Proposition de loi portant réforme des règles budgétaires et comptables applicables aux départements

N° 64

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003

Annexe au procès-verbal de la séance du 19 novembre 2002

PROPOSITION DE LOI

portant réforme des règles budgétaires et comptables applicables aux départements ,

PRÉSENTÉE

Par M. Philippe ADNOT,

Sénateur.

( Renvoyée à la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement ).

Collectivités territoriales.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi a pour objet de fixer les nouvelles règles applicables en matière budgétaire et comptable pour les départements.

Ce texte s'inscrit dans le mouvement de réforme des règles budgétaires et comptables des collectivités locales, initié avec la réforme de l'instruction budgétaire et comptable applicable aux communes (M. 14) en 1997.

Ce mouvement se poursuit aujourd'hui par la réforme des règles budgétaires et comptables des départements, fixées pour la plupart par la loi du 10 août 1871 et par une instruction de 1963, et des services départementaux d'incendie et de secours (S.D.I.S.), réformés par la loi du 3 mai 1996, qui se voient appliquer par renvoi les dispositions des départements.

Il sera complété par la mise en oeuvre de la réforme budgétaire et comptable des régions (Nouvelle instruction budgétaire et comptable M.71) en cours d'élaboration.

Les élus locaux ont en effet besoin pour gérer au mieux les collectivités locales de disposer d'un outil budgétaire et comptable modernisé. A cet égard, l'article 52 du décret n°62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique prévoit que la comptabilité des organismes publics doit s'inspirer du plan comptable général en vigueur.

Ces deux considérations fondent le mouvement de réforme des règles budgétaires et comptables des collectivités locales.

Ainsi, comme toute comptabilité, les comptabilités du secteur public local doivent être élaborées pour donner une image fidèle de la composition et de l'évolution du patrimoine et surtout, elles doivent être conçues pour décrire de manière exhaustive l'emploi qui est fait des autorisations de recettes et de dépenses inscrites au budget.

La proposition présentée ci-après a été élaborée à l'issue d'un travail de concertation entre les administrations concernées et les associations d'élus.

Ce travail de concertation a abouti à l'élaboration de deux instructions budgétaires et comptables provisoires qui ont été expérimentées par un certain nombre de départements depuis 2001 (16 départements puis 22 à compter du 1er janvier 2003) et de S.D.I.S. (21 S.D.I.S) depuis 2002.

La plupart des dispositions de ces instructions provisoires mettent en oeuvre des mesures qui sont pour l'essentiel du niveau réglementaire.

Toutefois, certaines de ces dispositions doivent être prévues par la loi.

La proposition qui vous est soumise a reçu l'accord de l'Assemblée des départements de France (A.D.F.).

Le Comité des finances locales a émis un avis favorable sur ces dispositions le 9 juillet.

Il est le fruit d'une expérimentation de plus de 2 ans, expérimentation qui a permis naturellement d'améliorer, au vu de leur mise en oeuvre, les dispositions qui vous sont proposées.

Les dispositions concernées sont limitées, tant dans leur nombre que dans les modifications qu'elles apportent au régime budgétaire des départements.

Certains articles ont pour objet de mettre à jour la rédaction (articles 1er, 2, 4, 6, 9, 11 et 14), voire de supprimer des articles de la loi (articles 10 et 15), qui pour l'essentiel date de 1871, la codification de 1996 ayant été réalisée à droit constant. Le texte a également vocation à préciser un certain nombre de procédures existantes.

La proposition comprend principalement quatre nouveautés :

- les modalités de vote et de présentation du budget, par nature ou par fonction (article 3), pour lesquelles il est renvoyé à un décret fixant les règles de vote et la liste des annexes au budget, autres que celles fixées par la loi du 6 février 1992 (A.T.R.). Il est en outre renvoyé à un arrêté interministériel s'agissant des modèles de présentation budgétaire ;

- le mécanisme des autorisations d'engagement et crédits de paiements en section de fonctionnement a été introduit afin de tenir compte des spécificités des interventions des départements (article 5) ;

- la reprise, l'affectation et surtout la reprise anticipée des résultats de l'exercice budgétaire clos, seront désormais applicables aux départements (article 7). Innovation du régime budgétaire et comptable des communes, la reprise anticipée sera probablement, à terme, généralisée à toutes les collectivités ;

- les principes de l'amortissement et du provisionnement sont introduits (articles 8, 11 et 13). Les mécanismes d'atténuation de la charge de l'amortissement, expérimentés par les départements, sont également mentionnés dans ce texte : la reprise des subventions d'investissement (article 8) et la neutralisation de l'amortissement (article 12). Toutefois, les modalités techniques en seront définies par décret.

