Question de M. MOULY Georges (Corrèze - UMP) publiée le 19/11/2002

M. Georges Mouly appelle l'attention de Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées sur l'attente de mesures fortes en direction des personnes handicapées, attente manifeste parmi les acteurs de terrain et les familles. C'est pourquoi il l'a déjà interrogée sur divers aspects de la politique en faveur du handicap et a pris note avec satisfaction de sa volonté de moderniser la loi d'orientation n° 75-534 du 30 juin 1975 en faveur des personnes handicapées. Néanmoins, il lui demande comment elle compte, à plus court terme, décliner ce qu'elle a défini comme " la priorité des priorités " : les enfants handicapés et l'intégration scolaire.

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Réponse du Secrétariat d'Etat aux personnes handicapées publiée le 15/01/2003

Réponse apportée en séance publique le 14/01/2003

M. Georges Mouly. Madame la secrétaire d'Etat, comme tout un chacun, je porte intérêt à la situation des personnes handicapées, plus précisément à leurs choix de vie.
En préalable à la modernisation de la loi de 1975 - j'espère d'ailleurs que celle-ci fera l'objet d'une loi de programmation accompagnée de moyens -, vous avez déclaré, madame la secrétaire d'Etat, que, « à court terme, la priorité des priorités concerne les enfants handicapés et l'intégration scolaire dans les meilleures conditions ».
Il est vrai que, lorsqu'elle est possible, la scolarisation en milieu ordinaire représente bien la meilleure voie vers l'intégration sociale. Cependant, la réussite de cette politique d'intégration est directement liée aux moyens mis en oeuvre.
A cet égard, les auxiliaires de vie sociale constituent désormais un élément incontournable du projet éducatif de l'enfant ou de l'adolescent : M. le sénateur-maire de Brive et moi-même vous avons adressé deux courriers sur ce sujet en septembre et en octobre derniers. Lors de la discussion budgétaire, vous avez annoncé le maintien des postes créés au titre des emplois-jeunes jusqu'en juin 2003 ainsi que la création de cinq cents nouveaux postes au sein des associations. Voilà qui est bien, mais cela éclaire peut-être insuffisamment l'avenir. En effet, la mise en oeuvre de ces mesures restera encore soumise au dynamisme et à la bonne volonté des associations - celles-ci n'en manquent certes pas, au demeurant - avec une répartition inégale liée au degré actuel de structuration ou d'équipement des territoires.
Par ailleurs, dès ce mois de janvier, s'élaborent les projets pédagogiques et thérapeutiques des enfants handicapés intégrés à la prochaine rentrée scolaire ; pour certains d'entre eux, l'incertitude relative aux moyens d'accompagnement rend les prévisions particulièrement délicates.
Il est donc important, me semble-t-il, de préciser la ventilation des postes d'auxiliaire de vie sociale et de les pérenniser avant juin 2003, tout en leur conférant un statut. A cet égard, madame la secrétaire d'Etat, peut-on espérer que le groupe de travail que vous avez constitué rende rapidement ses conclusions ? J'ai appris tout récemment que votre collègue le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche avait confié à un député une mission sur l'intégration des enfants handicapés en milieu scolaire : je suppose qu'il y aura parfaite articulation.
Au demeurant, cette politique d'intégration ne peut être développée au détriment des moyens accordés aux établissements spécialisés, qui conservent toute leur raison d'être. Ces établissements, dans la plupart des cas, se sont d'ailleurs résolument ouverts au monde extérieur, et je sais qu'un travail en réseau se met en place entre établissements scolaires ordinaires et établissements spécialisés.
Ce principe, que vous avez vous-même réaffirmé, madame la secrétaire d'Etat, lors de la discussion budgétaire, est parfois quelque peu mis à mal en raison de l'absence de dispositifs ou de structures ad hoc.
Ainsi, il arrive souvent qu'un parcours d'intégration s'achève brutalement, non pas à cause de la faiblesse du potentiel de l'individu, mais parce que la structure ou le dispositif susceptible de l'accueillir est complet ou ne dispose plus de moyens de fonctionnement suffisants : c'est un constat que l'on peut dresser sur le terrain.
Dans mon département, la plupart des projets d'intégration sont liés à la prise en charge de l'élève par un SESSAD, un service d'éducation spéciale ou de soins à domicile. L'absence d'une telle prise en charge, qui laisse l'instituteur confronté seul aux problèmes quotidiens, est préjudiciable à la mise en oeuvre du projet d'intégration. Or les services fonctionnent souvent en sureffectif, leur agrément étant insuffisant, ce qui affecte lourdement l'équilibre budgétaire. Est-il concevable de réduire l'aide apportée par le biais de ce dispositif à la scolarisation, voire de la réserver à des prises en charge moins « lourdes », comme nous pouvons parfois être contraints de le faire ?
Il convient donc de doter les projets d'intégration des moyens qui permettront la réalisation des objectifs assignés au projet pédagogique, éducatif et thérapeutique pour la prochaine rentrée scolaire. Il me semble que, là encore, quelques zones d'ombre subsistent.
Vous avez déclaré, madame la secrétaire d'Etat, qu' « une meilleure intégration scolaire contribue davantage à l'épanouissement des enfants, les prépare ainsi à une vie adulte se déroulant au maximum dans un milieu ordinaire ». Cela suppose que cette intégration ne soit pas menacée par le couperet des « orientations par défaut » à l'issue d'un cycle.
