M. Henri de RAINCOURT

II. LE PROGRAMME 108 « ADMINISTRATION TERRITORIALE »

A. UN PROGRAMME CENTRÉ SUR LES MISSIONS DES PRÉFECTURES ET DES SOUS-PRÉFECTURES

Le programme 108 « Administration territoriale » recouvre l'ensemble des missions des préfectures, des sous-préfectures, des Hauts-commissariats et des représentations de l'Etat outre-mer , y compris le rôle d'animation et de coordination interministérielle rempli par les préfets en s'appuyant notamment sur les projets d'action stratégique de l'Etat dans les régions (PASER) et les départements (PASED).

- L'action 1 « Coordination de la sécurité des personnes et des biens » correspond aux activités de sécurité publique et civile exercées par les préfectures et les sous-préfectures. Elle se situe donc, par certains aspects, à la limite  d'autres missions (« Sécurité » et  « Sécurité civile », notamment).

- L'action 2 « Garantie de l'identité et de la nationalité, délivrance de titres » s'applique aux activités de délivrance des cartes d'identité, des passeports, des cartes grises, ainsi que de police des étrangers. Concernant la délivrance de titres fiables, le rôle des préfectures est désormais combiné avec l'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), opérateur du présent programme.

- L'action 3 correspond au « Contrôle de légalité et au conseil aux collectivités territoriales ».

- L'action 4 « Pilotage territorial des politiques gouvernementales » recouvre les moyens de la coordination des services de l'Etat et de la conduite de politiques spécifiques (ville, cohésion sociale, logement, développement durable, aide au développement économique...).

- L'action 5 « Intégration des Hauts-commissariats et représentations de l'Etat à l'Outre-mer et soutien du réseau des préfectures » 2 ( * ) concerne les activités de soutien logistique des préfectures et les activités de soutien de la sous-direction de l'administration territoriale (SDAT). Par ailleurs, les dépenses liées à la représentation de l'Etat outre-mer sont également imputées sur cette action, de façon transitoire pour 2008.

Les actions du programme « Administration territoriale »

- 207,3 millions d'euros
Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur (mission « Administration générale et territoriale de l'Etat »)

- 5,5 millions d'euros
Police nationale (mission « Sécurité »)

L'action 2 « Garantie de l'identité et de la nationalité, délivrance des titres » représente 38,1 % des moyens du programme.

B. UNE MONTÉE EN PUISSANCE DE L'AGENCE NATIONALE DES TITRES SÉCURISÉS (ANTS)

En 2007, le programme « Administration territoriale » a connu une modification substantielle de son périmètre avec la création de l'ANTS 3 ( * ) .

Etablissement public à caractère administratif, l'ANTS a la qualité d' opérateur du programme . Sa mission vise à répondre aux besoins des administrations de l'Etat en matière de titres sécurisés et recouvre le passeport électronique (depuis le 1 er mars 2007), le passeport biométrique (depuis le 1 er juin 2007), la carte nationale d'identité (depuis le 1 er juin 2007), les visas (d'ici à la fin de l'année 2007), le système d'immatriculation à vie des véhicules (à partir du 1 er septembre 2008) et le permis de conduire (courant 2008).

L'objectif poursuivi est de donner à la France les moyens d'être au meilleur niveau mondial dans l'emploi des nouvelles technologies pour la production de titres sécurisés, de développer les synergies entre les administrations pour une meilleure maîtrise des coûts et de mutualiser les achats d'équipements nécessaires à l'exploitation des titres.

Le financement de l'ANTS s'opère via deux sources. D'une part, une subvention pour charges de service public d'un montant de 54,9 millions d'euros en crédits de paiement permettra de couvrir le solde des dépenses d'acquisition des passeports électroniques (achetés à l'Imprimerie nationale), de mettre en oeuvre le déploiement du passeport électronique (études, assistance, marchés informatiques et acquisition des matériels d'enregistrement et de lecture) et d'assurer la charge des personnels qui lui seront partiellement transférés. D'autre part, une taxe affectée prélevée sur les recettes de timbre fiscal sur les passeports d'un montant de 47,5 millions d'euros sera destinée à l'achat des passeports personnalisés.