Il est prévu par une disposition de renvoi que, comme actuellement, les S.D.I.S. appliquent les règles budgétaires et comptables des départements.

Enfin, un certain nombre de dispositions transitoires et diverses règlent l'entrée en vigueur de cette réforme.

Par ailleurs, les autres innovations de la réforme comptable et budgétaire des départements seront introduites par décrets, puis dans l'arrêté portant instruction budgétaire et comptable des départements. Il s'agira notamment du principe du rattachement des charges. L'arrêté portant instruction comportera par ailleurs le plan de comptes rénové applicable aux départements, ainsi que les modèles de présentation budgétaire. Naturellement, ces décrets et arrêtés viendront également préciser les principes fixés par les dispositions de niveau législatif et notamment, les principes de l'amortissement et du provisionnement, les autorisations de programme et les règles de reprise des résultats, ainsi que les annexes obligatoires à présenter au budget.

PROPOSITION DE LOI

Article 1 er

L'article L. 3311-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« Art. L. 3311-1. - Le budget du département est établi en section de fonctionnement et section d'investissement, tant en recettes qu'en dépenses. Certaines interventions, activités ou services sont individualisés au sein de budgets annexes.

« Le budget du département est divisé en chapitres et articles.

« Un décret fixe les conditions d'application du présent article. »

Article 2

Les quatre derniers alinéas de l'article L. 3312-1 du code général des collectivités territoriales sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« Le budget primitif, le budget supplémentaire et les décisions modificatives sont votés par le conseil général. ».

Article 3

L'article L. 3312-2 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 3312-2. - Le budget du département est voté soit par nature, soit par fonction. Si le budget est voté par nature, il comporte, en outre, une présentation croisée par fonction ; s'il est voté par fonction, il comporte une présentation croisée par nature. La nomenclature par nature et la nomenclature par fonction sont fixées par arrêté conjoint du ministre chargé des collectivités locales et du ministre chargé du budget.

« Les documents budgétaires sont présentés, selon les modalités de vote retenues par le conseil général, conformément aux modèles fixés par arrêté conjoint du ministre chargé des collectivités locales et du ministre chargé du budget.

« Le budget primitif et le compte administratif sont assortis des annexes prévues à l'article L. 2313-1.

« Ces documents comprennent également des annexes portant sur la composition du patrimoine, sur les opérations d'ordre budgétaire et sur les différents engagements du département, ainsi que sur tous les éléments utiles à fournir une information financière.

« Ces annexes devront également être jointes aux autres documents budgétaires lorsqu'elles auront été modifiées.

« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article. »

Article 4

L'article L. 3312-3 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 3312-3 - Les crédits sont votés par chapitre et, si le conseil général en décide ainsi, par article.

« Dans ces deux cas, le conseil général peut cependant spécifier que certains crédits sont spécialisés par article.

« En cas de vote par article, le président du conseil général peut effectuer, par décision expresse, des virements d'article à article à l'intérieur du même chapitre à l'exclusion des articles dont les crédits sont spécialisés. »

Article 5

Au chapitre 2 du titre 1 er du livre 3 de la troisième partie du code général des collectivités territoriales, il est ajouté un article L. 3312-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 3312-4 - I.- Les dotations budgétaires affectées aux dépenses d'investissement peuvent comprendre des autorisations de programme et des crédits de paiement.

« Les autorisations de programme constituent la limite supérieure des dépenses qui peuvent être engagées pour l'exécution des investissements. Elles demeurent valables, sans limitation de durée, jusqu'à ce qu'il soit procédé à leur annulation. Elles peuvent être révisées.

« Les crédits de paiement constituent la limite supérieure des dépenses pouvant être mandatées pendant l'année pour la couverture des engagements contractés dans le cadre des autorisations de programme correspondantes.

« L'équilibre budgétaire de la section d'investissement s'apprécie en tenant compte des seuls crédits de paiement.

« II. Si le conseil général le décide, les dotations affectées aux dépenses de fonctionnement comprennent des autorisations d'engagement et des crédits de paiement.

« La faculté prévue à l'alinéa précédent est réservée aux seules dépenses résultant de conventions, de délibérations ou de décisions au titre desquelles le département s'engage, au-delà d'un exercice budgétaire, dans le cadre de l'exercice de ses compétences, à verser une subvention, une participation ou une rémunération à un tiers à l'exclusion des frais de personnel.

