M. Adrien GOUTEYRON

I. LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

A. DES PRIORITÉS QUI S'INSCRIVENT DANS LA CONTINUITÉ DES ANNÉES PRÉCÉDENTES

Les priorités affichées par le ministère des affaires étrangères pour l'année 2005 s'inscrivent dans le prolongement de celles retenues en 2003 et 2004 :

- la relance de l'aide publique au développement , conformément aux engagements du Président de la République ;

- l' affirmation du rayonnement linguistique et culturel de la France ;

- la poursuite de la réforme du droit d'asile ;

- l' amélioration de la sécurité des Français à l'étranger ;

- la promotion de l'Europe et des institutions européennes .

B. UN BUDGET QUI PARTICIPE À LA MAÎTRISE DES DÉPENSES DE L'ETAT

Le projet de budget du ministère des affaires étrangères est marqué par un souci de participer pleinement à l'effort de maîtrise des dépenses de l'Etat . Il augmente de 4,36 %, mais cette progression résulte intégralement de la hausse des crédits consacrés à l'aide publique au développement, et en particulier, de la contribution de 150 millions de la France au fonds de l'ONU consacré à la lutte contre le SIDA.

Hors aide publique au développement, les crédits du ministère des affaires étrangères sont en légère diminution en valeur . Les dépenses de fonctionnement sont maîtrisées, grâce notamment au non-remplacement de un départ à la retraite sur deux , conformément aux souhaits de votre commission des finances.

Dans ce contexte de forte contrainte budgétaire, le ministère des affaires étrangères s'implique fortement dans une démarche de réforme, tant dans le cadre de sa stratégie ministérielle de réforme que dans celui de la mise en oeuvre de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

C. UNE AMÉLIORATION NÉCESSAIRE DES CONDITIONS DE GESTION

Le prédécesseur de votre rapporteur spécial, notre ancien collègue Jacques Chaumont, avait, au cours des dernières années, souligné les difficultés importantes que le niveau élevé de régulation budgétaire entraînait pour le ministère des affaires étrangères, et, en particulier, pour la gestion des actions de coopération par les postes à l'étranger. Il convient donc de se féliciter de la décision consistant à exonérer le ministère des affaires étrangères des mesures de régulation budgétaire à compter de l'exercice en cours : il était en effet indispensable de tenir compte du caractère spécifique du ministère des affaires étrangères, dont une part importante des crédits résulte d'engagements internationaux pris par la France ou s'inscrivent dans le cadre de partenariats avec les acteurs locaux à l'étranger.

Par ailleurs, on notera que le ministère des affaires étrangères bénéficie depuis cette année d'une « ristourne » de 4 millions d'euros sur les recettes générées par les visas, les demandes de visas faisant désormais l'objet d'une facturation, mais surtout, bénéficie de l'intégralité des produits de la cession de ses biens immobiliers.

Par conséquent, si le budget du ministère des affaires étrangères est en légère régression (hors aide publique au développement), il n'est plus soumis aux mesures de régulation budgétaire et dispose donc d'une plus grande visibilité quant au montant de crédits dont il dispose sur l'ensemble de l'exercice.

Votre rapporteur spécial considère que s'il est parfaitement logique que le ministère des affaires étrangères contribue à la maîtrise des dépenses de l'Etat, il était également indispensable de l'exonérer des contraintes liées à la régulation budgétaire. Par ailleurs, il se félicite que les économies réalisées par le ministère des affaires étrangères puissent désormais être - au moins partiellement - recyclées afin de lui permettre de financer ses actions prioritaires.

D. UN BUDGET DE TRANSITION VERS LA LOLF

Le projet de budget du ministère des affaires étrangères est marqué par la préfiguration de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), qui se traduit :

- par le développement des expérimentations des programmes de la nouvelle nomenclature du budget de l'Etat, qui concerneront 872 emplois budgétaires et 161,3 millions d'euros. Ces expérimentations se traduisent concrètement par la création de quatre nouveaux chapitres budgétaires, qui correspondent aux quatre futurs programmes 1 ( * ) qui seront gérés par le ministère des affaires étrangères. Ces modifications de nomenclature, indispensables pour « tester » les nouvelles modalités de gestion prévues par la LOLF, rendent toutefois difficiles les comparaisons, d'une année sur l'autre, des dotations budgétaires ;

- par la présentation d'un avant-projet annuel de performance relatif à l'action extérieure de la France, qui expose la stratégie du ministère des affaires étrangères pour ses programmes et ses actions compris dans cette mission, ainsi que les objectifs et les indicateurs qui y sont associés ;

- par le recensement et la valorisation du patrimoine immobilier et mobilier du ministère des affaires étrangères ;

- enfin, par la mise en place d'un plan de contrôle de gestion.

