N° 2222

ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

N° 202

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale

le 13 janvier 2010.

Enregistré à la présidence du Sénat

le 13 janvier 2010.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE (1) CHARGÉE DE PROPOSER UN TEXTE SUR LES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION DE LA PROPOSITION DE LOI visant à rendre obligatoire l' installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d' habitation ,

PAR M. DAMIEN MESLOT,

Député.

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PAR M. BRUNO SIDO,

Sénateur.

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(1) Cette commission est composée de : M. Patrick Ollier, député, président ; M. Jean-Paul Emorine , sénateur, vice-président ; M. Damien Meslot, député , M. Bruno Sido, sénateur , rapporteurs.

Membres titulaires : MM. Jean-Claude Bouchet, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Annick Lepetit, M. Pierre Morange, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, députés ; MM. Gérard Cornu, Jean-Claude Danglot, Daniel Dubois, Roger Madec, Daniel Raoul, sénateurs .

Membres suppléants : MM. François Brottes, Jean Grellier, Gérard Hamel, Mme Laure de La Raudière, MM. Serge Poignant, François Rochebloine, députés ; MM. Yannick Botrel, Dominique Braye, Jean-Pierre Chevènement, Pierre Hérisson, Jackie Pierre, Thierry Repentin, Charles Revet, sénateurs .

Voir les numéros :

Assemblée nationale (12 ème législature) : 1 ère lecture : 2535 , 2554 et T.A. 486 .

(13 ème législature) : 2 ème lecture : 56 , 953 et T.A. 158 .

Sénat : 1 ère lecture : 22 (2005-2006), 116 et T.A. 59 (2006-2007).

2 ème lecture : 399 , 438 et T.A. 135 (2007-2008).

TRAVAUX DE LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE

MESDAMES, MESSIEURS,

La commission mixte paritaire, chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à rendre obligatoire l'installation de détecteurs de fumée dans tous les lieux d'habitation (n° 1049), s'est réunie à l'Assemblée nationale le mercredi 13 janvier 2010.

Elle a tout d'abord procédé à la désignation de son bureau qui a été ainsi constitué :

- M. Patrick Ollier, député, président ;

- M. Jean-Paul Émorine, sénateur, vice-président ;

- M. Damien Meslot, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale ;

- M. Bruno Sido, sénateur, rapporteur pour le Sénat.

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* *

La Commission a ensuite procédé à l'examen des dispositions restant en discussion, sur la base du texte adopté par le Sénat en deuxième lecture, après que le président Patrick Ollier eut procédé à l'appel des membres de la commission mixte paritaire.

M. Patrick Ollier, président. Nous sommes aujourd'hui les premiers à mettre en oeuvre une nouvelle procédure introduite par la révision constitutionnelle de 2008. Cette commission mixte paritaire ne se réunit pas en effet à la demande du Gouvernement, mais pour la première fois à l'initiative du Parlement. Le président Jean-Paul Émorine et moi-même avons fortement insisté pour que cette proposition de loi soit examinée dans ce cadre, volonté relayée par les présidents de nos assemblées respectives.

La navette parlementaire avait mis en évidence des divergences d'appréciation. Nous étions parvenus à un accord et avions transcrit l'obligation d'installer des détecteurs de fumée dans la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, mais le Conseil constitutionnel avait censuré le dispositif pour des raisons de procédure. J'insiste bien sur la motivation des juges constitutionnels, qui n'avait pas trait au fond. Il nous faut maintenant cesser de tergiverser et sceller notre accord une nouvelle fois dans cette proposition de loi. Des vies sont en jeu. J'espère donc de tous une attitude d'ouverture et un vote consensuel.

M. Jean-Paul Émorine, vice-président. Une commission mixte paritaire n'est en effet pas le lieu d'un combat d'une assemblée contre l'autre, mais de la recherche d'un compromis acceptable par tous.

Je veux rendre hommage aux auteurs de la proposition de loi, Damien Meslot et Pierre Morange. Je voudrais aussi rappeler que, pour ce texte, le président Ollier et moi avons agi ensemble en dépit des réserves gouvernementales. Nous nous sentons tous moralement responsables chaque fois que nous rencontrons des victimes d'incendie domestique. Je sais qu'il existe un désaccord entre l'Assemblée nationale et le Sénat sur la question de la responsabilité de l'installation des détecteurs de fumée au propriétaire ou à l'occupant du logement, mais il est désormais impératif d'avancer.

