2. Le respect des normes de qualité concernant le plomb

a) Les normes

Les effets du plomb sur la santé sont bien identifiés. Le plomb est un neurotoxique entraînant des troubles du comportement, des séquelles invalidantes (épilepsie), des retards dans le développement intellectuel. Au début des années 80, on dénombra plus de 200 cas d'hospitalisation pour intoxication saturnine liée à la circulation de l'eau dans des canalisations en plomb. Ces conséquences sont surtout marquées au cours de deux périodes critiques : la petite enfance car l'absorption de plomb est beaucoup plus importante qu'à l'âge adulte, et la vieillesse, car le plomb, fixé dans les os pendant la vie, est alors relargué dans le sang.

L'eau est l'un des facteurs d'exposition. Ainsi, la réglementation abaisse progressivement la teneur limite autorisée dans l'eau destinée à la consommation humaine de 50 ug de plomb par litre/l à 10 ug/l d'ici le 24 décembre 2013. Un valeur transitoire de 25 ug/l doit être respectée à partir du 24 décembre 2003 (72 ( * )). Les concentrations sont relevées au robinet de l'usager.

b) Le respect des normes

Sans revenir sur la pertinence des seuils indiqués, toujours très discutés -voir annexe précitée-, ces normes sont très contraignantes.

- D'une part, la gestion pratique d'un double seuil échelonné dans le temps est très difficile. L'usager a tendance à considérer que puisque le seuil, à terme, est fixé à 10 ug/l, tout autre seuil intermédiaire constitue en fait une mise en danger de la vie d'autrui.

- La norme intermédiaire de 25 ug/ l n'impose pas un changement total des conduites en plomb. Il existe de nombreux facteurs favorisant la corrosion et on peut donc assez facilement limiter la dissolution du plomb en agissant sur les caractéristiques physicochimiques de l'eau. L'acidité et la faible minéralisation sont les deux principales caractéristiques qui rendent l'eau corrosive. 3,7 millions de Français seraient touchés par une eau trop acide ou trop faiblement minéralisée (dans les zones granitiques du Massif Central, des Alpes et des Pyrénées, Vosges, Bretagne). Les traitements préventifs et leurs effets secondaires sont présentés ci-après.

Constat

Traitement

Limite

Une eau acide augmente la corrosion

Augmenter le pH (autour de 8)

Un pH trop élevé nuit à la désinfection par le chlore

Une eau douce augmente la corrosion

Reminéraliser les eaux

Une eau trop calcaire génère des dysfonctionnements de traitements d'eau et des appareils électroménagers

La solubilité du plomb décroît avec la teneur en biocarbonate

Décarbonatation de l'eau

La corrosion est le vecteur de dissolution du plomb

Injecter des phosphates en particulier orthophosphates qui limitent la corrosion

Un apport de phosphates dans une eau calcaire entraîne un précipité de phosphate et une augmentation de la turbidité

Les teneurs en plomb sont mesurées au robinet

Filtrer l'eau en captant le plomb avant l'usage de l'eau

Les filtres anti-plomb doivent être régulièrement chargés, sinon ils deviennent de vrais « nids bactériens »

- En revanche , la norme de 10 ug/l ne pourra être respectée en 2013 sans d'importants travaux d'aménagement qui passent au minimum, par la suppression de toutes les conduites et branchements au plomb, mais aussi vraisemblablement par la rénovation des conduites sans plomb mais avec des joints ou des métaux associés à du plomb (zinc, acier, cuivre, étain -une soudure à l'étain contient 60 % de plomb ...)

Plusieurs dizaines de milliers d'habitations sont concernées par cette échéance, surtout dans les grandes villes. Les estimations de coût, initialement évaluées à 20 millions d'euros sont périodiquement revues à la baisse pour être estimées aujourd'hui à 10,5 millions d'euros et sans doute moins (l'installation de conduites flexibles en plastique à l'intérieur des conduites de grande dimension permettrait de réduire considérablement les coûts). Mais sauf à remettre en cause ce seuil (un nouveau seuil de 20 ug, voire 15 ug/l permettrait de réduire la facture), le coût est inévitable.

Il faut bien distinguer les deux opérations : le changement des branchements sera opéré par le distributeur. La dépense ne sera pas répercutée sur l'usager individuel, mais le coût sera mutualisé sur l'ensemble des habitants de la commune. Le coût est estimé à 750 €. En revanche, le changement des conduites sera exclusivement financé par le ou les propriétaires de l'immeuble. L'essentiel ne portera pas sur les travaux de plomberie (estimés à 60 € le mètre de tuyauterie) mais sur la maçonnerie associée (démolition de cloisons, reconstruction...). Le coût total par logement est estimé entre 1.500 et 15.000 €.

c) Proposition

L'idée est de lier l'obligation de rénovation plomb à l'obligation de ravalement prévue par le code de la construction (article L.132-1 à 6) qui dispose que « les façades des immeubles doivent être constamment tenues en état de propreté ». Le rythme est cependant à l'initiative des communes. A Paris et dans la plupart des grandes villes -où le risque plomb est concentré- le ravalement est obligatoire tous les dix ans.

Concernant l'application de la norme plomb (10 ug/l à l'échéance 2013), qui exige le changement des branchements et des conduites intérieures en plomb, il est proposé de surseoir pendant quelques années à l'obligation de ravalement, pour les immeubles qui doivent changer leurs canalisations en plomb, afin de leur permettre de réaliser ces modifications.

* (72) Annexe 72 - Les normes de plomb dans l'eau potable.

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