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Rapport n° 250 (2006-2007) de M. Robert del PICCHIA , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 20 février 2007

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N° 250

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 20 février 2007

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, autorisant l'approbation de l' accord de sécurité sociale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Japon ,

Par M. Robert del PICCHIA,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Serge Vinçon, président ; MM. Jean François-Poncet, Robert del Picchia, Jacques Blanc, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Jean-Pierre Plancade, Philippe Nogrix, Mme Hélène Luc, M. André Boyer, vice - présidents ; MM. Daniel Goulet, Jean-Guy Branger, Jean-Louis Carrère, Jacques Peyrat, André Rouvière, secrétaires ; MM. Bernard Barraux, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Pierre Biarnès, Didier Borotra, Didier Boulaud, Robert Bret, Mme Paulette Brisepierre, M. André Dulait, Mme Josette Durrieu, MM. Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Pierre Fourcade, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Gisèle Gautier, MM. Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Robert Hue, Joseph Kergueris, Robert Laufoaulu, Louis Le Pensec, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Charles Pasqua, Jacques Pelletier, Daniel Percheron, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Yves Rispat, Josselin de Rohan, Roger Romani, Gérard Roujas, Mme Catherine Tasca, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 3678, 3692 et T.A. 681

Sénat : 245 (2006-2007)

Traités et conventions.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, a pour objet d'autoriser l'approbation de l'accord de sécurité sociale signé à Paris le 25 février 2005 entre la France et le Japon.

Après celui concernant la Corée, dont le projet de loi d'approbation a été définitivement adopté par le Sénat le 14 février dernier, cet accord avec le Japon vient s'ajouter à la trentaine d'accords du même type conclus avec des pays extérieurs à l'Union européenne ou à l'Espace économique européen. Il améliorera la prise en compte des questions relatives à la sécurité sociale pour les travailleurs expatriés des deux pays et présente un intérêt tout particulier en raison du niveau des relations économiques entre la France et le Japon.

Votre rapporteur présentera l'accord de sécurité sociale franco-japonais avant d'évoquer son intérêt pour les relations bilatérales.

I. L'ACCORD DE SÉCURITÉ SOCIALE FRANCO-JAPONAIS

La France est actuellement liée à près d'une trentaine d'Etats par un accord bilatéral de sécurité sociale 1 ( * ) . Ces accords ont pour but de clarifier la situation des expatriés au regard des régimes de sécurité sociale en définissant les règles d'affiliation applicables, en éliminant ou limitant les restrictions fondées sur la nationalité ou relatives au versement de prestations à l'étranger, et en garantissant la continuité des droits et la prise en compte des périodes d'assurance au titre du pays d'origine comme du pays d'accueil. Dans l'Union européenne, dans les pays de l'Espace économique européen (Islande, Liechtenstein, Norvège) et en Suisse, ces dispositions relèvent de règlements communautaires.

La négociation de l'accord de sécurité sociale franco-japonais a débuté en 2002 et a été conclue lors de la signature de l'accord le 25 février 2005. Il comporte un grand nombre de dispositions voisines de celles figurant dans les accords déjà signés par la France. Il vise principalement à instaurer pour les salariés une procédure de détachement permettant le maintien durant cinq ans de l'affiliation à la sécurité sociale du pays d'origine, et donc l'exonération de charges sociales dans le pays d'accueil. Il porte aussi sur la coordination des régimes d'assurance vieillesse pour les salariés et non salariés.

A. LE CHAMP D'APPLICATION DE L'ACCORD

L'accord définit dans son article 2 les différents domaines de la protection sociale dans lesquels il a vocation à s'appliquer.

Il s'agit essentiellement, pour la France, des assurances sociales des salariés et non salariés et de l'assurance accidents du travail. Sont en revanche exclus le régime spécial de la fonction publique et le régime spécial de sécurité sociale des marins.

