EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE 21

Fonds de garantie des risques liés à l'épandage agricole des boues urbaines et industrielles

Commentaire : le présent article tend à créer un fonds de garantie des risques liés à l'épandage agricole des boues urbaines et industrielles.

I. LA SITUATION ACTUELLE

A. LES RÈGLES APPLICABLES À L'ÉPANDAGE DES BOUES

Le traitement des eaux usées domestiques dans les stations d'épuration urbaines génère la production de boues d'épuration. L'étude d'impact du présent projet de loi précise que 900.000 tonnes par an de matière sèche sont produites pour l'ensemble des communes françaises.

L'élimination de ces boues peut se faire par mise en décharge, par incinération ou par épandage sur des sols agricoles comme matière fertilisante. Les boues constituent en effet des amendements organiques qui peuvent généralement se substituer à des engrais chimiques. Cette voie d'élimination constitue une voie économique et écologique, du fait du recyclage de la matière organique et des composants fertilisants. L'étude d'impact précise ainsi que près des deux tiers des boues sont aujourd'hui épandus.

L'épandage des boues issues du traitement des eaux usées fait l'objet en France d'un encadrement prévu par le décret 97-1133 du 8 décembre 1997, complété par l'arrêté du 8 janvier 1998 fixant les prescriptions techniques applicables aux épandages de boues sur les sols agricoles.

Le décret 97-1133 précité fixe ainsi les conditions générales d'épandage des boues. Il dispose notamment que la nature, les caractéristiques et les quantités de boues épandues ainsi que leur utilisation doivent être telles que leur usage et leur manipulation ne portent pas atteinte, directe ou indirecte, à la santé de l'homme et des animaux, à l'état phytosanitaire des cultures, à la qualité des sols et des milieux aquatiques.

L'épandage des boues ne peut être pratiqué que si celles-ci présentent un intérêt pour les sols ou pour la nutrition des cultures et des plantations. Il est ainsi interdit de pratiquer des épandages à titre de simple décharge.

Par ailleurs, les boues doivent avoir fait l'objet d'un traitement 9 ( * ) afin de réduire de façon significative leur pouvoir fermentescible et les risques sanitaires liés à leur utilisation.

Des arrêtés conjoints des ministres chargés de l'environnement, de la santé et de l'agriculture fixent la nature du traitement en fonction de la nature et de l'affectation des sols ainsi que les conditions dans lesquelles il peut être dérogé à cette obligation de traitement par des précautions d'emploi appropriées.

Il faut, en outre, signaler que tout épandage est subordonné à une étude préalable réalisée à ses frais par le producteur de boues, afin de définir l'aptitude du sol à recevoir cet épandage, son périmètre et les modalités de sa réalisation.

Enfin, les producteurs de boues doivent mettre en place un dispositif de surveillance de la qualité des boues et des épandages et tiennent, à cet effet, un registre dont une synthèse est adressée chaque année au préfet.

B. UN ÉPANDAGE AUJOURD'HUI PLUS DIFFICILE

L'épandage des boues est aujourd'hui fragilisé par la réticence de la profession agricole à accepter ces amendements. Elle craint, en cas d'épandage de boues polluées, la mévente des productions et, éventuellement, la disqualification pour des productions futures des terres exposées à cet épandage.

Cette crainte est renforcée par le fait que certains distributeurs ou certaines entreprises agro-alimentaires font de l'absence d'épandage de boues une exigence de qualité, en exploitant la méfiance des consommateurs vis-à-vis de cette filière de valorisation.

Le présent article entend donc répondre à cette inquiétude du monde agricole en instituant un fonds de garantie des risques liés à l'épandage des boues urbaines et industrielles.

II. LE DISPOSITIF PRÉVU PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article insère au titre II du livre IV du code des assurances un nouveau chapitre V consacré au Fonds de garantie des risques liés à l'épandage agricole des boues urbaines et industrielles. Un décret en Conseil d'Etat précisera les conditions d'application des dispositions prévues par le présent article.

A. LA MISSION DU FONDS

Le nouvel article L. 425-1 introduit par le présent article dans le code des assurances prévoit l'institution d'un Fonds de garantie des risques liés à l'épandage agricole des boues urbaines et industrielles.

Celui-ci serait chargé d'indemniser, dans la limite de ses ressources, les préjudices subis par les exploitants agricoles et les propriétaires des terres agricoles et forestières ayant reçu des épandages de boues d'épuration urbaines ou industrielles, au cas où ces terres deviendraient totalement ou partiellement impropres à la culture en raison de la réalisation d'un risque sanitaire ou de la survenance d'un dommage écologique liés à l'épandage.

Une restriction est toutefois posée : l'indemnisation n'est possible que si ce risque ou ce dommage ne pouvait être connu au moment de l'épandage.

Il est, en outre, précisé que ce fonds assure l'indemnisation des dommages constatés dans la limite d'un montant maximum, sous une double réserve :

- que ces dommages ne trouvent pas leur origine dans une faute ou une négligence du maître d'ouvrage des systèmes de traitement des eaux usées, de son délégataire ou de l'utilisateur de boues ;

- et que l'épandage ait été effectué dans des conditions conformes à la réglementation en vigueur.

Le montant de l'indemnisation fait l'objet d'un plafond : le propriétaire des terres ne peut être indemnisé plus que la valeur de ses terres.

Il est, en outre, prévu que le fonds de garantie n'intervient pas dans les cas où les maîtres d'ouvrage des systèmes de traitement des eaux usées dont provenaient les boues épandues ne sont pas assurés , sauf s'ils ont contribué volontairement à ce fonds, sur la base d'un montant de 0,5 euro par tonne de matière sèche de boue produite. Cette disposition a pour but d'éviter un risque d'« aléa moral ».

B. SON MODE DE FINANCEMENT

Le fonds de garantie est alimenté par un prélèvement annuel sur le produit des primes ou cotisations additionnelles afférentes aux conventions d'assurance de responsabilité civile des maîtres d'ouvrage, des systèmes de traitement des eaux usées et aux conventions d'assurance relatives à la production et à l'élimination des boues.

Ce prélèvement est versé par les entreprises d'assurances ou, pour les entreprises d'assurances non établies en France, par leur représentant fiscal.

Le présent article prévoit que le taux de ce prélèvement est fixé par l'autorité administrative dans la limite de 15 % et qu'il ne peut excéder le plafond de 0,50 euro par tonne de matière sèche de boue produite. Il semble que ce plafond de 0,50 euro doive, en fait, s'appliquer au montant du prélèvement.

Celui-ci serait recouvré suivant les mêmes règles, sous les mêmes garanties et les mêmes sanctions que la taxe sur les conventions d'assurance.

A côté de cette recette, il est précisé que le fonds de garantie peut également recevoir des avances de l'Etat, ce qui peut apparaître contradictoire avec le principe précédemment exposé selon lequel le fonds intervient dans la limite de ses ressources.

C. SA GESTION

Il est prévu que la gestion comptable et financière du fonds institué par le présent article est assurée par la Caisse centrale de réassurance .

La Caisse centrale de réassurance

Créée en 1946, la Caisse centrale de réassurance est une société anonyme au capital de 60 millions d'euros détenue par l'Etat français. Avec un chiffre d'affaires de plus d'un milliard d'euros, elle est classée parmi les 25 premiers réassureurs mondiaux

L'entreprise se distingue de ses concurrents en proposant, avec la garantie de l'Etat, des couvertures illimitées pour des branches spécifiques, telles que les catastrophes naturelles en France et les risques de guerre (60 % de son chiffre d'affaires).

La caisse assure également, pour le compte de l'Etat, la gestion comptable et financière de certains fonds publics : Fonds national de garantie des calamités agricoles, Fonds de compensation des risques de l'assurance construction et Fonds de prévention des risques naturels majeurs.

Il est précisé que cette gestion est effectuée dans un compte distinct de ceux qui retracent les autres opérations pratiquées par cet établissement. Les frais exposés par la caisse de réassurance pour cette gestion sont imputés sur le fonds.

D'après les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, la mission de la Caisse centrale de réassurance serait cantonnée à la gestion du fonds : elle ne jouerait pas le rôle de réassureur.

L'étude d'impact du présent projet de loi précise que les dossiers seraient instruits au niveau des préfectures. Ils seraient ensuite examinés par le ministère de l'écologie et du développement durable puis, le cas échéant, transmis à la Caisse centrale de réassurance pour paiement.

En outre, le présent article prévoit que la Caisse centrale de réassurance est informée de tous les litiges liés à l'épandage agricole ou forestier des boues d'épuration pris directement en charge par les assurances.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

L'opportunité de créer un tel fonds mérite une attention particulière.

En effet, l'étude d'impact du présent projet de loi indique expressément que « la création d'un tel fonds n'est pas indispensable sur un strict plan rationnel ». Elle ajoute que « l'autodiscipline croissante des maîtres d'ouvrage des systèmes d'assainissement urbain, des entreprises mettant en oeuvre l'épandage et des transformateurs et distributeurs des productions agricoles concernées devrait normalement exclure tout risque. Depuis 1998 aucun dommage n'a d'ailleurs été signalé, malgré la défiance de très nombreux acteurs et organismes vis-à-vis de l'épandage de boues ». En outre, elle précise que « l'amélioration de l'action de la police de l'eau constatée depuis dix ans et programmée pour l'avenir est également un facteur de sécurisation ».

Le ministère de l'écologie et du développement durable indique toutefois que ces arguments ne parviennent pas à convaincre les organismes agricoles et que ce fonds serait destiné à créer un climat plus serein autour de cette démarche considérée par le ministère comme la moins coûteuse et la plus écologique. Votre rapporteur pour avis souscrit à cette analyse.

Le ministère s'appuie sur l'exemple de l'Allemagne, où un fonds du même type existe et n'a été mobilisé que de façon exceptionnelle 10 ( * ) .

Techniquement, la question qui se pose est de savoir s'il est nécessaire de prévoir un dispositif complémentaire aux assurances existantes. Ce point mériterait une étude poussée qu'il n'a pas été possible, à ce stade, de mener. Le ministère de l'écologie et du développement durable précise toutefois que les assurances ne couvrent pas le risque de développement, par définition inconnu à ce jour, ou n'accepteraient de le faire qu'à des coûts prohibitifs.

La discussion du présent projet de loi devra être l'occasion pour le gouvernement de clarifier ce point. Votre rapporteur pour avis vous proposera un amendement tendant à prévoir que l'intervention du fonds n'est possible que dans la mesure où les risques ou les dommages ne sont pas couverts par les contrats d'assurance classiques.

Par ailleurs, ce fonds pourrait présenter un risque de dérive budgétaire qui ne doit pas être écarté, d'autant que les avances de l'Etat mentionnées par le présent article reviennent à prévoir une garantie ultime de l'Etat , ce qu'a confirmé le ministère de l'écologie et du développement durable à votre rapporteur pour avis.

On remarquera que cette possibilité, qui n'était pas prévue dans la version du présent projet de loi transmise au Conseil d'Etat, apparaît contradictoire avec le principe selon lequel le fonds n'intervient que dans la limite de ses ressources et brouille l'image de ce fonds, qui ne correspond plus totalement à un dispositif assuranciel. En outre, même si l'étude d'impact du présent projet de loi précise que le fonds sera vraisemblablement très peu sollicité et ne générera qu'une faible augmentation des cotisations d'assurance, on peut noter qu'un élargissement des missions de ce fonds ou une utilisation extensive de ses ressources pourrait avoir des conséquences budgétaires importantes pour l'Etat.

S'agissant de l'équilibre économique général résultant de l'institution de ce fonds, le ministère de l'écologie et du développement durable estime qu'il serait positif. Il indique, en effet, que le coût du report sur les autres filières d'élimination des boues (incinération, compostage, mise en décharge), « pourrait se chiffrer très rapidement en millions d'euros, voire en dizaines de millions d'euros par an ».

Par ailleurs, le dispositif relatif au prélèvement alimentant le fonds nécessite des corrections rédactionnelles afin de le rendre viable.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'émettre un avis favorable sur cet article ainsi modifié.

ARTICLE 23

Instauration d'une taxe sur les volumes d'eaux pluviales et de ruissellement

Commentaire : le présent article vise à permettre aux communes et à leurs groupements d'instaurer une taxe sur les volumes d'eaux pluviales et de ruissellement entrant dans les systèmes de collecte pour financer les ouvrages relatifs aux eaux pluviales et de ruissellement.

I. UN DROIT AMBIGU

A. LE BUDGET ANNEXE DE L'ASSAINISSEMENT

1. L'assainissement doit être financé par un budget annexe

L'article L. 2221-11 du code général des collectivités territoriales prévoit que les services de distribution d'eau potable et d'assainissement sont soumis aux règles de droit commun applicables aux produits des régies dotées de la seule autonomie financière.

Ces produits, y compris les taxes ainsi que les charges, font donc l'objet d'un budget spécial annexé au budget de la commune voté par le conseil municipal 11 ( * ) .

2. Des assouplissements dans le cas des petites communes

Il existe cependant certains assouplissements à cette règle.

a) Les communes de moins de 500 habitants peuvent ne pas avoir de budget annexe

Tout d'abord, l'article L. 2221-11 précité prévoit que l'établissement d'un budget annexe , pour les services de distribution d'eau potable et d'assainissement gérés sous la forme d'une régie simple ou directe, est facultatif pour les communes de moins de 500 habitants , dès lors qu'elles produisent, en annexe au budget et au compte administratif, un état sommaire présentant, article par article, les montants de recettes et de dépenses affectés à ces services.

b) Les communes de moins de 3.000 habitants bénéficient de certains assouplissements

Ensuite, les communes et groupements de communes de moins de 3.000 habitants bénéficient également de certains assouplissements.

Tout d'abord, l'article L. 2224-6 du code précité précise qu'ils peuvent établir un budget unique des services de distribution d'eau potable et d'assainissement si les deux services sont soumis aux mêmes règles d'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée et si leur mode de gestion est identique.

Ensuite, selon l'article L. 2224-2 du même code, la règle en fonction de laquelle il est interdit aux communes de prendre en charge dans leur budget propre des dépenses au titre des services publics à caractère industriel ou commercial exploités en régie, affermés ou concédés, n'est pas applicable aux services de distribution d'eau potable et d'assainissement de ces communes et groupements.

B. LA NOTION D'ASSAINISSEMENT NE SEMBLE PAS COMPRENDRE LA NOTION DE COLLECTE DES EAUX PLUVIALES ET DE RUISSELLEMENT

1. Une définition restrictive

D'un point de vue juridique, la notion d' assainissement ne semble pas comprendre celle de collecte des eaux pluviales et de ruissellement 12 ( * ) .

En effet, l'article L. 2224-7 du code général des collectivités territoriales prévoit que « tout service chargé en tout ou partie de la collecte, du transport ou de l'épuration des eaux usées constitue un service d'assainissement ». L'article précité ne mentionne pas la collecte des eaux pluviales et de ruissellement.

De même, l'article R. 2224-6 du même code, chargé de préciser cette disposition, prévoit que les dispositions de la section du code relatives à l'assainissement s'appliquent « aux eaux usées ».

Ainsi, la collecte des eaux pluviales et de ruissellement doit en principe être financée par le budget général des collectivités territoriales.

2. Un droit difficilement applicable

En pratique, la notion d'assainissement est difficilement dissociable de celle de collecte des eaux pluviales et de ruissellement.

Tout d'abord, les eaux pluviales et de ruissellement peuvent polluer le milieu aquatique , et nuire à l'efficacité des dispositifs d'assainissement. Ainsi, l'article L. 2224-10 du même code, situé dans la section relative à l'assainissement, charge les communes ou leurs établissements publics de coopération de délimiter, après enquête publique, les zones où certaines mesures doivent être prises relativement aux eaux pluviales et de ruissellement. Cette dépendance tendrait à légitimer le financement des ouvrages relatifs aux eaux pluviales et de ruissellement par la redevance d'assainissement.

Surtout, les communes recourent fréquemment à des réseaux dits « unitaires » , c'est-à-dire servant à la fois à la collecte des eaux pluviales et de ruissellement et à l'assainissement des eaux usées. Dans ce cas, c'est généralement le budget annexe de l'assainissement qui supporte le coût de la collecte des eaux pluviales et de ruissellement, éventuellement partagé avec les communes. En pratique, ce coût ne peut être totalement pris en charge par le budget de la commune qu'en cas de réseau séparatif.

L'enjeu financier est important. Le coût est variable en fonction de la complexité du dispositif d'assainissement pluvial. Selon les indications fournies par le gouvernement, pour les très grands réseaux unitaires, il pourrait représenter plus de 50 % du coût de création et d'exploitation. Rapporté au logement desservi, le coût annuel de la collecte d'eau pluviale pourrait être compris dans une fourchette de 20 à 200 euros.

3. Une pratique génératrice d'insécurité juridique et accroissant le prix de l'eau

Cette pratique suscite un risque de contentieux ou de difficultés au stade du contrôle de légalité. S'il ne semble pas, à ce jour, y avoir eu de recours contentieux, les Chambres régionales des comptes et la Cour des comptes ont, à plusieurs reprises, souligné l'incompatibilité entre le droit et la pratique, en particulier dans le rapport de la Cour des comptes de janvier 1997 sur « La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement ».

Par ailleurs, cette pratique accroît le prix de l'eau. En effet, l'article L. 2224-1 du code précité prévoit que les budgets des services publics à caractère industriel ou commercial exploités en régie, affermés ou concédés par les communes, doivent être équilibrés en recettes et en dépenses. Par conséquent, une augmentation des charges du budget de l'assainissement entraîne, mécaniquement, une augmentation de ses recettes, et donc en pratique du prix de l'eau.

II. LE DROIT PROPOSÉ

Le présent article permet aux communes et à leurs groupements d'instaurer une taxe sur les volumes d'eau de ruissellement entrant dans les systèmes de collecte pour financer les travaux en matière d'assainissement pluvial.

Il propose d'insérer deux articles , respectivement L. 2333-92 et L. 2333-93, au sein du code général des collectivités territoriales. Ces articles seraient insérés au chapitre III (« taxes, redevances ou versements non prévus par le code général des impôts ») du titre III (« recettes ») du livre III (« finances communales ») de la deuxième partie (« la commune ») du code général des collectivités territoriales. Ils seraient réunis au sein d'une section 14 , intitulée « taxe pour la collecte, le stockage et le traitement des eaux pluviales et de ruissellement ».

A. L'INSTAURATION D'UNE TAXE SUR LES VOLUMES D'EAU DE RUISSELLEMENT

Selon l'article L. 2333-92 proposé par le présent article, les « collectivités territoriales ou leurs groupements » 13 ( * ) qui ont réalisé ou réalisent des installations destinées à assurer la collecte, le transport, le stockage et le traitement des eaux pluviales et de ruissellement, peuvent instituer une taxe annuelle destinée à financer ces installations.

1. Une taxe à l'assiette mal définie

a) Le redevable et le taux de la taxe

Le redevable serait le propriétaire du branchement.

Le taux serait institué par délibération de l'assemblée délibérante de la collectivité territoriale ou du groupement, dans la limite de 0,30 euro par mètre cube.

b) Les imprécisions relatives à la détermination de l'assiette

L'assiette de cette taxe serait « le volume maximal des eaux susceptibles de pénétrer dans ces installations par des branchements ».

Cette disposition risque d'être difficile à appliquer en pratique.

Le présent article précise à cet égard qu'« il est tenu compte des caractéristiques des branchements, de la superficie et de la nature des terrains et des bâtiments dont proviennent les eaux, ainsi que de l'existence d'aménagements ou d'équipements en limitant le volume ». Selon les indications fournies par le gouvernement, cela signifie que l'assiette sera calculée à partir de la capacité hydraulique du branchement, corrigée lorsque le branchement sera manifestement surdimensionné en fonction du volume maximal d'eau que peut recueillir la parcelle desservie.

Les conditions d'application des dispositions du nouvel article L. 2333-92 du code général des collectivités territoriales seraient précisées, « en tant que de besoin », par un décret en Conseil d'Etat. C'est donc, en principe, à ce décret de résoudre les problèmes liés à la détermination de l'assiette. Selon les indications fournies par le gouvernement, ce décret précisera, notamment, les modalités techniques de fixation de l'assiette et la répartition de la taxe lorsque l'assainissement pluvial sera délégué, pour partie, par la commune à un syndicat de communes (comme en matière d'assainissement collectif).

Votre rapporteur pour avis n'est pas actuellement en mesure de savoir si les règles de détermination de l'assiette prévues par le présent article sont applicables. Votre commission vous proposera donc un amendement tendant à supprimer le présent article, afin que le gouvernement apporte des précisions satisfaisantes à cet égard.

2. Un recouvrement par les collectivités territoriales, le délégataire du service ou le représentant de l'Etat dans le département

La taxe serait « assise, liquidée et recouvrée par la collectivité territoriale, par le groupement ou, par délégation de l'assemblée délibérante, par le délégataire du service et, à défaut, par le représentant de l'Etat dans le département, selon les mêmes garanties et sanctions qu'en matière d'impôt direct ».

a) Des modalités de recouvrement proches de celles de la taxe d'usage des abattoirs publics

Cette rédaction s'inspire de celle de l'article L. 2333-1 du code général des collectivités territoriales, qui prévoit que la taxe d'usage des abattoirs publics , perçue par la collectivité territoriale propriétaire, est « assise, liquidée et recouvrée par la collectivité territoriale et, à défaut, par le représentant de l'Etat dans le département et selon les mêmes garanties et sanctions qu'en matière d'impôt direct ».

La différence est que, par délégation de l'assemblée délibérante, la taxe proposée par le présent article pourrait être recouvrée par le délégataire du service.

b) Des modalités de recouvrement adaptées

Le plus souvent, le code général des collectivités territoriales prévoit que lorsqu'un impôt local est recouvré « comme en matière d'impôts directs », c'est sans restriction, c'est-à-dire par l'Etat 14 ( * ) .

Dans le cas du présent article, le fait que ce soit à la collectivité territoriale, au groupement ou au délégataire du service d'asseoir, de liquider et de recouvrer l'impôt, - le représentant de l'Etat dans le département n'intervenant qu'à défaut -, se justifie, si l'on considère que la nature de cette taxe, destinée à financer un service particulier, est proche de celle d'une redevance.

Par ailleurs, selon les indications fournies par le ministère de l'intérieur, la taxe d'usage des abattoirs publics, soumise à un régime analogue, n'aurait jamais connu de difficultés de recouvrement exigeant l'intervention du représentant de l'Etat dans le département.

B. L'AFFECTATION DE CETTE TAXE AUX INSTALLATIONS RELATIVES AUX EAUX PLUVIALES ET DE RUISSELLEMENT

Par ailleurs, le présent article propose d'insérer dans le code général des collectivités territoriales un article L. 2333-93, selon lequel « le produit de la taxe est affecté à la création, à l'exploitation, au renouvellement, à l'extension des installations de collecte, de transport, de stockage et de traitement des eaux pluviales et de ruissellement et à l'entretien de ces ouvrages ».

Comme celles de l'article L. 2333-92 précité, les conditions d'application du nouvel article L. 2333-93 du code général des collectivités territoriales seraient précisées, « en tant que de besoin », par un décret en Conseil d'Etat.

Il est à noter que le présent article n'impose pas l'affectation de cette taxe à un budget annexe. Lorsque le budget général supporte le coût de l'assainissement pluvial, la taxe lui sera affectée. Lorsque la gestion sera assurée par un service doté d'un budget annexe, la taxe sera affectée à ce budget annexe. Ce pourra notamment être le service d'assainissement si le réseau est unitaire, c'est-à-dire sert à la fois à la collecte des eaux pluviales et de ruissellement et à l'assainissement.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article poursuit un objectif pertinent.

De nombreuses communes, contraintes de prendre « certaines libertés » par rapport à une interprétation stricte de la loi, en particulier lorsqu'elles possèdent un réseau « unitaire », c'est-à-dire destiné à la fois aux eaux usées et aux eaux pluviales et de ruissellement, retrouveraient ainsi la sécurité juridique nécessaire à l'exercice de leurs compétences.

Cependant, comme cela a été indiqué ci-avant, on peut se demander si les règles de détermination de l'assiette proposées par le présent article seront applicables en pratique. C'est pourquoi votre commission vous propose un amendement de suppression du présent article, afin que le gouvernement apporte des précisions satisfaisantes à cet égard.