Je trouve aussi piquant que le Gouvernement ait d'ailleurs commencé une campagne de sensibilisation par voie de presse, conformément à une disposition de la proposition de loi alors qu'il s'est toujours montré très réservé sur celle-ci. Il reste au Parlement à achever son travail.

M. Patrick Ollier, président. Le président Émorine a raison d'évoquer notre action commune pour passer outre l'opposition gouvernementale. Je me souviens des débats parlementaires lors de la loi de mobilisation pour le logement dans lesquels j'avais dû personnellement intervenir pour que la question des détecteurs de fumée se trouve résolue. Je sais trop qu'à Rueil, s'ils avaient été obligatoires, ils auraient certainement sauvé des vies.

A l'article 2, unique article demeurant en discussion, la commission mixte paritaire examine un amendement de MM. Damien Meslot et Bruno Sido.

M. Bruno Sido, rapporteur pour le Sénat. Nous présentons, Damien Meslot et moi-même, un amendement conjoint visant à rétablir à l'article 2 restant seul en discussion la rédaction de compromis retenue par la commission mixte paritaire de la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion.

M. Patrick Ollier, président. Je salue la position constructive du Sénat.

M. Damien Meslot, rapporteur pour l'Assemblée nationale. Je remercie moi aussi le Sénat ainsi que les présidents des deux commissions, sans l'action desquels cette proposition de loi n'aurait pas pu être examinée ici et maintenant. Cet amendement commun voit chacun accomplir une partie du chemin qui le séparait de l'autre : l'opinion du Sénat prévaut sur les normes techniques applicables aux détecteurs, celle de l'Assemblée nationale sur la responsabilité de principe de l'occupant dans l'installation de ces équipements.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Nous nous opposions dès 2005 non sur le problème soulevé par cette proposition de loi mais sur les solutions proposées. Le ministre Jean-Louis Borloo avait sollicité un rapport sur le sujet, qui avait conclu à l'importance d'une politique de prévention préalable à toute obligation légale. J'ai en mémoire la catastrophe de L'Haÿ-les-Roses dans laquelle des personnes paniquées par les flammes s'étaient précipitées dans la cage d'escalier, en dépit des préconisations des pompiers, pour y trouver une fin tragique. La proposition de loi prévoit un délai de cinq années avant que l'obligation d'installation n'intervienne. C'est un point positif.

Notre deuxième divergence portait sur le type d'équipement rendu obligatoire. Il était envisagé que ce soit exclusivement des détecteurs avertisseurs autonomes. L'opposition à l'Assemblée nationale ainsi que le Sénat préféraient que la norme soit prévue par décret. Ils ont été entendus. Je m'en félicite.

Un seul désaccord persiste. Il porte sur le coût d'installation, supporté dans cet amendement par l'occupant du logement. Nous pensons qu'un détecteur de fumée est un immeuble par destination et que, à ce titre, son installation devrait toujours échoir au propriétaire et sa maintenance à l'occupant. Notre analyse n'a pas varié.

Notre position sur ce texte reste par conséquent inchangée.

M. Patrick Ollier, président. Je souhaiterais que nous ne refassions pas ici les débats des deux lectures dans les deux assemblées. Même si le temps perdu n'est pas du fait de l'opposition, nous ne pouvons nous permettre de tergiverser. Nous devons nous mettre en situation de convaincre le Gouvernement et, pour cela, lui proposer un texte applicable.

M. Daniel Raoul. Je souligne les avancées réalisées par ce texte. Cependant, il me semble que le propriétaire a une assurance et que c'est à lui d'équiper un logement avant de le mettre en location. Je viens d'une ville de 150 000 habitants dont 38 000 étudiants logés pour beaucoup dans le parc privé ; je vois mal comment leur imposer d'installer un détecteur de fumée.