« Les autorisations d'engagement constituent la limite supérieure des dépenses qui peuvent être engagées pour le financement des dépenses visées à l'alinéa précédent. Elles demeurent valables sans limitation de durée jusqu'à ce qu'il soit procédé à leur annulation. Elles peuvent être révisées.

« Les crédits de paiement constituent la limite supérieure des dépenses pouvant être mandatées pendant l'année pour la couverture des engagements contractés dans le cadre des autorisations d'engagement correspondants.

« L'équilibre budgétaire de la section de fonctionnement s'apprécie en tenant compte des seuls crédits de paiement.

« III - Un état récapitulatif des autorisations d'engagement et de programme est joint aux documents budgétaires.»

Article 6

Au chapitre 2 du titre 1 er du livre 3 de la troisième partie du code général des collectivités territoriales, il est ajouté un article L. 3312-5 ainsi rédigé :

« Art. L. 3312-5 - Le président du conseil général présente annuellement le compte administratif au conseil général, qui en débat sous la présidence de l'un de ses membres.

« Dans ce cas, le président du conseil général peut, même s'il n'est plus en fonction, assister à la discussion. Il doit se retirer au moment du vote.

« Le compte administratif est adopté par le conseil général.

« Préalablement, le conseil général arrête le compte de gestion de l'exercice clos. ».

Article 7

Au chapitre 2 du titre 1 er du livre 3 de la troisième partie du code général des collectivités territoriales, il est ajouté un article L. 3312-6 ainsi rédigé :

« Art. L. 3312 -6 - Le résultat excédentaire de la section de fonctionnement dégagé au titre de l'exercice clos, cumulé avec le résultat antérieur reporté, est affecté en totalité dès la plus proche décision budgétaire suivant le vote du compte administratif et, en tout état de cause, avant la clôture de l'exercice suivant. La délibération d'affectation prise par le conseil général est produite à l'appui de la décision budgétaire de reprise de ce résultat.

« Le résultat déficitaire de la section de fonctionnement, le besoin de financement ou l'excédent de la section d'investissement sont repris en totalité dès la plus proche décision budgétaire suivant le vote du compte administratif et, en tout état de cause, avant la fin de l'exercice.

« Entre la date limite de mandatement fixée au dernier alinéa de l'article L. 1612-11 et la date limite de vote des taux des impositions locales prévue à l'article 1639 A du code général des impôts, le conseil général peut, au titre de l'exercice clos et avant l'adoption de son compte administratif, reporter de manière anticipée au budget le résultat de la section de fonctionnement, le besoin de financement de la section d'investissement, ou le cas échéant l'excédent de la section d'investissement, ainsi que la prévision d'affectation.

« Si le compte administratif fait apparaître une différence avec les montants reportés par anticipation, le conseil général procède à leur régularisation et à la reprise du résultat dans la plus proche décision budgétaire suivant le vote du compte administratif et, en tout état de cause, avant la fin de l'exercice.

« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article. ».

Article 8

I - Au début du premier alinéa de l'article L. 3321-1 du même code, avant les mots : « Sont obligatoires pour le département », sont ajoutés les mots : « Sans préjudice des dispositions de l'article L. 1612-15, ».

II - L'article L. 3321-1 du code général des collectivités territoriales est complété in fine par quatre alinéas ainsi rédigés :

« 19° Les dotations aux amortissements ;

« 20° Les dotations aux provisions ;

« 21° La reprise des subventions d'équipement reçues.

« Un décret détermine les modalités d'application des dispositions des 19°, 20° et 21° du présent article. ».

Article 9

A l'article L. 3321-2 du même code, avant les mots : « à l'allocation personnalisée d'autonomie », sont insérés les mots : « au revenu minimum d'insertion et ».

Article 10

L'article L. 3331-1 du code général des collectivités territoriales est abrogé.

Article 11

Le b) de l'article L. 3332-1 du code général des collectivités territoriales, est complété in fine par trois alinéas ainsi rédigés :

« 5° Le droit de consommation sur les tabacs prévu à l'article 268 bis du Code des douanes pour les départements visés aux articles L. 3431-2 et L. 3441-2 ;

« 6° L'octroi de mer perçu par le département de la Guyane en application de la loi n°92-676 du 17 juillet 1992 relative à l'octroi de mer et portant mise en oeuvre de la décision du Conseil des ministres des communautés européennes n° 89-688 du 22 décembre 1989 ;

« 7° La taxe sur les carburants prévue par l'article 266 quater du code des douanes et répartie dans les conditions prévues par l'article L.4434-3 ».