Décision de la commission : sous le bénéfice de ces observations, votre commission émet un avis défavorable sur cet article.

ARTICLE 27

Règlement et tarification des services de distribution d'eau

Commentaire : le présent article propose d'améliorer la diffusion du règlement des services de distribution d'eau, de mettre fin d'ici au 1 er janvier 2007 aux livraisons gratuites d'eau, de préciser les modalités d'établissement des redevances de distribution d'eau et d'assainissement, d'interdire la demande, par le service de distribution d'eau, d'une caution solidaire ou d'un dépôt de garantie, de confirmer le principe de la tarification en fonction du volume consommé, et d'introduire des dispositions visant à mieux adapter la consommation d'eau à la rareté ou à l'abondance de la ressource en eau.

I. LE DROIT EXISTANT

Le présent article concerne essentiellement la tarification de l'eau. On rappellera donc, brièvement, les règles en vigueur en ce domaine.

L'arrêté du 10 juillet 1996 relatif aux factures de distribution de l'eau et de collecte et de traitement des eaux usées prévoit que toute facture d'eau aux abonnés comprend trois rubriques distinctes ainsi dénommées :

- distribution de l'eau (rubrique correspondant à la rémunération du service de fourniture et de distribution d'eau) ;

- collecte et traitement des eaux usées (rubrique correspondant à la redevance d'assainissement) ;

- organismes publics (rubrique correspondant aux taxes et redevances liées aux solidarités régionales et nationales pour la protection de l'eau dans son milieu naturel).

Dans un souci de lisibilité, le régime juridique de ces composantes du prix de l'eau sera rappelé, en tant que de besoin, dans la seconde partie du présent commentaire d'article.

A titre d'illustration, le tableau ci-après indique la décomposition du prix de l'eau en 2001, année la plus récente pour laquelle ces données sont disponibles.

Décomposition du prix de l'eau (2001)

Montant en euros

Part en %

Distribution

1,29

46

Part fixe eau potable

0,32

11

Part variable eau potable

0,97

35

Assainissement

1,04

37,5

Part fixe assainissement

0,13

4,5

Part variable assainissement

0,91

33

Autres

0,47

16,7

Redevance Ressource de l'agence

0,04

1,5

FNDAE (1)

0,02

0,8

VNF

0

0,1

Autres taxes

0,01

0,3

Redevance Pollution

0,4

14

Total de la facture

2,79

100

(1) L'article 38 de la loi 2003-1311 du 13 décembre 2003 de finances pour 2004 a clôturé le Fonds national pour le développement des adductions d'eau (FNDAE). La redevance correspondante a été remplacée par une taxe sur les consommations d'eau, affectée au budget général de l'Etat.

Source : Ifen-Scees, enquête eau 2001

II. LES MODIFICATIONS PROPOSÉES PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le présent article propose d'insérer dans la  section 2 (« assainissement ») du chapitre IV (« services publics industriels et commerciaux ») du titre II (« services communaux ») du livre II (« administration et services communaux ») de la deuxième partie (« la commune ») du code général des collectivités territoriales une sous-section 2 intitulée : « règlements des services et tarification ».

Les modalités de cette insertion s'accompagnent de diverses dispositions de coordination, figurant à d'autres articles du présent projet de loi :

- l'article 26 propose de renommer la section 2 précitée, actuellement intitulée « assainissement », et qui serait désormais intitulée « dispositions relatives aux services publics de distribution d'eau et d'assainissement » ;

- par ailleurs, la sous-section 1 qui découlerait de la création d'une sous-section 2 par le présent article serait dénommée « dispositions générales ».

La sous-section 2 précitée comprendrait les articles L. 2224-12 à L. 2224-12-6 , présentés ci-après.

A. L'AMÉLIORATION DE LA DIFFUSION DU RÈGLEMENT DU SERVICE

1. Les modifications prévues par le présent article

Le présent article propose d'insérer dans le code général des collectivités territoriales un article L. 2224-12, précisant les modalités de diffusion du règlement de service, notamment pour améliorer l'information des abonnés au service.

Selon le présent article, les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes devraient établir et mettre à la disposition du public, pour chaque service de distribution d'eau ou d'assainissement, un règlement définissant, en fonction des conditions locales, « les prestations assurées par le service ainsi que les obligations respectives de l'exploitant, des abonnés, des usagers et des propriétaires ».

Bien que ceci ne soit pas explicitement indiqué , l'article L. 2224-12 du code général des collectivités territoriales proposé par le présent article remplacerait l'actuel article L. 2224-12 du même code (relatif au décret en Conseil d'Etat précisant le régime des redevances d'assainissement) , dont les dispositions sont reprises , de manière presque inchangée, au premier alinéa du texte proposé par le présent article pour l'article L. 2224-12-2 du code général des collectivités territoriales.

2. Une amélioration proposée par votre commission des finances

Actuellement, la jurisprudence de la Cour de Cassation rend le règlement opposable aux abonnés, dès lors que celui-ci leur a été communiqué.

Votre commission des finances vous propose donc, dans un souci de sécurité juridique , de prévoir que le règlement du service doit systématiquement être transmis à l'usager, soit directement, soit par courrier postal ou électronique.

B. LA FIN DES LIVRAISONS GRATUITES D'EAU

1. La fin des livraisons gratuites d'eau

Le présent article propose d'insérer dans le code général des collectivités territoriales un article L. 2224-12-1, tendant à mettre fin aux pratiques de livraison gratuite d'eau à des administrations ou à des bâtiments publics , qui ont pour effet de mettre à la charge des autres abonnés les dépenses correspondantes.

Ainsi, le nouvel article L. 2224-12-1 prévoirait que « toute fourniture d'eau, quel qu'en soit le bénéficiaire, fait l'objet d'une facturation au tarif applicable à la catégorie d'usagers correspondante ».

Le présent article précise que ces dispositions ne seraient pas applicables aux consommations d'eau pour la lutte contre l'incendie.

2. L'échéance du 1 er janvier 2007

La deuxième phrase du texte proposé pour l'article L. 2224-12-1 prévoit que « les collectivités mentionnées à l'article L. 2224-12 sont tenues de mettre fin, avant le 1 er janvier 2007 , à toute disposition ou stipulation contraire ».

Comme cela a été indiqué ci-avant, l'article L. 2224-12 auquel il est fait référence (relatif à la diffusion du règlement de service) est celui par lequel le présent article remplace l'actuel article L. 2224-12 du même code (relatif au décret en Conseil d'Etat précisant le régime des redevances d'assainissement). Les collectivités concernées sont donc les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes.

C. L'APPORT DE PRÉCISIONS AU RÉGIME DES REDEVANCES DE DISTRIBUTION D'EAU ET D'ASSAINISSEMENT

Le présent article précise le régime des redevances de distribution d'eau et d'assainissement.

1. La reprise, de manière quasiment inchangée, des dispositions de l'actuel article L. 2334-12 du code général des collectivités territoriales

Tout d'abord, le présent article propose d'insérer dans le code général des collectivités territoriales un article L. 2224-12-2 reprenant, de manière quasiment inchangée, les dispositions de l'actuel article L. 2224-12 du code général des collectivités territoriales, dont le présent article prévoit le remplacement par un article numéroté de façon identique, mais relatif à un sujet entièrement différent (la diffusion du règlement du service).

L'actuel article L. 2224-12 du code général des collectivités territoriales prévoit qu' « un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans lesquelles sont instituées, recouvrées et affectées les redevances dues par les usagers, ainsi que les sommes dues par les propriétaires mentionnés aux articles L. 1331-1 et L. 1331-8 du code de la santé publique ».

Le présent article propose de modifier légèrement cette disposition, en insérant dans le code général des collectivités territoriales un article L. 2224-12-2 prévoyant que « dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État, les règles relatives aux redevances de distribution d'eau et d'assainissement et aux sommes prévues par les articles L. 1331-1 à L. 1331-10 du code de la santé publique 15 ( * ) sont établies par délibération du conseil municipal ou de l'assemblée délibérante de l'établissement public ».

Les modifications par rapport au droit actuel prévoient :

- que les redevances concernées sont non seulement celles relatives à l'assainissement, mais aussi celles relatives à la distribution d'eau ;

- que les articles concernés du code de la santé publique sont non seulement les articles L. 1331-1 et L. 1331-8, relatifs respectivement aux propriétaires d'immeubles devant être reliés aux égouts ou équipés d'un dispositif individuel d'assainissement, et aux sanctions des usagers qui ne remplissent pas leurs obligations, mais aussi d'autres articles , comme l'article L. 1331-10, relatif au déversement des eaux usées non domestiques.

2. Le remboursement de divers travaux relatifs à l'assainissement des immeubles réalisés par les communes

Le présent article prévoit que lorsque les communes prennent en charge les travaux mentionnés au « troisième alinéa de l'article L. 2224-8 » du code général des collectivités territoriales, elles se font rembourser intégralement par les propriétaires les frais de toute nature entraînés par ces travaux, diminués des subventions éventuellement obtenues 16 ( * ) .

On rappelle que l'article 26 du présent projet de loi propose de modifier l'article L. 2224-8 précité, dont le troisième alinéa ferait désormais référence à divers travaux relatifs à l'assainissement des immeubles 17 ( * ) . Le remboursement des communes est la contrepartie de cette nouvelle compétence.

3. Une précision juridique

Le présent article prévoit également d'insérer dans le code général des collectivités territoriales un article L. 2224-12-3 prévoyant que les redevances de distribution d'eau et d'assainissement couvrent les charges découlant des investissements, du fonctionnement et des renouvellements nécessaires à la fourniture des services, ainsi que les charges et les impositions de toute nature afférentes à leur exécution.

Selon les informations obtenues auprès du ministère de l'écologie et du développement durable, cette disposition clarifie le droit , en faisant référence aux « charges et impositions de toute nature », c'est-à-dire les redevances à la charge des services de distribution d'eau. En revanche, cette disposition ne changerait rien en pratique.

D. L'INTERDICTION DE LA CAUTION SOLIDAIRE OU DU VERSEMENT D'UN DÉPÔT DE GARANTIE

L'article L. 2224-12-3 proposé par le présent article prévoit, en outre, que pour les abonnés domestiques, « les demandes de caution solidaire ou de versement d'un dépôt de garantie sont interdites ».

Les dépôts de garantie sont payés par l'abonné lors de l'ouverture de l'abonnement et sont remboursés lors du départ de l'abonné. Selon une enquête réalisée par l'Office international de l'eau en avril 2000, sur 33 services identifiés à partir de l'échantillon du suivi du prix de l'eau mis en place par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), 9 d'entre eux demandaient des dépôts de garantie en 2000. Le montant moyen était de 90 euros, le minimum étant de 38 euros, et le maximum observé de 165 euros.

Le présent article précise que le remboursement des sommes perçues au titre des dépôts de garantie devra intervenir dans un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi.

E. LA CONFIRMATION DU PRINCIPE DE LA TARIFICATION EN FONCTION DU VOLUME CONSOMMÉ

Le présent article propose de confirmer le principe de la tarification en fonction du volume consommé. Il permet, dans des conditions très particulières, le recours à une tarification indépendante du volume consommé.

1. Le transfert du code de l'environnement au code général des collectivités territoriales du principe de la tarification en fonction du volume consommé

a) Le droit actuel

Actuellement, la tarification de la consommation d'eau est régie par l'article L. 214-15 du code de l'environnement.

L'article précité prévoit que toute facture d'eau « comprend un montant calculé en fonction du volume réellement consommé par l'abonné à un service de distribution d'eau et peut, en outre, comprendre un montant calculé indépendamment de ce volume, compte tenu des charges fixes du service et des caractéristiques du branchement ».

Toutefois, il est prévu, « à titre exceptionnel », que le préfet peut « autoriser la mise en oeuvre d'une tarification ne comportant pas de terme directement proportionnel au volume total consommé ». Cette autorisation doit être demandée, soit par le maire, soit par le président de l'établissement public de coopération intercommunale ou de syndicat mixte ayant compétence pour assurer la distribution d'eau. Par ailleurs, certaines conditions (non cumulatives) doivent être remplies pour que le préfet accorde l'autorisation :

- la ressource en eau doit être « naturellement abondante » ;

- le nombre d'usagers raccordés au réseau doit être « suffisamment faible » ;

- la commune doit connaître « habituellement de fortes variations de sa population ».

Dans le cas de la Corse, la mise en oeuvre de ce régime de tarification est autorisée, selon les mêmes conditions, non par le préfet, mais par l'Assemblée de Corse.

b) Les modifications proposées

Le présent article propose d'introduire dans le code général des collectivités territoriales un article L. 2224-12-4 modifiant les modalités de facturation de l'eau.

L'article L. 214-15 précité du code de l'environnement serait quant à lui supprimé, par coordination, par l'article 49 du présent projet de loi.

(1) La modification à la marge des dispositions actuelles

Tout d'abord, certaines dispositions diffèrent légèrement par rapport aux dispositions de l'article L. 214-15 précité du code de l'environnement, conformément au tableau ci-après.

La modification du régime des factures d'eau proposée par le présent article

Texte actuellement en vigueur : article L. 214-15 du code de l'environnement

Texte proposé par le présent article pour le I de l'article L. 2224-12-4 (nouveau) du code général des collectivités territoriales

Factures non forfaitaires

Toute facture d'eau comprend un montant calculé en fonction du volume réellement consommé par l'abonné à un service de distribution d'eau

et peut, en outre, comprendre un montant calculé indépendamment de ce volume, compte tenu des charges fixes du service et des caractéristiques du branchement.

Toute facture d'eau comprend un montant calculé en fonction du volume réellement consommé par l'abonné

et peut, en outre, comprendre un montant calculé indépendamment de ce volume en fonction des charges fixes du service et des caractéristiques du branchement.

Factures forfaitaires

Toutefois à titre exceptionnel, le préfet peut, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, à la demande du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale ou des présidents des syndicats mixtes visés à l'article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales ayant compétence pour assurer la distribution d'eau, si la ressource en eau est naturellement abondante, et si le nombre d'usagers raccordés au réseau est suffisamment faible, ou si la commune connaît habituellement de fortes variations de sa population, autoriser la mise en oeuvre d'une tarification ne comportant pas de terme directement proportionnel au volume total consommé.

Toutefois, à titre exceptionnel, lorsque la ressource en eau est abondante et qu'un nombre limité d'usagers est raccordé au réseau, le préfet peut, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État, à la demande du maire ou du président de l'établissement public compétent pour assurer la distribution d'eau, autoriser une tarification ne comportant pas de terme proportionnel au volume d'eau consommé.

Dispositions relatives à la Corse

En Corse, la mise en oeuvre du régime de tarification prévu à l'alinéa précédent est autorisée, selon les mêmes conditions, par l'Assemblée de Corse, à la demande du maire, du président de l'établissement public de coopération intercommunale ou du président du syndicat mixte compétent.

Texte proposé par le II du présent article pour l'article L. 4424-36-2 du code général des collectivités territoriales :

Les pouvoirs dévolus au préfet par l'article L. 2224-12-4 sont exercés par l'Assemblée de Corse.

Sources : présent projet de loi ; article L. 214-15 du code de l'environnement

Outre quelques modifications purement rédactionnelles, le présent article modifie le droit sur un seul point : la tarification forfaitaire ne pourrait plus être autorisée dans le cas où la commune « connaît[rait] habituellement de fortes variations de sa population ». Cela vient du fait que la disposition actuellement en vigueur semble inadaptée. En effet, elle a pour objet de permettre à des communes touristiques de faire payer un prix de l'eau élevé aux personnes qui consomment peu, c'est-à-dire en pratique aux saisonniers. Le gouvernement a estimé que les communes concernées pouvaient financer plus équitablement le service de distribution d'eau.

Le II du présent article propose d'insérer au code général des collectivités territoriales un article L. 4424-36-2 prévoyant que les pouvoirs dévolus au préfet par l'article L. 2224-12-4, c'est-à-dire l'autorisation de recourir à la tarification forfaitaire, sont exercés par l'Assemblée de Corse 18 ( * ) , conformément au droit actuel.

(2) L'introduction de dispositions visant à mieux adapter la consommation d'eau à la rareté ou à l'abondance des ressources en eau

Par ailleurs, le présent article propose d'introduire des dispositions visant à mieux adapter la consommation d'eau à la rareté ou à l'abondance des ressources en eau.

Tout d'abord, le II du texte proposé par le présent article pour l'article L. 2224-12-4 du code général des collectivités territoriales prévoit des dispositions particulières lorsque « la ressource en eau utilisée pour la distribution fait l'objet de règles de répartition des eaux » , c'est-à-dire lorsque les ressources sont rares . Dans ce cas, le conseil municipal ou l'assemblée délibérante de l'établissement public procède, dans un délai de deux ans à compter de la date du classement en zone de répartition, à « un réexamen des modalités de tarification en vue d'inciter les usagers à une meilleure utilisation de la ressource ».

Ensuite, le III du texte proposé par le présent article pour l'article L. 2224-12-4 du code général des collectivités territoriales prévoit qu'à compter du 1 er janvier 2010 et sous réserve des dispositions relatives à la tarification forfaitaire, le montant de la facture d'eau calculé en fonction du volume réellement consommé peut être établi  sur la base :

- d'un tarif uniforme au mètre cube ;

- d'un tarif progressif ;

- d'un tarif dégressif.

Ces trois possibilités existent d'ores et déjà. La différence par rapport au droit actuel est que le présent article limite la possibilité de recours au tarif dégressif au cas où il y a abondance d'eau , c'est-à-dire « si le prélèvement d'eau ne fait pas l'objet de règles de répartition des eaux ou ne porte pas atteinte à la réalisation des objectifs de quantité des eaux que fixe le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux ou, s'il existe, le schéma d'aménagement et de gestion des eaux ».

Le tarif progressif ou dégressif serait décidé par le conseil municipal ou l'assemblée délibérante de l'établissement public. Le présent article précise que le conseil municipal ou l'assemblée délibérante pourrait définir, pour les immeubles collectifs d'habitation , un barème particulier tenant compte du nombre de logements.

Enfin, le III du texte proposé par le présent article pour l'article L. 2224-12-4 du code général des collectivités territoriales prévoit que, dans les communes où l'équilibre entre la ressource et la consommation est menacé de façon saisonnière, le conseil municipal ou l'assemblée délibérante peut définir des tarifs différents selon les périodes de l'année.

F. AUTRES DISPOSITIONS

Le présent article propose enfin d'insérer dans le code général des collectivités territoriales plusieurs articles de moindre importance.

Un article L. 2224-12-5 prévoierait qu'un décret fixe les conditions dans lesquelles il est fait obligation aux usagers raccordés ou raccordables au réseau d'assainissement d'installer un dispositif de comptage de l'eau qu'ils prélèvent sur des sources autres que le réseau de distribution.

Enfin, selon un article L. 2224-12-6, les articles L. 2224-12-4 et L. 2224-12-5 du code général des collectivités territoriales, c'est-à-dire, respectivement, les dispositions relatives à la facturation de l'eau, et l'article précité, ne seraient pas applicables à la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UN ARTICLE BIENVENU

Le présent article apporte des modifications bienvenues :

- amélioration de la diffusion du règlement des services de distribution d'eau ;

- fin, d'ici le 1 er janvier 2007, des livraisons gratuites d'eau ;

- précision du régime des redevances de distribution d'eau et d'assainissement ;

- interdiction de la demande, par le service de distribution d'eau à l'usager, d'une caution solidaire ou d'un dépôt de garantie ;

- confirmation du principe de la tarification en fonction du volume consommé ;

- introduction de dispositions visant à mieux adapter la consommation d'eau à la rareté ou à l'abondance des ressources en eau.

B. UNE POSSIBLE AMÉLIORATION

Votre commission des finances vous propose cependant d'apporter au présent article une amélioration technique , selon laquelle le règlement du service doit systématiquement être transmis à l'usager, soit directement, soit par courrier postal ou électronique. Cette transmission aura pour effet, conformément à la jurisprudence de la Cour de Cassation, de le rendre opposable à l'usager.

Décision de la commission : votre commission émet un avis favorable sur cet article ainsi modifié.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 28

Possibilité pour les conseils généraux d'instituer un fonds départemental pour l'alimentation en eau et l'assainissement

Commentaire : le présent article vise à permettre aux conseils généraux d'instituer un fonds départemental pour l'alimentation en eau et l'assainissement.

Le projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, tel que transmis au Conseil d'Etat, comportait un article permettant la création, facultative, d'un fonds départemental pour l'alimentation en eau et l'assainissement, afin de permettre aux départements de participer à l'effort de solidarité en faveur des communes rurales en sus des contributions de leur budget général. Les départements auraient, alors, été autorisés à établir une redevance dont l'assiette et le taux étaient définis par cet article.

Cet article ne figure toutefois plus dans le présent projet de loi, qui contient au demeurant peu de dispositions relatives au rôle joué par les conseils généraux dans le domaine de la politique de l'eau. Or, les départements doivent faire face à des besoins importants et ce fonds leur permettrait d'assurer une certaine solidarité infra-départementale, qui est pertinente et viendrait en complément de la solidarité assurée à l'échelle du bassin par les agences de l'eau.

Le présent article additionnel a donc pour objet de permettre la création, facultative, dans chaque département, d'un fonds départemental pour l'alimentation en eau et l'assainissement.

Les ressources de ce fonds seraient notamment assurées par le produit d'une redevance sur les consommations d'eau distribuées dans les communes, dont le taux serait plafonné à 15 centimes d'euros par mètre cube.

Ce fonds aurait pour objet de permettre l'allègement des charges des annuités supportées par les communes, l'attribution de subventions en capital, l'appui aux regroupements intercommunaux et le financement de l'assistance technique.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 35

Comités de bassin et agences de l'eau

Commentaire : le présent article définit la composition des comités de bassin et des conseils d'administration des agences de l'eau, ainsi que les missions dévolues à ces dernières.

I. LE DROIT EXISTANT

A. UNE ARCHITECTURE ORIGINALE RÉSULTANT DE LA LOI DU 16 DÉCEMBRE 1964

La loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution a posé les bases d'un modèle original de financement de la politique de l'eau.

Elle a, en effet, consacré un cadre d'action ne respectant pas les limites administratives habituelles : le bassin hydrographique. D'après la définition de la directive cadre sur l'eau 19 ( * ) , un bassin hydrographique est « toute zone dans laquelle toutes les eaux de ruissellement convergent à travers un réseau de rivières, de fleuves et éventuellement de lacs vers la mer, dans laquelle elles se déversent par une seule embouchure, estuaire ou delta ». Sept bassins ont ainsi été définis en France métropolitaine : Adour-Garonne, Artois-Picardie, Loire-Bretagne, Rhin-Meuse, Rhône-Méditerranée, Corse, Seine-Normandie.

Dans chacun de ces bassins ont été mis en place deux structures fonctionnant en binôme : les agences de l'eau et les comités de bassins. On notera que le binôme comité de bassin/agence de l'eau souffre une exception. Il existe ainsi une seule agence Rhône-Méditerranée et Corse, alors qu'il existe deux comités de bassin, l'un pour la Corse, l'autre pour le bassin Rhône-Méditerranée. Au total, il existe actuellement 11 comités de bassin (sept pour la France métropolitaine et quatre dans les départements d'outre-mer). Un douzième est en cours de création à Mayotte.

Les agences de l'eau 20 ( * ) , établissements publics nationaux à caractère administratif marqués par une très forte autonomie, se sont vu confier la mission de « faciliter les diverses actions d'intérêt commun au bassin ou au groupe de bassins », tandis que les comités de bassin sont des assemblées consultatives ayant, de facto , un réel pouvoir de régulation financière.

Comme l'analyse notre collègue député Jean-Claude Flory dans son rapport d'octobre 2003 21 ( * ) , « le système Comités de Bassin-agences de l'eau a bien été conçu à l'origine comme un instrument financier, et force est de constater que pendant une assez longue période, les attributions effectives des Comités de Bassin en sont en pratique restées plus ou moins à l'avis conforme sur les redevances, quelle qu'ait été la rédaction de la loi de 1964 en ce qui concerne les « autres » attributions de ces assemblées (consultation sur des questions générales, notamment).

