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N° 142

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1996-1997

Annexe au procès-verbal de la séance du 11 décembre 19%.

PROPOSITION DE LOI

tendant à organiser la lutte contre les termites,

PRÉSENTÉE

Par MM. Jean-Pierre CAMOIN, Gérard CÉSAR, Michel ALLONCLE, Louis ALTHAPÉ, Honoré BAILET, Mme Paulette BRISEPIERRE, MM. Auguste CAZALET, Jacques CHAUMONT, Jean CHÉRIOUX, Jacques DELONG, Charles DESCOURS, Michel DOUBLET, Alain DUFAUT, Charles GINÉSY, Hubert HAENEL, Jean-Paul HUGOT, Lucien LANIER, René-Georges LAURIN, Guy LEMAIRE, Philippe MARINI, Lucien NEUWIRTH, Joseph OSTERMANN, Jean-Jacques ROBERT, Josselin de ROHAN, Jean-Pierre SCHOSTECK, Maurice SCHUMANN, Louis SOUVET, Martial TAUGOURDEAU, René TRÉGOUËT, Alain VASSELLE et Serge VINÇON,

Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Affaires économiques et du Plan, sous réserve de la constitution

éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

Risques naturels, - Logement et habitat - Termites.

EXPOSÉ DES MOTIFS

MESDAMES, MESSIEURS,

Les termites sont des insectes blanchâtres de 5 à 7 millimètres de long peu visibles hors de leur milieu naturel, la terre et le bois. Ils possèdent une organisation sociale avec reproducteurs mâles et femelles, ouvriers, soldats et larves.

Ce sont des insectes destructeurs qui prolifèrent généralement dans les régions tropicales et équatoriales, où ils peuvent être à l'origine d'importants dégâts.

D'autres sont également présents dans les forêts européennes (pour certaines espèces, depuis la dernière glaciation), où ils contribuent à la dégradation du bois en attaquant les bois morts ou les arbres dépérissants. A ce propos, il faut noter que les arbres sains sécrètent naturellement des substances de défense qui éloignent ou intoxiquent les termites.

C'est à la suite de l'augmentation des transports de bois et de gravats, et d'un certain nombre de négligences humaines, que les termites se sont répandus rapidement hors de leurs limites naturelles et s'attaquent maintenant de plus en plus aux habitations.

Quatre espèces sont particulièrement dangereuses pour l'habitat : le termite de Saintonge (Reticulitermes santonensis) et trois autres espèces appartenant au groupe Lucifugus (une cinquième espèce, Kalotermes flavicollis, termite du bois sec localisé sur le pourtour méditerranéen, ne présente pas de danger pour les constructions).

Les termites se nourrissent de cellulose, qu'ils trouvent en abondance dans la nature, mais aussi dans les zones urbanisées, et, particulièrement, dans les habitations proches d'une source d'humidité, celles-ci constituant des biotopes préférentiels. Ainsi, le bois, mais aussi le carton, le papier et les tissus sont activement recherchés et consommés par des dizaines de milliers d'individus discrets et silencieux, difficiles à détecter.

Les termites peuvent se propager de trois façons :

- par essaimage (ce mode de propagation semblerait être marginal) : les reproducteurs ailés quittent alors la colonie mère, au printemps pour Reticulitermes, à l'automne pour Kalotermes, et recherchent des sites propices à l'implantation de nouvelles colonies en se guidant grâce aux substances volatiles émises par le bois ;

- par « bouturage » (ce procédé de reproduction apparaissant comme la principale source d'infestation) : lorsque la colonie mère devient très populeuse, un groupe d'individus s'isole progressivement de la termitière pour créer une nouvelle colonie, en investissant notamment les constructions avoisinantes ;

- par transport accidentel de colonies ou de fragments de colonies, au cours de déménagement de matériaux par exemple.

Face à ce fléau grandissant, certains pays (USA., Japon, Australie, notamment) ont adopté des mesures adéquates concernant les normes de construction et la prévention. De telles mesures restent à développer en France car, si le territoire national est déjà contaminé de la côte atlantique à la côte méditerranéenne, le phénomène se manifeste aussi dans de nombreuses villes du nord de la Loire. Pour illustrer ce propos, le nombre de départements infestés est passé de seize en 1953 à cinquante en 1989.

