INTRODUCTION

L'année 2004 a été marquée par un retour limité de la croissance, mais avec de fortes incertitudes quant à sa poursuite. Ainsi, la hausse continue des prix du pétrole, les incertitudes géopolitiques, ou bien les craintes suscitées par l'élargissement de l'Union européenne, sont autant de facteurs qui pourraient, le moment venu, handicaper une croissance qui reste fragile.

L'échec du sommet de Cancun a révélé de graves divergences entre les différents partenaires. La déclaration interministérielle qui a conclu les débats, et qui réaffirme la détermination des membres à conclure les négociations au 1 er janvier 2005, ne doit pas dissimuler les incertitudes qui pèsent sur cette forme de multilatéralisme. Si un « accord-cadre » a pu être négocié le 31 juillet 2004, il ne préjuge en rien du contenu de l'accord final, et il n'est pas certain que l'échéancier puisse être tenu.

De plus, les différends commerciaux entre l'Europe et les Etats-Unis, dans un contexte de campagne électorale, sont nombreux, avec notamment les menaces qui pèsent sur l'avionneur européen Airbus.

La position française s'est ainsi sensiblement dégradée, l'excédent commercial étant en repli de plus d'un milliard d'euros au premier semestre 2004. Une réflexion est actuellement en cours sur la réorientation de la structure de nos échanges, en direction des pays les plus dynamiques.

PREMIÈRE PARTIE :

LE CONTEXTE INTERNATIONAL ET NATIONAL

I. LE CONTEXTE INTERNATIONAL : DES SITUATIONS CONTRASTÉES

A. UNE CROISSANCE MONDIALE FORTE MAIS FRAGILISÉE

La croissance mondiale a été vive depuis un an, tirée par les économies américaine, britannique et asiatique , et depuis la fin 2003, par la reprise en Europe continentale.

Au printemps 2004, le cycle mondial a amorcé une nouvelle phase. Les facteurs exogènes (politiques monétaire et budgétaire, prix du pétrole) se réorientent dans un sens moins favorable et suggèrent un freinage en cours de l'expansion mondiale , même si les indicateurs conjoncturels sont bien orientés dans la plupart des pays. Parallèlement, la composition mondiale de la croissance se rééquilibre au profit des zones entrées le plus tardivement dans la phase de rebond (Europe continentale et Amérique latine). La reprise mondiale s'est de plus accompagnée d'une progression des échanges internationaux.

En 2003, l'Asie émergente a constitué le principal moteur du commerce mondial, mais les contributions des Etats-Unis et de la zone euro progressent au 1 er semestre 2004.

B. LES ETATS-UNIS : UNE SITUATION TOUJOURS INCERTAINE

L'économie américaine, qui a connu une croissance vigoureuse en 2003 (3 %), est restée dynamique au premier semestre (4 % en rythme annualisé), malgré un léger ralentissement au deuxième trimestre, provenant essentiellement du freinage de la consommation des ménages.

Celui-ci s'explique par la disparition des stimuli macroéconomiques (fin des baisses d'impôts et chute des refinancements hypothécaires, en lien avec la remontée des taux longs) et par une poussée d'inflation liée à la hausse du prix du pétrole. Au début de l'été, le ralentissement est également perceptible dans les créations d'emploi et les exportations. En revanche l'investissement, vigoureux depuis l'été 2003, accélère. La Fed estimant que le ralentissement récent était passager, a augmenté pour la deuxième fois ses taux directeurs de 25 points de base.

A l'approche des élections présidentielles, de nombreux débats ont lieu sur la politique économique menée par l'administration républicaine, les critiques formulées portant principalement sur le niveau du déficit budgétaire et commercial (les « twin deficits », pour reprendre l'expression popularisée par l'économiste Paul Krugman).

Ainsi :

- le déficit budgétaire s'établissait, pour l'administration fédérale, à 413 milliards de dollars à la fin du mois de septembre 2004, contre 377 milliards de dollars l'année précédente, soit 3,6 % du PIB ;

- le déficit commercial s'établissait, à la même date, soit fin septembre 2004, à 393,4 milliards de dollars, ce qui laisse présager que le déficit « record » de 2003 (496,5 milliards de dollars) sera amplement dépassé.

C. LE JAPON PEINE À SORTIR DU MARASME

L'économie japonaise a crû de 5,5 % en rythme annualisé au premier semestre 2004, sous l'effet d'un investissement massif des entreprises et d'une consommation relativement soutenue des ménages.

Au printemps 2004, on observe toutefois un fort ralentissement de la demande intérieure provenant principalement de l'investissement productif des entreprises, qui pèse sur l'activité.

