IV. LES MÉTAUX LOURDS DANS LES SOLS

Même si les concentrations de métaux lourds dans les sols paraissent beaucoup moins importantes que celles relevées dans les sédiments, la contamination des sols constitue un enjeu fondamental non seulement parce qu'il affecte notre environnement proche, chargé en symboles (la terre nourricière), mais aussi et surtout parce que l'enjeu de la pollution des sols n'est ni plus ni moins que l'alimentation en eau potable. L'analyse organisée, sinon méthodique, des sols, est cependant récente et remonte à une dizaine d'années seulement, avant d'être imposée, en 1996, pour la gestion des sites et sols pollués, et en 1998, par la réglementation sur l'épandage des boues.

A. LES SOURCES DE CONTAMINATION

1. Le fond pédogéochimique

a) Le but des mesures

L'étude des sols permet d'éviter à la fois un contresens et une impasse.

Le contresens consiste à confondre concentration et contamination (apport par une activité humaine), voire même pollution (apport constituant un danger). La détermination d'un fonds pédogéochimique -équivalent à celle d'un bruit de fond dans une analyse de bruit- permet d'évaluer les concentrations naturelles en éléments traces en l'absence de toute contamination d'origine anthropique, liée à l'épandage de boue ou à une activité industrielle.

L'impasse aurait consisté à fixer une valeur unique de « normalité ». Au-delà d'un certain seuil de contaminant, un sol aurait été considéré comme pollué. Certains pays d'Europe (Pays-Bas par exemple) ont choisi ce type de classification, qu'il est évidemment tentant d'appliquer et de transposer en France pour la raison simple qu'il n'y a, a priori, aucune raison pour considérer qu'un sol serait pollué ici et serait considéré comme non pollué là.

Cette idée séduisante doit être discutée. Le fond pédogéochimique naturel est lié à la concentration en métaux originels du sous-sol sur lequel se développe le sol. Les processus de formation du sol (pédogénèse) tendent à accumuler ou à appauvrir dans le sol les concentrations initiales de la roche en fonction des propriétés physico-chimiques des métaux. Ainsi, le fond pédo-géochimique d'un sol naturel non contaminé peut varier d'environ un à trois pour un même métal à l'échelle du territoire français compte tenu de la grande diversité géologique de notre pays.

Comme l'explique l'une des personnes auditionnées : « On n'aurait pas idée de fixer la même valeur de sang pour les porcs, les poules et les chevaux. Vouloir fixer une seule valeur seuil « normale », pour tous les types de sols, aux propriétés physiques et chimiques différentes est à la fois impossible et déraisonnable ». D'une part, les experts mettent en avant les difficultés de mesure liées au respect d'un protocole rigoureux précisant les conditions de prélèvement (les analyses sont trop souvent limitées aux 10 ou 20 premiers centimètres négligeant les horizons profonds...). Ils évoquent les résultats contestables de mesures approximatives conduites par des personnes qui n'ont pas de connaissance particulière de ce qu'est véritablement un sol. D'autre part, cette notion de valeur seuil peut servir de signal d'alerte, mais en aucun cas de valeur sanction, pouvant pénaliser des régions entières du fait de leurs concentrations naturelles. On peut cependant imaginer des normes sectorielles qui tiennent compte de la nature des sols ET de leur usage. Mais cela peut varier aussi selon les productions.

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