« Mais un tournant a été pris avec l'adoption de la loi sur l'eau de 1992. Celle-ci, sur la foi d'un ancrage territorial déconcentré qui s'affirmait - mais aussi d'une pertinence de périmètre à l'échelle de la gestion des eaux -, a confié aux Comités de Bassin le soin d'élaborer les SDAGE 22 ( * ) , ce qui leur a donné un second pan d'activité, certes complémentaire, mais néanmoins déconnecté au plan institutionnel de celui relatif strictement aux relations « financières » avec l'agence de l'eau ».

B. LA COMPOSITION ET LES MISSIONS DU COMITÉ DE BASSIN

1. La composition

L' article L. 213-2 du code de l'environnement qu'un comité de bassin est créé dans chaque bassin ou groupement de bassins.

Ce comité de bassin est composé :

- de représentants des régions et des collectivités locales situées en tout ou partie dans le bassin ;

- de représentants des usagers et de personnes compétentes ;

- de représentants désignés par l'Etat, notamment parmi les milieux socioprofessionnels.

Il est précisé que les représentants des deux premières catégories détiennent au moins deux tiers du nombre total des sièges . En pratique, les deux premiers collèges représentent souvent près de 40 % des sièges chacun et le collège de l'Etat, 20 %.

Le comité de bassin est une instance de concertation sans personnalité civile. Au total, les comités les plus importants rassemblent plus de cent personnes.

2. Les missions

Le III de l'article L. 213-2 précité du code de l'environnement dispose que le comité de bassin est consulté :

- sur l'opportunité des travaux et aménagements d'intérêt commun envisagés dans la zone de sa compétence ;

- sur les différends pouvant survenir entre les collectivités ou groupements intéressés ;

- plus généralement, sur toutes les questions faisant l'objet des chapitres I er à VII du titre I er du livre II du code de l'environnement 23 ( * ) .

Il donne, en application de l'article 14 de la loi précitée du 16 décembre 1964, un avis conforme sur l'assiette et les taux des redevances décidés par l'agence de l'eau.

Il désigne également, parmi les représentants de certains de ses collèges, des personnes pour siéger au conseil d'administration de l'agence de l'eau.

Enfin, en application de l'article L. 212-2 du code de l'environnement, il élabore le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux.

En application de l'article L. 213-4 du code de l'environnement, les comités de bassin créés dans chaque département d'outre-mer disposent des mêmes compétences En outre, ils sont associés à la mise en place des structures administratives qui se révéleraient nécessaires et, s'il y a lieu, à l'élaboration des adaptations de certaines dispositions aux spécificités de l'outre-mer.

C. L'ADMINISTRATION ET LES MISSIONS DES AGENCES DE L'EAU

1. Les missions des agences de l'eau

Le I de l'article L. 213-5 du code de l'environnement dispose que dans chaque bassin ou groupement de bassins, une agence de l'eau, établissement public administratif doté de la personnalité civile et de l'autonomie financière, est chargée de faciliter les diverses actions d'intérêt commun au bassin ou au groupe de bassins.

L'article L. 213-6 du code de l'environnement précise les missions des agences.

Il dispose ainsi que celles-ci contribuent, notamment par voie de fonds de concours au budget de l'Etat, à l'exécution d'études, de recherches et d'ouvrages d'intérêt commun aux bassins et à la couverture de ses dépenses de fonctionnement.

Les agences de l'eau attribuent également des subventions et des avances remboursables aux personnes publiques et privées pour l'exécution de travaux d'intérêt commun au bassin ou au groupement de bassins directement effectués par elles, dans la mesure où ces travaux sont de nature à réduire les charges financières de l'agence.

En outre, elles attribuent des subventions en capital aux collectivités territoriales et à leurs groupements pour l'exécution de travaux d'alimentation en eau potable et d'assainissement dans les communes rurales. Cette mission a été confiée aux agences de l'eau par l'article 121 de la loi de finances rectificative pour 2004 et correspond aux missions antérieurement dévolues au Fonds national de développement des adductions d'eau (FNDAE) 24 ( * ) .

Le transfert du FNDAE aux agences de l'eau

Les agences de l'eau reprennent, dès le 1 er janvier 2005, dans le cadre du décroisement des interventions de l'Etat et des agences dans le domaine de l'eau et des politiques d'interventions au titre de l'eau potable et de l'assainissement, les missions de solidarité entre le milieu urbain et le milieu rural, préalablement assurées par le Fonds national de développement des adductions d'eau (FNDAE). Ce transfert du FNDAE, jusque-là pris en charge par le ministère de l'agriculture, de l'alimentation de la pêche et de la ruralité, vaut à la fois pour les opérations nouvelles et pour les dossiers actuellement en cours de réalisation qui ne sont pas soldés au 31 décembre 2004.

Les modalités du transfert, décidées conjointement par le ministère de l'agriculture et le ministère de l'écologie, ont donné lieu à des projets de notes communes adressées aux préfets, aux directeurs des agences et aux présidents de conseils généraux, ainsi qu'à une note d'organisation.

Pour les opérations en cours, les engagements de l'Etat seront repris par l'agence sous forme de décisions d'attribution d'aides sur la base d'une liste d'opérations recensées par la direction départementale de l'agriculture et de la forêt (DDAF). La DDAF poursuit l'instruction des dossiers jusqu'au 31 décembre 2006 avec une « certification du service fait » en vue du paiement qu'elle transmettra à l'agence.

Pour les opérations nouvelles programmées dès 2005, l'agence territorialement compétente effectue une gestion directe. Les agences définiront pour 2005 et 2006 un taux de subvention en capital reconduisant le taux moyen antérieur.

Source : ministère de l'écologie et du développement durable

Par ailleurs, dans le respect des engagements internationaux de la France et dans le cadre de conventions soumises à l'avis du comité de bassin, l'agence peut mener des actions de coopération internationale dans les domaines de l'eau et de l'assainissement, dans la limite de 1 % de ses ressources, le cas échéant et suivant les règles statutaires en vigueur pour chaque catégorie de personnels, avec le concours de ses agents. On rappellera que cette disposition découle de la loi n° 2005-95 du 9 février 2005 relative à la coopération internationale des collectivités territoriales et des agences de l'eau dans les domaines de l'alimentation en eau et de l'assainissement, qui résulte d'une proposition de loi de notre ancien collègue Jacques Oudin 25 ( * ) .

2. La composition du comité d'administration

Le II de l'article L. 213-5 du code de l'environnement précise que chaque agence est administrée par un conseil d'administration, composé comme suit :

- un président nommé par décret ;

- des représentants des régions et des collectivités locales situées en tout ou partie dans le bassin ;

- des représentants des usagers ;

- des représentants de l'Etat et, le cas échéant, des personnalités qualifiées ;

- un représentant du personnel de l'agence.

Les collèges des élus, des usagers et de l'Etat disposent d'un nombre égal de sièges.

II. LE DROIT PROPOSÉ

A. LA COMPOSITION ET LES MISSIONS DU COMITÉ DE BASSIN

1. La composition des comités de bassin

L'article L. 213-8 inséré dans le code de l'environnement par le présent article prévoit que, dans chaque bassin ou groupement de bassins hydrographiques, il est créé un comité de bassin composé à parts égales :

- de représentants des collectivités territoriales et de leurs établissements publics de coopération exerçant une compétence dans le domaine de l'eau dans le bassin ou le groupement de bassins ;

- de représentants des usagers de l'eau et des milieux aquatiques, des milieux socioprofessionnels, des associations agréées de protection de l'environnement, des associations agréées de défense des consommateurs, des instances représentatives de la pêche et de personnes qualifiées ;

- de représentants de l'Etat ou de ses établissements publics.

Il est outre précisé que le président du comité de bassin est élu par l'ensemble des membres, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui : l'article 8 du décret n° 66-699 du 14 septembre 1966 relatif aux comités de bassin créés par l'article 13 de la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 dispose, en effet, que les représentants désignés par l'Etat ne prennent pas part à l'élection du président et du vice-président, à l'exception de ceux désignés au titre des milieux socioprofessionnels.

2. Les missions du comité de bassin

L'article L. 213-8 précité tel qu'il est proposé par le présent article précise également les missions du comité de bassin.

Il prévoit, ainsi, que celui-ci est consulté sur l'opportunité des travaux et aménagements significatifs d'intérêt commun envisagés et, plus généralement, sur toutes les questions faisant l'objet des chapitres I er à VII du titre I er du livre II du code de l'environnement 26 ( * ) . Cette formulation est très proche de la rédaction actuelle.

Ensuite, le comité de bassin, comme le prévoit l'article L. 212-1 du code de l'environnement, procède dans chaque bassin ou groupement de bassins à l'analyse de ses caractéristiques et des incidences des activités sur l'état des eaux, ainsi qu'à une analyse économique des utilisations de l'eau.

Il est également chargé d'établir et de mettre régulièrement à jour des registres répertoriant :

- les zones faisant l'objet de dispositions législatives ou réglementaires particulières en application d'une législation communautaire spécifique portant sur la protection des eaux de surface ou des eaux souterraines ou la conservation des habitats ou des espèces directement dépendants de l'eau ;

- les zones de captages, actuelles ou futures, destinées à l'alimentation en eau potable.

Il est par ailleurs chargé d'élaborer et de mettre à jour le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux.

Enfin, l'article L. 213-8 inséré dans le code de l'environnement par le présent article prévoit que le comité de bassin définit les orientations de l'action de l'agence de l'eau et participe à l'élaboration des décisions financières de cette agence.

B. L'ADMINISTRATION ET LES MISSIONS DES AGENCES DE L'EAU

1. Le statut et les missions des agences de l'eau

L'article L. 213-8-1 inséré dans le code de l'environnement par le présent article prévoit qu'une agence de l'eau est instituée dans chaque bassin ou groupement de bassins.

Il est précisé que l'agence de l'eau jouit d'un statut d'établissement public national à caractère administratif. La mention « doté de l'autonomie financière » ne figure pas dans la rédaction proposée mais elle est implicite.

L'agence de l'eau a pour mission de contribuer à la mise en oeuvre des orientations des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux ainsi qu'à l'application des schémas d'aménagement et de gestion des eaux.

Elle est également chargée de mener ou de soutenir des actions destinées :

- à favoriser une gestion globale, durable et équilibrée de la ressource en eau et des milieux aquatiques continentaux et marins ;

- à assurer l'alimentation en eau potable et la gestion des crues,

- à permettre le développement durable des activités économiques ;

- à préserver une gestion équilibrée de la ressource en eau, ainsi que le prévoit l'article L. 211-1 du code de l'environnement.

2. La composition du conseil d'administration des agences

L'article L. 213-8-1 précité précise que chaque agence de l'eau est administrée par un conseil d'administration composé comme suit :

- un président nommé par décret ;

- des représentants désignés en leur sein par les membres du comité de bassin relevant des deux collèges autres que celui de l'Etat ;

- des représentants de l'Etat ou de ses établissements publics.

- un représentant du personnel de l'agence.

Comme c'est le cas pour le comité de bassin, les trois collèges (élus, usagers et Etat) disposeront d'un nombre égal de sièges.

C. LES DISPOSITIONS FINANCIÈRES RELATIVES AUX AGENCES DE L'EAU

1. Les ressources financières des agences

L'article L. 213-9 du code de l'environnement, tel qu'il résulte du présent article, prévoit que les ressources financières de l'agence de l'eau sont constituées, notamment, des redevances, qui sont réformées par l'article 37 du présent projet de loi et seront donc analysées dans ce cadre, et de subventions versées par des personnes publiques.

2. Le programme pluriannuel d'intervention : un cadre d'action

L'article L. 213-9-1 inséré dans le code de l'environnement par le présent article précise le cadre dans lequel s'inscrit l'action des agences de l'eau, à savoir le programme pluriannuel d'intervention.

Il prévoit ainsi que, pour l'exercice de ses missions, le programme pluriannuel d'intervention de chaque agence de l'eau détermine les domaines et les conditions de son action et prévoit le montant des dépenses et des recettes nécessaires à sa mise en oeuvre.

Les délibérations du conseil d'administration de l'agence de l'eau relatives au programme pluriannuel d'intervention et aux redevances sont prises sur avis conforme du comité de bassin , dans le respect des dispositions arrêtées conjointement, après avis du comité national de l'eau, par les ministres chargés de l'environnement et des finances.

Il est précisé que les délibérations concernant les taux des redevances sont publiées au Journal officiel de la République française et sont tenues à la disposition du public.

3. Les contributions financières des agences

L'article L. 213-9-2, inséré dans le code de l'environnement par le présent article, précise les contributions ou les interventions des agences de l'eau, dans le cadre défini par le programme pluriannuel d'intervention.

Ainsi, dans le cadre de son programme pluriannuel d'intervention, l'agence de l'eau apportera des concours financiers sous forme de subventions, de primes ou d'avances remboursables aux personnes publiques ou privées pour la réalisation d'actions et de travaux d'intérêt général ou d'intérêt commun au bassin ou au groupement de bassins, dans la mesure où ces actions ou travaux sont de nature à éviter des dépenses futures plus élevées ou à contribuer à leur maîtrise. La notion de prime ne figurait pas aujourd'hui dans la rédaction relative aux concours financiers accordés par l'agence, même s'il était fait référence à ces primes dans l'article 14-1 de la loi précitée du 16 décembre 1964 27 ( * ) , ainsi que dans les décrets d'application. Le ministère de l'écologie et du développement durable précise que ces primes ont pour objet de passer d'une taxation de la pollution brute à une taxation de la pollution nette.

Il est précisé que « les concours de l'agence ne sont définitivement acquis que sous réserve du respect des prescriptions relatives à l'eau imposées par la réglementation en vigueur ». Cette disposition est nouvelle et revêt une certaine importance. Elle a, en effet, pour objet de mieux lier les interventions des agences de l'eau au respect de la police de l'eau, ce qui n'est pas toujours le cas aujourd'hui.

Ensuite, l'agence de l'eau participe financièrement à la réalisation des schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE). Cette disposition témoigne d'une volonté de souligner l'importance des SAGE.

Dans le respect des engagements internationaux de la France et dans le cadre de conventions soumises à l'avis du comité de bassin, elle peut également mener des actions de coopération internationale dans les domaines de l'eau et de l'assainissement, dans la limite de 1 % de ses ressources, le cas échéant et suivant les règles statutaires en vigueur pour chaque catégorie de personnels, avec le concours de ses agents. Il s'agit de la reprise du droit existant.

L'agence de l'eau peut, en outre, percevoir, à la demande d'un établissement public territorial de bassin et pour le compte de celui-ci, des redevances instituées par cet établissement.

Par ailleurs, elle contribue financièrement aux actions menées par l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA), créé par l'article 41 du présent projet de loi, dont le commentaire analyse précisément les missions. Il est précisé que le montant de cette contribution est décidé chaque année par décret, dans les limites fixées par la loi, soit 108 millions d'euros par an au total pour les six agences de l'eau, selon le plafond fixée par l'article 36 du présent projet de loi.

Enfin, comme c'est le cas depuis l'article 121 de la loi de finances rectificative pour 2004 précitée, il est prévu que l'agence de l'eau attribue des subventions en capital aux collectivités territoriales et à leurs groupements pour l'exécution de travaux d'alimentation en eau potable et d'assainissement dans les communes rurales.

Un décret en Conseil d'Etat précisera les modalités d'application du présent article.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Cet article pose les bases générales du système de financement de la politique de l'eau et doit être lu à la lumière des articles suivants, notamment s'agissant de la contribution versée à l'ONEMA.

A. DES DISPOSITIONS RELATIVES AU COMITÉ DE BASSIN QUI NE PEUVENT ÊTRE CONSERVÉES EN L'ÉTAT

S'agissant des comités de bassin, la principale nouveauté apportée par le présent article réside dans la modification des règles de composition du comité et, surtout, de la désignation du président de celui-ci.

Des nuances existent, tout d'abord, dans la rédaction relative à la composition des collèges, la définition retenue plus précise et extensive pour le collège des usagers que la rédaction actuelle, correspondant à la pratique.

La vraie différence tient au poids relatif des différents collèges . Le présent article renforce en effet le poids de l'Etat , d'une part en prévoyant que les trois collèges bénéficient d'un nombre égal de sièges, comme c'est déjà le cas au conseil d'administration de l'agence de l'eau, d'autre part en permettant que les représentants du collège de l'Etat prennent part à l'élection du président du comité de bassin.

Or, retenir le vote des représentants de l'Etat pour l'élection du président du comité reviendrait à confier à l'Etat un pouvoir d'arbitrage, ce qui n'est pas souhaitable. Aussi votre rapporteur pour avis vous proposera-t-il de réserver le droit de vote pour l'élection du président du comité de bassin aux membres des collèges des collectivités locales et des usagers/consommateurs. En outre, il vous proposera également de modifier le poids relatif des différents collèges , en ramenant à 20 % la part des sièges réservée à l'Etat et en fixant à 40 % celle réservée aux représentants des deux autres collèges.

Signalons par ailleurs que le comité de bassin est conforté par le présent projet de loi, dans la mesure où un avis conforme de sa part est requis pour les délibérations du conseil d'administration de l'eau relatives au programme pluriannuel d'intervention des agences et au taux des redevances.

B. LA SUPPRESSION DE LA POSSIBILITÉ POUR LES AGENCES DE CONTRIBUER PAR VOIE DE FONDS DE CONCOURS AU BUDGET DE L'ETAT

Concernant les agences de l'eau, la principale nouveauté réside dans la contribution des agences au financement de l'ONEMA, dans la limite de 108 millions d'euros par an. Ce point fait l'objet d'une analyse plus approfondie dans le commentaire de l'article 41 du présent projet de loi.

Il faut également souligner la suppression de la possibilité, actuellement ouverte aux agences par l'article L. 213-6 du code de l'environnement, de contribuer par voie de fonds de concours au budget de l'Etat à l'exécution d'études, de recherches et d'ouvrages d'intérêt commun aux bassins et à la couverture de ses dépenses de fonctionnement.

On rappellera, en effet, que le ministère de l'écologie et du développement durable s'était appuyé sur ces dispositions pour justifier, d'un point de vue juridique, le « prélèvement » de 210 millions d'euros opéré l'an dernier sur la trésorerie des agences de l'eau 28 ( * ) .

La suppression de ces dispositions est présentée comme une forme de protection des ressources des agences de l'eau , qu'il serait à l'avenir plus difficile « d'orienter » au profit du budget de l'Etat.

Il convient toutefois de rappeler que les agences de l'eau constituent des établissements publics sous tutelle de l'Etat et que leurs ressources sont des impôts affectés. Le suivi de la trésorerie des agences constituera un enjeu essentiel à l'avenir et, si un gonflement de la trésorerie des agences tel qu'il avait été observé par le passé devait se reproduire, on ne peut exclure qu'un mécanisme correctif, y compris un concours versé au budget général de l'Etat, soit mis en place, dans l'hypothèse où une action sur le taux des redevances serait insuffisante. Le mécanisme serait toutefois plus protecteur pour les agences de l'eau et plus transparent pour le Parlement, dans la mesure où une telle opération nécessiterait une nouvelle disposition législative.

C. PRÉVOIR UNE CONTRACTUALISATION ENTRE LES AGENCES DE L'EAU ET LES DÉPARTEMENTS

Ainsi que votre rapporteur pour avis l'a noté dans son commentaire de l'article additionnel après l'article 28, le présent projet de loi comporte très peu de dispositions relatives au rôle des départements dans le financement de la politique de l'eau.

Si l'article 121 de la loi de finances rectificative pour 2004 a transféré aux agences de l'eau les missions antérieurement dévolues au FNDAE, l'articulation entre les actions des agences et les actions des départements méritent d'être coordonnées. C'est la raison pour laquelle, en lien avec la création du fonds départemental proposée par l'article additionnel après l'article 28, votre rapporteur pour avis vous proposera de prévoir une contractualisation entre les agences de l'eau et les départements pour le financement des travaux d'alimentation en eau potable et d'assainissement dans les communes rurales.

Par ailleurs, afin de recentrer l'article 36 du présent projet de loi pour lui conférer un caractère d'article de programmation, votre rapporteur pour avis vous proposera de prévoir que le Parlement définit les orientations prioritaires des programmes pluriannuels d'intervention et de codifier les dispositions de l'article 36 relatives à l'arrêtée conjoint des ministres chargés de l'environnement et des finances. Il précisera également que cet arrêté ne « fixe » pas, mais « encadre », le montant pluriannuel global des dépenses de chaque agence et leur répartition par grands domaines d'intervention, afin de permettre aux comités de bassin de jouer un rôle réel.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'émettre un avis favorable sur cet article ainsi modifié.

ARTICLE 36

Programmes pluriannuels d'intervention des agences de l'eau pour les années 2007-2012

Commentaire : le présent article définit les orientations prioritaires des programmes pluriannuels d'intervention des agences de l'eau pour les années 2007-2012 et fixe le montant maximal des dépenses des agences de l'eau sur cette période.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LES PROGRAMMES PLURIANNUELS D'INTERVENTION : UN CADRE D'ACTION POUR LES AGENCES

L'article 14-2 de la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution dispose que le montant global des redevances mises en recouvrement par chaque agence est déterminé « en fonction des dépenses lui incombant dans le cadre d'un programme pluriannuel d'intervention ».

Ce programme pluriannuel d'intervention permet à l'Etat de fixer les orientations de la politique menée par les agences de l'eau, celles-ci demeurant des établissements publics sous tutelle, même si elles ont en pratique acquis une autonomie certaine.

L'élaboration des programmes d'intervention des agences

L'élaboration des programmes d'intervention des agences obéit à une procédure administrative impliquant la majorité des acteurs agissant dans le domaine de l'eau.

Cette procédure est déclenchée par la notification aux présidents des conseils d'administration de la lettre d'orientation gouvernementale.

L'envoi de cette lettre de cadrage permet d'engager le travail préparatoire qui est lancé par un débat d'orientation générale au sein des conseils d'administration. Ce débat permet de définir pour chaque agence les grandes lignes de programme.

Ce travail est ensuite repris par les commissions de programme au niveau des comités de bassin. Il est conduit par conséquent en concertation étroite entre les conseils d'administration et les différentes instances du bassin.

Lorsque le programme d'intervention est finalisé, il est soumis pour approbation au comité de bassin qui rend un avis. Cet avis est un avis conforme en ce qui concerne les taux de redevance. Il est également présenté à la mission interministérielle sur l'eau qui donne un avis.

Chaque conseil d'administration va ensuite approuver par délibération le programme d'intervention. Une large information est faite auprès de l'ensemble des acteurs concernés (collectivités locales, industriels, usagers,...) et auprès du public.

Les programmes d'intervention ont traditionnellement été construits sur une durée de cinq ans. Cette planification quinquennale a toutefois été modifiée à l'occasion de l'élaboration du huitième programme d'intervention, qui court jusqu'en 2006.

B. LES HUITIÈMES PROGRAMMES D'INTERVENTION ET LA RÉVISION INTERVENUE À MI-PARCOURS

1. Les orientations du huitième programme

Le huitième programme d'intervention des agences de l'eau pour la période 2003-2006 a été élaboré par les conseils d'administration des agences de l'eau au cours de l'année 2002.

La remise à plat du processus législatif de réforme de la politique de l'eau a permis de redonner de la visibilité aux instances de bassin, en retenant pour ce programme une durée de quatre ans , calée sur le calendrier prévisible de la préparation de la loi sur l'eau et sur certaines étapes d'application de la directive cadre sur l'eau.

Les orientations gouvernementales ont été notifiées aux présidents des conseils d'administration par une lettre de cadrage de la ministre de l'écologie et du développement durable datée du 24 septembre 2002. Il leur a ainsi été demandé de privilégier deux axes principaux :

- la mise en oeuvre des engagements communautaires de la France , notamment en matière de résorption des excédents de nitrates (programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA)) et des normes de rejets urbains (en application de la directive « eaux résiduaires urbaines ») ;

- la maîtrise des prélèvements obligatoires et la baisse des excédents de trésorerie dans certaines agences de l'eau.

Dans ce programme, les agences de l'eau ont, à la demande du gouvernement, développé une logique d'intervention plus territoriale fondée sur des objectifs renforcés de qualité du milieu aquatique.

