N° 164

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès verbal de la séance du 26 janvier 1999

PROPOSITION DE

RÉSOLUTION

PRÉSENTÉE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 73 BIS DU RÈGLEMENT, sur :

- la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur l'établissement de nouvelles perspectives financières pour la période 2000-2006 (E 1049) ;

- le document de travail de la Commission : accord interinstitutionnel sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire (E 1128) ;

Par M. Denis BADRÉ,

Sénateur.

(Renvoyée à la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement)

Union européenne -

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les propositions E 1049, relative à l'établissement de nouvelles perspectives financières pour la période 2000-2006, et E 1128, relative à un nouvel accord interinstitutionnel sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire, constituent le volet financier de l'Agenda 2000, dont l'objet consiste notamment à préparer l'Union européenne à son élargissement aux pays d'Europe centrale et orientale et, à cette fin, à réformer la politique agricole commune et la politique structurelle, ainsi qu'à aider les pays candidats à s'organiser pour adhérer dans les meilleures conditions. C'est dire l'importance de ces deux textes, sur lesquels, par un rapport d'information (1( * )) , la délégation pour l'Union européenne a souhaité donner au Sénat la plus large information. Par la présente proposition de résolution, elle l'appelle à se prononcer solennellement sur cette question fondamentale.

Les futures perspectives financières, qui prendront le relais du " paquet Delors II ", sont appelées à déterminer l'évolution générale du budget communautaire sur la période 2000-2006 en fixant des plafonds annuels pour chaque catégorie de dépenses de l'Union européenne (PAC, politiques structurelles, politiques internes, actions extérieures...). Le futur accord interinstitutionnel, qui succédera à celui conclu en 1993 entre la Commission, le Conseil et le Parlement européen, précisera les règles relatives à la procédure budgétaire et à l'exécution des crédits.

Ces deux instruments doivent, aux dires mêmes de la Commission, assurer la maîtrise de l'évolution des finances publiques de l'Union européenne. C'est un objectif auquel on ne peut que souscrire. Plus de budget pourrait en effet signifier moins d'Europe si l'Union européenne était perçue par le citoyen comme responsable de plus d'impôts.

Mais la définition du futur cadre financier de l'Union ne saurait s'effectuer sur la base de ce seul paramètre de maîtrise des dépenses. Une réflexion s'impose dans le domaine des recettes afin de parvenir à un système de ressources propres lisible et accepté par le citoyen européen . Il doit en outre être clair que cette réflexion ne saurait conduire à des solutions qui, fondées sur la notion profondément anti-européenne de " juste retour ", remettraient en cause le principe de solidarité communautaire.

Par ailleurs, l'Europe de demain, élargie, dont les principales politiques seront redessinées, ne peut se construire sur les choix d'hier. Une redéfinition de ses interventions, et donc de ses priorités budgétaires, s'impose.

Ainsi, l'objectif général de maîtrise de la dépense européenne suppose des arbitrages parmi les différentes rubriques des perspectives financières. Ces arbitrages doivent être dictés par le souci d'élaborer un cadre financier qui soit véritablement axé sur la construction européenne. L'Union européenne ne peut s'affranchir d'une réflexion sur la répartition optimale de ses dépenses en fonction de ses objectifs tels qu'ils sont affirmés par les traités, et au premier rang desquels se situent la croissance et l'emploi .

Le budget des Communautés doit être un instrument au service de ces objectifs et non une " machine à saupoudrer " des crédits entre les Etats. Il doit traduire de véritables choix entre les politiques en fonction :

- du souci d'efficacité, qui impose de ne mener au niveau européen que des actions qui ne peuvent être mieux conduites au niveau national ;

- du souci de transparence, qui subordonne l'exécution des crédits budgétaires à l'exigence d'une base légale ;

- du souci de réalisme, qui rend nécessaire la prise en compte de la possibilité de mobiliser effectivement les crédits correspondant aux dotations budgétaires ;

- du souci de bonne et saine gestion des crédits budgétaires, qui doit conduire à une exécution prévenant les risques de gaspillages et de fraude.