Pour la Corée, l'accord s'applique au régime de la Pension nationale, à l'exception du fonds de pension nationale, et aux différents régimes de pensions des salariés, aux régimes d'assurance maladie et au régime d'assurance accidents du travail.

L'article 3 délimite, quant à lui, le champ d'application personnel de l'accord, qui couvre les personnes qui, quelle que soit leur nationalité, sont ou ont été soumises à la législation de l'un ou l'autre Etat contractant en application de sa législation, ainsi que leurs ayants droit.

B. LA DÉTERMINATION DE LA LÉGISLATION APPLICABLE

Le principe posé par l'accord (article 5) est que toute personne qui exerce une activité salariée ou non salariée dans l'un des deux Etats est soumise uniquement à la législation de cet Etat .

Ce principe général connaît toutefois plusieurs dérogations.

Des dispositions particulières sont prévues pour les travailleurs occupés à bord d'un navire (article 7). L'article 8 précise également que l'accord ne concerne pas les personnels diplomatiques et consulaires, tandis que les autres personnels employés par l'un des deux Etats sur le territoire de l'autre sont soumis uniquement à la législation de l'Etat qui les emploie.

Enfin, la dérogation principale, habituelle dans ce type d'accords, concerne les personnels salariés détachés , dont la situation est régie par l'article 6. D'une manière générale, le statut de salarié détaché, à la différence de celui de salarié expatrié, permet à la personne envoyée temporairement à l'étranger de continuer à relever exclusivement du régime de protection sociale de son pays d'origine et de conserver l'ensemble des droits qui s'y attachent. Le détachement est une procédure dont la durée, nécessairement limitée, est fixée par la législation nationale (trois ans renouvelables une fois, soit six ans au maximum dans le droit commun français), mais peut être adaptée dans le cadre d'une convention bilatérale de sécurité sociale.

L'accord franco-japonais retient, pour le bénéfice du détachement, une durée prévisible du travail à accomplir n'excédant pas 5 ans . En cas d'interruption du séjour, un délai minimum d'un an est imposé avant de pouvoir bénéficier à nouveau pendant 5 années du statut de détaché. Les salariés japonais en France ou français au Japon en fonction au moment de l'entrée en vigueur de l'accord, pourront bénéficier du statut de détaché. Ils bénéficieront de la période de détachement maximale de 5 ans à compter de l'entrée en vigueur de l'accord, quelle que soit la durée antérieure de leur expatriation (article 26).

Le détachement des salariés japonais en France est conditionné à la possession d'une couverture contre les risques d'accidents du travail.

L'article 9 permet aux autorités compétentes des deux Etats de prévoir éventuellement, d'un commun accord, d'autres dérogations aux règles générales d'assujettissement en faveur d'une personne ou d'une catégorie de personnes, à condition que les intéressés soient soumis à la législation de l'un ou l'autre des deux Etats.

L'article 10 précise que l'affiliation obligatoire au régime japonais ne s'applique pas au conjoint ou aux enfants de nationalité française du détaché français au Japon. En revanche, dès lors que le conjoint ou les enfants sont de nationalité japonaise, leur situation est appréciée en fonction de la législation japonaise. Les ayants droit d'un travailleur salarié détaché du Japon en France ne sont pas soumis à la législation française, sauf s'ils exercent une activité professionnelle.

C. LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX DROITS SOCIAUX

L'accord reprend, dans son article 4, le principe fondamental de l' égalité de traitement , que l'on retrouve dans tous les accords de sécurité sociale auxquels la France est partie. Ainsi, les ressortissants de chaque Etat résidant sur le territoire de l'autre Etat, ainsi que leurs ayants droit, bénéficient d'un traitement égal à celui des nationaux.

L'article 13 traite de la prise en compte des périodes d'assurance accomplies sous la législation d'un Etat pour l'ouverture ou le maintien du droit aux prestations dans l'autre État, dans la mesure où ces périodes ne se superposent pas. Cette disposition vaut également pour les régimes spéciaux qui entrent dans le champ d'application matériel de l'accord, à la condition que les périodes accomplies au Japon ou en France l'aient été dans une profession correspondante.