Les principaux moyens d'action sont :

- une meilleure organisation des responsabilités respectives des délégations régionales et des services du siège, en vue d'assurer un meilleur pilotage stratégique des objectifs de résultats, dans l'esprit de la LOLF ;

- un renforcement du rôle consultatif des commissions géographiques des comités de bassin ;

- des dispositifs de sélectivité accrue des aides, en privilégiant des approches territoriales de la gestion globale et équilibrée de l'eau par rapport aux approches sectorielles (collectivités, industries, agriculture) ;

- une plus grande cohérence entre la modulation géographique des taux et des coefficients de redevances et celle des aides.

2. La révision intervenue à mi-parcours

L'examen à mi-parcours du programme, intervenu mi-2004, avait pour but d'évaluer les résultats obtenus et d'examiner les besoins éventuels de révision des besoins.

Trois types de besoins sont apparus :

- les besoins propres de chaque agence, s'agissant en particulier de la mise en oeuvre de la directive communautaire « eaux résiduaires urbaines » ;

- ceux liés au décroisement des interventions de l'Etat et des agences de l'eau, dans des domaines financés en 2004 par le ministère de l'écologie et du développement durable ;

- le besoin de compenser le transfert des missions antérieurement dévolues au FNDAE, puis portées par le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité, décidé par l'article 121 de la loi de finances rectificative pour 2004.

Après révision, le montant total des autorisations de programme pour l'ensemble du huitième programme s'élève ainsi à 8.882,52 millions d'euros. Cette révision a donc permis de mobiliser 429,59 millions d'euros d'autorisations de programme supplémentaires , essentiellement utilisées pour la mise en oeuvre de la directive eau résiduaire urbaine et l'alimentation en eau potable des communes rurales, ainsi répartis :

- 36,98 millions d'euros au titre du décroisement des interventions du ministère de l'écologie et du développement durable et des agences de l'eau ;

- 245,6 millions d'euros au titre du transfert de l'ex-FNDAE ;

- 195,01 millions d'euros au titre des besoins propres au programme.

Le montant total des redevances après révision s'élève quant à lui à 6.464,5 millions d'euros. La révision a ainsi mobilisé 190,12 millions d'euros de produit de redevances supplémentaire pour les deux dernières années du programme.

Le tableau qui suit, transmis à votre rapporteur pour avis par le ministère de l'écologie et du développement durable, retrace les modifications intervenues pour chaque agence.

Source : ministère de l'écologie et du développement durable

II. LE DROIT PROPOSÉ

A. LES ORIENTATIONS DES NEUVIÈMES PROGRAMMES

Le I du présent article définit huit orientations prioritaires pour les neuvièmes programmes d'intervention des agences de l'eau, qui couvrent la période 2007-2012 .

Ce cadre est contraignant pour les agences de l'eau, dont les délibérations doivent être compatibles avec ces orientations, même si la rédaction retenue reste très générale.

Les 8 orientations prioritaires des programmes pluriannuels d'intervention des agences de l'eau pour les années 2007 à 2012

Favoriser la réalisation des objectifs environnementaux du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux en application de la directive 2000/60/CE fixant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau et créer les conditions permettant d'atteindre d'ici 2015 le bon état des masses d'eau ;

Favoriser la réalisation des objectifs environnementaux des schémas d'aménagement et de gestion des eaux ;

En matière de lutte contre la pollution, contribuer à l'épuration des eaux usées et au traitement des boues, à la réduction des rejets industriels et à l'élimination des rejets de substances dangereuses, au développement de l'assainissement non collectif dans les zones d'habitat dispersé et à la maîtrise des pollutions des eaux de toutes origines en assurant la solidarité avec les communes rurales ;

En matière d'eau potable, contribuer à la sécurité de l'alimentation en eau des consommateurs et à la préservation de la qualité de l'eau distribuée, en privilégiant les actions préventives dans les bassins versants en amont des points de captage de l'eau destinée à la consommation humaine et les travaux indispensables au respect des limites de qualité pour les eaux distribuées et en assurant la solidarité avec les communes rurales ;

Créer les conditions d'un développement durable des activités économiques utilisatrices d'eau en favorisant notamment les économies d'eau et les recyclages, ainsi que l'utilisation de ressources respectant un équilibre entre volumes consommés et ressources disponibles ou la mobilisation de ressources nouvelles dans la mesure où l'impact global sur les milieux aquatiques est positif à l'échelle du bassin versant ;

Mener et favoriser des actions de préservation des écosystèmes aquatiques, d'amélioration de la gestion, de la restauration et d'entretien des milieux aquatiques et de leurs usages professionnels, sportifs et de loisirs ;

Améliorer la gestion des crues par l'accroissement de la capacité de rétention des zones naturelles d'expansion des crues, un meilleur entretien des rivières et la restauration de leur lit ;

Mener et soutenir au niveau du bassin des actions de communication, d'information et de sensibilisation du public dans le domaine de l'eau, de la pêche, de la protection des milieux aquatiques et du patrimoine piscicole, des sports et des loisirs nautiques.

B. LE PLAFONNEMENT DU MONTANT DES DÉPENSES DES AGENCES AU COURS DE LA PÉRIODE 2007-2012

1. Le plafonnement des dépenses totales

Le II du présent article plafonne le montant des dépenses des agences de l'eau pour les années 2007 à 2012 à 12 milliards d'euros.

Il est toutefois précisé que ce plafond s'entend « hors primes » : l'article L. 213-9-2, inséré dans le code de l'environnement par l'article 35 du présent projet de loi prévoit, en effet, que l'agence de l'eau apporte des concours financiers sous forme de subventions, de primes ou d'avances remboursables. En excluant cette forme de concours financiers, le présent article permet aux dépenses des agences de l'eau d'excéder le plafond de dépenses voté par le Parlement. Le ministère de l'écologie et du développement durable justifie cette exclusion par le fait que les primes, calculées sur la base des quantités de pollution éliminées, ont un caractère quasi automatique. Il précise que le montant total des primes versées pour l'élimination de la pollution domestique s'élevait, en 2003, à 240 millions d'euros, pour un montant total de dépenses de 2,2 milliards d'euros environ.

Le présent article prévoit que la déclinaison de ce plafond global par agence est d'ordre réglementaire. Il est, en effet, précisé qu'un arrêté conjoint des ministres chargés de l'environnement et des finances, pris après avis du comité national de l'eau, fixe, pour chaque agence de l'eau, le montant pluriannuel global des dépenses et leur répartition par grand domaine d'intervention.

2. Le plafonnement de la contribution annuelle des agences à l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA)

Conjointement à ce plafond global de dépenses, le II du présent article limite à 108 millions d'euros par an le total des contributions des agences de l'eau aux ressources financières de l'ONEMA.

C. UNE PROCÉDURE DE RECONDUCTION AUTOMATIQUE DE CES DISPOSITIONS

Le III du présent article tend à instaurer une possibilité de reconduction automatique des dispositions précédemment examinées.

Il prévoit en effet que les dispositions du présent article « seront reconduites par période de six ans à partir du 1 er janvier 2013, en l'absence de nouvelle disposition législative à cette échéance ».

On notera que cette procédure ne vaut qu'en l'absence de nouvelle disposition législative au 1 er janvier 2013 et qu'elle confirme la durée de six ans retenue par le présent article pour le prochain programme d'intervention.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UN ENCADREMENT SOUHAITABLE PAR LE PARLEMENT...

Le présent article renforce incontestablement l'implication du Parlement dans la définition de la politique de l'eau. On rappellera que les agences de l'eau concentrent des moyens financiers bien plus importants que ceux détenus, en propre, par le ministère de l'écologie et du développement durable.

Or le Parlement ne prend pas part, actuellement, à la définition des orientations des programmes pluriannuels d'intervention des agences de l'eau, qui sont encadrés par lettre du ministre de l'écologie et du développement durable.

Dans la mesure où l'Etat est responsable de la politique de l'eau devant l'Union européenne, et en particulier du respect des objectifs assignés par la directive cadre sur l'eau, et dans la mesure où les agences de l'eau sont des établissements publics nationaux à caractère administratif financés par des impôts affectés, il apparaît essentiel que le Parlement se prononce sur les orientations de leur action, sans préjudice du rôle des comités de bassin.

B. L'APPRÉCIATION DU PLAFOND DE DÉPENSES

S'agissant de la fixation d'un plafond de dépenses, on remarquera tout d'abord qu'elle participe de la même philosophie d'encadrement par le Parlement de l'action des agences de l'eau, ce qui paraît souhaitable.

On peut s'interroger sur le plafond de dépenses fixé. Le montant de 12 milliards d'euros correspond, en effet, à peine à la reconduction des dépenses moyennes annuelles des agences de l'eau au cours du huitième programme révisé. Le ministère de l'écologie et du développement durable estime, toutefois, que ce plafond est suffisant pour satisfaire les besoins. En outre, on a noté précédemment qu'une réactualisation à mi-parcours des besoins du huitième programme venait d'être effectuée : une révision interviendra également de manière probable au cours du neuvième programme, et, le cas échéant, il appartiendra au Parlement d'ajuster ce plafond en fonction des besoins reconnus.

On remarquera, par ailleurs, que ce plafond de dépenses ne comprend pas l'ensemble des contributions des agences, puisqu'il exclut les primes, ce qui mériterait d'être précisément justifié.

En outre, on peut s'interroger sur l'articulation entre ce plafond de dépenses et l'évolution des recettes des agences de l'eau. En effet, l'article 37 du présent projet définit l'assiette de ces redevances et encadre les taux, mais la fixation de ces derniers dépendra de l'agence de l'eau. Or, d'après les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, si toutes les agences retenaient un taux plafond pour l'ensemble des redevances, leurs recettes atteindraient environ 24 milliards d'euros, soit le double du plafond fixé pour les dépenses. Si cette hypothèse n'est qu'un cas d'école, elle a le mérite de souligner la marge d'action dont disposent les agences et la possible absence de coordination entre les recettes et les plafonds de dépenses, ce qui amène, une nouvelle fois, à souligner l'importance de la tutelle qui sera menée par le ministère de l'écologie et du développement durable et le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

S'agissant enfin de la contribution des agences de l'eau à l'ONEMA, que le présent article plafonne à 108 millions par an au cours de la période 2007-2012, il est improbable qu'elle permette à cet office d'assurer réellement une mission de solidarité inter-bassins, ainsi que le montre le commentaire de l'article 41, à moins de prévoir des critères « négatifs » visant à intégrer cette solidarité dans la répartition de la contribution entre les agences. Votre rapporteur pour avis vous proposera un amendement en ce sens.

C. LA POSSIBILITÉ DE RECONDUCTION AUTOMATIQUE DES ORIENTATIONS : UNE DISPOSITION QUI N'EST PAS SOUHAITABLE

Si le présent article représente globalement une avancée sensible, dans la mesure où il implique davantage le Parlement dans le « pilotage » des agences de l'eau, la possibilité de reconduction automatique des orientations du programme pluriannuel d'intervention en cas d'absence de vote du Parlement ne paraît pas souhaitable, en particulier si l'on reconduit ces orientations pour la durée d'un programme entier.

Il est, en effet, paradoxal d'asseoir d'un côté la compétence du Parlement et de prévoir de l'autre les moyens de le priver de celle-ci. C'est la raison pour laquelle votre rapporteur pour avis vous proposera, d'une part de supprimer cette possibilité et, d'autre part, de codifier, dans le cadre de l'article 35 du présent projet de loi, le principe selon lequel les orientations des programmes pluriannuels d'intervention des agences de l'eau sont définies par le Parlement.

En outre, afin de conférer au présent article un caractère d'article de programmation, il est également souhaitable de codifier, dans le cadre de l'article 35, les dispositions relatives à l'arrêté conjoint des ministres chargés de l'environnement et des finances, en précisant que celui ne fixe pas mais encadre, pour chaque agence de l'eau, le montant pluriannuel global des dépenses et leur répartition par grand domaine d'intervention.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'émettre un avis favorable sur cet article ainsi modifié.

ARTICLE 37

Redevances des agences de l'eau

Commentaire : le présent article vise à réformer les redevances perçues par les agences de l'eau.

I. LE DROIT EXISTANT

A. UN SYSTÈME FRAGILE AU REGARD DE LA JURISPRUDENCE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

1. Des dispositions législatives très peu précises

L'article 14 de la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution permet aux agences de l'eau d'établir et de percevoir sur les personnes publiques ou privées « des redevances, dans la mesure où ces personnes publiques ou privées rendent nécessaire ou utile l'intervention de l'agence ou dans la mesure où elles y trouvent leur intérêt ».

Il précise que l'assiette et le taux de ces redevances sont fixés sur avis conforme du comité de bassin.

L'article 14-1 de la loi précitée du 16 décembre 1964 posait les bases essentielles du dispositif des redevances « en ce qui concerne la détérioration de la qualité de l'eau », en précisant notamment qu'elles sont établies et perçues par les agences financières de bassin « en fonction de la quantité de pollution produite par les personnes publiques et privées un jour normal du mois de rejet maximal ».

En application de ces dispositions, le décret n° 66-700 du 14 septembre 1966 29 ( * ) apportait quelques précisions et disposait notamment, dans son article 18, que :

« des redevances peuvent être réclamées aux personnes publiques ou privées qui rendent l'intervention de l'agence nécessaire ou utile :

« - soit qu'elles contribuent à la détérioration de la qualité de l'eau ;

« - soit qu'elles effectuent des prélèvements sur la ressource en eau ;

« - soit qu'elles modifient le régime des eaux dans tout ou partie du bassin .

« Des redevances peuvent également être réclamées aux personnes publiques ou privées qui bénéficient de travaux ou ouvrages exécutés avec le concours de l'agence ».

Comme le note notre collègue Jean-Claude Flory dans son rapport d'octobre 2003 30 ( * ) , « à l'exception des redevances de pollution (« pour détérioration de la qualité de l'eau »), les autres formes de redevances n'ont fait l'objet ni d'une quelconque « validation » législative, ni même, il faut en convenir, de réelles précisions sur le plan réglementaire, en ce qui concerne les modalités de détermination des assiettes sur lesquelles ces redevances sont susceptibles d'être calculées. De ce point de vue, la formulation de l'article 18 du décret n° 66-700, si elle permet visiblement d'ouvrir la possibilité de réelles adaptations aux conditions locales, peut aussi faire craindre, par son caractère particulièrement « évasif », ce que par euphémisme nous pourrions qualifier « d'hétérogénéité mal justifiée » dans l'évolution des pratiques de chaque bassin, au fil du temps ».

2. La décision du Conseil constitutionnel du 23 juin 1982 et ses conséquences

Cette absence d'encadrement législatif du dispositif des redevances a réellement posé un problème à partir de la décision du Conseil constitutionnel n° 82-124 L du 23 juin 1982. Le Conseil constitutionnel y jugeait que « les redevances perçues par les agences financières de bassin, établissements publics à caractère administratif, ne constituent pas des taxes parafiscales au sens de l'article 4 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances; que, destinées à assurer le financement des dépenses de toute nature qui incombent aux agences, elles ne constituent pas davantage des rémunérations pour services rendus visés à l'article 5 de l'ordonnance du 2 janvier 1959; qu'ainsi ces redevances doivent être rangées parmi les impositions de toute nature dont l'article 34 de la Constitution réserve au législateur le soin de fixer les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement ».

Le Conseil constitutionnel ayant été saisi sur le fondement de l'article 37, alinéa 2 de la Constitution, il n'avait pas censuré les dispositions des articles 14 et 14-1 de la loi précitée du 16 décembre 1964. Toutefois, cette décision a empêché toute évolution législative ultérieure du mécanisme des redevances qui ne remettrait pas en cause l'ensemble du dispositif : une nouvelle disposition législative aurait très probablement été déclarée contraire à la Constitution et aurait risqué de compromettre l'ensemble du dispositif des redevances. Le Conseil d'Etat avait également refusé l'intégration des articles de la loi précitée du 16 décembre 1964 relatifs aux redevances dans le code de l'environnement, en raison de leur inconstitutionnalité.

Il était donc important de renforcer l'ensemble du dispositif des redevances pour assurer sa pérennité, ce à quoi s'attache le présent projet de loi.

Quant au débat sur la nature juridique des redevances, il paraît désormais tranché , comme le souligne notre collègue député Jean-Claude Flory : « à l'heure actuelle, même s'il existe encore ça et là quelques velléités de « requalifier » les redevances sur d'autres bases juridiques que celles « d'impositions de toutes natures », l'essentiel des acteurs et experts estime que cette question est derrière nous : il faut désormais en priorité regarder vers l'avant pour définir la meilleure solution ».

B. LE MÉCANISME ACTUEL DE REDEVANCES DES AGENCES DE L'EAU

Le système actuel de redevances est excessivement complexe et le présent commentaire, qui se base largement sur le rapport précité de notre collègue député Jean-Claude Flory, se bornera à en décrire les principales lignes directrices.

1. Des redevances dont le montant est déterminé par les aides à attribuer

L'article 14-2 de la loi précitée du 16 décembre 1964 dispose que le montant global des redevances mises en recouvrement par chaque agence est déterminé en fonction des dépenses lui incombant dans le cadre d'un programme pluriannuel d'intervention.

Cet article illustre bien la visée des redevances d'après la loi du 16 décembre 2004. Celles-ci apparaissent en priorité comme des outils destinés à mobiliser des capacités de financement , plus que comme des outils destinés à mettre en oeuvre le principe pollueur-payeur ou à inciter à des modifications de comportement.

2. Les principes essentiels de calcul des redevances

Suivant l'analyse du rapport précité de notre collègue député Jean-Claude Flory, on distinguera les principes applicables aux redevances « de pollution », qui font l'objet de précisions législatives ou réglementaires, de ceux applicables aux redevances « ressources en eau ».

a) Les redevances de pollution

(1) Les règles applicables dans le cas des usages domestiques de l'eau

S'agissant des usages domestiques de l'eau, la redevance de pollution est perçue, via la facture d'eau, par l'exploitant, qui la reverse ensuite à l'agence de l'eau, sur la base d'un mécanisme de contre-valeur calculé par commune.

Ce mécanisme de contre-valeur est établi à partir de la pollution communale et fondé sur un « tarif » au m 3 résultant de la division du montant global de redevance par le nombre de m 3 distribués. Comme le souligne notre collègue député Jean-Claude Flory, « la contre-valeur n'est donc pas formellement, en elle-même, une redevance, mais plutôt un mode de perception « par répartition » d'une redevance communale ».

Le mécanisme de contre-valeur

« En théorie, le principe est, rappelons-le, extrêmement simple, puisqu'il consiste :

« - 1) à déterminer une quantité journalière de pollution produite par les habitants de la commune ;

« - 2) à en déduire, par l'application des taux et coefficients ad hoc le montant annuel de redevances de la commune ;

« - et 3) à calculer, en fonction du volume d'eau potable distribué, la « contre-valeur » au m 3 qu'il convient d'appliquer dans la facturation pour générer un produit égal au montant global de redevances ainsi déterminé pour l'ensemble de la commune.

« Il est donc clair ici que la contre-valeur n'est pas une redevance stricto sensu, mais seulement un mode de perception de la redevance. Et c'est bien là que les choses se gâtent un peu, car :

« - le paradoxe (apparent) est que, si la consommation d'eau de la commune diminue, le niveau de contre-valeur augmente. Si techniquement cela n'est pas illogique (puisque le montant de redevances est le même et que rien n'indique que la quantité de pollution rejetée soit strictement proportionnelle aux volumes d'eau potable distribués...), il n'en reste pas moins que cela est difficile à expliquer ;

« - parallèlement, deux communes voisines peuvent comparer leurs niveaux de contre-valeur et se rendre compte d'écarts très significatifs : il suffit pour cela que le ratio volumes d'eau distribués/nombre d'habitants soit significativement différent, ce qui peut être lié à la présence dans une des deux communes d'un établissement « gros consommateur », ou à l'importance relative des populations saisonnières... Il est clair que le développement de l'intercommunalité s'accorde assez mal à ce type de situation ;

« - d'autre part, cette contre-valeur, bien que déterminée sur la base de la seule pollution domestique, est appliquée aux volumes distribués non seulement aux abonnés domestiques mais aussi à des établissements industriels desservis, sous certaines conditions (niveau de pollution rejeté inférieur à 200 équivalents-habitants, volume d'eau consommé inférieur à 6.000 m 3 /an).

« Et ces établissements, souvent appelés paradoxalement (mais sur des bases techniquement vraies, là encore) « non redevables » acquittent alors des sommes qui peuvent être significatives, en ayant les plus grandes difficultés à comprendre que ces sommes ne prétendent en aucune façon représenter « leur » pollution d'industriel, mais simplement une quote-part d'un système de répartition interne à une commune de la redevance de pollution domestique des habitants... ;

« - enfin, ces mêmes établissements acquittent par ce biais une contribution à une redevance qui inclut des coefficients (d'agglomération, de collecte) spécifiques. Mais dès lors que leur propre pollution rejetée s'accroîtra, par exemple par développement de leur activité, ils deviendront redevables directs de l'agence de l'eau : ils devront alors lui verser une redevance déterminée sans application des dits coefficients... qui sera peut être inférieure à la précédente (ou, plus exactement, à la somme qu'ils acquittaient précédemment sur leur facture d'eau au titre de la redevance de pollution domestique due par la commune...).

« En bref, si rien dans tout cela n'est inexplicable ni même injuste, la compréhension pratique d'un tel système et de ses subtilités reste l'apanage d'un nombre limité de connaisseurs, et en tous cas l'abonné domestique, consommateur et payeur ultime, est dans une situation qui rend assez peu lisible la perception du « signal » délivré ».

Source : extrait du rapport de notre collègue député Jean-Claude Flory, Les redevances des agences de l'eau - enjeux, objectifs et propositions dans la perspective de la réforme de la politique de l'eau, rapport au Premier ministre et à la ministre de l'écologie et du développement durable (octobre 2003)

L'assiette de ces redevances est déterminée par le nombre d'habitants agglomérés de la commune, auquel est ajouté le nombre d'habitants saisonniers (pondéré par un coefficient 0,4), le tout étant multiplié par un « coefficient d'agglomération » variant de 0,5 pour les communes de 400 habitants à 1,4 pour l'agglomération parisienne.

Les communes de moins de 400 habitants sont exonérées du paiement de la redevance.

Ce système conduit à l'estimation d'une pollution en « équivalent-habitants » . Ceci permet, par le biais de ratios forfaitaires, l'estimation d'une pollution produite exprimée suivant différents paramètres (matières en suspension, matières oxydables, matières inhibitrices, azote réduit...).

A chacun de ces paramètres est associé, dans le bassin considéré, un taux, qui peut être modulé géographiquement par le biais de coefficients de zone.

Le produit de ces taux conduit à un résultat qui, affecté d'un « coefficient de collecte », permet d'aboutir au calcul final de la redevance due par la commune.

C'est ce dernier élément qui, divisé par le nombre de m 3 distribués, permet de fixer la contre-valeur de chaque commune pour une année donnée.

Cette redevance est dite redevance « brute », c'est-à-dire avant épuration éventuelle des rejets.

En outre, les collectivités qui assurent le traitement des effluents, que ce soit à l'échelon communal ou à l'échelon intercommunal, peuvent bénéficier de primes pour épuration, suivant un principe similaire à celui applicable aux redevances, mais qui est fondé sur la mesure ou l'évaluation des quantités de pollution effectivement « éliminées », et non sur un comptage d'habitants. Par ailleurs, le coefficient de collecte n'est pas pris en compte dans ce cas.

(2) Les règles applicables aux usages non domestiques (hors agriculture)

Le dispositif retenu s'agissant des usages non domestiques de l'eau (hors agriculture) est proche de celui précédemment décrit.

L'assiette de pollution « brute » est le plus souvent déterminée à partir des « grandeurs caractéristiques » de l'activité concernée.

A chacune de ces grandeurs caractéristiques est associé un « coefficient spécifique de pollution ». Ces grandeurs caractéristiques et coefficients spécifiques sont rassemblés dans un « tableau d'estimation forfaitaire » (TEF), approuvé par arrêté ministériel.

L'assiette peut également être déterminée par mesure, soit de façon directe, soit en permettant, pour tel ou tel établissement industriel, de retenir une grandeur caractéristique et des coefficients de pollution adaptés aux types particuliers d'activités.

Les taux sont ensuite appliqués de la même façon que pour les redevances de pollution domestique.

