M. Jean-Pierre Demerliat

I. PRINCIPALES OBSERVATIONS SUR LA MISSION

Cette mission spécifique présente des crédits , destinés au financement :

- d'une part, des « mesures générales en matière de rémunérations », objet d'une première dotation (programme 551) ;

- d'autre part, des « dépenses accidentelles » et des « dépenses imprévisibles », objet d'une seconde dotation (programme 552).

Il convient de souligner que, cette année encore, les crédits demandés correspondent intégralement au programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles ».

En outre, comme le prévoit la LOLF, s'agissant d'une mission « spécifique » regroupant deux dotations, aucun objectif de performance n'est fixé.

Votre rapporteur spécial tient à saluer la forte diminution des crédits du programme 552 demandés pour 2007, tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement (respectivement 82,7 % et 28 % de baisse), par rapport aux crédits équivalents inscrits en LFI pour 2006, signe d'un retour à la norme budgétaire en ce domaine.

Votre rapporteur spécial vous propose l' adoption des crédits de la mission « Provisions ».

Au 10 octobre 2006, date limite, en application de l'article 49 de la LOLF, pour le retour des réponses du gouvernement aux questionnaires budgétaires concernant le présent projet de loi de finances, 100 % des réponses étaient parvenus à votre rapporteur spécial.

II. UNE MISSION SPÉCIFIQUE CONSTITUÉE DE DEUX DOTATIONS

La présente mission a été créée en application des alinéas trois à cinq du paragraphe I de l' article 7 de la LOLF .

Aux termes de ces dispositions, « [...] une mission regroupe les crédits des deux dotations suivantes :

« 1° Une dotation pour dépenses accidentelles, destinée à faire face à des calamités, et pour dépenses imprévisibles ;

« 2° Une dotation pour mesures générales en matière de rémunérations dont la répartition par programme ne peut être déterminée avec précision au moment du vote des crédits . »

Chaque dotation constitue un programme.

Ce faisant, la mission « Provisions » regroupe des crédits qui, dans la nomenclature issue de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, figuraient au budget des charges communes, selon un périmètre inchangé.

Ces programmes sont pilotés par la direction du budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

A. PRÉSENTATION ET FINALITÉ DES PROGRAMMES

Cette mission comprend deux programmes.

1. Le programme 551

La dotation du programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques 1 ( * ) » a vocation à permettre le financement des mesures générales en matière de rémunérations dont la répartition, par programme, ne peut être déterminée avec précision au moment du vote des crédits .

Conformément à l'article 5 de la LOLF, les crédits affectés au programme 551 sont repris sous le titre 2 ( Dépenses de personnel ).

2. Le programme 552

La dotation du programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles » 2 ( * ) a pour vocation d'assurer les crédits nécessaires à des dépenses accidentelles, imprévisibles et urgentes (notamment liées à des catastrophes naturelles, en France ou à l'étranger, ou à des événements extérieurs qui requièrent le rapatriement de Français). La nature même de ces dépenses explique que la répartition par programme ne puisse en être déterminée avec précision au moment du vote des crédits.

Conformément à l'article 5 de la LOLF, les crédits affectés au programme 552 sont repris sous le titre 3 ( Dépenses de fonctionnement ).

B. DES CRÉDITS PAR VOCATION DÉROGATOIRES

1. Des crédits globaux, dont l'emploi déroge au caractère limitatif des programmes

La présente mission, avec les dotations des programmes 551 et 552 précités, rassemble des crédits globaux , destinés à couvrir des dépenses indéterminées au moment du vote. Ces crédits sont répartis en tant que de besoin en cours d'exercice, entre les autres missions , par programme.

a) Une procédure de répartition par voie réglementaire

La procédure de répartition des crédits de la présente mission est fixée par l' article 11 de la LOLF . Cette disposition distingue selon qu'il s'agit des crédits de l'une ou de l'autre des deux dotations composant la mission.

(1) Les crédits du programme 551

En ce qui concerne les crédits ouverts sur la dotation pour mesures générales en matière de rémunérations (programme 551), ils sont répartis, par programme, par arrêté du ministre chargé des finances (LOLF, article 11, alinéa 2).

Cet arrêté ne peut majorer que des crédits ouverts sur le titre 2 , concernant les dépenses de personnel (même disposition de la LOLF). Ainsi, les crédits du programme 551 échappent, comme le réserve expressément le paragraphe III de l'article 7 de la LOLF, à la règle que pose ce paragraphe III et selon laquelle « les crédits ouverts sur le titre des dépenses de personnel sont assortis de plafonds d'autorisation des emplois rémunérés par l'Etat ».

(2) Les crédits du programme 552

En ce qui concerne les crédits ouverts sur la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles, ils sont répartis, par programme, par décret pris sur le rapport du ministre chargé des finances (LOLF, article 11, alinéa 1 er ). Cette procédure reprend, mutatis mutandis , celle que prévoyait l'article 11 de l'ordonnance n° 59-2 s'agissant des dépenses « accidentelles ».

b) Une dérogation au caractère limitatif des programmes

Les crédits de la présente mission sont par nature susceptibles d'entraîner une dérogation au caractère limitatif des programmes qu'ils viennent abonder , suivant la procédure ci-dessus décrite.

