CHAPITRE III - PRENDRE EN COMPTE LES SPÉCIFICITÉS DES TERRITOIRES DE MONTAGNE LORS DE LA MISE EN oeUVRE DES SERVICES PUBLICS

Article 8 nonies (art. 96 bis (nouveau) de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne) - Modalités d'exercice du secours d'urgence sur les pistes de ski

L'article 8 nonies du projet de loi tend à préciser que le maire peut confier à un prestataire public ou privé l'exécution matérielle du secours d'urgence pour les victimes d'accidents de ski .

Il résulte de l'adoption par l'Assemblée nationale en séance publique d'un amendement de Mmes  Bernadette Laclais et Annie Genevard, rapporteurs de la commission des affaires économiques, sous-amendé par M. Martial Saddier (groupe Les Républicains) afin d'en préciser le périmètre 130 ( * ) . Cet amendement ainsi sous-amendé a reçu l'avis favorable du Gouvernement.

1. L'organisation des secours en cas d'accidents de ski

Deux cas de figure doivent être distingués :

- le secours en montagne : l'accident a lieu dans une zone non accessible depuis une remontée mécanique. L'intervention est alors assurée par l'État (gendarmerie, unités spécialisées des sapeurs-pompiers, etc .) dans les conditions fixées par le ministre de l'intérieur 131 ( * ) . En 2011, le secours en montagne a représenté entre 5 000 et 8 000 interventions et 181 décès ont été recensés 132 ( * ) ;

- le secours sur pistes : l'accident a lieu sur une piste de ski aménagée ou sur les terrains « interstitiels » qui correspondent aux parties non balisées situées entre plusieurs pistes ou en bordure de ces dernières 133 ( * ) . L'opération de secours est alors placée sous l'autorité du maire , au titre de son pouvoir de police générale (article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales). En 2011, le secours sur pistes a représenté 52 000 interventions et 13 décès ont été recensés 134 ( * ) .

Le présent article concerne ce second cas de figure .

Pour exercer son pouvoir de police municipale, le maire s'appuie sur des pisteurs secouristes qui peuvent être des agents publics (exercice de la compétence en régie) ou privés (délégation de la compétence) 135 ( * ) .

Le nombre de pisteurs-secouristes est aujourd'hui estimé à 2 300 136 ( * ) . À titre d'exemple, la station de Valloire (Savoie) compte 18 pisteurs-secouristes, dont un maître-chien et quatre spécialistes des conditions météorologiques 137 ( * ) .

2. Le dispositif introduit par l'Assemblée nationale

L'article 8 nonies vise, selon les auteurs de l'amendement adopté à l'Assemblée nationale, à reconnaître « la singularité de l'organisation des secours dans les zones de montagne , de manière à ce que la formation et les moyens des opérateurs intervenant dans ce cadre soient adaptés à la mission qui est la leur » .

Il reprend, pour l'essentiel, l'état du droit, en consacrant au niveau législatif la possibilité de déléguer à un prestataire public ou privé l'exécution matérielle des prestations de secours sur pistes.

Si le cas de la régie n'est pas explicitement mentionné par le présent article, un maire aurait toujours la faculté de confier les prestations de secours à ses propres équipes, sans avoir obligatoirement à les déléguer.

Toutefois, par rapport au droit en vigueur, cet article :

- prévoit explicitement la nécessité pour le prestataire de « disposer de moyens matériels adaptés et des personnels qualifiés » ;

- réserve le secours sur pistes aux accidents constatés « sur les pistes de ski définies à l'article R. 122-8 du code de l'urbanisme » 138 ( * ) .

Le périmètre des secours sur pistes proposé par l'article 8 nonies serait donc plus restreint que l'actuel 139 ( * ) , qui comporte, outre les pistes, les terrains « interstitiels » non balisés et situés entre plusieurs pistes ou en bordure de celles-ci. C'est par exemple sur ces terrains qu'est survenu l'accident de ski de l'ancien pilote automobile Michael Schumacher le 29 décembre 2013.

3. La position de votre commission

Les auditions de votre rapporteur pour avis n'ont pas permis de justifier ce changement de périmètre. Elles ont démontré, au contraire, l'efficacité de l'organisation actuelle des secours .

À l'initiative de son rapporteur pour avis, votre commission a donc adopté l'amendement COM-280 pour revenir au droit en vigueur et inclure les pistes de ski et les terrains « interstitiels » dans le périmètre de la délégation du secours sur pistes.

Sous réserve de l'adoption de son amendement , votre commission a donné un avis favorable à l'adoption de l'article 8 nonies .


* 130 L'amendement de M. Saddier a précisé que le présent article s'applique « sur les pistes de ski définies par l'article R. 122-8 du code de l'urbanisme » et non « sur le domaine skiable » comme initialement envisagé.

* 131 Circulaire du 6 juin 2011 relative aux orientations générales pour la mise en oeuvre des moyens publics concourant au secours en montagne et sa formalisation dans le cadre d'une disposition spécifique ORSEC.

* 132 Source : Cour des comptes, « L'organisation du secours en montagne et de la surveillance des plages » , septembre 2012, p. 17 et 18

(http://www.ccomptes.fr/index.php/Publications/Publications/Organisation-du-secours-en-montagne-et-de-la-surveillance-des-plages).

* 133 Circulaire n° 78-003 du 4 janvier 1978 sur la sécurité et les secours dans les communes où se pratiquent les sports d'hiver.

* 134 Source : Cour des comptes, op.cit. , p. 17 et 18.

* 135 En effet, s'il n'est pas possible de déléguer le pouvoir de police en tant que tel (Conseil d'État, 17  juin 1932, ville de Castelnaudary , n° 1204), la jurisprudence permet de déléguer l'exercice matériel de ce pouvoir (Conseil d'État, 24 mai 1968, ministre de l'Intérieur c/ Chambrin , n° 69733).

* 136 Source : domaines skiables de France.

* 137 Source : www.pisteurs-secouristes.fr/

* 138 Article du code de l'urbanisme selon lequel : « une piste de ski alpin est un parcours sur neige réglementé, délimité, balisé, contrôlé et protégé des dangers présentant un caractère anormal ou excessif, éventuellement aménagé et préparé, réservé à la pratique du ski alpin et des activités de glisse autorisées » .

* 139 Périmètre actuellement défini par la circulaire n° 78-003 du 4 janvier 1978.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page