Article 12

I - A la fin du premier alinéa de l'article L. 3332-2 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « Les recettes non fiscales de la section de fonctionnement se composent », est ajouté le mot : « notamment ».

II - Au 6° du même article, les mots : « pour les dépenses annuelles et permanentes d'utilité départementale » sont remplacés par les mots : « aux dépenses de fonctionnement ».

III - Le même article est complété in fine par quatre alinéas ainsi rédigés :

« 8° Du produit de la neutralisation des dotations aux amortissements, selon des modalités fixées par décret ;

« 9° De la reprise des subventions d'équipement reçues ;

« 10° Du produit du fonds prévu à l'article L. 232-21 du code de l'action sociale et des familles ;

« 11° Des dons et legs en espèces hormis ceux visés au 7° de l'article L.3332-3 ».

Article 13

L'article L. 3332-3 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 3332-3 - Les recettes de la section d'investissement se composent notamment :

« 1° Du produit des emprunts ;

« 2° Du versement pour dépassement du plafond légal de densité ;

« 3° De la dotation globale d'équipement ;

« 4° De la dotation départementale d'équipement des collèges ;

« 5° Des versements au titre du Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée ;

« 6° Des subventions de l'État et des contributions des communes et des tiers aux dépenses d'investissement ;

« 7° Des dons et legs en nature et des dons et legs en espèces affectés à l'achat d'une immobilisation financière ou physique;

« 8° Du produit des cessions d'immobilisations, selon des modalités fixées par décret ;

« 9° Du remboursement des capitaux exigibles et des rentes rachetées ;

« 10° Des surtaxes locales temporaires conformément aux dispositions de la loi du 15 septembre 1942 relative à la perception de surtaxes locales temporaires sur les chemins de fer d'intérêt général, les voies ferrées d'intérêt local, les voies ferrées des quais des ports maritimes ou fluviaux et les services de transports routiers en liaison avec les chemins de fer, des surtaxes locales temporaires destinées à assurer le service des emprunts contractés ou le remboursement des allocations versées ;

« 11° Des amortissements ;

« 12° Du virement prévisionnel de la section de fonctionnement et du produit de l'affectation du résultat de fonctionnement conformément à l'article L. 3312-6. ».

Article 14

L'article L. 3342-1 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 3342-1- Le comptable du département est seul chargé d'exécuter, sous sa responsabilité et sous réserve des contrôles qui lui incombent, le recouvrement des recettes, ainsi que le paiement des dépenses de la collectivité dans la limite des crédits régulièrement ouverts par le conseil général. ».

Article 15

L'article L. 3342-2 du code général des collectivités territoriales est abrogé.

Article 16

L'article L. 3241-1 du même code est ainsi rédigé :

« Art. L. 3241-1 - Les dispositions relatives au contrôle de légalité et au contrôle budgétaire des actes des établissements publics départementaux et des services départementaux d'incendie et de secours sont celles fixées par le chapitre II du titre III du livre Ier de la troisième partie et par le chapitre II du livre VI de la première partie.

« Les dispositions relatives aux finances des services départementaux d'incendie et de secours sont celles fixées :

« 1° Par les titres I et II du livre III de la troisième partie à l'exception des premier et troisième alinéas de l'article L. 3312-2, du 2°, 3° et du 7° au 16° de l'article L. 3321-1 et de l'article L. 3321-2 ;

« 2° Par les chapitres II et V du titre III du livre III de la troisième partie à l'exception de l'article L. 3332-1 et du 2° au 6° et du 10° de l'article L. 3332-2 et du 2°, 4° et 10° de l'article L. 3332-3 ;

« 3° Par le titre IV du livre III de la troisième partie. ».

Article 17

I - Les dispositions de la présente loi entreront en vigueur à compter du 1er janvier 2004.

II - Les dispositions des 19° et 21° de l'article L. 3321-1 et du 11° de l'article L. 3332-3 entreront en vigueur à compter de l'exercice 2005 pour les immobilisations acquises à compter du 1er janvier 2004 et pour les subventions reçues en financement de ces immobilisations.

III - A l'article L. 5722-1 du code général des collectivités territoriales, la référence  « L. 3312-2 » est remplacée par la référence  « L. 3312-4 ».

IV - Les dispositions du II de l'article L. 3312-4 sont applicables aux régions.

Article 18

Des décrets en Conseil d'État précisent en tant que de besoin les modalités d'application de la présente loi.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page