Il convient cependant de souligner que ces crédits de provisions , en ce qui concerne le programme 551 comme le programme 552, sont eux-mêmes des crédits limitatifs , conformément au principe posé par l'article 9 de la LOLF.

En outre, dans la mesure où ces crédits représentent une dotation prévisionnelle, ils n'ont pas vocation à être entièrement consommés. En cas « d'urgence et de nécessité impérieuse d'intérêt national », l'article 13 de la LOLF prévoit une procédure encadrée d'ouverture de crédits par décret d'avance 3 ( * ) .

2. Des dotations dénuées d'objectif de performance

A l'instar de la mission « Pouvoirs publics 4 ( * ) », la présente mission, composée de deux dotations, constitue, conformément aux dispositions de l'article 7, précité, de la LOLF, une mission « spécifique », dénuée d'objectif de performance . Ses programmes, par conséquent, ne font l'objet d'aucun indicateur, et leur présentation n'est pas accompagnée d'un projet annuel de performances.

III. PRÉSENTATION DES CRÉDITS DE LA MISSION POUR 2007

A. LES CRÉDITS DE LA MISSION

La mission « Provisions », pour 2007, représente, en termes de crédits budgétaires, 80 millions d'euros, tant en autorisations d'engagement (AE) qu'en crédits de paiement (CP). Ces crédits en font, de même qu'en 2006, la mission la moins dotée du budget général , comme le représente le graphique ci-après.

Les CP des missions du budget général dans le projet de loi de finances pour 2007

(en milliards d'euros)

Source : projet de loi de finances pour 2007

Par ailleurs, il convient de souligner que, cette année encore, les crédits demandés pour 2007 correspondent intégralement au programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles ».

B. VENTILATION DES CRÉDITS PAR PROGRAMME

Le tableau ci-dessous retrace la comparaison des crédits demandés par rapport à ceux ouverts au titre de la loi de finances initiale (LFI) pour 2006.

Évolution des crédits ouverts en LFI

(en milliers d'euros)

Dotation

Ouverts en LFI 2006

Demandés pour 2007

Variation 2007/2006
en valeur

Variation 2007/2006
en %

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

551 Provision relative aux rémunérations publiques

0

0

0

0

0

0

0

0

552 Dépenses accidentelles et imprévisibles

463.113

111.113

80.000

80.000

-383.113

-31.113

- 82,7

- 28

1. Les crédits du programme 551

a) Une budgétisation nulle

Comme pour 2006, aucun crédit n'est demandé pour 2007 en ce qui concerne la dotation du programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques ».

b) Le signe d'une bonne répartition budgétaire

L'objet du programme 551 étant, comme on l'a indiqué plus haut, d'assurer les rémunérations publiques dont la répartition par programme ne peut être déterminée avec précision au moment du vote des crédits, une budgétisation nulle suppose que l'ensemble des rémunérations a pu être réparti a priori entre les programmes des autres missions .

Dans la perspective d'une rationalisation des crédits comme dans celle d'une meilleure lisibilité budgétaire, votre rapporteur spécial s'en félicite.

2. Les crédits du programme 552

a) Une très forte diminution

En ce qui concerne la dotation du programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles », 80 millions d'euros en AE et en CP sont demandés au titre des aléas susceptibles d'intervenir en 2007, soit respectivement 82,7 % et 28 % de moins que les crédits accordés pour 2006 . Ce montant s'inscrit dans la continuité du niveau des crédits demandés pour les budgets antérieurs à l'exercice 2006 5 ( * ) .

b) Qui témoigne d'un retour à la normale budgétaire après la « parenthèse 2006 »

Cette très significative diminution, s'agissant à la fois des crédits de paiement mais surtout des autorisations d'engagement, est présentée par le ministère de l'économie et des finances, comme un retour à la « norme » budgétaire en la matière, après le budget 2006, le premier en mode LOLF. Deux facteurs principaux étaient évoqués pour justifier cette surévaluation des crédits demandés pour 2006 :

- s'agissant en premier lieu du montant des CP demandés pour 2006 (111 millions d'euros), le ministère avait alors justifié cette augmentation par « l' accroissement de ces dépenses depuis plusieurs années, ce qui a conduit dans certains cas à traiter ces dépenses par décret d'avance ».

Cette prévision, semble aujourd'hui quelque peu atténuée par le taux de consommation des crédits , figurant dans les réponses au questionnaire budgétaire transmis cette année par votre rapporteur spécial, qui affiche 0 % au 31 août 2006. Interrogée sur cette donnée, la direction du budget a précisé que, depuis, trois décrets publiés en septembre 2006 ont consommé ces 111 millions d'euros d'environ 30 millions d'euros. Elle estime toutefois que le reliquat des crédits de paiement non consommés se situera, en fin d'exercice 2006, entre 50 et 80 millions d'euros.