D. LA ZONE EURO : LE RETOUR DE LA CROISSANCE ?

Dans la zone euro, la reprise amorcée à l'été 2003 s'est confirmée, avec un taux de croissance du PIB supérieur à 2 % en rythme annualisé au premier semestre. La zone a bénéficié du dynamisme du commerce mondial et de la fin de l'appréciation de l'euro par rapport au dollar.

Les composantes de la croissance diffèrent sensiblement d'un pays à l'autre. La demande intérieure a été le principal moteur de l'activité en France et en Espagne, et dans une moindre mesure, en Italie. En Allemagne, la croissance doit davantage au soutien du commerce extérieur, dans un contexte d'atonie persistante de la demande interne.

E. LES PAYS ÉMERGENTS : UN RÉSERVOIR DE CROISSANCE ?

L'Asie émergente a bénéficié du dynamisme de la Chine. Face aux signes de surchauffe (pressions inflationnistes et apparition d'un déficit commercial), les autorités chinoises ont mis en place des mesures de refroidissement qui ont commencé à produire leurs effets au deuxième trimestre 2004.

L'Amérique latine a bénéficié de la reprise mondiale et de conditions monétaires favorables. Enfin, les pays en transition ont connu une croissance de l'ordre de 5,5 % en rythme annualisé au premier semestre 2004 (après 6 % en 2003), et bénéficié de gains de parts de marché.

F. UN COMMERCE MONDIAL TOUJOURS DYNAMIQUE

Le commerce mondial a été dynamique au premier semestre 2004 : il a crû de 9 % en rythme annualisé, après 5,5 % en 2003. Alors qu'en 2003 l'Asie émergente expliquait plus de la moitié de la progression du commerce mondial, les contributions sont plus équilibrées au 1 er semestre 2004 : 0,3 pour l'Asie émergente, 0,25 pour les Etats-Unis et 0,2 pour la zone euro.

Les mêmes tendances sont à l'oeuvre pour la demande mondiale adressée à la zone euro : elle a crû de 8,5 % en rythme annualisé, après 5,3 % en 2003 ; la part de l'Asie émergente dans cette progression, égale à 40 % en 2003, n'est plus que de 25 % au premier semestre 2004. Les contributions des différentes zones au commerce mondial sont ainsi en cours de rééquilibrage.

En 2003 la demande mondiale adressée à la France a progressé de 3,8 %, la France étant moins présente sur les marchés asiatiques. Au 1 er semestre 2004 la demande mondiale adressée à la France accélère (3,2 % contre 2,7 % au semestre précédent) en raison de la reprise de l'activité en Europe et du dynamisme des importations américaines. Les entreprises françaises ont été très réactives à cette hausse de la demande mondiale adressée à la France puisque les exportations françaises de biens augmentent au même rythme (3,1 % au premier semestre 2004 contre 2,8 % au second semestre 2003).

Evolution des PIB en volume

(en %)

PIB

2003

2003

2004

 
 

T1

T2

T3

T4

T1

T2

Union européenne

0,8

0,1

0,0

0,5

0,5

0,6

0,6

Zone Euro

0,5

0,0

-0,1

0,4

0,4

0,6

0,5

Etats-Unis

3,0

0,5

1,0

1,8

1,0

1,1

0,8

Japon

2,5

0,0

1,0

0,6

1,8

1,6

0,4

Royaume-Uni

2,2

0,2

0,7

0,9

1,0

0,7

0,9

Amérique latine

1,5

-

-

-

-

-

-

Asie hors Japon

7,3

-

-

-

-

-

-

Pays du Sud et de l'Est de la Méditerranée

4,6

-

-

-

-

-

-

Pays en Transition

5,9

-

-

-

-

-

-

Monde

3,8

-

-

-

-

-

-

Source : direction de la prévision

Evolution des importations de biens et services en volume

(en %)

 

2003

2003

2004

 
 

T1

T2

T3

T4

T1

T2

Zone Euro

1,9

-0,6

0,1

1,0

1,8

0,5

2,6

Etats-Unis

4,7

-0,5

1,2

0,0

4,3

3,0

2,1

Japon

5,0

0,6

-1,0

2,6

2,6

2,8

1,3

Royaume-Uni

0,9

1,1

-2,6

1,2

3,5

-0,3

1,0

Amérique latine

3,8

-

-

-

-

-

-

Asie hors Japon

14,7

-

-

-

-

-

-

Pays du Sud et de l'Est de la Méditerranée

6,0

-

-

-

-

-

-

Pays en transition

10,3

-

-

-

-

-

-

Demande mondiale adressée à la France

3,8

0,0

0,4

1,4

2,2

1,1

2,2

Commerce mondial

5,5

0,7

0,9

1,5

3,0

1,8

2,4

Source : direction de la prévision