Si la lutte contre ce fléau nécessite la collaboration des chercheurs, des centres techniques du bois, des entreprises applicatrices de traitement, etc., il s'avère néanmoins indispensable de donner aux pouvoirs publics les moyens juridiques et administratifs susceptibles d'organiser la détection des foyers contaminés et le traitement des zones infestées.

Pour ce faire, la présente proposition de loi énonce tout un ensemble de mesures qu'il appartiendra plus tard au Gouvernement de codifier, notamment dans le futur code de l'environnement.

Pour l'essentiel, celle-ci se propose d'instituer un système de déclaration des foyers d'infection (art. 2) dont le but essentiel est de permettre aux autorités locales, ou déconcentrées, d'établir une cartographie des zones contaminées ou susceptibles de l'être (art. 3).

Dans les lieux ainsi délimités, les autorités compétentes (maire ou préfet) devront édicter les normes sanitaires susceptibles d'être imposées (art. 4), l'administration ayant en outre le pouvoir d'effectuer d'office, et aux frais des récalcitrants, les travaux nécessaires (art. 5).

Les dispositions de l'article 6 ont pour but d'appliquer aux zones termitées, ou susceptibles de l'être, le régime juridique des périmètres de risques visés à l'article R. 111-3 du code de l'urbanisme (cette procédure vise à soumettre à des « conditions spéciales » la construction sur les terrains exposés).

Dans un souci de protection et d'information des acquéreurs de biens susceptibles d'être termites, il est prévu d'exiger, pour les transactions immobilières situées dans les zones ci-dessus mentionnées, une attestation de parasitologie (art. 7) dont l'existence sera vérifiée par le notaire chargé de rédiger l'acte.

Dans le même sens, et pour garantir le sérieux des personnes exerçant une activité professionnelle en lien avec le traitement des bois infestés par les insectes xylophages, celles-ci devront être agréées dans des conditions fixées par les pouvoirs publics et être titulaires d'une assurance couvrant leur responsabilité professionnelle (art. 8).

Afin de favoriser la mise en oeuvre de traitements efficaces, les propriétaires d'immeubles concernés pourront bénéficier directement d'aides financières accordées par l'État et les collectivités territoriales. Celles-ci s'ajouteront aux réductions fiscales accordées au titre des dépenses afférentes à l'habitation principale du contribuable (art. 9).

Les prescriptions de l'article 10 étendent aux propriétaires de biens situés dans des zones termitées le bénéfice des dispositions de l'article L. 125-1 du code des assurances relatives à l'assurance des risques de catastrophes naturelles.

Les infractions aux dispositions précitées sont constatées par les agents mentionnés à l'article 11, les conditions d'exercice du contrôle des propriétés contaminées, ou susceptibles de l'être, étant fixées par l'article 12 (l'obstacle aux fonctions des agents chargés du contrôle constitue le délit prévu à l'article L. 48-3 du code de la santé publique passible d'une amende de 500 à 5 000 F, voire d'une peine d'emprisonnement variant de dix jours à trois mois).

Les autres infractions à la loi et à ses règlements d'application seront punies de peines contraventionnelles qu'il appartiendra au Gouvernement de définir par voie réglementaire (art. 13).

PROPOSITION DE LOI

Article premier.

Les dispositions de la présente loi ont pour but de définir les conditions dans lesquelles la prévention et la lutte contre les insectes xylophages, et plus particulièrement les termites, sont organisées par les pouvoirs publics.

Art. 2.

La présence de termites dans un immeuble, construit ou non, doit faire l'objet d'une déclaration en mairie.

Cette déclaration est obligatoire, d'une part, pour tout propriétaire ou occupant de l'immeuble contaminé et, d'autre part, pour le responsable de l'entreprise de traitement de bois auquel il pourrait être fait appel.

Un décret fixe les formes et conditions dans lesquelles sont faites les déclarations mentionnées à l'alinéa précédent.

Art. 3.