- s'agissant des AE , la direction du budget justifiait la demande pour 2006 (plus de 463 millions d'euros), considérable mais ponctuelle, par la mise en oeuvre du premier budget en mode LOLF.

Ainsi, les 352 millions d'euros d'écart entre les AE et les CP étaient imputés par le ministère, pour leur plus large part, aux frais de justice 6 ( * ) , le principe de crédits limitatifs imposé par la LOLF ayant rendu nécessaire, en la matière, une prévision au titre de dépenses « accidentelles ».

Cette explication n'avait toutefois pas entièrement satisfait votre rapporteur spécial, qui s'était interrogé sur les raisons du « transit », par la présente mission, d'AE destinées à des dépenses relevant de la mission « Justice ». Conformément aux préconisations issues des travaux de notre ancien collègue Louis-Ferdinand de Rocca-Serra, votre rapporteur avait mis en garde que les crédits demandés au titre des dépenses accidentelles ne servent pas à corriger des évaluations de crédits initiales insuffisantes pour d'autres missions 7 ( * ) comme l'exigeait la sincérité budgétaire .

En outre, dans ses réponses au questionnaire budgétaire, la direction du budget impute une partie de cette surévaluation des AE demandés pour 2006 aux « éventuelles difficultés de gestion liées à la mise en oeuvre de la LOLF, notamment s'agissant des AE (problème de transition comptable entre les anciennes autorisations de programme et les nouvelles AE) ». Il s'agit principalement du « basculement » des crédits non consommés en 2005 sur l'exercice 2006, dans le contexte de la transition entre les deux régimes budgétaires (ordonnance de 1959 et LOLF).

Au 31 août 2006, moins de 10 % des AE étaient ouverts (soit 45 millions d'euros ) exclusivement au profit du programme 122 (« Concours spécifiques et administrations ») de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Depuis, le décret n° 2006-1148 du 14 septembre 2006 a ouvert 24,6 millions d'euros d'AE supplémentaires au bénéfice du programme 122 précité (4,4 millions d'euros) et du programme 160 « Intégration et valorisation de l'outre-mer » de la mission « Outre-mer » (20,2 millions). Le taux de consommation des AE est donc porté à 15 % (soit un montant de 69,6 millions d'euros) .

Cette année, votre rapporteur spécial ne peut que se féliciter de ce retour à des prévisions budgétaires plus conformes à celles des budgets précédents, l'année 2006, marquée par la mise en oeuvre de la LOLF, ayant constitué une transition.

* 1 Cette dotation correspondait, dans la nomenclature de l'ordonnance n° 59-2, aux crédits des « mesures générales intéressant les agents du secteur public du budget des charges communes » (chapitre 31-94).

* 2 Cette dotation correspondait, dans la nomenclature de l'ancienne ordonnance organique, aux crédits pour « dépenses éventuelles », d'une par,t qui constituaient une dotation « réservoir » en vue d'abonder les crédits dits « provisionnels » en cas d'insuffisance de ces derniers, et pour « dépenses accidentelles », d'autre part, qui permettaient de couvrir les dépenses occasionnées par des calamités ou d'autres dépenses urgentes et imprévues du budget des charges communes (respectivement, chapitre 37-94 et chapitre 37-95). Depuis la LOLF, ces deux types de crédist se trouvent fusionnés au sein du programme 552. L'intitulé de celui-ci « Dépenses accidentelles et imprévisibles » réalise de fait la disparition formelle de la notion de dépenses éventuelles . Cette disparition est logique dès lors que la LOLF a supprimé la notion juridique de crédits « provisionnels ».

* 3 Cette procédure fut mise en place pour la première fois en 2006. Cf. par exemple le rapport d'information n° 252 (2005-2006) du 14 mars 2006 de M. Philippe MARINI , « Avis sur le projet de décret d'avance relatif à l'épidémie de chikungunya et à l'épizootie de grippe aviaire » ou le rapport d'information n° 22 (2006-2007) du 17 octobre 2006 de M. Philippe MARINI , « Avis sur le projet de décret d'avance relatif aux OPEX et à diverses dépenses urgentes ».

* 4 Cf. le troisième alinéa du paragraphe I de l'article 7 de la LOLF. Les dotations regroupées par la mission « Pouvoirs publics » sont les seules dotations prévues par la LOLF avec les deux qui composent la présente mission.

* 5 Pour mémoire : 81 millions d'euros ouverts en loi de finances initiale pour 2005, 91,2 millions pour 2004 et 84,5 millions pour 2003.

* 6 La notion de frais de justice recouvre toutes les dépenses occasionnées par une procédure civile, pénale ou administrative (examens médicaux et expertise, frais de fourrière, frais d'huissier, frais d'enquête, de contrôle judiciaire et de médiation, indemnités versées aux jurés etc). Ces derniers, qui avaient montré un fort dynamisme (+ 24 % en 2004) les années précédentes, étaient jusqu'à présent réglés sur crédits évaluatifs, sans ordonnancement préalable.

* 7 Rapport d'information n° 444 (1999-2000), « La gestion et l'utilisation des dépenses éventuelles et accidentelles depuis 1990 ».