DEUXIÈME PARTIE - EXAMEN DES ARTICLES

Article premier - Objectifs de la loi

Par les principes qu'il énonce, l'article premier constitue, en quelque sorte, le préambule du projet de loi.

Le premier alinéa fait ainsi écho à l'un des articles du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 qui dispose qu'elle [la Nation] garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère... la protection de la santé, la sécurité matérielle..., en établissant un lien direct entre l'environnement et la santé de l'individu. Plus précisément, les auteurs du projet de loi, entendant s'appuyer sur les études scientifiques et épidémiologiques qui concluent à un lien de causalité entre la pollution de l'air et les risques pour la santé publique, fondent l'obligation d'agir faite aux pouvoirs publics en matière de lutte contre la pollution de l'air sur cet article du Préambule de la Constitution de 1946. On peut remarquer que l'article premier de la loi 61-842 du 2 août 1961 relative à la lutte contre les pollutions atmosphériques et les odeurs établissait déjà ce lien entre pollution et santé, puisqu'il reconnaissait que « les pollutions de l'atmosphère compromettent la santé » .

Cette obligation d'agir est reprise dans les deux alinéas suivants qui déterminent le champ d'application de la loi. Cette dernière doit définir les règles permettant :

- de connaître et surveiller la pollution de l'air ;

- de définir des outils préventifs pour sauvegarder la qualité de l'air ;

- de disposer de mesures visant à réduire de supprimer les pollutions atmosphériques notamment par une utilisation rationnelle de l'énergie.

À propos du premier alinéa de cet article, il est évident que l'on ne peut qu'acquiescer à une pétition de principe aussi généreuse.

Mais il convient de s'interroger sur la portée juridique d'une telle affirmation et sur ses éventuelles implications contentieuses.

En fait, il s'agit d'une pétition de principe, sans réelle portée normative, mais qui, en affirmant l'existence d'un lien entre la préservation de la qualité de l'air et la santé publique, risque, à terme, de donner lieu à contentieux même si elle n'est assortie d'aucune sanction administrative ou pénale.

S'agit-il de reconnaître des moyens « d'ordre public », permettant au juge d'évoquer d'office le sujet quel que soit le différend ou contentieux à lui soumis ? En cas de « pics » de pollution, cherche-t-on à ouvrir un droit de recours à une association de protection de l'environnement ?

Bien plus, si ce droit venait un jour à être consacré par la jurisprudence sur le fondement de cette disposition légale, à rencontre de qui serait-il invoqué ? Le maire ? Le président du conseil général ou régional ? Le préfet (donc l'État) ? Enfin, quelle correspondance pénale assurer à ce principe ? Pourra-t-on évoquer la non-assistance à personne en danger et ce à l'égard des personnes privées comme des personnes publiques ?

De telles questions méritent d'autant plus d'être posées que la définition donnée de la pollution atmosphérique à l'article 2 du projet de loi s'avère - on le verra plus loin - extensive.

Pour prévenir ces risques contentieux, il aurait pu sembler logique de s'inspirer de la rédaction des articles premiers de la loi n° 93-2 du 3 janvier l992 sur l'eau et n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement. On rappellera ici que le premier alinéa de l'article premier de la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau résulte d'un amendement proposé par la commission des Affaires économiques et du plan du Sénat ainsi rédigé : « l'eau fait partie du patrimoine commun de la nation ». Sa protection, sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable, dans le respect des équilibres naturels sont d'intérêt général. Il s'agissait de mettre l'accent sur la nature particulière de l'eau et sur l'obligation pour les pouvoirs publics de mettre en oeuvre les politiques propres à concilier des deux priorités indissociables en ce domaine : la protection et la mise en valeur de la ressource et le développement de la ressource utilisable dans le respect des équilibres naturels.

Votre commission vous propose d'adopter l'article premier, sans modification.

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