Deux différences doivent toutefois être signalées :

- les redevances et primes pour épuration sont « contractées » en un seul résultat global, si l'industriel traite lui-même la pollution qu'il produit ;

- ni le coefficient d'agglomération, ni le coefficient de collecte n'interviennent dans le calcul, même pour les industriels redevables raccordés aux réseaux publics.

Signalons enfin que, s'agissant des pollutions liées aux effluents d'élevages, un dispositif spécifique a été introduit depuis 1994.

b) Les redevances « ressources en eau »

Alors que le mécanisme applicable aux redevances de pollution avait fait l'objet d'un certain encadrement législatif ou réglementaire, le dispositif applicable aux redevances pour prélèvement sur la ressource en eau était plus vague. Pour cette raison, les dispositifs mis en oeuvre diffèrent grandement selon les bassins.

Notre collègue député Jean Claude Flory indique que si, sur le plan des principes généraux, on trouve toujours un terme « prélèvement brut » - c'est-à-dire le volume d'eau soustrait au milieu au point de captage - et un terme « consommation nette » - c'est-à-dire le volume d'eau non restitué au milieu :

« - d'une part, les « volumes assiettes » sont, selon le cas, soit les volumes annuels, soit les volumes prélevés ou consommés pendant la période d'étiage seulement ;

« - d'autre part, des termes additionnels assortis de taux spécifiques peuvent venir majorer (parfois de façon extrêmement substantielle, et même largement majoritaire) les assiettes « de base ». Il en est fréquemment ainsi pour les termes « eau potable » particuliers ;

« - enfin, et bien que l'on se situe plutôt là dans le domaine de la « modification du régime des eaux » que dans celui du prélèvement, des dispositifs adaptés à l'usage de la force motrice de l'eau (hydroélectricité) ont pu venir, dans tel ou tel bassin, s'ajouter ».

En outre, les taux de base retenus sont eux-mêmes largement modulables géographiquement, en fonction du type de ressource sollicitée (superficielle ou souterraine), ainsi que par des coefficients d'usages dépendant de la « destination » des prélèvements.

II. LE DROIT PROPOSÉ

A. L'AXE ESSENTIEL DE LA RÉFORME : RENDRE LE DISPOSITIF CONSTITUTIONNEL

1. Le maintien du principe d'affectation des redevances aux agences

L'article L. 213-10, inséré dans le code l'environnement par le présent article, pose le principe de l'affectation des redevances aux agences de l'eau. Le droit existant est donc confirmé par le présent article.

Sept catégories de redevances sont définies : redevances pour pollution de l'eau, pour modernisation des réseaux de collecte, pour pollutions diffuses, pour prélèvements sur la ressource en eau, pour stockage d'eau en période d'étiage, pour obstacles sur les cours d'eau et pour protection du milieu aquatique.

Parmi ces catégories de redevances :

- deux existaient déjà (redevances pour pollution de l'eau et pour prélèvements sur la ressource en eau) ;

- une remplace le mécanisme de coefficient de collecte (redevance pour modernisation des réseaux de collecte) ;

- une remplace le volet « produits phytosanitaires » de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), qui abonde aujourd'hui le budget général de l'Etat (redevance pour pollutions diffuses) ;

- une se substitue à la taxe piscicole actuellement affectée au Conseil supérieur de la pêche (redevances pour protection du milieu aquatique) ;

- deux sont créées (redevances pour stockage d'eau en période d'étiage et pour obstacles sur les cours d'eau).

2. Un encadrement par le Parlement

Le présent article encadre le dispositif des redevances, en fixant pour chacune d'elles l'assiette, les plafonds de taux et les critères de modulation des taux, ce qui est nécessaire dans la mesure où les redevances constituent des impositions de toute nature.

Le dispositif ainsi proposé est plus simple que le dispositif actuel, dans la mesure où une seule assiette existera pour chaque redevance, quelle que soit l'agence, alors que ceci n'était pas le cas jusqu'à présent. Malgré cela, le dispositif prévu par le présent article demeure d'une très grande complexité.

L'exposé des motifs du présent projet de loi indique que, dans un souci de forte incitation, les agences de l'eau seront invitées à moduler les taux des redevances dans le temps ou en fonction de l'état des eaux. De même, ces taux pourront varier en fonction de la nature de l'activité du redevable, pour tenir compte des enjeux écologique et économique pour la zone géographique concernée.

B. LES REDEVANCES POUR POLLUTION DE L'EAU

En application de l'article L. 213-10-1, inséré dans le code de l'environnement par le présent article, la catégorie des redevances pour pollution de l'eau recouvre deux redevances distinctes :

- d'une part, une redevance pour pollution de l'eau d'origine non domestique ;

- d'autre part, une redevance pour pollution de l'eau d'origine domestique.

Un décret en Conseil d'Etat précisera les modalités d'application des articles relatifs à ces redevances.

1. La redevance pour pollution de l'eau d'origine non domestique

a) Les redevables

En application de l'article L. 213-10-2 du code de l'environnement, inséré par le présent article, toute personne, à l'exception des propriétaires d'immeubles à usage d'habitation , entre dans la catégorie des assujettis à la redevance pour pollution de l'eau d'origine non domestique, à la condition que ses activités entraînent le rejet d'un élément de pollution , défini par le présent article, dans le milieu naturel ou dans un réseau de collecte .

b) L'assiette

L'assiette de la redevance est la pollution annuelle rejetée dans le milieu naturel , alors qu'elle repose aujourd'hui sur la pollution produite au cours d'un jour normal du mois de rejet maximal. Cette assiette est composée de 16 éléments (cf. infra c)).

Il est précisé que cette assiette est déterminée :

- soit directement , à la demande du redevable, à partir des résultats du suivi régulier de l'ensemble des rejets par un organisme agréé par l'agence de l'eau ;

- soit indirectement , par différence entre , d'une part, un niveau théorique de pollution correspondant à l'activité en cause et, d'autre part, le niveau de pollution évitée par les dispositifs de dépollution mis en place par le redevable ou le gestionnaire du réseau collectif.

L'article L. 213-10-2 du code de l'environnement, tel qu'inséré par le présent article, explicite ces notions de « niveau théorique de pollution » et de « niveau de pollution évitée ».

Ainsi est-il précisé que le niveau théorique de pollution d'une activité est calculé sur la base de grandeurs et de coefficients caractéristiques de cette activité , déterminés à partir de campagnes générales de mesures ou d'études fondées sur des échantillons représentatifs.

La pollution évitée est, quant à elle, déterminée à partir de mesures effectuées chaque année . Une disposition est prévue pour les exploitations d'élevage : lorsque la pollution produite provient d'un épandage direct, la pollution évitée est calculée indirectement , en prenant en compte la qualité des méthodes de récupération des effluents et des plans d'épandage.

c) Les plafonds de tarifs et les seuils

(1) Les tarifs maximum et les seuils fixés par le présent article

Le III du nouvel article L. 213-10-2 inséré dans le code de l'environnement par le présent article décrit, pour chacun des 16 éléments constitutifs de la pollution formant l'assiette de cette redevance, le tarif maximum de la redevance et le seuil en dessous duquel celle-ci n'est pas due.

Le tableau qui suit retrace ces différentes données.

Tableau récapitulatif des tarifs maximum et des seuils fixés pour chaque élément constitutif de la pollution formant l'assiette de la redevance

Source : présent projet de loi

Les éléments physiques, chimiques et biologiques générateurs de pollution mentionnés par le présent article sont, pour la plupart, déjà retenus dans les textes réglementaires actuellement applicables, en particulier l'arrêté du 28 octobre 1975 31 ( * ) . Certains d'entre eux sont mentionnés dans la directive cadre sur l'eau du 23 octobre 2000.

Le présent projet de loi fait toutefois référence à deux nouveaux paramètres :

- les sels solubles évalués à partir de la conductivité des effluents ;

- la quantité de chaleur apportée, lorsque la température des rejets excède la température des eaux réceptrices, cette formule concernant aussi bien les rejets en mer qu'en rivière. Le ministère de l'écologie et du développement durable précise que l'introduction de ce paramètre, qui vise les centrales thermiques et les entreprises industrielles, se justifie par la prise en compte des conséquences des rejets de chaleur sur les milieux aquatiques, l'élévation de la température des eaux ayant des effets de synergie avec d'autres pollutions et en augmentant les impacts sur les écosystèmes.

Une disposition spécifique est prévue pour les élevages. En effet, l'élément d'assiette est alors l'azote oxydé épandable produit par les animaux. Le seuil en dessous duquel la redevance n'est pas due est fixé à 8.500 kg, ce seuil correspondant à environ 100 unités de gros bétail. En dessous de ce seuil, la redevance pour pollution de l'eau d'origine domestique s'appliquerait. Le tarif est en revanche inchangé.

(2) Les possibilités de modulation des tarifs

Des possibilités de modulation des tarifs sont également ouvertes par le présent article.

Ainsi, il est prévu que, pour chaque élément d'assiette, le tarif de la redevance est fixé par unité géographique cohérente.

La notion d'« unité géographique cohérente »

L'« unité géographique cohérente » à laquelle il est fait référence pour la fixation des taux des redevances est définie en tenant compte de quatre critères :

- l'état des masses d'eaux ;

- les risques d'infiltration ou d'écoulement des polluants dans les masses d'eau souterraines ;

- les prescriptions imposées au titre de la police de l'eau ou relatives à l'eau au titre d'une autre police ;

- les objectifs fixés par le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) et le schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) s'il existe, notamment lorsqu'ils exigent la mise en place d'un programme d'intervention et de concours financiers spécifiques.

2. La redevance pour pollution de l'eau d'origine domestique

a) Les redevables

Le champ des assujettis à la redevance pour pollution de l'eau d'origine domestique est, pour partie, défini par opposition à celui des assujettis à la redevance pour pollution de l'eau d'origine non domestique.

Ainsi, l'article L. 213-10-3, inséré dans le code de l'environnement par le présent article, prévoit que tout abonné au service public de distribution d'eau, à l'exception des personnes assujetties à la redevance pour pollution de l'eau d'origine non domestique, est assujetti à la redevance pour pollution de l'eau d'origine domestique.

b) L'assiette

L'assiette de cette redevance est plus simple que celle de la redevance précédente. Il s'agit du volume d'eau annuel facturé à l'abonné .

Une restriction est toutefois prévue : les volumes d'eau utilisés pour l' abreuvement des animaux ne sont pas pris en compte pour la détermination de cette assiette, dès lors qu'ils font l'objet d'un comptage spécifique.

c) Le taux plafond et les possibilités de modulation

Le III de l'article L 213-10-3 précité plafonne à 0,5 €/m 3 le taux que l'agence de l'eau peut fixer.

Comme pour la redevance pour pollution de l'eau d'origine non domestique, ce taux est fixé par unité géographique cohérente , celle-ci étant définie en tenant des quatre critères précédemment mentionnés.

d) Les modalités de perception

Le IV de l'article L. 213-10-3 précité précise que la redevance est perçue auprès de l'exploitant du service public de distribution d'eau par l'agence de l'eau et qu'elle est exigible à l'encaissement du prix.

C. LES REDEVANCES POUR MODERNISATION DES RÉSEAUX DE COLLECTE

La catégorie des redevances pour modernisation des réseaux de collecte se compose de deux redevances distinctes .

La première redevance touche les assujettis à la redevance pour pollution de l'eau d'origine non domestique, dont les activités entraînent des rejets d'eaux usées dans un réseau public de collecte. Cette redevance est donc moins large que la redevance pour pollution dans la mesure où elle ne concerne pas les personnes dont les activités entraînent un rejet polluant dans le milieu naturel.

La seconde redevance s'applique aux gestionnaires des réseaux publics d'assainissement collectif.

Il est prévu qu'un décret en Conseil d'Etat précise les modalités d'application des dispositions relatives à ces redevances.

1. La redevance applicable aux redevables de la redevance pour pollution de l'eau d'origine non domestique

a) L'assiette de la redevance

Cette redevance est assise sur les volumes d'eau déversés dans les réseaux publics de collecte.

b) Le taux

Le taux de cette redevance est fixé par l'agence de l'eau en fonction des priorités et des besoins de financement de leur programme pluriannuel d'intervention 32 ( * ) .

Une double limite est prévue :

- d'une part, le présent article fixe un plafond de 0,15 €/m 3 ;

- d'autre part, le taux fixé par l'agence de l'eau ne peut être supérieur à la moitié du taux de la redevance pour modernisation des réseaux de collecte applicable aux gestionnaires des réseaux publics d'assainissement collectif.

En outre, il est précisé que le taux de la redevance peut être dégressif, par tranches, en fonction des volumes rejetés.

2. La redevance applicable aux gestionnaires des réseaux publics d'assainissement collectif

a) L'assiette

La redevance applicable aux gestionnaires des réseaux publics d'assainissement collectifs est assise sur les volumes d'eau pris en compte pour le calcul de la redevance d'assainissement.

En sont toutefois exclus les volumes d'eau retenus pour le calcul de l'assiette de la première redevance pour modernisation des réseaux de collecte (applicable aux assujettis à la redevance pour pollution de l'eau d'origine non domestique).

Cette disposition évite une double taxation d'un même élément d'assiette.

b) Le taux

Comme pour la première redevance pour modernisation des réseaux de collecte, le taux de cette redevance est fixé par l'agence de l'eau en fonction des priorités et des besoins de financement de son programme pluriannuel d'intervention.

Le présent article plafonne toutefois ce taux à 0,30 €/m 3 . Ce plafond est le double de celui fixé pour la première redevance pour modernisation des réseaux de collecte, ce qui est nécessaire compte tenu des limites fixées pour le taux de cette première redevance.

D. LA REDEVANCE POUR POLLUTIONS DIFFUSES

Cette redevance , définie par le nouvel article L. 213-10-8, inséré dans le code de l'environnement par le présent article, remplace le volet « produits phytosanitaires » de la TGAP. Comme c'est le cas pour les autres redevances, un décret en Conseil d'Etat précisera les modalités d'application du présent article.

La TGAP sur les produits phytosanitaires

La TGAP sur les produits phytosanitaires est due par toute personne qui livre pour la première fois après fabrication nationale, qui livre sur le marché intérieur après achat, importation ou fabrication dans un autre Etat membre de la Communauté européenne ou qui met à la consommation des produits antiparasitaires à usage agricole ou des produits assimilés.

Le fait générateur de la taxe est constitué par la première livraison après fabrication nationale, la livraison sur le marché intérieur après achat, importation ou fabrication dans un autre Etat membre de la Communauté européenne ou la mise à la consommation des produits antiparasitaires à usage agricole ou des produits assimilés dans la composition desquels entrent des substances classées dangereuses.

La taxe est assise sur le poids des substances classées dangereuses entrant dans la composition des produits antiparasitaires à usage agricole ou des produits assimilés.

Ces substances classées dangereuses sont réparties en sept catégories, affectées d'un taux unitaire spécifique en fonction de leurs caractéristiques écotoxicologiques et toxicologiques.

1. Les assujettis

La redevance pour pollutions diffuses concernera les personnes qui distribuent des produits antiparasitaires à usage agricole qui ne peuvent être mis sur le marché sans autorisation spécifique , en application de l'article L. 253-1 du code rural. Sont ainsi visés six types de produits :

-les antiseptiques et les anticryptogamiques destinés à la protection des cultures et des matières végétales ;

- les herbicides ;

- les produits de défense contre les vertébrés et invertébrés nuisibles aux cultures et aux produits agricoles ;

- les adjuvants vendus seuls ou en mélange et destinés à améliorer les conditions d'utilisation des trois catégories de produits précédemment mentionnées ;

- les produits de défense des végétaux contre les attaques bactériennes et virales, ainsi que tout produit autre que les matières fertilisantes et les supports de culture, destinés à exercer une action sur les végétaux et sur le sol ;

- enfin, les produits utilisés en agriculture et destinés à la lutte contre des organismes animaux ou végétaux vecteurs de maladies humaines ou animales, à l'exception des médicaments.

Ne sont toutefois visées que les personnes qui distribuent ces produits en vertu d'un agrément particulier , prévu par l'article L. 254-1 du code rural, ce qui implique que ces produits soient classés dans les catégories toxique, très toxique, cancérigène, mutagène, tératogène et dangereuse pour l'environnement .

2. L'assiette

L'assiette de la redevance est constituée par la somme des quantités de substances dangereuses contenues dans les produits précédemment mentionnés.

Il est précisé que la liste de ces substances dangereuses comprend les substances dangereuses pour les travailleurs , définies en application des dispositions de l'article L. 231-7 du code du travail, dès lors qu'elles présentent un caractère toxique ou écotoxique. Cette liste est arrêtée par décret en Conseil d'Etat.

3. Le taux

Le taux de la redevance est fixé par l'agence de l'eau, en fonction de la teneur des eaux du bassin en résidus de produits antiparasitaires .

Une limite est toutefois fixée : le taux ne peut excéder 1,2 euro par kilogramme de substances dangereuses contenues dans ces produits antiparasitaires. Ce taux a été fixé afin de permettre aux agences de percevoir environ 40 millions d'euros de recettes à ce titre, soit sensiblement l'équivalent du produit de l'actuelle TGAP sur les produits phytosanitaires (36 millions d'euros).

4. Les dispositions relatives au recouvrement

L'article L. 213-10-8 précité prévoit que cette redevance est exigible lors de la vente à l'utilisateur final des produits antiparasitaires visés par cet article.

Il est précisé que les distributeurs font apparaître le montant de la redevance acquittée au titre du produit distribué sur leurs factures et qu'ils tiennent à la disposition des agences de l'eau un registre des destinataires de ces factures, ainsi que des montants de redevance correspondants.

E. LES REDEVANCES POUR PRÉLÈVEMENTS SUR LA RESSOURCE EN EAU

Le présent article insère dans le code de l'environnement un nouvel article L. 213-10-9 qui fixe les règles relatives à la redevance pour prélèvements sur la ressource en eau. Celle-ci se subdivise en deux catégories :

- la redevance « normale » ;

- les redevances qui obéissent à des modalités de calcul spécifiques.

Comme pour les autres redevances, un décret en Conseil d'Etat précisera les modalités d'application de ces dispositions.

1. La redevance « normale »

a) Les assujettis

La définition des assujettis à cette redevance est simple : est concernée, sous réserve des exceptions concernant l'assiette, toute personne dont les activités entraînent un prélèvement sur la ressource en eau.

b) L'assiette

L'assiette de la redevance est constituée par le volume d'eau prélevé au cours d'une année.

Quatre catégories de prélèvements sont toutefois exonérées de cette redevance :

- les prélèvements effectués en mer ;

- les exhaures de mines dont l'activité a cessé, ainsi que les prélèvements rendus nécessaires par l'exécution de travaux souterrains et les prélèvements effectués lors d'un drainage réalisé en vue de maintenir à sec des bâtiments ou des ouvrages ;

- les prélèvements liés à l'aquaculture ;

- les prélèvements liés à la géothermie.

En outre, un seuil d'application de la redevance est prévu. Celui-ci n'est pas défini strictement par le présent projet de loi : en effet, l'article L. 213-10-9 précité précise qu'il appartient à l'agence de l'eau de déterminer le seuil de prélèvement en dessous duquel la redevance n'est pas due.

Le présent projet de loi se contente de fixer un seuil maximal, qui varie selon la catégorie de la ressource :

- les montants en cause ne peuvent être supérieurs à 10.000 m 3 par an pour les prélèvements dans des ressources de catégorie 1, c'est-à-dire lorsqu'elles sont situées hors des zones de répartition des eaux ;

- ils ne peuvent excéder 7.000 m 3 par an pour des prélèvements dans des ressources de catégorie 2, c'est-à-dire lorsqu'elles sont situées dans des zones de répartition des eaux 33 ( * ) .

Ce système est applicable uniquement si le redevable procède à la mesure de ses prélèvements sur la ressource en eau. Si tel n'est pas le cas, l'article L. 213-10-9 précité prévoit la possibilité de fixer une assiette forfaitaire. La redevance est alors assise « sur un volume forfaitaire calculé en prenant en compte des grandeurs caractéristiques de l'activité en cause déterminées à partir de campagnes générales de mesure ou d'études fondées sur des échantillons représentatifs ».

d) Les tarifs maximum

L'article L. 213-10-9 précité prévoit que la fixation du tarif de la redevance dépend de la catégorie à laquelle se rattachent les ressources en eau de chaque bassin.

Le tarif de la redevance est fixé par l'agence de l'eau, en centimes d'euro par mètre cube, en fonction des différents usages auxquels donnent lieu les prélèvements. Les plafonds fixés par le présent projet de loi sont les suivants :

Tarifs maximum applicables à la redevance « normale » pour prélèvements sur la ressource en eau, en fonction des usages et de la catégorie à laquelle se rattache cette ressource en eau

(en centimes d'euro par mètre cube)

Une exception est toutefois prévue lorsque le prélèvement pour l'irrigation est effectué de manière collective.

Dans ce cas, le taux est minoré lorsque le prélèvement est opéré sur une ressource de catégorie 2 : le taux défini pour les ressources de catégorie 1 s'applique.

2. Les redevances obéissant à des règles spécifiques de calcul

Le VI de l'article L. 213-10-9 précité prévoit des modalités spécifiques de calcul de la redevance dans trois cas.

a) Lorsque le prélèvement est destiné à plusieurs usages

La redevance est alors calculée au prorata des volumes utilisés pour chaque usage.

b) Lorsque le prélèvement est destiné à l'alimentation d'un canal

La redevance est alors assise sur le montant du prélèvement opéré, déduction faite des volumes prélevés dans le canal et soumis à cette redevance.

En outre, il est précisé que les volumes prélevés pour alimenter un canal en vue de la préservation d'écosystèmes aquatiques ou de sites et de zones humides sont déduits de l'assiette de la redevance.

c) Lorsque le prélèvement est destiné au fonctionnement d'une installation hydroélectrique

L'assiette de la redevance est alors la suivante :

volume d'eau turbiné dans l'année (en m 3 ) hauteur totale de chute brute de l'installation telle qu'elle figure dans son titre administratif (en mètres)

Le taux de la redevance est fixé par l'agence de l'eau en fonction de l'état des masses d'eau et des objectifs fixés par le SDAGE et le SAGE s'il existe.

Un plafond est toutefois prévu. Le tarif de la redevance ne peut excéder 60 centimes d'euro par million de mètres cubes et par mètre.

Un cas particulier est prévu lorsque l'installation ne fonctionne pas au fil de l'eau : le taux est alors multiplié par 1,5.

Enfin, un seuil est prévu en dessous duquel la redevance ne s'applique pas : celle-ci n'est pas due lorsque le volume d'eau turbiné dans l'année est inférieur à un million de mètres cubes.

F. LA REDEVANCE POUR STOCKAGE D'EAU EN PÉRIODE D'ÉTIAGE

Le présent article insère dans le code de l'environnement un article L. 13-10-10 qui définit la redevance pour stockage d'eau en période d'étiage. Un décret en Conseil d'Etat précisera ces dispositions.

1. Les assujettis

La redevance pour stockage d'eau en période d'étiage serait due par toute personne qui dispose d'une installation de stockage de plus d'un million de mètres cubes et qui procède au stockage de tout ou partie du volume écoulé dans un cours d'eau en période d'étiage. On rappellera que l'étiage est le niveau moyen le plus bas d'un cours d'eau.

La définition de la « période d'étiage » est au coeur de la construction de cette redevance. L'article L. 213-10-10 précité prévoit qu'elle est fixée dans chaque bassin par l'agence de l'eau, en fonction du régime des cours d'eau.

2. L'assiette

L'assiette de la redevance est constituée par le volume d'eau stocké pendant la période d'étiage.

Il est précisé que ce volume est égal à la différence entre le volume stocké en fin de période et le volume stocké en début de période.

Une exception est, en outre, prévue. Ainsi, les volumes stockés lors des crues supérieures à la crue de fréquence quinquennale et déstockés dans un délai de trente jours à compter de la date à laquelle la crue atteint son maximum ne sont pas pris en compte pour le calcul de l'assiette de la redevance.

3. Le taux

Le taux de la redevance, fixé par l'agence de l'eau, ne peut excéder un centime d'euro par mètre cube stocké.

G. LA REDEVANCE POUR OBSTACLE SUR LES COURS D'EAU

Le présent article insère dans le code de l'environnement un nouvel article L. 213-10-11 qui définit la redevance pour obstacles sur les cours d'eau. Un décret en Conseil d'Etat précisera les modalités d'application de ces dispositions.