M. Jean-Pierre Chevènement. Ce texte a une histoire. J'avais signé dans les années 1980 une proposition de loi créant un contrôle technique des logements à chaque transaction immobilière. Elle n'a jamais pu être discutée, y compris par des majorités auxquelles j'appartenais. La disposition dont nous débattons aujourd'hui est plus modeste. J'estime moi aussi que la logique plaide en faveur d'une responsabilité du propriétaire, eu égard à la faible somme que représente l'investissement et à des raisons pratiques évidentes.

M. Jean-Claude Danglot. Nous discutons d'un sujet plus humain que politique. Comme j'ai été pompier avant d'entrer au Sénat, il me touche personnellement.

Nous devons rechercher la solution la plus efficace. Le texte du Sénat me paraît le meilleur et le plus équilibré, y compris pour le parc public de logements. Il doit apparaître comme une protection, non comme une contrainte. Une information importante sera donc nécessaire. J'estime par ailleurs scandaleuse l'attitude des compagnies d'assurance dans ce dossier.

M. Pierre Morange. Je m'associe aux remerciements déjà présentés aux présidents des assemblées et des commissions. Je retiens aussi la démarche de la commission mixte paritaire et je souhaite moi aussi aboutir à une version de compromis.

La campagne gouvernementale en faveur des détecteurs de fumée a commencé. Je m'en réjouis, la sensibilisation de la population est en cours.

En ce qui concerne le débat sur l'opportunité de confier au propriétaire ou à l'occupant l'installation des équipements, je tiens à rappeler que c'est au dernier nommé qu'il revient d'assurer son habitation. Par ailleurs, en cas de difficultés d'ordre social, les collectivités territoriales pourraient décider d'une aide au cas par cas.

M. Jean-Claude Bouchet. Je félicite nos présidents d'avoir obtenu la convocation de cette commission mixte paritaire. Il est en effet temps de clore le débat.

M. Gérard Cornu. Nous voyons persister le débat qui avait opposé au cours de la navette l'Assemblée nationale et le Sénat. Je crois cependant moi aussi qu'un compromis est nécessaire. Je comprends les réticences des bailleurs sociaux devant les sommes en jeu. Toutefois, les propriétaires privés pourraient procéder aux aménagements demandés, qui sont peu coûteux et de surcroît déductibles. Je crains que les locataires n'accordent à ces équipements qu'une attention insuffisante.

Mme Annick Lepetit. Je m'inscris dans la continuité des propos précédents. Je salue le travail accompli de part et d'autre, notamment celui du Sénat, et je comprends la nécessité d'agir maintenant. Je dois cependant insister sur la simplicité d'une installation effectuée par le propriétaire, facilement vérifiable. A l'inverse, une contrainte pesant sur l'occupant me paraît source de contentieux à venir, que nous devons prévenir. On évoque la situation des offices HLM, mais la proposition de loi leur accorde un délai de cinq ans et la presse se fait l'écho de leurs cagnottes. Notre position me semble par conséquent tout à fait applicable et réaliste.

M. Daniel Dubois. J'admets l'urgence et la nécessité d'un compromis, même si je regrette que ce ne soit pas sur une installation à la charge des propriétaires. Je rappelle qu'au moins le dixième des locataires d'habitations à loyer modéré ne sont pas assurés malgré l'obligation de souscrire une police d'assurance à l'entrée dans les murs. Il est clair que, très vite, les détecteurs disparaîtront du monde HLM qui est pourtant particulièrement exposé à ces sinistres comme à leurs retombées médiatiques. Les incendies récents ont montré que les immeubles des zones urbaines sensibles n'étaient équipés ni en extincteurs ni en extracteurs de fumée, ceci en raison des trop nombreuses dégradations constatées. Les risques sont grands. Je regrette la position des organismes HLM sur cette proposition de loi.

M. Damien Meslot, rapporteur pour l'Assemblée nationale. Nous voyons resurgir les mêmes discussions autour des mêmes sujets. Je m'en tiendrai aux faits. 1 % seulement des logements français sont équipés de détecteurs de fumée. 800 personnes perdent la vie dans des incendies domestiques chaque année. 10 000 autres sont blessées. Dans les autres pays, l'obligation d'installation a fait chuter ces statistiques de moitié.

Le texte qui nous est soumis aujourd'hui a été amélioré par l'opposition et par le Sénat. Le Gouvernement a lancé une campagne de sécurité publique sur le sujet. Nous présentons un amendement commun, qui reprend un compromis déjà adopté précédemment. Le moment de la décision me semble venu.