Lorsque, dans une ou plusieurs communes, des foyers de termites sont décelés, le maire - ou à défaut le préfet - délimite les zones contaminées ou susceptibles de l'être.

Art. 4.

Dans les zones visées à l'article précédent, l'autorité administrative fait connaître aux propriétaires et occupants concernés les mesures susceptibles de limiter l'extension du fléau.

Le maire - ou à défaut le préfet - arrête les mesures générales de prophylaxie ou de lutte contre ce fléau.

Il fixe, en outre, les conditions dans lesquelles les terrains ou constructions situés dans le périmètre contaminé font l'objet d'une vérification par des agents mandatés à cet effet.

Art. 5.

Dans l'hypothèse où les propriétaires des immeubles concernés n'exécuteraient pas les mesures imposées par l'autorité administrative, celle-ci peut, après mise en demeure restée infructueuse, procéder à l'exécution d'office desdites mesures aux frais du propriétaire.

Art. 6.

Un décret détermine les conditions dans lesquelles les zones termitées, ou susceptibles de l'être, sont intégrées dans les périmètres de risques visés à l'article R. 111-3 du code de l'urbanisme, ainsi que les mesures qui pourront être imposées à l'occasion de la délivrance de toute autorisation d'occupation du sol.

Art. 7.

Afin d'informer les acquéreurs des biens immobiliers situés dans les zones mentionnées à l'article 3, toute transaction immobilière est assortie d'une attestation de parasitologie délivrée par un organisme agréé par les pouvoirs publics.

Art. 8.

Les personnes susceptibles de fournir une attestation de parasitologie, ou d'effectuer des traitements à titre préventif ou curatif, sont tenues de souscrire préalablement une assurance couvrant leur responsabilité civile professionnelle.

En outre, celles-ci doivent être agréées dans des conditions fixées par décret.

Art. 9.

Afin de soutenir l'effort financier des propriétaires d'immeubles situés dans les zones mentionnées à l'article 3, les travaux de traitement effectués à titre préventif ou curatif par des entreprises agréées sont assimilés aux travaux de grosses réparations visés à l'article 199 sexies C du code général des impôts, et déductibles à ce titre de l'impôt sur le revenu.

De plus, l'État et les collectivités territoriales pourront décider d'accorder une aide financière directe aux propriétaires des immeubles mentionnés à l'alinéa précédent.

Art. 10.

Les dispositions des articles L. 125-1 et suivants du code des assurances, relatives à l'assurance des risques de catastrophes naturelles, sont applicables aux dommages matériels directs causés par les termites.

Art. 11.

Les infractions aux prescriptions de la présente loi et à ses décrets d'application sont constatées par :

- les agents et officiers de police judiciaire ;

- les gardes champêtres et agents de police municipale ;

- les agents visés à l'article L. 48 du code de la santé publique ;

- les agents habilités à relever les infractions au code de l'urbanisme.

Les procès-verbaux dressés par ces agents font foi jusqu'à preuve du contraire. Ils sont transmis sans délai au procureur de la République, ainsi qu'au préfet et au maire territorialement concernés.

Art. 12.

Pour accomplir leur mission, les agents visés à l'article 11 de la présente loi ont accès aux propriétés privées ou publiques.

Quiconque met un obstacle aux fonctions des agents cités ci-dessus est passible des sanctions prévues par l'article L. 48-3 du code de la santé publique.

Sans préjudice des pénalités prévues à l'alinéa précédent, dans l'hypothèse où la personne ayant la garde des lieux en refuse l'accès, le juge des référés pourra être saisi par le maire, ou le préfet, et ordonner toutes les mesures utiles à l'accomplissement de la mission des fonctionnaires visés à l'article 11 de la présente loi.

Art. 13.

Un décret en Conseil d'État détermine, en tant que de besoin, les conditions d'exécution de la présente loi, et notamment l'échelle des sanctions qui lui sont applicables.

Art. 14.

La perte de ressources des collectivités locales résultant des dispositions prévues à l'article 9 sont compensées à due concurrence par une augmentation de leur dotation globale de fonctionnement.

Les pertes de ressources de l'État résultant de l'application de la présente proposition de loi sont compensées à due concurrence par une augmentation des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

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