1. Les assujettis

Cette redevance pour obstacle sur les cours d'eau est due par toute personne possédant un ouvrage constituant un obstacle continu joignant les deux rives d'un cours d'eau.

Une exception est toutefois prévue : les propriétaires d'ouvrages faisant partie d'installations hydroélectriques assujettis à la redevance pour prélèvements sur la ressource en eau seront en effet exonérés de cette redevance. Cette disposition permet d'éviter une double taxation d'une même installation.

2. L'assiette

L'assiette de cette redevance pour obstacle sur les cours d'eau est la suivante :

dénivelée entre la ligne d'eau à l'amont de l'ouvrage et la ligne d'eau à l'aval (en mètres) coefficient de débit du tronçon de cours d'eau au droit de l'ouvrage coefficient d'entrave

L'article L. 213-10-11 précité précise le calcul des deux coefficients mentionnés :

- le coefficient de débit varie en fonction du débit moyen interannuel du tronçon de cours d'eau considéré. Il est compris entre 0,3 pour les tronçons dont le débit moyen interannuel est inférieur à 0,3 mètre cube par seconde et 40 pour les tronçons dont le débit moyen interannuel est supérieur ou égal à 1.000 mètres cubes par seconde.

- le coefficient d'entrave varie entre 0,3 et 1, en fonction de l'importance de l'entrave apportée par l'obstacle au transport sédimentaire et à la circulation des poissons, ainsi que l'expose le tableau suivant :

Tableau récapitulatif des coefficients d'entrave

Deux cas d'exonération de la redevance sont prévus :

- si la dénivelée entrant dans le calcul de l'assiette est inférieure à 5 mètres ;

- si les obstacles sont situés dans des cours d'eau dont le débit moyen est inférieur à 0,3 m 3 /s.

3. Le taux

Comme c'est le cas pour les autres redevances, l'article L. 213-10-11 précité prévoit que le taux de la redevance est fixé par l'agence de l'eau.

Cet article se contente de fixer un plafond : le taux de cette redevance ne pourra excéder 150 euros par mètre par unité géographique cohérente.

Il est précisé que cette unité géographique cohérente est définie « en tenant compte de l'impact des ouvrages qui y sont localisés sur le transit sédimentaire et sur la libre circulation des organismes aquatiques ».

H. LA REDEVANCE POUR PROTECTION DU MILIEU AQUATIQUE

Le présent article insère enfin dans le code de l'environnement un article L. 213-10-12, qui définit la redevance pour protection du milieu aquatique. Contrairement à ce qui est prévu pour les autres redevances, aucun décret en Conseil d'Etat n'est envisagé pour préciser les modalités d'application de ces dispositions.

Cette redevance remplace la taxe piscicole auparavant affectée au Conseil supérieur de la pêche.

La taxe piscicole

La taxe piscicole est une taxe affectée au Conseil supérieur de la pêche.

Elle est régie par les dispositions de l'article L. 436-1 du code de l'environnement, qui dispose que « toute personne qui se livre à l'exercice de la pêche doit justifier de sa qualité de membre d'une association agréée de pêche et de pisciculture ou d'une association agréée de pêcheurs amateurs aux engins et aux filets sur les eaux du domaine public, ou d'une association agréée de pêcheurs professionnels et avoir versé, en sus de sa cotisation statutaire, une taxe annuelle, dont le produit est affecté aux dépenses de surveillance et de mise en valeur du domaine piscicole national ».

L'article L. 436-3 du même code prévoit que la taxe piscicole est collectée par les fédérations départementales des associations agréées de pêche et de pisciculture et les associations agréées de pêcheurs professionnels. Son produit est centralisé par le Conseil supérieur de la pêche, en application de l'article L. 434-1.

Le taux de la taxe piscicole pour l'année 2005 a été fixé par le décret n° 2004-1414, qui modifie l'article R. 236-1 du code de l'environnement, selon les modalités suivantes :

Pour la pêche de loisir :

Pour la pêche professionnelle :

Les conditions de perception et de centralisation de la taxe piscicole sont régies par les dispositions d'un arrêté interministériel du 27 mars 1972.

1. Les assujettis

La redevance pour protection du milieu aquatique est due par les personnes qui se livrent à l'exercice de la pêche au sein d'une association agréée de pêche et protection du milieu aquatique, d'une association agréée de pêcheurs amateurs aux engins et filets, de la commission syndicale de la Grande Brière et des comités départementaux ou interdépartementaux de la pêche professionnelle en eau douce.

2. L'assiette et les tarifs

Le tarif de la redevance sera fixé chaque année par les agences de l'eau. L'article L. 213-10-12 précité fixe cinq plafonds différents en fonction de la nature des activités de pêche ou de l'âge des personnes concernées :

- 10 euros par personne de plus de 18 ans qui se livre à l'exercice de la pêche, pendant une année, au sein d'une association agréée de pêche et protection du milieu aquatique ou de pêcheurs amateurs aux engins et filets ;

- 4 euros par personne de moins de 18 ans qui se livre à l'exercice de la pêche dans les mêmes conditions ;

- 4 euros par personne, quel que soit son âge, qui se livre à l'exercice de la pêche, pendant quinze jours consécutifs entre le 1 er juin et le 30 septembre, au sein d'une des associations précédemment mentionnées ;

- 1 euro par personne, quel que soit son âge, qui se livre à l'exercice de la pêche, à la journée, au sein d'une des associations précédemment mentionnées ;

- par rapport aux tarifs précédents, 20 euros de supplément par personne qui se livre à l'exercice de la pêche de l'alevin d'anguille, du saumon et de la truite de mer au sein d'une des associations précédemment mentionnées.

3. Le mode de collecte

L'article L. 213-10-12 précité fixe également le mode de collecte de cette redevance. Ainsi, celle-ci sera collectée par les fédérations départementales des associations agréées de pêche et protection du milieu aquatique, par les associations agréées de pêcheurs amateurs aux engins et filets, par la commission syndicale de la Grande Brière et par les comités départementaux ou interdépartementaux de la pêche professionnelle en eau douce.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. UN DISPOSITIF JURIDIQUE PLUS SOLIDE MAIS QUI RESTE D'UNE GRANDE COMPLEXITÉ

Ainsi qu'il a été dit précédemment, le présent article répond à la nécessité de rendre constitutionnel le dispositif des redevances, qui, quoique leur appellation n'ait pas été modifiée, constituent des impositions de toute nature. Le présent article remplit son objectif, dans la mesure où le législateur « épuise » sa compétence tout en permettant des adaptations locales en fonction des spécificités propres à chaque bassin. Les fondements de la loi précitée du 16 décembre 1964, auxquels l'ensemble des acteurs sont attachés, sont ainsi préservés.

Quel impact sur le prix de l'eau ?

L'étude d'impact du présent projet de loi présente une simulation de l'impact des redevances sur le prix de l'eau, en se basant sur un échantillon de communes. Il faut toutefois préciser que ces simulations ne constituent qu'une hypothèse, le résultat final dépendant des taux qui seront arrêtés par les conseils d'administration des agences de l'eau, sur avis conforme des comités de bassin.

L'analyse du ministère de l'écologie et du développement durable met en évidence les points suivants :

1. Pour les habitants des communes de plus de 10.000 habitants de l'échantillon de collectivités retenues :

- 75 % des habitants des principales villes connaîtraient une baisse des redevances, les augmentations constatées y étant moins marquées que les diminutions ;

- pour la moitié des villes de l'échantillon, la redevance nette diminue de plus de 7 %.

Ce même constat peut également être fait pour les villes moyennes (de 10.000 à 50.000 habitants), les diminutions de la redevance nette étant encore plus marquées ;

2. Pour les habitants des communes de moins de 10.000 habitants, on constate :

- pour les habitants des villes de plus de 2.000 habitants, une stabilité globale : les communes connaissant une diminution de leur redevance sont aussi nombreuses que celles voyant une augmentation ;

- et pour les habitants des plus petites communes (moins de 2.000 habitants), une croissance du montant de la redevance nette pour 80 % d'entre elles. Plus de la moitié de ces communes enregistre des hausses de plus de 45 %. Dans la pratique, les habitants des petites communes bénéficiaient d'un coefficient de réduction des redevances de 50 %, voire étaient totalement exonérés dans les communes de moins de 400 équivalents-habitants. Ces différences de traitement entre habitants de communes voisines n'étaient plus justifiées par des différences liées à la pollution rejetée et ne pouvaient donc être maintenues.

3. Environ 80 % des communes touristiques verraient leur redevance nette diminuer et pour la moitié de ces communes, la baisse serait supérieure à 15 %. Il convient de noter que pour ces communes, sauf disposition spécifique, le montant de la prime versée pourrait être supérieur au montant de la redevance pollution brute (compte tenu des faibles consommations d'eau par les saisonniers).

Source : étude d'impact du présent projet de loi, évaluation de l'impact de la réforme des redevances des agences de l'eau

S'il y a lieu de se satisfaire de cet objectif général, il reste que le mécanisme proposé demeure particulièrement complexe. On peut, en particulier, s'interroger sur la pertinence d'instituer une redevance pour modernisation des réseaux de collecte, en remplacement du coefficient de collecte modulant actuellement la redevance appliquée à la pollution domestique, dans la mesure où cette redevance n'opère, en tant que telle, aucune internalisation de coût : le coût des pollutions est internalisé par les redevances pollution et celui des prélèvements par les redevances pour prélèvement sur la ressource en eau. Cette remarque amène à s'interroger plus largement sur le caractère incitatif, d'un point de vue écologique, de la réforme fiscale proposée .

B. UN DÉBAT SUR LA RÉPARTITION DES REDEVANCES QUI DEMEURE

1. Un système de redevances actuellement faiblement incitatif

L'une des questions essentielles liée à la réforme proposée concerne en effet, la finalité des redevances affectées aux agences de l'eau. Ainsi qu'il a été dit précédemment, celles-ci ont, avant tout, été conçues pour être un moyen de mutualiser le financement. Comme le notait la Cour des comptes dans son rapport public 2003, « davantage que des instruments de taxation des rejets polluants ou des prélèvements dans les aquifères, elles ont été conçues comme des contributions permettant de financer les aides accordées pour les travaux d'intérêt commun aux bassins ».

Cette analyse s'applique à la répartition de la charge fiscale entre les différents contribuables. A cet égard, on remarque que les agriculteurs, qui sont à l'origine d'une pollution importante, sont de faibles contributeurs aux agences de l'eau, puisque leur contribution au financement des agences ne représente aujourd'hui que 1,2 % du montant total des redevances, comme le montre le tableau suivant.

2. Une réforme qui devrait maintenir assez largement les équilibres actuels

a) Les simulations générales effectuées par le ministère de l'écologie et du développement durable

De ce point de vue, la réforme proposée par le présent article ne paraît pas de nature à modifier réellement les grands équilibres actuels ni à rendre le dispositif des redevances très incitatif.

L'étude d'impact du présent projet de loi est au demeurant assez claire de ce point de vue : « une différence importante par rapport au texte de 2002 est le choix de solutions pragmatiques et concertées, en abandonnant l'illusion de bâtir, avec une fiscalité compliquée et punitive, un système d'incitation forte pour changer les comportements individuels des redevables ».

Le tableau qui suit retrace l'évolution attendue des redevances dues par catégorie d'usagers. Comme le précise le ministère de l'écologie et du développement durable, ces simulations ont pour objet de vérifier la faisabilité d'une hypothèse de recettes reconduisant la moyenne actualisée des recettes nettes du huitième programme et maintenant ainsi la capacité de financement des agences de l'eau. Les recettes nouvelles sont intégrées dans le montant ainsi calculé, venant alléger la charge des autres usagers, en particulier des usagers domestiques.

Tableau de synthèse des évolutions des redevances par catégorie d'usagers

(en millions d'euros 2006)

Catégorie d'usagers

Moyenne annuelle du 8 ème programme

Simulation 2007 (hors compensation du FNDAE)

Evolution

Remarques

Usagers domestiques

Dont pollution

Dont ressource

1.164

951

213

1.102

893

209

- 62

- 58

- 4

Production électricité

Dont thermique

Dont ressource

36,9

36,9

43,6

5,8

37,8

+ 6,7

+ 5,8

+ 0,9

Canaux (ressource)

0,03

1,72

+ 1,7

Autres industries

Dont pollution

Dont thermique

Dont ressource

134

102

0

32

138,4

105,5

0,7

32,2

+ 4,4

+ 3,5

+ 0,7

+ 0,2

Agriculture

Pollution

ressource

17,9

5,9

12

58,6

45,6

13

+ 40,7

+ 39,7

+1


Suppression de la TGAP phytosanitaire

Milieux

0

12

+ 12

Suppression de la taxe piscicole

Total général

1.352

1.356

+ 4

Source : ministère de l'écologie et du développement durable, évaluation de l'impact de la réforme des redevances des agences de l'eau, étude d'impact jointe au présent projet de loi

b) Des conséquences qui dépendront des décisions des agences de l'eau

En pratique, l'étude d'impact jointe au présent projet de loi montre que les industries raccordées aux réseaux publics d'assainissement devraient voir leur contribution augmenter, notamment en raison de la substitution au mécanisme de coefficient de collecte de la redevance pour modernisation des réseaux de collecte.

Elle précise également, d'une part, que le dispositif de redevance pour pollution domestique est élargi aux habitants des zones d'assainissement non collectif, d'autre part, que toutes les catégories d'usagers raccordés à l'assainissement collectif qui consomment beaucoup d'eau et qui réaliseront des économies d'eau verront le produit de la redevance de collecte baisser.

Par ailleurs, la contribution des agriculteurs devrait également croître pour passer de 1 % à 4 % du total. Il faut préciser que cette croissance résulte en partie d'un changement de périmètre, dans la mesure où le produit de la TGAP était auparavant affecté à l'Etat, alors que le produit de la redevance pour pollution diffuse sera affecté aux agences à l'avenir. Le ministère de l'écologie et du développement durable précise toutefois que la contribution des agriculteurs devrait être plus directe, dans la mesure où le présent article précise que les distributeurs devront faire apparaître le montant de la redevance acquittée sur leurs factures.

De manière générale, toutefois, il est à ce stade difficile d'avoir une vision précise des conséquences de la présente réforme, dans la mesure où celles-ci dépendront des taux qui seront fixés par les agences de l'eau, sur avis conforme des comités de bassin, et des dispositions figurant dans les décrets d'application.

c) Des transferts de charges qui sont encadrés

L'absence de bouleversement des grands équilibres ne signifie pas que des transferts de charges entre telle ou telle catégorie d'acteurs ne seront pas observés. L'étude d'impact du présent projet de loi montre d'ailleurs que certaines entreprises pourraient connaître des variations extrêmement importantes de leurs redevances : les industries chimiques les plus touchées pourraient, par exemple, voir leurs redevances multipliées par trois, certaines industries de métallurgie par six. D'autres pourraient, en revanche, connaître des baisses substantielles. De même, la réforme de la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau devrait avoir des conséquences contrastées, amenant, selon l'étude d'impact, « une différenciation croissante des montants des redevances en fonction de la disponibilité de la ressource en eau utilisée ».

Votre rapporteur pour avis estime nécessaire que la situation des différentes entreprises soit analysée avec attention avant la mise en oeuvre de la réforme, afin d'éviter de fragiliser le tissu économique . Des mesures sectorielles d'accompagnement devront être envisagées pour les industries, notamment dans la métallurgie et la chimie, qui sont par ailleurs exposées à la concurrence dans le cadre de la mondialisation.

Signalons par ailleurs que l'article 48 du présent projet de loi lisse, jusqu'en 2010, les conséquences qui pourraient résulter de la présente réforme des redevances.

En effet, il prévoit que, pour chacune des années 2007, 2008, 2009 et 2010, il est procédé à la comparaison entre les sommes qui auraient été dues par un contribuable au titre de chaque année en application des dispositions applicables aux redevances de l'eau avant l'entrée en vigueur de la présente loi et celles qui sont dues en application du présent article.

Il précise que, si cette comparaison fait apparaître une augmentation ou une diminution supérieure ou égale à 20 % au titre de 2007, à 40 % au titre de 2008, à 60 % au titre de 2009 et à 80 % au titre de 2010, l'augmentation ou la diminution est ramenée à hauteur de ces taux.

d) L'absence d'une taxation spécifique des engrais

L'élément le plus symbolique du rééquilibrage modéré opéré par le présent projet de loi reste l' absence d'instauration d'un dispositif spécifique de taxation des nitrates , qui contribuent pourtant grandement à la pollution des sols. Le ministre de l'écologie et du développement durable, M. Serge Lepeltier, a toutefois indiqué devant la commission des affaires économiques du Sénat que le gouvernement n'avait pas retenu le principe d'une redevance sur les engrais, considérant que son efficacité économique et écologique était loin d'être démontrée et qu'elle pourrait même être perçue comme un droit à polluer. Il a estimé que la conditionnalité des aides de la politique agricole commune exigée depuis le 1 er janvier 2005 constituait le meilleur outil environnemental afin de favoriser le respect des règles communautaires sur les nitrates. Votre rapporteur pour avis portera une attention particulière à cette réforme et à ses effets .

On notera, par ailleurs, que la possibilité de faire varier le taux des redevances pour prélèvements sur la ressource en eau en fonction des usages ne respecte pas le principe pollueur-payeur, même si elle permet, en revanche, de tenir compte de la capacité contributive des personnes et de ne pas fragiliser l'équilibre économique du monde agricole. Il en va ainsi, notamment, de la différence de taux prévue entre l'usage « alimentation en eau potable » et l'usage « irrigation ». Votre rapporteur pour avis vous proposera de réduire l'écart de taux de la redevance pour prélèvements sur la ressource en eau fixé pour ces deux usages.

De même, il vous proposera de rendre plus incitative la redevance pour pollutions diffuses, en prévoyant une gradation du taux de la redevance en fonction du degré de danger présenté par les substances entrant dans la composition des produits phytosanitaires.

C. LA BAISSE DE LA FICALITÉ LIÉE À L'EXERCICE DE LA PÊCHE

On peut, par ailleurs, s'interroger sur le taux de la redevance pour protection du milieu aquatique, fixé par le présent article à un niveau très bas par rapport au tarif de la taxe piscicole actuelle (10 euros contre 28 euros pour une personne majeure prenant une cotisation annuelle).

Le ministère de l'écologie et du développement durable a indiqué à votre rapporteur pour avis que cette évolution est liée à la création de l'ONEMA, qui ne s'occuperait plus de pêche comme le fait actuellement le Conseil supérieur de la pêche (CSP).

Des missions d'intérêt général, dont certaines sont actuellement de la compétence du Conseil supérieur de la pêche, relèveront ainsi à l'avenir de la fédération nationale et des fédérations départementales de pêche. Sont notamment concernées les missions de gestion du milieu aquatique (entretien de rivière, aménagement de zones de frayères, réempoissonnement à partir de souches locales...), la surveillance du patrimoine piscicole ainsi que des actions de formation et d'éducation à l'environnement.

La différence entre les 28 euros actuels et le montant de la redevance pour protection du milieu aquatique serait ainsi justifiée par l'évaluation des coûts de ces missions d'intérêt général, l'objectif général de la réforme étant de ne pas augmenter le coût global de la licence de pêche. Votre rapporteur pour avis estime que cet objectif doit être tenu.

Sous ces réserves, votre rapporteur pour avis vous présentera quelques amendements rédactionnels visant à clarifier la rédaction du texte proposé par le présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'émettre un avis favorable sur cet article ainsi modifié.

ARTICLE 38

Obligations déclaratives, contrôle et modalités de recouvrement des redevances

Commentaire : le présent article précise les obligations déclaratives, le contrôle et les modalités de recouvrement des redevances des agences de l'eau.

I. LE DROIT EXISTANT

Les dispositions relatives au recouvrement des redevances sont actuellement d'ordre réglementaire et, de manière générale, fort peu détaillées.

Les dispositions actuelles résultent :

- du décret n° 66-700 du 14 septembre 1966 relatif aux agences financières de bassin créées par l'article 14 de la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 ;

- du décret n° 75-996 du 28 octobre 1975 portant application des dispositions de l'article 14-1 de la loi modifiée du 16 décembre 1964 relative à au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution.

Il est ainsi prévu que tout redevable est tenu des fournir à l'agence les renseignements nécessaires à l'établissement de la redevance et que l'agence est habilitée à contrôler l'exactitude de ces renseignements.

Le recouvrement est assuré par l'agent comptable de l'agence.

Les décisions relatives aux redevances peuvent faire l'objet de contestations devant la juridiction administrative, sauf s'agissant des actes de poursuite, les tribunaux judiciaires étant alors compétents. Les réclamations relatives à la liquidation des redevances doivent toutefois avoir été portées devant le directeur de l'agence préalablement au recours contentieux.

Le redevable doit payer la somme qui lui est demandée par l'agence dans un délai de trois mois à compter de la présentation de la quittance ou de l'ordre de recettes. A défaut, il lui est envoyé une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception. S'il ne paie pas alors dans les quinze jours suivant cette mise en demeure, l'agence peut majorer la somme qui lui est due de 10 % et réclamer le remboursement des frais correspondants.

II. LE DROIT PROPOSÉ

A. LES OBLIGATIONS DÉCLARATIVES

L'article L. 213-11, inséré dans le code de l'environnement par le présent article, définit les obligations déclaratives applicables aux redevances perçues par les agences de l'eau.

Il prévoit ainsi que les contribuables déclarent à l'agence de l'eau les éléments nécessaires au calcul des redevances avant le 1 er avril de l'année suivant celle au titre de laquelle ces redevances sont dues.

Des dispositions particulières sont prévues en cas de cession ou de cessation d'entreprise : les redevances dues sont alors immédiatement établies. Les contribuables doivent déclarer les éléments nécessaires au calcul des redevances dans un délai de soixante jours à compter de la cession ou de la cessation d'entreprise.

B. LE CONTRÔLE

1. Le champ du contrôle

Le présent article confie à l'agence de l'eau le soin de mener les opérations de contrôle des déclarations faites par les contribuables.

a) Des possibilités de contrôle étendues

Ainsi, l'article L. 213-11-1, inséré dans le code de l'environnement par le présent article, précise que l'agence de l'eau contrôle l'ensemble des éléments permettant de vérifier l'assiette des redevances , notamment les déclarations et les documents produits par les intéressés pour l'établissement des redevances ainsi que les installations, ouvrages ou activités ayant un impact sur celles-ci et les appareillages susceptibles de fournir des informations utiles pour leur détermination.

L'agence de l'eau dispose de la faculté d'effectuer ses contrôles sur pièces et sur place , selon des modalités encadrées par l'article L. 213-11-1 précité.

S'agissant du contrôle sur pièces , le texte est très large puisque l'agence peut demander la production de pièces ainsi que tout renseignement ou éclaircissement nécessaire au contrôle. L'agence fixe alors un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois à compter de la réception de la demande par l'intéressé. En cas de réponse insuffisante , l'agence peut adresser au contribuable une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours, en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite.

Lorsqu'elle envisage d'effectuer un contrôle sur place , l'agence est tenue d'informer au préalable le contribuable , par l'envoi ou la remise d'un avis. Cet avis doit indiquer les années soumises au contrôle et l'identité des agents qui en sont chargés. Il doit également préciser que le contribuable peut se faire assister au cours des opérations de contrôle par un conseil de son choix.

Il est toutefois prévu que l'agence ne peut procéder à deux contrôles successifs portant sur l'assiette d'une même redevance pour les mêmes années.

b) Un contrôle sur place encadré

L'article L. 213-11-1 précité encadre la possibilité de recours au contrôle sur place.

En effet, celui-ci doit être effectué par des agents habilités par le directeur de l'agence.

Toutefois, l'agence peut confier à des organismes extérieurs le soin d'opérer certains contrôles techniques . Deux conditions sont alors posées : l'organisme retenu doit, d'une part être habilité par l'autorité administrative dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat et, d'autre part, être mandaté à cette fin par le directeur de l'agence.

c) La coopération de l'administration

L'article L. 213-11-2, inséré dans le code de l'environnement par le présent article, oblige les administrations à coopérer avec les agences de l'eau.