A cette époque de l'année où de nombreux projets sont élaborés en vue de la prochaine rentrée scolaire, il serait pour le moins opportun - mais tel est sans aucun doute votre sentiment, madame la secrétaire d'Etat - que l'on puisse savoir quels moyens seront mobilisés.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi, à mon tour, de vous présenter mes voeux les plus chaleureux pour cette nouvelle année et de souhaiter que vous puissiez accomplir un travail très fructueux dans tous les domaines, en particulier dans celui dont j'ai la responsabilité, la tâche étant immense.
L'intégration scolaire, monsieur le sénateur, est une de mes priorités, je crois l'avoir dit depuis le premier jour. Les enfants ont l'obligation d'aller à l'école et l'éducation nationale a le devoir d'accueillir tous les enfants. Ils ont le droit à la scolarité. Celle-ci résulte d'une politique définie et mise en oeuvre, conjointement, je vous rassure, par le ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche et par le secrétariat d'Etat aux personnes handicapées.
Les réponses apportées doivent être souples et diversifiées afin que puissent être mis en oeuvre des projets individualisés correspondant au mieux aux besoins de chaque enfant.
Ces besoins peuvent être décrits selon trois axes principaux : pédagogique, éducatif et thérapeutique, l'importance de chacun de ces domaines variant en fonction des besoins de l'enfant considéré. Ils doivent être organisés dans le temps car il ne peut y avoir, vous l'avez dit et je partage votre point de vue, de discontinuité depuis l'accueil en maternelle jusqu'à la formation professionnelle ou universitaire, voire jusqu'à l'insertion professionnelle.
Vous abordez, dans votre question, des éléments qui me paraissent déterminants : il faut définir un projet pour chaque enfant et permettre la scolarisation de la plupart des enfants et adolescents ; l'école est le milieu naturel de cette scolarisation ; les auxiliaires de vie scolaire et les services d'éducation spécialisée et de soins à domicile, les SESSAD, doivent y contribuer lorsque cela s'avère nécessaire.
C'est pourquoi les conclusions du groupe de travail qui a été mis en place pour étudier la pérennisation du service rendu par les auxiliaires de vie scolaire sont attendues très prochainement, d'ici à la fin du mois, monsieur le sénateur. Mais, d'ores et déjà, le Président de la République a souhaité que le nombre d'auxiliaires de vie scolaire soit porté à 6 000 à la rentrée prochaine, ce qui renforcera notablement les moyens actuels.
Le nombre de places en service d'éducation spécialisée et de soins à domicile reste, je vous l'accorde, notoirement insuffisant. Il a tout de même progressé depuis de nombreuses années, puisque l'on est passé de 6 500 places en 1988 à 17 600 places en 1998. Des chiffres plus récents seront disponibles d'ici à deux mois. Mais tout laisse à penser que cette dynamique sera maintenue, voire amplifiée, car c'est nécessaire.
S'agissant des établissements médico-éducatifs, ils se sont ouverts - ils doivent continuer à le faire - pour faciliter, en particulier, l'intégration scolaire, notamment en développant des services d'éducation spécialisée et de soins à domicile, je viens de le dire. Ils doivent également s'attacher à recevoir les enfants les plus lourdement handicapés : trop d'enfants ayant d'importants troubles du comportement ou polyhandicapés, pour ne citer que ceux-là, ne pourront, on le sait, bénéficier d'un accueil à temps complet à l'école. Inversement, ils doivent, là où ils se trouvent, pouvoir bénéficier, quelles que soient leurs difficultés, d'un apport pédagogique, celui-ci devant être le plus adapté possible.
Il est nécessaire, aujourd'hui, de trouver des réponses pour des dizaines de milliers d'enfants pour lesquels l'orientation par les CDES, les commissions départementales de l'éducation spéciale, n'a pu aboutir. Aucun enfant ne doit rester sans solution. Monsieur le sénateur, je reviens d'un voyage éclair en Suède, au cours duquel j'ai visité un certain nombre d'établissements et observé les réponses qui étaient apportées au problème. En matière d'intégration scolaire, notamment, l'exemple de la Suède est très probant, et je compte m'en inspirer dans le projet de loi qui vous sera soumis prochainement.
Les instructions qui seront bientôt données aux DDASS pour la mise en oeuvre de la loi de financement de la sécurité sociale confirmeront les orientations que je viens de vous présenter.
M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.
M. Georges Mouly. Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie de cette réponse détaillée, qui mérite d'être examinée attentivement. Les chiffres dont vous avez fait état révèlent le caractère concret de vos engagements.
J'ai noté que le secrétariat d'Etat aux personnes handicapées et le ministère de la recherche, de l'éducation nationale et de la jeunesse travaillent en parfaite coordination, mais le contraire m'aurait surpris. Qui ne pourrait souscrire à l'idée essentielle que sont les projets individualisés, allant jusqu'à l'insertion professionnelle ? Vous avez mentionné le point de vue du Président de la République. Elu de son département, je puis attester de la réalité profonde de cet engagement.
En cette période de voeux, permettez-moi, madame la secrétaire d'Etat, de vous souhaiter un plein succès dans l'exercice de vos lourdes responsabilités. Il s'agit d'un immense chantier. Pour le mener à bon port, vous pouvez compter sur le soutien de chacun d'entre nous.

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