La mise en oeuvre de ces dispositions fait l'objet de précisions propres au Japon (article 14) et propres à la France (articles 15 et 16). S'agissant des prestations d'invalidité, de vieillesse et survivants, les modalités de calcul retenues en France prévoient, lorsque les conditions d'ouverture du droit sont remplies au titre de la seule législation française, un double calcul (au titre de la seule législation française et en coordination), la prestation la plus élevée étant accordée. Il est notamment stipulé que les salariés détachés de France au Japon bénéficieront des allocations familiales françaises pour les enfants qui les accompagnent.

La prise en compte coordonnée des périodes d'assurance effectuées dans les deux Etats est l'une des principales avancées de l'accord en ce qui concerne l' assurance vieillesse . En effet, alors que le droit à pension est acquis auprès du régime français dès le premier trimestre cotisé, il suppose au Japon une durée de cotisation minimale de 25 ans, à défaut de laquelle l'intéressé ne perçoit qu'un capital forfaitaire de montant réduit. L'accord permettra donc aux ressortissants français de réunir plus facilement la condition de durée d'assurance de 25 ans exigée par le régime japonais , grâce à la comptabilisation des périodes d'assurance effectuées en France pour l'ouverture des droits, la prestation versée par le régime japonais, selon les règles de la législation japonaise, étant ensuite ramenée à une prestation prorata temporis correspondant aux périodes prises en compte et rémunérées par le seul régime japonais. Ce droit à une pension de retraite à la charge d'un régime japonais ne privera d'ailleurs pas l'assuré de ses droits à pension de retraite à la charge d'un régime français. Les périodes d'assurance seront de la même façon totalisée par le régime français, le montant de la pension lui-même ne correspondant qu'aux seules périodes validées par le régime français.

L'accord comporte enfin plusieurs dispositions diverses relatives à la monnaie de paiement des prestations et au libre transfert des sommes dues (articles 17), aux demandes de prestations ou réclamations (article 18), à l'entraide administrative (article 19), à la protection des données échangées dans le cadre de l'accord (article 20), à la langue de communication utilisée (article 21) et à l'exemption de la procédure de légalisation (article 22).

L'article 23 prévoit la conclusion, par les autorités compétentes, des arrangements administratifs nécessaires à l'application de l'accord. Un arrangement administratif général a été signé le 31 mars 2005 et un arrangement sur les formulaires administratif fin novembre 2006.

L'article 24 institue une commission mixte chargée de suivre l'application de l'accord.

L'entrée en vigueur de l'accord doit intervenir trois mois après que la dernière partie ait notifié l'achèvement de sa procédure interne de ratification (article 28).

II. UN ACCORD NÉCESSAIRE AU VU DES ÉCHANGES ÉCONOMIQUES BILATÉRAUX

Entamées en 2002, les négociations sur l'accord bilatéral de sécurité sociale ont abouti en octobre 2004 avant que le texte soit formellement signé à Paris le 25 février 2005.

Comme indiqué dans l'exposé des motifs du projet de loi, le gouvernement français a lié la procédure de ratification de cet accord au règlement d'un aspect particulier du traitement fiscal des salariés français détachés au Japon. En effet, les salariés étrangers détachés en France relevant d'une convention de sécurité sociale bénéficient depuis le 1 er janvier 2004 d'une exonération de l'impôt sur le revenu acquitté en France sur leurs cotisations de sécurité sociale versées à l'étranger. Cet avantage bénéficiera aux salariés japonais détachés en France dès l'entrée en vigueur du présent accord bilatéral de sécurité sociale. A défaut de disposition équivalente dans la législation fiscale japonaise, la France a souhaité qu'un avenant à la convention fiscale franco-japonaise prévoie un avantage analogue pour les salariés français détachés au Japon. Cet avenant a été signé au mois de janvier 2007.