Il prévoit ainsi que les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, les entreprises concessionnaires d'une personne publique et les organismes de toute nature soumis au contrôle de l'autorité administrative doivent communiquer à l'agence, sur sa demande, les documents qu'ils détiennent et qui sont nécessaires pour la définition de l'assiette et le contrôle des redevances.

Il est précisé le secret professionnel ne peut être opposé à l'agence de l'eau.

2. Les possibilités de redressement

a) Les possibilités de rectification

L'article L. 213-11-3, inséré dans le code de l'environnement par le présent article, prévoit que l'agence de l'eau, lorsqu'elle constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des redevances, adresse au contribuable une proposition de rectification motivée, de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation dans un délai de trente jours.

Il est précisé que, lorsque l'agence rejette les observations du contribuable, sa réponse doit également être motivée.

b) Le délai de reprise

Le nouvel article L. 213-11-4 prévoit que le délai de reprise expire à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle les redevances sont dues.

c) Les possibilités d'établissement d'office des redevances

L'article L. 213-11-6 inséré par le présent article dans le code de l'environnement définit les conditions dans lesquelles les redevances peuvent être établies d'office.

Trois cas sont ainsi prévus :

- quand les personnes n'ont pas produit la déclaration des éléments nécessaires à leur calcul à la date fixée, après l'expiration d'un délai de trente jours suivant la mise en demeure préalable qui leur est adressée par l'agence ;

- quand les personnes se sont abstenues de répondre dans les délais fixés aux demandes de renseignements ou d'éclaircissements formulées par l'agence ;

- lorsque des personnes ont refusé de se soumettre aux contrôles ou ont fait obstacle à leur déroulement.

La procédure d'imposition est toutefois encadrée. En effet, dans ce cas, les éléments servant au calcul des redevances sont notifiés au contribuable au moins trente jours avant la mise en recouvrement. La notification doit préciser les modalités de détermination des éléments servant au calcul, le montant des redevances dues. Elle doit en outre prévoir la faculté, pour le contribuable, de présenter ses observations.

d) Les possibilités d'intérêts de retard

En cas de défaut de déclaration, de déclaration tardive des éléments nécessaires à la détermination des redevances, lorsque la déclaration fait apparaître des éléments insuffisants, inexacts ou incomplets, ou en cas de taxation d'office, le nouvel article L. 213-11-7 du code de l'environnement prévoit que les redevances mises à la charge du contribuable sont assorties d'intérêts de retard et, le cas échéant, de majorations , selon les modalités prévues en matière d'impôt sur le revenu par le code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 1 er janvier de l'année au titre de laquelle les redevances sont dues.

C. LES PROCÉDURES DE RECOUVREMENT

1. Les modalités de recouvrement

L'article L. 213-11-8, inséré par le présent article dans le code de l'environnement, définit la procédure de recouvrement des redevances.

Ainsi, il est prévu qu'un ordre de recette, émis par le directeur de l'agence et pris en charge par l'agent comptable, est notifié au contribuable pour le recouvrement des redevances ainsi que des intérêts de retard et des majorations dont elles sont le cas échéant assorties. Cet ordre de recette doit mentionner quatre éléments : la somme à acquitter au titre de chaque redevance, la date de mise en recouvrement, la date d'exigibilité et la date limite de paiement.

Le nouvel article L. 213-11-10 précise que les redevances sont recouvrées par l'agent comptable de l'agence selon les règles applicables au recouvrement des créances des établissements publics à caractère administratif de l'Etat, sous réserve de dispositions spécifiques.

Ainsi est-il est indiqué que la date d'exigibilité de la contribution est fixée au dernier jour du mois qui suit la date de mise en recouvrement.

La date limite de paiement est, quant à elle, fixée au 15 du deuxième mois qui suit la date de mise en recouvrement. Au-delà de cette date, une majoration de 10 % est appliquée aux redevances ou fractions de redevances qui n'ont pas été réglées et l'agent comptable adresse au redevable une lettre de rappel par pli recommandé avec accusé de réception. Si cette lettre de rappel n'est pas suivie de paiement, l'agent comptable peut, à l'expiration d'un délai de vingt jours, engager les poursuites.

Celles-ci sont exercées par l'agent comptable, dans les formes de droit commun. Il est toutefois précisé que les commandements de payer sont, à l'initiative de l'agent comptable, notifiés au contribuable, par lettre recommandée avec accusé de réception, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 259 du livre des procédures fiscales, qui prévoit que ces actes de poursuites échappent alors aux conditions générales de validité des actes des huissiers de justice.

Par ailleurs, un seuil de recouvrement est fixé afin de maîtriser le coût de gestion de l'impôt : les redevances ou suppléments de redevances inférieurs à 100 euros ne seront ainsi pas mis en recouvrement .

Les redevances peuvent donner lieu chaque année au paiement d'acomptes.

2. Les voies de contestation

Le nouvel article L. 213-11-9 encadre les possibilités de recours contentieux, en prévoyant que le contribuable qui conteste tout ou partie des redevances mises à sa charge doit, préalablement à tout recours contentieux, adresser une réclamation au directeur de l'agence.

Il est en outre précisé que les règles prévues par l'article L. 281 du livre de procédures fiscales sont applicables aux contestations relatives au recouvrement de redevances. Ainsi, les contestations ne peuvent porter que sur deux types d'éléments :

- la régularité en la forme de l'acte, et dans ce cas, le recours est formé devant le juge de l'exécution;

- l'existence de l'obligation de payer, le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, l'exigibilité de la somme réclamée ou tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. Le recours doit alors être formé devant le juge de l'impôt, en l'espèce le tribunal administratif.

3. Les possibilités de remises

La définition des possibilités de remises est définie par le nouvel article L. 213-11-11. Il prévoit que l'agence peut accorder des remises totales ou partielles de redevances, majorations et intérêts de retard dans deux cas :

- soit sur demande du contribuable, lorsque celui-ci est dans l'impossibilité de payer par suite de gêne ou d'indigence ;

- soit sur demande du représentant des créanciers pour les entreprises soumises à la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.

4. Le délai de prescription

L'article L. 213-11-13 prévoit que l'action de l'agent comptable chargé du recouvrement des redevances se prescrit dans un délai de quatre ans à compter de la date de mise en recouvrement.

La prescription est toutefois interrompue dans les conditions définies au premier alinéa de l'article L. 189 du livre des procédures fiscales, c'est-à-dire par la notification d'une proposition de redressement, par la déclaration ou la notification d'un procès-verbal, de même que par tout acte comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous les autres actes interruptifs de droit commun.

5. Le recouvrement par voie d'opposition à tiers détenteur

Une possibilité de recouvrement par voie d'opposition à tiers détenteur est également instaurée afin de sécuriser le recouvrement des redevances.

L'opposition est adressée aux personnes qui détiennent des fonds pour le compte des contribuables, qui ont une dette envers eux ou qui lui versent une rémunération. Le comptable doit notifier cette opposition au contribuable en même temps qu'elle est adressée au tiers détenteur.

Il est précisé que l'opposition à tiers détenteur emporte l'effet d'attribution immédiate des sommes saisies disponibles au profit de l'agence à concurrence des sommes pour lesquelles l'opposition est pratiquée.

Sous peine de se voir réclamer les sommes saisies majorées du taux d'intérêt légal, le tiers détenteur doit verser les fonds auprès du comptable chargé du recouvrement dans les trente jours qui suivent la réception de l'opposition.

Cette opposition peut s'exercer sur les créances conditionnelles ou les créances. Dans ce dernier cas, les fonds sont versés au comptable chargé du recouvrement lorsque ces créances deviennent exigibles.

Deux dispositions spécifiques sont prévues en cas d'insuffisance ou d'indisponibilité des fonds du tiers détenteur :

- si une même personne est simultanément destinataire de plusieurs oppositions à tiers détenteur établies au nom du même contribuable, elle doit, en cas d'insuffisance des fonds, exécuter ces oppositions en proportion de leurs montants respectifs.

- si les fonds détenus ou dus par le tiers détenteur sont indisponibles, il doit en aviser le comptable chargé du recouvrement dès la réception de l'opposition.

Un décret en Conseil d'Etat précisera les modalités d'application de l'ensemble de ces dispositions.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article présente de manière très détaillée l'ensemble de la procédure de recouvrement des redevances, ce qui n'était pas le cas actuellement dans les textes législatifs relatifs aux redevances des agences de l'eau. Il s'agit donc d'un progrès, nécessaire compte tenu de la réforme d'ensemble du dispositif des redevances, qui n'appelle pas de remarques particulières.

Votre rapporteur pour avis vous proposera un amendement tendant à prévoir que les personnes intervenant dans l'assiette, le contrôle, le recouvrement ou le contentieux des redevances sont tenues de respecter les obligations de secret professionnel.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'émettre un avis favorable sur cet article ainsi modifié.

ARTICLE 39

Dispositions relatives aux comités de bassin et aux redevances perçues par les offices de l'eau dans les départements d'outre-mer

Commentaire : le présent article tend à prévoir dans les départements d'outre-mer des dispositions relatives aux comités de bassin et aux redevances similaires à celles prévues en France métropolitaine.

I. LE DROIT EXISTANT

A. UN ALIGNEMENT RÉCENT SUR LE DISPOSITIF PRÉVU POUR LA MÉTROPOLE

Si la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution prévoyait la création d'agences de l'eau, les départements d'outre-mer (DOM) sont longtemps restés à l'écart de ce dispositif.

En effet, même si la loi précitée du 16 décembre 1964 n'interdisait pas la mise en place d'agences de l'eau dans ces départements, aucun décret n'était intervenu pour concrétiser cette possibilité. L'absence de politique de l'eau dans les DOM a rapidement posé problème, entraînant un retard d'autant plus préoccupant dans la mise en place des infrastructures que la ressource en eau y est rare et exposée à un risque important de pollution.

Une première étape a été franchie avec la loi sur l'eau du 3 janvier 1992 34 ( * ) , qui a instauré dans chaque DOM des comités de bassin, instances consultatives chargées d'élaborer des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE).

Le dispositif a ensuite été complété par deux lois :

- la loi d'orientation pour l'outre-mer 35 ( * ) , dont l'article 51 prévoyait la mise en place, dans chaque département d'outre-mer, d'un office de l'eau inspiré des agences de l'eau métropolitaines ;

- la loi de programme pour l'outre-mer 36 ( * ) , dont l'article 54 a codifié les dispositions applicables aux offices de l'eau et leur a notamment permis de percevoir une redevance pour prélèvement d'eau .

B. LE DROIT APPLICABLE AUX OFFICES DE L'EAU

1. Leur statut

A la différence des agences de l'eau, qui sont des établissements publics nationaux sous tutelle de l'Etat, les offices de l'eau sont, en application de l'article L. 213-13 du code de l'environnement, des établissements public locaux à caractère administratif, rattachés au département.

La présidence de l'office de l'eau est ainsi assurée par le président du conseil général, qui nomme, après avis du préfet, le directeur de l'office. Le droit de la fonction publique territoriale s'applique au personnel travaillant dans ces offices.

2. Leur rôle

En liaison avec le comité de bassin, l'office de l'eau est chargé de faciliter les diverses actions d'intérêt commun dans le domaine de la gestion de l'eau et des milieux aquatiques.

Sans préjudice des compétences dévolues en la matière à l'Etat et aux collectivités territoriales, il exerce trois missions :

- l'étude et le suivi des ressources en eau, des milieux aquatiques et littoraux et de leurs usages ;

- le conseil et l'assistance technique aux maîtres d'ouvrage, la formation et l'information dans le domaine de la gestion de l'eau et des milieux aquatiques ;

- sur proposition du comité de bassin, la programmation et le financement d'actions et de travaux.

3. Leurs ressources

Le financement de l'office de l'eau repose sur quatre types de ressources :

- des redevances pour prélèvement d'eau, sur proposition du comité de bassin et dans le cadre d'un programme pluriannuel d'intervention ;

- des redevances pour services rendus ;

- des subventions ;

- des ressources financières prévues par les lois et règlements en vigueur.

C. LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX COMITÉS DE BASSIN

1. La composition des comités de bassin

Le code de l'environnement ne comporte pas de dispositions spécifiques à la composition des comités de bassin établis dans les départements d'outre-mer.

A ce titre, les dispositions de droit commun s'appliquent. Les comités de bassin sont ainsi composés :

- de représentants des régions et des collectivités locales situées en tout ou partie dans le bassin ;

- de représentants des usagers et de personnes compétentes ;

- de représentants désignés par l'Etat, notamment parmi les milieux socioprofessionnels.

En outre, l'article L. 213-2 du code de l'environnement précise que les représentants des deux premières catégories détiennent au moins deux tiers du nombre total des sièges.

2. Leurs missions

Comme les comités de bassin métropolitains, les comités de bassin établis dans les DOM sont consultés :

- sur l'opportunité des travaux et aménagements d'intérêt commun envisagés dans leur zone de compétence ;

- sur les différends pouvant survenir entre les collectivités ou groupements intéressés ;

- et plus généralement sur toutes les questions relatives à l'eau.

En outre, ils sont chargés d'élaborer le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux.

L'article L. 213-4 du code de l'environnement précise que, outre ces compétences, les comités de bassin des départements d'outre-mer sont associés à la mise en place des structures administratives qui se révéleraient nécessaires et, s'il y a lieu, à l'élaboration des adaptations des dispositions prévues pour la France métropolitaine.

II. LE DROIT PROPOSÉ

Le présent article complète l'intitulé de la section 7 du chapitre III du titre Ier du livre II du code de l'environnement (« offices de l'eau dans les départements d'outre-mer »), pour faire également référence aux comités de bassin dans les DOM. Il contient deux types de dispositions :

- des dispositions relatives aux comités de bassin dans les DOM ;

- des dispositions relatives aux redevances perçues par les offices de l'eau.

A. LA COMPOSITION ET LE RÔLE DES COMITÉS DE BASSIN

Le présent article insère dans le code de l'environnement un nouvel article L. 213-13-1, relatif à la composition et au rôle des comités de bassin dans les départements d'outre-mer.

1. Leur composition

Les comités de bassin seront ainsi composés :

- de représentants des collectivités territoriales situées en tout ou partie dans le bassin ;

- de représentants des usagers et de personnalités qualifiées ;

- de représentants désignés par l'Etat, notamment parmi les milieux socioprofessionnels.

Ces dispositions reprennent, sous réserve de modifications rédactionnelles, les dispositions actuelles de l'article L. 213-2 du code de l'environnement, qui s'applique à l'ensemble des comités de bassin. On remarquera que, ce faisant, le présent article ne retient pas une rédaction identique à celles prévues pour la métropole.

En outre, aucune disposition ne précise les règles relatives au poids respectif des différents collèges, alors que l'actuel article L. 213-2 précité dispose que les membres des deux premiers collèges détiennent au moins deux tiers du nombre total des sièges.

Enfin, contrairement aux dispositions du présent projet de loi applicables aux comités de bassin de métropole, aucune disposition n'est prévue s'agissant de l'élection du président du comité de bassin.

2. Leurs missions

Le présent article prévoit que le comité de bassin est consulté sur l'opportunité des travaux et aménagements d'intérêt commun envisagés dans le bassin et plus généralement sur toute question relative à l'eau.

Contrairement à ce qui prévu par l'article 35 du présent projet de loi pour les comités métropolitains, il n'est pas précisé que le comité de bassin élabore le SDAGE. Par ailleurs, les dispositions actuelles précisant qu'il est consulté sur toute mesure d'adaptation de la réglementation aux spécificités des DOM n'est pas reprise.

B. LES RESSOURCES DES OFFICES DE L'EAU

1. Le seuil de la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau

Le présent article modifie le VI de l'article L. 213-14, qui fixe le seuil minimal de perception de la redevance pour prélèvement d'eau à un volume d'eau prélevé de 50.000 m 3 par an.

Il prévoit que le seuil de mise en recouvrement de la redevance est arrêté par l'office de l'eau et qu'il ne peut être inférieur à 10.000 m 3 d'eau par an. L'exposé des motifs du présent projet de loi indique que cette disposition vise à abaisser le seuil de recouvrement à 10.000 m 3 , mais l'on remarquera que la rédaction proposée ne fixe qu'un plancher, et ne fixe aucune limite maximale.

2. La définition de redevances très proches de celles applicables en France métropolitaine

Le 4° du présent article complète l'article L. 213-14 du code de l'environnement afin d'adapter les dispositions relatives aux redevances autres que la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau aux départements d'outre-mer.

Il prévoit ainsi que des redevances pour pollution de l'eau, pour modernisation des réseaux de collecte, pour pollutions diffuses, pour stockage d'eau en période d'étiage, pour obstacles sur les cours d'eau et pour protection du milieu aquatique sont affectées à l'office de l'eau. La redevance pour prélèvement d'eau n'est pas mentionnée ici dans la mesure où le texte de l'article L. 213-14 y fait référence auparavant.

Il est prévu que l'office de l'eau institue ces redevances sur proposition du comité de bassin et dans le cadre du programme pluriannuel d'intervention, ce qui reprend les dispositions applicables à la redevance pour prélèvement.

Le présent article prévoit que les dispositions relatives à l'assiette et aux taux de ces redevances sont les dispositions applicables aux redevances perçues en France métropolitaine par les agences de l'eau, sous deux réserves :

- les taux des redevances sont fixés par délibération du conseil d'administration de l'office de l'eau sur avis conforme du comité de bassin : il s'agit d'une précision formelle, afin de viser les offices de l'eau, et non les agences de l'eau, qui n'existent pas dans les DOM ;

- le taux plafond de la redevance pour stockage d'eau en période d'étiage est fixé à 0,3 centime d'euro par mètre cube pour le volume d'eau stocké à l'étiage pris en compte au delà de 300 millions de mètres cubes : cette redevance aura donc une portée nettement moindre que la redevance applicable en métropole, dans la mesure où, d'une part, le taux plafond de cette dernière est fixé à un centime d'euro par mètre cube et où, d'autre part, le seuil de stockage est fixé à un million de mètre cube. Il a été précisé à votre rapporteur pour avis que ce seuil avait été fixé pour tenir compte de la situation particulière du barrage de Petit-Saut, en Guyane.

3. Les précisions relatives au recouvrement des redevances

Le 5° du présent article complète l'article L. 213-20 du code de l'environnement relatif au recouvrement des redevances afin de prévoir :

- d'une part, que les redevances peuvent donner lieu chaque année au paiement d'acomptes ;

- d'autre part, qu'un décret en Conseil d'Etat précisera les modalités d'application des dispositions relatives au recouvrement des redevances.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le présent article reprenant largement des dispositions applicables aux redevances perçues en France métropolitaine, il n'appelle pas de remarques spécifiques.

Il est toutefois souhaitable d'apporter certaines modifications rédactionnelles au présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'émettre un avis favorable sur cet article ainsi modifié.

ARTICLE 41

Création de l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques

Commentaire : le présent article vise à créer un Office national de l'eau et des milieux aquatiques, qui se substituerait au Conseil supérieur de la pêche.

I. LE DROIT PROPOSÉ

Le présent article tend à remplacer la section 2 intitulée « Comités de bassin » du chapitre III du titre I er du livre II du code de l'environnement par des dispositions consacrées à l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA), nouvelle institution qui se substitue au Conseil supérieur de la pêche (CSP) avec des missions modifiées. Un décret en Conseil d'Etat précisera les conditions d'application de cette section.

Le Conseil supérieur de la pêche

Notre collègue Philippe Adnot, alors rapporteur spécial des crédits de l'écologie et du développement durable, avait mené un contrôle budgétaire sur le Conseil supérieur de la pêche (CSP). Son rapport 37 ( * ) fournit une excellente appréciation de la situation de cet établissement public.

Aux termes de l'article L. 434-1 du code de l'environnement, « le Conseil supérieur de la pêche est un établissement public auquel est affecté le produit de la taxe piscicole . Il utilise les fonds dont il dispose pour la mise en valeur et la surveillance du domaine piscicole national, notamment par des interventions, réalisations, recherches, études et enseignements en faveur de la pêche et de la protection du patrimoine piscicole. En outre, le Conseil supérieur de la pêche constitue un organisme consultatif auprès du ministre chargé de la pêche en eau douce ».

Les 10 missions du Conseil supérieur de la pêche sont précisées par l'article R. 234-3 du code de l'environnement :

1° La gestion des agents de l'établissement commissionnés par décision ministérielle ;

2° L'assistance technique aux fédérations départementales des associations agréées de pêche et de pisciculture et aux associations agréées de pêcheurs professionnels ;

3° La participation aux travaux entrepris par les fédérations et associations agréées de pêche en vue de l'aménagement des milieux naturels aquatiques, de leur mise en valeur piscicole et du développement de la pêche ;

4° L'information des services de l'administration et l'appui technique à leur apporter ;

5° La réalisation d'expérimentations, de travaux de recherche technique et d'études socio-économiques dans le domaine de la protection des milieux naturels aquatiques, de leur mise en valeur piscicole et du développement de la pêche ;

6° La participation à l'application de la recherche en matière hydrobiologique et piscicole, en liaison avec les organismes et établissements de recherche afin de valoriser les acquis scientifiques par tous les moyens d'expérimentation, de démonstration et de contrôle ;

7° La contribution à l'enseignement et à la formation en matière de pêche, de protection et de gestion des milieux naturels aquatiques ;

8° L'appui technique à la promotion dans les pays étrangers des travaux réalisés en France en matière de pêche en eau douce et d'hydrobiologie ;

9° La collecte de renseignements sur l'état des populations piscicoles, leur gestion et leur exploitation par la pêche amateur et professionnelle qui donne lieu à un rapport annuel ;

10° La promotion et la vulgarisation dans le domaine de la pêche et de la gestion des milieux naturels aquatiques.

Ainsi, outre sa mission traditionnelle de police de la pêche, le CSP est en charge de la conduite de travaux à caractère scientifique et de l'assistance technique aux fédérations de pêche. Cette dernière mission occupe une place croissante parmi les activités du Conseil, au détriment de la police de la pêche, mission régalienne du CSP.

Le contrat d'objectifs du CSP définit cinq programmes d'objectifs dans lesquels s'inscrivent les missions et les actions de l'établissement :

1°) Optimisation des activités de police, qui représentent environ 64 % de l'activité du CSP ;

2°) Production et valorisation de données sur les milieux, les espèces et les activités halieutiques ;

3°) Protection des milieux et des espèces en danger ;

4°) Gestion patrimoniale et halieutique, ce programme s'étant nettement orienté en 2003 vers des contributions à la mise en oeuvre de la directive cadre sur l'eau, par le biais d'une assistance aux services de l'Etat et aux agences de l'eau ;

5°) Promotion du loisir « pêche .

La situation budgétaire du CSP reste tendue. Jusqu'en 1998, la taxe piscicole acquittée obligatoirement par les pêcheurs en eaux libres était la principale ressource de financement du CSP. L'évolution des effectifs de pêcheurs, passés d'environ 1,8 million de personnes en 1992 à 1,4 million en 2002, a déstabilisé le financement du CSP, au moment où celui-ci devait faire face à des charges nouvelles liées à l'augmentation de ses effectifs, à la mise en place d'un nouveau régime indemnitaire pour les frais de déplacement du personnel et à la séparation des brigades départementales et des fédérations de pêcheurs décidée en 1998.

L'Etat a donc été contraint d'accroître sa contribution au financement de l'établissement public. Les efforts de gestion engagés par le CSP ont toutefois permis de réduire la subvention de l'Etat à 10,5 millions d'euros en 2005 , après 14 millions d'euros en 2004 et 19 millions d'euros en 2003.

Le CSP s'appuie sur un effectif réel de 790 agents permanents.

A. LE STATUT ET L'ADMINISTRATION DE L'ONEMA

L'article L. 213-2, inséré dans le code de l'environnement par le présent article, prévoit que l'ONEMA est un établissement public national.

L'article L. 213-3, inséré dans le code de l'environnement par le présent article, précise le mode d'administration de cet office.

L'ONEMA est ainsi administré par un conseil d'administration composé :

- de représentants de l'Etat et de ses établissements publics autres que les agences de l'eau ;

- de représentants des comités de bassin, des agences de l'eau et des offices de l'eau des départements d'outre-mer ;

- de représentants des collectivités territoriales ;

- de représentants des usagers de l'eau et des milieux aquatiques, des associations de consommateurs et de protection de l'environnement, des activités de pêche et de loisirs nautiques ;

- de représentants du personnel de l'établissement.