Votre rapporteur spécial est pleinement conscient des problèmes que pose la mise en oeuvre de la LOLF pour le ministère des affaires étrangères, compte tenu de la spécificité de ses missions et de l'éclatement de son réseau à l'étranger. C'est la raison pour laquelle il se félicite de l'implication du ministère des affaires étrangères dans la mise en oeuvre de la LOLF . Votre rapporteur spécial considère qu'il conduit cet exercice avec beaucoup d'application, et constate d'ailleurs qu'une culture de gestion semble peu à peu se développer dans ce ministère. Les réformes rendues nécessaires par la LOLF ou dont la conception est liée à sa mise en oeuvre constituent, au-delà des problèmes pratiques qu'elles posent, d'intéressantes opportunités de modernisation pour le ministère des affaires étrangères.

E. UNE VOLONTÉ RÉAFFIRMÉE DE RÉFORME DU FONCTIONNEMENT ET DU RÉSEAU DU MINISTÈRE

Le présent projet de budget s'inscrit dans le cadre de la stratégie ministérielle de réforme (SMR) du ministère des affaires étrangères, qui a été approuvée au dernier trimestre 2003. Trois axes la sous-tendent :

- le renforcement de la capacité stratégique du ministère pour mieux définir les priorités de l'action extérieure de la France dans ses nouvelles dimensions, notamment son européanisation croissante, les conséquences de la mondialisation sur nos capacités d'influence et la régionalisation du monde et son impact sur notre organisation ;

- la valorisation des compétences et la motivation des agents du ministère dans leur diversité ;

- la rénovation des outils et des méthodes de travail avec la création d'une direction collégiale et les perspectives ouvertes par la LOLF en termes de gestion par objectifs.

Quatre priorités ont été définies :

- l'immobilier, en particulier, le regroupement des services parisien sur un site unique ;

- la formation continue des agents ;

- la sécurité, qui repose principalement sur la mise à niveau des installations de sécurité dans l'ensemble des postes ;

- la modernisation des communications.

Par ailleurs, la rationalisation du réseau du ministère des affaires étrangères sera poursuivie, à travers :

- la cession des biens immobiliers devenus inutiles ;

- le regroupement des implantations à l'étranger ;

- la réduction du dispositif consulaire et culturel en Europe ;

- la poursuite du redéploiement des effectifs vers les zones prioritaires.

Votre rapporteur spécial considère que l'adaptation du réseau du ministère des affaires étrangères est indispensable, tant pour s'adapter aux évolutions de la situation géopolitique mondiale que pour limiter les dépenses de fonctionnement, afin de dégager de nouvelles marges de manoeuvre budgétaires.

F. CERTAINES DOTATIONS SONT ENCORE INSUFFISANTES

Les économies dégagées par le ministère des affaires étrangères sur ses dépenses de rémunération et de fonctionnement, mais aussi les recettes générées par la cession de biens immobiliers, permettent de financer certaines de ses priorités, mais pas l'intégralité des besoins du ministère. Votre rapporteur spécial regrette ainsi que le ministère des affaires étrangères n'ait pas été en mesure de financer certains pans de l'action du ministère de manière à assurer ses missions dans de bonnes conditions à l'étranger.

On notera par exemple que, malgré une progression bienvenue, les crédits d'investissement du ministère des affaires étrangères restent largement insuffisants, au vu de l'état de son patrimoine à l'étranger et de ses projets de constructions nouvelles. Votre rapporteur spécial souhaite que la mise en oeuvre de la LOLF permette, grâce à la définition d'une norme d'entretien des biens immobilier, mais aussi, à la mise en oeuvre de la fongibilité des crédits, de mieux entretenir le parc immobilier de l'Etat à l'étranger, de réduire les délais de rénovation des biens fortement dégradés, et, parfois, rendus inutilisables, et d'éviter les retards de paiement constatés ces dernières années, et liés à l'indisponibilité des crédits 2 ( * ) .

Par ailleurs, votre rapporteur spécial note que l'instruction des demandes de visas ne bénéficie toujours pas de personnel suffisant pour assurer des conditions de sécurité jugées satisfaisantes par le ministère lui-même. Sur ce sujet, il souhaite également que soit mieux suivie et exploitée, depuis l'administration centrale, l'évolution des délivrances de visas à l'étranger.

* 1 Trois programmes dans le cadre de la mission « action extérieure de la France » et un programme dans le cadre de la mission interministérielle « aide publique au développement ».

* 2 Sur ces questions, on pourra se reporter au rapport d'information du prédécesseur de votre rapporteur spécial, notre ancien collègue Jacques Chaumont, « Atouts et ajustements de l'outil de coopération français en Turquie », n° 395 (2003-2004).