II. LES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI.

A. LE CHAMP DE LA SAISINE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES.

Examiné au fond par la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, le projet de loi a en réalité fait l'objet d'un examen croisé de plusieurs commissions, et notamment de votre commission des affaires économiques :

- la commission au fond a utilisé la procédure de « délégation au fond » à votre commission pour les articles touchant des sujets qui relèvent de sa compétence : agriculture, forêt, urbanisme, tourisme ;

- en outre, votre commission s'est saisie pour avis de certaines dispositions qui lui paraissaient particulièrement importantes : numérique, grands prédateurs, gestion de l'eau pour l'agriculture.

Votre commission n'a ainsi que très peu examiné le titre I er , essentiellement consacré aux questions de gouvernance de la politique de la montagne, à l'exception de l'article 1 er , qui définit les grands objectifs de la politique publique en montagne.

Sur cet article, votre commission a recommandé l'adoption de trois amendements destinés à mieux prendre en compte les objectifs de la politique agricole et forestière en montagne.

Votre commission s'est saisie pour avis des articles 9, 9 bis , 9 ter , 9 quinquies , 9 sexies , 9 septies , 9 octies et 9 nonies au sein du chapitre I er du titre II , qui concernent le déploiement du numérique et de la téléphonie en montagne, mais sans adopter d'amendements sur cette partie qui paraît suffisamment équilibrée.

Votre commission a été saisie au fond sur l'article 14 imposant dans les communes touristiques un dispositif de convention pour le logement des travailleurs saisonniers.

Votre commission a été saisie au fond de la quasi-totalité des articles du chapitre III du titre II , consacré au développement des activités agricoles, pastorales et forestières. Il s'agit des articles 15 A, 15, 15 bis A, 15 ter , 15 quater , 15 quinquies , 16 bis et 16 ter . Sur les articles 15 bis et 16, votre commission n'a été saisie que pour avis.

Votre commission a été saisie au fond des dispositions en matière de tourisme prévues aux chapitres IV et V du titre II .

Votre commission a également été saisie au fond de l'ensemble du titre III consacré à l'immobilier et l'urbanisme en montagne .

Enfin, votre commission s'est saisie pour avis des articles 23 B relatif à la gestion de l'eau, et 23 sur les zones de tranquillité . Elle a également proposé un amendement en faveur des petits canaux d'irrigation de montagne.

B. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION.

1. Les dispositions en matière agricole.

Le projet de loi initial contenait une seule mesure en faveur de l'agriculture : l'article 16 prévoyait d'inscrire dans la loi l'objectif de gestion différenciée de la prédation, essentiellement par les loups, dans le but d'adapter à la montagne les mesures générales prises pour la protection des troupeaux.

Les députés ont ajouté des dispositions symboliques comme l'article 15 A , qui proclame, dans le cadre de la politique nationale de la montagne, des soutiens spécifiques à l'agriculture à travers des aides directes au revenu compensant les handicaps en montagne et un accompagnement renforcé des investissements. Votre rapporteur note au passage que le cadre de ces aides n'est pas fixé par la loi mais par la politique agricole commune.

Les députés ont également pris des dispositions pratiques pour adapter le régime des conventions pluriannuelles de pâturage à l'article 15 bis A , ou encore pour donner la priorité aux agriculteurs locaux pour la location de terres aux groupements pastoraux, avec l'article 15 quinquies . Ils ont aussi permis aux GAEC de participer en tant que tels aux groupements pastoraux, avec l'article 16 ter , et ont adapté le droit de préemption des SAFER sur les anciens bâtiments agricoles, dans le prolongement des mesures prises en loi agricole de 2014.

Surtout, les députés ont permis avec l'article 15 quater de reconquérir des anciennes terres agricoles ou pastorales ayant fait l'objet de boisements spontanés en zone de montagne : ils ont proposé de supprimer le boisement compensateur ou la taxe de défrichement sur ces parcelles, qui constituent des freins au défrichement.

Outre quelques amendements rédactionnels ou de clarification, votre commission a proposé sur la partie agricole du projet de loi quelques modifications limitées :

- un premier amendement élargit les possibilités d'exonération de taxe de défrichement en montagne à toutes les terres non classées au cadastre en nature de bois ;

- un autre amendement crée une exonération de taxe pour prélèvement d'eau pour les petits canaux d'irrigation de montagne, indispensables à l'agriculture et l'élevage dans certaines régions défavorisées ;

- un autre amendement rappelle enfin que les mesures concernant les grands prédateurs doivent avoir pour objectif de réguler la prédation pour ne pas nuire à l'élevage sur les territoires de montagne, particulièrement exposés ;

- enfin, un amendement à l'article 23 concerne les zones de tranquillité dans les parcs nationaux , proposant que ces zones ne fassent pas faire obstacle au maintien de l'activité pastorale traditionnelle, qui contribue aussi à l'équilibre écologique des territoires de montagne.

2. Les dispositions en matière forestière.

Le projet de loi ne comportait qu'une seule mesure en faveur de la forêt : l'article 15 , qui visait à élargir le périmètre des plans simples de gestion et à permettre la validation des plans présentés par un propriétaire unique, afin de développer la mobilisation collective du bois en forêt privée.