Alors que la Japon a achevé la procédure parlementaire de ratification en juillet 2005, l'entrée en vigueur de l'accord de sécurité sociale est désormais attendue avec une certaine impatience, notamment en raison de l'avantage que présentera le statut de salarié détaché pour les entreprises françaises présentes au Japon ou pour les entreprises japonaises présentes en France.

Les accords de sécurité sociale constituent un moyen d'accompagner les échanges économiques bilatéraux, notamment les investissements qui nécessitent souvent l'expatriation de cadres ou de techniciens.

Jusqu'à la signature des accords avec la Corée en 2004 et le Japon en 2005, aucune convention de sécurité sociale ne liait la France avec les pays d'Asie, exception faite des Philippines, alors que les échanges avec ces pays sont en fort développement.

En 2005, le Japon était le 10 ème client de la France, avec plus de 5,4 millions d'euros d'exportations françaises, et le 9 ème fournisseur, les importations en provenance du Japon s'élevant à 10,3 millions d'euros.

La France est le 3 ème investisseur au Japon , après les Etats-Unis et les Pays-Bas, où beaucoup de sociétés européennes ont établi leur siège social. Les investissements réalisés par la France représentent 11 % du stock des investissements étrangers, soit un total d'environ 9 milliards d'euros. On recensait en 2005 près de 420 implantations de sociétés françaises, constituées en majorité de grandes sociétés du secteur de l'industrie et des biens de consommation.

Les grandes entreprises françaises sont largement présentes au Japon. Outre l'alliance Renault-Nissan en 2002, ces dernières années ont été marquées par d'importants investissements dans l'agroalimentaire, par Danone, dans les cosmétiques, par L'Oréal, dans la mode, par Chanel ou encore dans la banque, par la Société générale.

Par ailleurs, la France est, après la Grande Bretagne, le deuxième pays d'accueil pour les investissements japonais en Europe. L'usine Toyota de Valenciennes représente un investissement majeur, mais beaucoup d'autres sociétés japonaises sont présentes dans les secteurs de l'électronique, ou de la mécanique. Ces entreprises japonaises emploient au total 60 000 salariés.

La communauté française au Japon est en augmentation rapide, le nombre d'immatriculés dépassant les 7 500, soit 40 % de plus qu'il y a cinq ans. On compte par ailleurs plus de 20 000 Japonais en France.

CONCLUSION

Le niveau des échanges avec le Japon, notamment des investissements réciproques, renforce l'intérêt d'un accord destiné à faciliter la couverture sociale des Français au Japon et des Japonais en France, à l'image des instruments qui nous lient à plusieurs de nos autres partenaires de l'OCDE.

Après l'approbation de cet accord par le Parlement japonais, il paraît particulièrement nécessaire que la France achève à son tour la procédure de ratification afin de permettre dès que possible l'entrée en vigueur de l'accord.

Pour cette raison, votre commission vous demande d'adopter le présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du présent projet de loi le 20 février 2007.

A l'issue de l'exposé de M. Robert Del Picchia, rapporteur, la commission a adopté le projet de loi et proposé qu'il fasse l'objet d'une procédure d'examen simplifiée en séance publique.

PROJET DE LOI

(Texte proposé par le Gouvernement)

Article unique

Est autorisée l'approbation de l'accord de sécurité sociale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Japon, signé à Paris, le 25 février 2005 et dont le texte est annexé à la présente loi 2 ( * ) .

* 1 Algérie, Andorre, Bénin, Bosnie-Herzégovine, Cameroun, Canada, Cap-Vert, Chili, Congo, Côte d'Ivoire, Croatie, Etats-Unis, Gabon, Israël, Macédoine, Madagascar, Mali, Maroc, Mauritanie, Monaco, Monténégro, Niger, Philippines, Saint Marin, Sénégal, Serbie, Togo, Tunisie, Turquie. Un accord spécifique est également en vigueur avec la province de Québec.

* 2 Voir le texte annexé au document Assemblée nationale n° 3678 (XII e législature)

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