Telles sont, Mesdames, Messieurs, les préoccupations traduites par la proposition de résolution dont la Délégation du Sénat pour l'Union européenne a approuvé les termes le mercredi 20 janvier 1999 et qu'elle m'a chargé de présenter en son nom.

PROPOSITION DE RESOLUTION

Le Sénat,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition E 1049,

Vu la proposition E 1128,

Considérant que, selon l'article 2 du traité instituant la Communauté européenne, celle-ci a pour mission de promouvoir un développement harmonieux et équilibré des activités économiques dans l'ensemble de la Communauté, une croissance durable et non inflationniste respectant l'environnement, un haut degré de convergence des performances économiques, un niveau d'emploi et de protection sociale élevé, le relèvement du niveau et de la qualité de la vie, la cohésion économique et sociale et la solidarité entre les Etats membres ; que, outre ces objectifs, l'article B du traité sur l'Union européenne donne notamment pour mission à l'Union d'affirmer son identité sur la scène internationale ;

Considérant que le Conseil européen de Vienne a marqué son accord sur une stratégie pour l'Europe dont le contenu, portant notamment sur la promotion des droits de l'homme au niveau mondial, la place de l'Europe sur la scène internationale ou l'établissement d'un espace de sécurité, de liberté  et de justice, confirme la volonté des Quinze de construire une Europe politique ;

Considérant que le cadre financier de l'Union européenne sur la période 2000-2006, que les propositions E 1049 et E 1128 ont pour objet de déterminer, doit permettre la meilleure réalisation de ces objectifs dans la perspective d'une réforme des politiques agricole et structurelle de l'Union européenne préalable à un élargissement aux pays d'Europe centrale et orientale;

Considérant que le pacte de stabilité et les exigences de la troisième phase de l'Union économique et monétaire rendent nécessaire la réalisation de l'équilibre budgétaire au niveau national ;

Considérant qu'il est d'autant plus indispensable que le futur cadre financier assure une gestion saine des finances publiques communautaires et la maîtrise de leur évolution que les dépenses de l'Union européenne ont un effet d'éviction sur les recettes des budgets nationaux ;

Approuve pleinement la Commission dans son souci de définir, dans le respect du plafond des ressources propres des Communautés européennes, un nouveau cadre financier marqué par un effort de discipline budgétaire ;

Considère cependant que les propositions E 1049 et E 1128, qui prévoient notamment une augmentation du montant global des dépenses de l'Union européenne, sont en contradiction avec cet objectif de discipline budgétaire ;

Estime que la maîtrise des finances publiques et les défis que devront relever les nouvelles perspectives financières dans l'optique de l'élargissement impliquent une définition rigoureuse des priorités de l'Union européenne, au premier rang desquelles se situent la croissance et l'emploi, et un réexamen de l'apport de ces différentes politiques au regard des objectifs que lui assignent les traités ;

Appelle de ses voeux l'élaboration d'un véritable budget européen :

• par l'adoption d'un nouveau système de ressources propres lisible et accepté par le citoyen européen, ce qui exclut tout réaménagement incompatible avec le principe de solidarité communautaire ;

• par le financement d'interventions dont la mise en oeuvre soit incontestable et justifiée au regard notamment :

- du principe de subsidiarité ;

- de la nécessité de subordonner l'exécution des crédits budgétaires à l'exigence d'une base légale ;

- de l'impératif de réalisme dans l'élaboration des prévisions budgétaires ;

- de la recherche de bonne et saine gestion des crédits budgétaires, qui doit conduire à une exécution prévenant les risques de gaspillages et de fraude.

(1) Rapport d'information de M. Denis Badré sur " le financement de l'Union européenne : 2000-2006 " (Sénat, 1998-1999, n° 136)

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