Les députés ont ajouté plusieurs dispositions : ils ont ainsi conservé la possibilité de s'appuyer sur un code de bonnes pratiques sylvicoles pour bénéficier d'une présomption de gestion durable des forêts en zone Natura 2000 à l'article 15 bis .

Ils ont souhaité obliger l'Office national des forêts à instruire les demandes de dossiers restauration des terrains de montagne (RTM) des collectivités territoriales avec l'article 15 ter .

Outre l'amendement demandant de renforcer la prise en compte de la contribution de la forêt à l'économie de montagne à l'article 1 er , en précisant que la politique de la montagne doit viser à développer des outils de transformation du bois à proximité des massifs, votre commission a adopté à l'article 15 A un amendement pour donner un cadre juridique autonome à la politique de soutien à la forêt en montagne .

En outre, un amendement a été adopté proposant d'aligner les sanctions encourues pour coupe illicite en forêt publique sur le régime existant en forêt privée , en plafonnant ces sanctions, pour être en conformité avec les exigences constitutionnelles de proportionnalité des peines.

3. Les dispositions en matière de logement et d'urbanisme.

L'article 14 du projet de loi institue pour l'ensemble des communes touristiques l'obligation de conclure une convention avec l'État pour le logement des travailleurs saisonniers . Cette convention, conclue pour trois ans et associant divers partenaires en sus de la commune et de l'État, doit comporter un diagnostic des besoins sur le territoire communal et proposer un ensemble d'actions pour y répondre. En cas de non signature, de non renouvellement ou de non atteinte des objectifs fixés, le préfet peut prendre comme sanction la suspension de l'agrément touristique de la commune. Votre commission a maintenu le dispositif mais en le sécurisant juridiquement , de manière à imposer la mise en place d'une politique en faveur du logement des saisonniers uniquement sur les territoires où un diagnostic partagé entre les collectivités et l'État conclut à l'intérêt de la mettre en place.

Sur la question de la rénovation de l'immobilier touristique en montagne , qui est un enjeu essentiel de l'économie montagnarde, le texte ne comporte pas de dispositions véritablement structurantes. La principale mesure figure à l'article 21 et vise à moderniser le dispositif des ORIL - les opérations de réhabilitation de l'immobilier de loisir, afin de l'adapter aux évolutions du marché de la location touristique. Il s'agit de renvoyer la définition des mesures d'aide à la rénovation au niveau des collectivités concernées et d'ouvrir les subventions aux propriétaires qui louent leurs appartements via des plateformes d'intermédiation et à ceux qui achètent des lots en vue de les réunir en un seul.

Concernant l'urbanisme de montagne , les principales dispositions figurent à l'article 19 et portent sur les unités touristiques nouvelles (UTN). Bien que cet article ait donné lieu à des discussions passionnées à l'Assemblée nationale, il ne modifie pas profondément le dispositif actuel. Son principal intérêt est de permettre la création d'UTN dites locales dans le cadre des plans locaux d'urbanisme (PLU), alors qu'aujourd'hui les UTN sont créées uniquement par les SCoT. Cela institue un mécanisme de subsidiarité entre PLU et SCoT afin de stabiliser les SCoT qui n'auront plus à être modifiés ou révisés pour rendre possible une UTN de faible ampleur. Votre commission a adopté sur cet article des amendements visant à supprimer quelques complexités procédurales superflues sans toucher au coeur du dispositif.

4. Les dispositions en matière de tourisme

En matière de tourisme, votre commission a examiné les 5 articles, 17 à 18 bis , qui font l'objet d'un large consensus :

- l'article 17 consiste à habiliter le Gouvernement à procéder par ordonnance pour la transposition d'une directive relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées ;

- l'article 17 bis ajoute aux priorités d'action de Bpifrance les entreprises du secteur touristique ;

- l'article 17 ter étend la possibilité pour les collectivités de créer en montagne et en dehors des périodes d'enneigement une servitude sur le domaine skiable après avis consultatif de la chambre d'agriculture, afin de permettre le nécessaire développement de nouvelles activités de loisirs tout en préservant les droits des agriculteurs ;

- l'article 18 étend la dérogation au transfert de compétence « promotion du tourisme dont la création d'offices de tourisme » des communes vers les intercommunalités prévu par la loi NOTRe. Le transfert de la compétence est prévu par la loi NOTRe au 1 er janvier 2017. Or, ce transfert est apparu inopportun pour certaines communes particulièrement touristiques. Cet article permet ainsi aux stations classées de tourisme ou qui ont engagé une démarche de classement avant le 1 er janvier 2017 d'adopter une délibération en vue de préserver leur compétence touristique et de conserver un office de tourisme communal. Mais les dispositions introduites à l'Assemblée nationale sur les modalités de maintien des offices de tourisme dans le giron communal étaient peu claires. Votre commission a donc adopté un amendement de clarification, pour prévenir toute contestation ;

- l'article 18 bis constitue la reconnaissance légale de l'association Nordic France, qui coordonne les activités des associations locales de sports nordiques.

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