Je concède volontiers que, sans doute, tous les foyers français ne seront pas équipés. Au Royaume-Uni, généralement considéré comme respectueux des obligations légales, le taux d'installation est de 80 %. Mais mieux vaut tenir que courir. Je préfère voir les deux tiers des habitations françaises protégées que pratiquement aucune dans l'attente d'une hypothétique loi parfaite.

Nous avons d'ailleurs prévu un délai pour donner aux citoyens le temps d'appréhender les enjeux. J'ai participé à une conférence associant des compagnies d'assurance qui, convaincues de l'utilité du dispositif, envisagent de l'offrir avec chaque contrat multirisque habitation. Les mentalités avancent pour le bien de tous. Même si on juge ce texte imparfait, on ne peut pas nier qu'il constitue une avancée.

M. Bruno Sido, rapporteur pour le Sénat. Je comprends que les débats aient duré près de cinq ans. Il faut y mettre un terme. Le Sénat transige en admettant le principe d'une installation par l'occupant, mais il est prévu que des exceptions incombent au propriétaire. C'est le cas dans les parties communes, pour les locations meublées et saisonnières, et pour une liste de situations qu'établira un décret en Conseil d'État. J'appelle les membres de la commission mixte paritaire à soutenir cette version de compromis, la pratique se chargera de corriger d'éventuelles imperfections.

M. Patrick Ollier, président. J'insiste sur le fait que Jean-Paul Émorine et moi avons dû imposer ce vote au Gouvernement qui n'en voulait pas. Si ce dernier sent une division chez les parlementaires alors que la Constitution lui réserve le droit d'inscrire à l'ordre du jour du Parlement la lecture des conclusions de cette commission mixte paritaire, il n'inscrira pas ce texte et nous n'y pourrons rien.

Une mise à la charge des propriétaires représenterait plus de soixante-cinq millions d'euros à la charge des bailleurs sociaux. Cette somme vaut que nous la prenions en considération. Il faut choisir entre ne rien faire ou s'entendre, faire le premier pas, lancer le mouvement de l'ensemble de la société.

M. Daniel Raoul. Savons-nous ce que contiendra le décret relatif aux propriétaires non occupants ?

M. Damien Meslot, rapporteur pour l'Assemblée nationale. Il établira la liste des cas dans lesquels la charge de l'installation reviendra au propriétaire, en fonction de la durée du bail et de la nature de l'occupant.

M. Patrick Ollier, président. Il est normal de confier cette mission au pouvoir réglementaire après avis du Conseil d'État. Les cas à envisager sont nombreux. L'équilibre devra être satisfaisant.

M. Daniel Raoul. Je comprends qu'une position unanime de la commission mixte paritaire aiderait à obtenir l'inscription de ses conclusions à l'ordre du jour des assemblées, dans une question qui relève de la protection des citoyens.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je sollicite une brève suspension de séance.

M. Patrick Ollier, président. Je vous l'accorde volontiers pour cinq minutes.

La séance est suspendue pour cinq minutes.

M. Daniel Raoul. Nos réticences perdurent sur le décret auquel renvoie la proposition de loi, nous aurions préféré davantage de clarté. Cependant, nous entendons les arguments qui ont été présentés.

Nous nous abstiendrons sur l'amendement de nos deux rapporteurs et voterons en faveur de la proposition de loi.

M. Jean-Claude Danglot. Je comprends moi aussi l'enjeu de cette commission mixte paritaire. Je m'abstiendrai sur les deux votes, mais il s'agit d'une abstention positive.

M. Patrick Ollier, président. Je prends note avec émotion de ces positions. Il est désormais temps de mettre aux voix.

La commission mixte paritaire adopte l'amendement à l'unanimité des suffrages exprimés , les parlementaires socialistes et M. Jean-Claude Danglot s'abstenant.

La commission mixte paritaire adopte la proposition de loi ainsi modifiée à l'unanimité des suffrages exprimés , M. Jean-Claude Danglot s'abstenant.

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En conséquence, la commission mixte paritaire vous demande d'adopter la proposition de loi dans le texte reproduit à la suite du tableau comparatif figurant ci-après.

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