Il est en outre précisé que le directeur général de l'établissement est nommé par arrêté du ministre chargé de l'environnement.

B. LES MISSIONS DE L'ONEMA

L'article L. 213-2, inséré dans le code de l'environnement par le présent article, définit les missions de l'ONEMA.

Celui-ci aura ainsi pour tâche « de mener et de soutenir au niveau national des actions destinées à favoriser une gestion globale, durable et équilibrée de la ressource en eau, des écosystèmes aquatiques et de la pêche et du patrimoine piscicole ».

Dans ce cadre général, cinq thèmes d'action sont définis :

- il participe à la protection et à la surveillance de l'eau et des milieux aquatiques, de leur faune et de leur flore, et contribue à la prévention des inondations ;

- il apporte son appui aux services de l'Etat, aux agences de l'eau et aux offices de l'eau dans la mise en oeuvre de leurs politiques ;

- il assure la mise en place et la coordination technique d'un système d'information ;

- il garantit une solidarité financière entre les bassins et conduit ou soutient des programmes de recherche et d'études qui leur sont communs ou revêtent un intérêt général, notamment sous la forme de concours financiers à des personnes publiques ou privées ;

- il mène et soutient des actions nationales de communication et de formation.

L'article L. 213-4, inséré dans le code de l'environnement par le présent article, précise que l'ONEMA détermine les domaines et les conditions de son action dans un programme pluriannuel d'intervention qui indique les montants de dépenses et de recettes nécessaires à sa mise en oeuvre.

C. LES RESSOURCES DE L'ONEMA

L'article L. 213-5, inséré dans le code de l'environnement par le présent article, définit les ressources de l'ONEMA. Celles-ci seront de deux types :

- les contributions des agences de l'eau , dont l'article 36 du présent projet de loi plafonne le montant global annuel à 108 millions d'euros ;

- des subventions versées par des personnes publiques . D'après les informations communiquées à votre rapporteur pour avis, ceci viserait en particulier des subventions versées par l'Etat.

D. UN OFFICE CRÉÉ À COMPTER DU 1 ER JANVIER 2007

Le II du présent article prévoit que l'ONEMA est créé le 1 er janvier 2007.

A compter de cette date, les biens, droits et obligations du Conseil supérieur de la pêche lui sont transférés , dans des conditions précisées par décret. Selon la formule habituelle, ces opérations ne donnent pas lieu à la perception de droits, impôts ou taxes de quelque nature que ce soit.

En outre, le III du présent article précise que l'ONEMA pourra, comme les agences de l'eau, exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts qu'ils ont pour objet de défendre et constituant une infraction aux dispositions législatives relatives à la protection de la nature et de l'environnement, à l'amélioration du cadre de vie, à la protection de l'eau, de l'air, des sols, des sites et paysages, à l'urbanisme ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions et les nuisances, ainsi qu'aux textes pris pour leur application. Sans préjudice de l'indemnisation des autres dommages subis, le responsable sera tenu au remboursement des frais exposés par l'ONEMA.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

A. LES PRÉCISIONS APPORTÉES PAR L'ÉTUDE D'IMPACT...

L'étude d'impact du présent projet de loi met en perspective la nouvelle architecture de financement de la politique de l'eau découlant de la création de l'ONEMA.

L'Etat serait ainsi appelé à se concentrer sur ses missions régaliennes , ce qui recouvrirait cinq missions :

- veiller à l'application des lois et règlements (y compris communautaires) ainsi que concevoir et mettre en oeuvre la police de l'eau ;

- assurer la protection des biens et des personnes ;

- défendre les intérêts français dans les instances internationales ou communautaires ;

- dialoguer avec le Parlement ;

- assurer la tutelle des établissements publics.

Ces missions seraient assurées par les directions d'administration centrale des ministères concernés et, s'agissant des missions de police de l'eau, par les services déconcentrés sous l'autorité des préfets.

L'ONEMA constituerait le « bras armé » du ministère de l'écologie et du développement durable s'agissant des missions non régaliennes de nature technique ou financière de niveau national. L'étude d'impact précise que « le statut d'établissement public permet en effet plus de souplesse de fonctionnement et une meilleure association des acteurs de l'eau à la définition et la mise en oeuvre de la politique nationale de l'eau ». L'ONEMA devrait permettre de mettre en place, à ce niveau, un pôle d'animation d'une politique de l'eau concertée, associant les partenaires représentés dans les comités de bassin.

La simplification de l'organisation de la police de l'eau

Prérogative de l'Etat, la mission de police de l'eau est assurée sous la responsabilité des préfets.

Dans le domaine de l'eau, l'action régalienne du préfet est assurée par les services déconcentrés de l'Etat (directions départementales de l'agriculture et de la forêt, DDAF), directions départementales de l'équipement (DDE), services de la navigation, services maritimes, cellules de qualité des eaux littorales, directions départementales des affaires sanitaires et sociales (DDASS). Pour les installations classées, cette mission est assurée par l'inspection des installations classées (DRIRE et DSV).

En matière de pêche en eau douce, deux services sont chargés de mettre en oeuvre, sous l'autorité du préfet, la police administrative de la pêche. Il s'agit des services de la navigation sur les cours d'eau navigables et des DDAF sur les autres cours d'eau du domaine public ou privé.

La dispersion des contrôles en fonction de la nature des eaux a entraîné, à partir de 1993, la création dans chaque département d'un organisme, la MISE (mission inter-services des eaux) chargée, entre autres, de la coordination des actions de la police des eaux, ainsi que de délégations interservices de l'eau. Ces progrès n'ont toutefois pas permis de remédier à la dispersion des services, à l'éclatement des responsabilités ni au manque de lisibilité du dispositif.

Aussi une circulaire du 26 novembre 2004 engage-t-elle une réforme de l'organisation de la police de l'eau qui se fonde sur trois principes :

- une évolution des missions des MISE pour renforcer la cohérence de l'action de l'Etat sous l'autorité des préfets : la MISE doit réunir les directeurs des principaux services déconcentrés et des établissements publics locaux pour débattre des priorités et des modalités de mise en oeuvre de la politique de l'eau et de son articulation avec les politiques sectorielles, en veillant à la bonne association des outils régaliens, financiers et d'ingénierie publique ;

- la désignation par le préfet d'un service unique chargé de la police de l'eau , qui doit conserver des moyens en personnels au moins identiques à ceux mobilisés avant la réforme ;

- la coordination du dispositif par les DIREN .

La circulaire du 26 novembre 2004 précise que cette réforme s'inscrit dans les principes qui régissent l'organisation territoriale de l'Etat, conformément au décret n°2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, qui renforce les compétences du préfet de région en matière de coordination et d'animation de l'action des préfets de département. Ainsi, l'action de la DIREN, sous l'autorité du préfet de région, visera à développer le lien indispensable entre le département, niveau de terrain opérationnel et la région et le bassin, en charge de la planification et de la définition d'objectifs généraux.

Source : pour l'état actuel, se reporter au rapport d'information n° 327 (2002-2003) de notre collègue Philippe Adnot sur le Conseil supérieur de la pêche. Pour la réforme proposée, se reporter au texte de la circulaire du 26 novembre 2004 relative à la déclinaison de la politique de l'Etat en département dans le domaine de l'eau et à l'organisation de la police de l'eau et des milieux aquatiques

La création de l'ONEMA devrait entraîner des redéploiements de personnels : outre les personnels du CSP, qu'il reprendra intégralement, l'office devrait également pouvoir compter sur des effectifs en provenance de la direction de l'eau du ministère de l'écologie et du développement durable. Dix à vingt personnes seraient ainsi concernées. Le ministère de l'écologie et développement durable a précisé à votre rapporteur pour avis que la direction de l'eau avait été réorganisée en septembre 2004 pour tenir compte de cette réforme. L'étude d'impact ajoute que « les moyens budgétaires correspondants de l'Etat seront affectés, sous forme de dotation, à l'ONEMA. Toutefois, en toute logique, il ne serait pas exclu que l'Etat considère qu'il n'a plus à financer ces interventions et qu'il conviendrait que l'ONEMA les reprenne à sa charge, dans le cadre de son futur budget ». Cette dernière option paraît, en effet, devoir être retenue afin d'éviter des flux nuisibles à la lisibilité du système de financement de la politique de l'eau.

En outre, il devrait permettre de rassembler en un lieu unique des moyens jusqu'ici épars, en particulier dans le domaine des études et recherches.

L'ONEMA devrait également servir à lier davantage politique de l'eau et politique de la pêche. Signalons toutefois que l'ONEMA ne reprendra pas l'intégralité des missions exercées par le Conseil supérieur de la pêche , ce qui justifie, selon le ministère de l'écologie et du développement durable, la baisse de la fiscalité liée à l'exercice de la pêche. Des missions d'intérêt général relèveront ainsi à l'avenir de la fédération nationale et des fédérations départementales de pêche. Sont notamment concernées les missions de gestion du milieu aquatique (entretien de rivière, aménagement de zones de frayères, réempoissonnement à partir de souches locales...), la surveillance du patrimoine piscicole ainsi que des actions de formation et d'éducation à l'environnement.

L'étude d'impact précise que « des synergies fortes seront recherchées entre les équipes de l'ONEMA, les directions régionales de l'environnement (DIREN) ou les futurs services départementaux de police de l'eau », les DIREN devant être les délégués régionaux de l'ONEMA.

B. ... NE PERMETTENT PAS DE LEVER TOUTES LES AMBIGUÏTÉS DÉCOULANT DE CETTE ARCHITECTURE

1. Des liens qui restent à préciser

En dépit des précisions de l'étude d'impact, la création de cet office requiert une certaine vigilance, dans la mesure où elle pourrait entraîner des « doublons » avec le ministère de l'écologie, et tout particulièrement avec la direction de l'eau.

Le partage des tâches devra donc être clairement fixé et les moyens réalloués en conséquence. Votre rapporteur pour avis note, à cet égard, que les moyens devant rester inscrits sur les crédits du ministère de l'écologie et du développement durable au titre de la politique de l'eau sont évalués par l'étude d'impact du présent projet de loi à 45 millions d'euros (40 millions d'euros au titre de la lutte contre les inondations et 5 millions d'euros pour le fonctionnement et les missions de police). Selon d'autres informations, ces moyens s'établiraient à une trentaine de millions d'euros. L'examen du projet de loi de finances pour 2007 sera l'occasion de mener une analyse précise de la situation et d'en tirer les conséquences budgétaires.

On peut également s'interroger sur les conséquences de la création de cet office sur la structure interne du ministère de l'écologie et du développement durable, à la lumière de la nouvelle architecture budgétaire retenue dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF). Dans la mesure où la direction de l'eau ne conservera qu'un volant limité de crédits d'intervention, la question de son maintien se pose. En effet, on rappellera qu'aucun programme « eau » n'est prévu, les crédits liés à la politique de l'eau étant répartis entre les programmes « prévention des risques et lutte contre les pollutions » et « gestion des milieux et biodiversité ». En outre, selon la répartition des tâches retenue par le ministère de l'écologie et du développement durable, le directeur de l'eau sera le seul directeur d'administration centrale à ne pas être responsable de programme. Compte tenu de l'évolution engagée par ce projet de loi, la question de la restructuration du ministère de l'écologie et du développement durable se pose. En effet, un pilotage assuré par les deux responsables de programme concernés, et coordonné par le secrétaire général du ministère, dont le poste a été créé à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2005, semblerait cohérent, d'une part avec les options retenues dans le cadre de la mise en oeuvre de la LOLF, d'autre part avec les orientations définies par le présent projet de loi.

On notera, par ailleurs, que les relations entre l'Etat, l'ONEMA et les agences de l'eau devront être précisées au cours de l'examen du présent projet de loi. L'étude d'impact indique que « la tutelle des agences de l'eau reste de la compétence de l'administration » et que « l'ONEMA privilégiera dans ses modalités de fonctionnement le mode « inter-bassins », en excluant tout système hiérarchique ou pyramidal entre elle et les agences ». Les relations entre les agences et l'ONEMA ne paraissent pas évidentes.

En outre, il n'est pas certain que la création de cet office soit la meilleure façon de garantir les moyens de pilotage de la politique de l'eau par l'Etat, qui est responsable de la politique de l'eau devant les institutions communautaires.

Enfin, dans une optique davantage budgétaire, la création de cet office s'apparente à une opération de débudgétisation et à un moyen de « sanctuariser » les crédits dévolus à la politique de l'eau, en mettant en avant le principe selon lequel « l'eau doit payer l'eau ». De ce point de vue, l'option retenue est contestable et on se doit de souligner que les redevances affectées aux agences de l'eau, et de manière indirecte à l'ONEMA dans la mesure où celui-ci sera financé par une contribution des agences, constituent des impositions de toute nature.

Le principe selon lequel « l'eau doit payer pour l'eau » :
l'analyse critique de la Cour des comptes

« Ce principe très souvent exprimé comme une évidence est incontestablement curieux. Il dérive peut-être des règles applicables aux services communaux de distribution d'eau et d'assainissement, services de nature industrielle et commerciale, dont le budget doit être en équilibre. En effet, le terme de redevances communément utilisé pour désigner les prix de ces services d'eau et d'assainissement, en l'espèce il s'agit de redevances pour services rendus, est le même que celui utilisé pour désigner les impôts prélevés par les agences, qui ne sont aucunement des redevances pour services rendus, comme l'a analysé le Conseil constitutionnel.

« Quoi qu'il en soit, un tel principe étendu à tous les domaines de l'activité de l'Etat, aboutirait à une liste à tout le moins singulière. Pour les services rendus par l'Etat financés par un prix ou une redevance, l'équivalence entre les recettes et les dépenses paraît être un principe de saine gestion, quoiqu'il ne puisse pas toujours être respecté, les recettes de nature commerciale devant être alors complétées par une subvention d'équilibre. En revanche pour les autres opérations de l'Etat, le principe général est celui de la non-affectation des recettes aux dépenses, principe auquel la loi organique du 1er août 2001 ne permet de déroger que dans des conditions encore plus strictes que l'ordonnance du 2 janvier 1959. Les choix politiques des dépenses, d'un côté, et de répartition des recettes fiscales, de l'autre, répondent en effet à des objectifs et des critères différents dont le seul lien est la nécessité d'équilibrer globalement les unes et les autres ».

Source : Philippe Adnot, Le Fonds national de solidarité pour l'eau (FNSE) : une expérience riche d'enseignements, rapport d'information n° 345 (2003-2004)

2. L'ONEMA a-t-il les moyens de ses ambitions ?

Enfin se pose la question des moyens à la disposition de cet office.

L'ONEMA devrait en effet recevoir une contribution des agences de l'eau limitée à 108 millions d'euros par an au cours de la période 2007-2012.

Dans ces conditions et en retenant ce plafond, l'étude d'impact précise que les dépenses de l'ONEMA seraient les suivantes : 25 millions d'euros au titre des études générales et des actions expérimentales, 35 millions d'euros au titre de la connaissance, 40 millions d'euros pour les charges de personnel et de fonctionnement et 8 millions d'euros pour les aides aux communes rurales d'outre-mer.

Cette présentation amène deux remarques :

1- d'une part, et contrairement aux missions qui lui sont imparties, l'ONEMA ne devrait pas disposer de réelle marge de manoeuvre pour assurer une certaine solidarité entre les bassins , et assurer ainsi une certaine péréquation nationale. Cela signifie que, si l'on veut permettre à l'ONEMA de remplir sa mission de solidarité entre les bassins et de prendre notamment en compte la péréquation nationale qui était auparavant assurée par le Fonds national de développement des adductions d'eau, deux options sont possibles et, le cas échéant, complémentaires :

- un accroissement des moyens de l'ONEMA passant par une subvention de l'Etat, possibilité ouverte par le présent article. Dans ce cas, il importe de connaître les intentions du gouvernement ;

- une solidarité « en creux », assurée par une modulation de la contribution des agences à l'ONEMA.

2- d'autre part, il convient de souligner que l'ONEMA reprendra les anciennes missions assurées par l'Etat au titre du FNDAE en outre-mer. L'article 121 de la loi de finances rectificative pour 2004 a transféré aux agences de l'eau, à compter du 1 er janvier 2005, les missions de solidarité rurale antérieurement exercées par l'Etat au titre du FNDAE, mais uniquement pour la métropole. Le présent projet de loi, et notamment le 6° du II de l'article 49, opère donc une harmonisation souhaitable.

Sous réserve de ces remarques, votre rapporteur pour avis vous proposera un amendement tendant à préciser que l'ONEMA a le statut d'établissement public à caractère administratif .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'émettre un avis favorable sur cet article ainsi modifié.

ARTICLE 48

Dispositif de lissage des effets de la réforme des redevances

Commentaire : le présent article vise à limiter, à titre transitoire, les conséquences qui pourraient résulter de la réforme des redevances menée par le présent projet de loi.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article limite, jusqu'en 2010, les conséquences qui pourraient résulter de la réforme des redevances menée par le présent projet de loi.

En effet, il prévoit que, pour chacune des années 2007, 2008, 2009 et 2010, il est procédé à la comparaison entre les sommes qui auraient été dues par un contribuable au titre de chaque année en application des dispositions applicables aux redevances de l'eau avant l'entrée en vigueur de la loi sur l'eau et les milieux aquatiques et celles qui sont dues en application de l'article 37 du présent projet de loi.

Il précise que, si cette comparaison fait apparaître une augmentation ou une diminution supérieure ou égale à 20 % au titre de 2007, à 40 % au titre de 2008, à 60 % au titre de 2009 et à 80 % au titre de 2010, l'augmentation ou la diminution est ramenée à hauteur de ces taux.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Le dispositif proposé permet d'éviter des transferts de charges trop importants entre les différents contribuables au cours de la période 2007-2010. Ceci permettra notamment aux différents acteurs de s'adapter à la présente réforme, solution qui reçoit l'approbation de votre rapporteur pour avis.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'émettre un avis favorable sur cet article.

* 9 Le décret précise que ce traitement peut intervenir par voie physique, biologique, chimique ou thermique, par entreposage à long terme ou par tout autre procédé approprié.

* 10 Pour une analyse détaillée de l'exemple allemand, se reporter à l'étude n° 92 de janvier 1999 réalisée par l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture : « Fonds d'indemnisation « boues » - L'exemple allemand, la proposition française ».

* 11 Dans les budgets et les comptes de la commune, ces produits et ces charges sont repris dans deux articles, l'un pour les recettes, l'autre pour les dépenses.

* 12 Il n'y a pas de réelle différence entre eaux pluviales et eaux de ruissellement. Il s'agit dans les deux cas des eaux générées par les épisodes pluvieux, recueillies sur les toitures des bâtiments ou ruisselant sur le sol.

* 13 La référence aux « collectivités territoriales », et non aux seules communes, vient de l'existence du Syndicat interdépartemental pour l'assainissement de l'agglomération parisienne, réunissant les départements de Paris, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.

* 14 Ainsi, sont recouvrées « comme en matière d'impôts directs », par exemple, les taxes particulières dues par les habitants ou propriétaires en vertu des lois et usages locaux (article L. 2331-11 du code général des collectivités territoriales), et la portion de la dépense relative à l'établissement des trottoirs des rues et places à la charge des propriétaires (article L. 2333-60 du même code), ou la taxe pouvant être instaurée dans certaines communes pour financer le pavage des rues (article L. 2333-63 du même code).

* 15 Il s'agit des sommes que le propriétaire doit payer avant son raccordement à l'égout.

* 16 Le présent article précise que ces sommes sont perçues au profit du budget du service d'assainissement et recouvrées comme les redevances dues par les usagers du service d'assainissement.

* 17 Dans la rédaction proposée par l'article 26 du présent projet de loi, le troisième alinéa de l'article L. 2224-8 du code général des collectivités territoriales se réfère aux travaux suivants : mise en conformité des installations d'assainissement non collectif ; mise en conformité des ouvrages nécessaires pour amener les eaux usées à la partie publique du branchement, depuis le bas des colonnes descendantes des constructions jusqu'à la partie publique du branchement ; suppression ou d'obturation des fosses et autres installations de même nature, à l'occasion du raccordement de l'immeuble ou de la mise aux normes de l'installation d'assainissement non collectif.

* 18 Le présent article propose, à juste titre, d'insérer l'article L. 4424-36-2 dans la sous-section 2 (« eau et assainissement ») de la section IV (« environnement et services de proximité ») du chapitre IV (« compétences ») du titre II (« la collectivité territoriale de Corse ») du livre IV(« régions à statut particulier et collectivité territoriale de Corse ») de la quatrième partie (« la région ») du code général des collectivités territoriales.

* 19 Directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000.

* 20 Initialement appelées agences financières de bassin.

* 21 Jean-Claude Flory, Les redevances des agences de l'eau - enjeux, objectifs et propositions dans la perspective de la réforme de la politique de l'eau, rapport au Premier ministre et à la ministre de l'écologie et du développement durable (octobre 2003).

* 22 Schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux.

* 23 Ces chapitres sont relatifs au régime général et à la gestion de la ressource, à la planification (schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux et schémas d'aménagement des eaux), aux structures administratives et financières, aux activités, installations et usages, aux dispositions propres aux cours d'eau non domaniaux, aux sanctions et à la défense nationale.

* 24 Sur ce point, se reporter au commentaire de l'article 57 ter, au sein du rapport n° 114 (2004-2005) de notre collègue Philippe Marini sur le projet de loi de finances rectificative pour 2004.

* 25 Proposition de loi n° 67 (2003-2004), déposée au Sénat le 13 novembre 2003.

* 26 Ces chapitres sont relatifs au régime général et à la gestion de la ressource, à la planification (schémas directeurs d'aménagement et des gestion des eaux et schémas d'aménagement des eaux), aux structures administratives et financières, aux activités, installations et usages, aux dispositions propres aux cours d'eau non domaniaux, aux sanctions et à la défense nationale.

* 27 Le 3° de cet article dispose en effet que « lorsqu'un dispositif permet d'éviter la détérioration de la qualité des eaux, une prime est versée au maître d'ouvrage public ou privé de ce dispositif ou à son mandataire. Elle est calculée en fonction de la quantité de pollution dont l'apport au milieu naturel est supprimé ou évité ».

* 28 Sur ce point, se reporter au rapport spécial n° 74 (2004-2005), annexe 9, de votre rapporteur pour avis sur les crédits de l'écologie et du développement durable pour 2005, et en particulier à l'annexe consacrée à la tutelle des agences de l'eau.

* 29 Décret relatif aux agences financières de basin créées par l'article 14 de la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964.

* 30 Jean-Claude Flory, Les redevances des agences de l'eau - enjeux, objectifs et propositions dans la perspective de la réforme de la politique de l'eau, rapport au Premier ministre et à la ministre de l'écologie et du développement durable (octobre 2003).

* 31 Arrêté du 28 octobre 1975 pris en exécution des articles 3, 5, 6, 10, 11 et 15 du décret n° 75-996 du 28 octobre 1975 portant application des dispositions de l'article 14-1 de la loi du 16 décembre 1964 modifiée relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution. On précisera que l'appellation métox recouvre les métaux et métalloïdes : arsenic, cadmium, chrome, cuivre, mercure, nickel, plomb ou zinc.

* 32 Sur ce point, se reporter au commentaire de l'article 36 du présent projet de loi pour le neuvième programme, couvrant la période 2007-2012.

* 33 Ces zones ont été définies par le décret n° 94-354 du 29 avril 1994 relatif aux zones de répartition des eaux, modifié par le décret n° 2003-869 du 11 septembre 2003 relatif à l'extension des zones de répartition des eaux et modifiant le décret n° 94-354 du 29 avril 1994. Le ministère de l'écologie et du développement durable précise que, dans le cadre du projet d'ordonnance de simplification du droit découlant de l'article 50 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit, il est prévu que l'établissement ou la modification de ces zones soit de la compétence du préfet coordonnateur de bassin.

* 34 Loi n° 92-3 du 3 janvier 1992.

* 35 Loi n° 2000-1207 du 13 décembre 2000.

* 36 Loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003. Se reporter au rapport pour avis n° 292 (2002-2003) de notre collègue Daniel Soulage, et en particulier au commentaire de l'article 41 du projet de loi de programme pour l'outre-mer.

* 37 Philippe Adnot, Le Conseil supérieur de la pêche, rapport d'information n° 327 (2002-2003).

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