A cet égard, votre rapporteur spécial souligne que cette affectation de recette, prévue à l'article 23 du projet de loi de finances pour 2008, ne doit pas avoir pour objet, même si elle est conforme à la LOLF (articles 2 et 36), de contourner l'objectif de maîtrise des dépenses mais au contraire d' optimiser l'utilisation des ressources budgétaires ,

Par ailleurs, l'ANTS se voit ouvert dans le présent projet de loi de finances une autorisation d'engagement à hauteur de 171,2 millions d'euros . Cette autorisation d'engagement sera consacrée notamment à l'engagement des marchés nécessaires au déploiement du passeport biométrique (118,2 millions d'euros), dont l'achèvement est prévu au plus tard au 1 er juin 2009, ainsi qu'à la convention de production des certificats d'immatriculation des véhicules (39 millions d'euros), le système d'immatriculation à vie des véhicules entrant en vigueur au 1 er janvier 2009.

Pour assurer l'ensemble de ses missions, l'ANTS bénéficiera en 2008 d' un renforcement de ses effectifs . Ce renforcement passera par le transfert des équipes « passeport électronique », « passeport biométrique », « carte nationale d'identité » et « visas », jusqu'à présent mis à disposition (14 ETPT), tandis que trois contractuels seront recrutés. En outre, l'ouverture du service de gestion du système d'immatriculation à vie des véhicules (au 1 er septembre 2008) impliquera le recrutement par l'ANTS de 93 ETPT supplémentaires, soit 31 ETPT sur les quatre derniers mois de l'année 2008. Ces emplois seront redéployés des préfectures vers l'agence.

Au total, l'ANTS emploiera 66 ETPT d'ici à la fin de l'année 2008.

C. UNE HAUSSE SUBSTANTIELLE DES AUTORISATIONS D'ENGAGEMENT (+ 10,3 %) ET DES CRÉDITS DE PAIEMENT (+ 5,7 %)

Le présent programme comprend 1,771 milliard d'euros en autorisations d'engagement, en hausse de + 10,3 % par rapport à 2007 , et 1,657 milliard d'euros en crédits de paiement, en hausse de + 5,7 % par rapport à 2007 .

Au sein de ce programme, les dépenses de personnel (titre 2) occupent une place prépondérante avec une enveloppe de 1,298 milliard d'euros de crédits de paiement (+ 2,5 % par rapport à 2007). Cette masse salariale correspond à un plafond d'emplois fixé à 28.473 ETPT , contre 30.228 ETPT en 2007 (- 5,8 % par rapport à 2007).

Si ces augmentations de crédits peuvent a priori sembler importantes, elles ne font en réalité que prendre en compte l'incidence budgétaire de l'intégration au sein de ce programme des Hauts-commissariats et des représentants de l'Etat outre-mer.

Au-delà, il convient toutefois de souligner l'évolution notable concernant les dépenses d'investissement liées au développement de l'application GREGOIRE , dont l'objectif est la refonte l'application actuelle de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (ADGREF) 4 ( * ) . Ces dépenses (3 millions d'euros en 2007, 5 millions d'euros pour 2008) seront ainsi transférées, à compter du 1 er janvier 2008, sur le programme 303 « Immigration et asile » relevant du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du co-développement, à qui la conduite de projet est désormais confiée. Seuls 2 millions d'euros de crédits de paiement, correspondant aux engagements antérieurs portés par le ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, reste provisionnés sur le présent programme.

Il faut, en outre, relever deux expérimentations lancées à compter de l'exercice 2008.

La première, mise en oeuvre dans le département du Lot dans le cadre du projet d'organisation des services de l'Etat (OSE), vise une fusion de l'ensemble des services de l'Etat placés sous l'autorité du préfet (selon les termes du décret n ° 2004-374 du 29 avril 2004), autour de trois directions générales (DG) opérationnelles (DG Territoires, DG Population, DG Sécurité), d'une DG thématique (DG Relations avec les collectivités territoriales) et d'une DG de soutien (DG Logistique). La DG Logistique, préfigurant un secrétariat général des services de l'Etat dans le département, gérera une enveloppe de crédits de fonctionnement (1,47 million d'euros) correspondant aux actions interministérielles de mutualisation.

La seconde expérimentation s'inspire de la première en organisant la présence de l'Etat dans les collectivités de Saint Martin et Saint Barthélémy , de manière resserrée, autour du préfet délégué placé auprès du préfet de la région Guadeloupe. La plupart des services de l'Etat présents dans ces territoires mutualiseront leurs moyens de fonctionnement dans une enveloppe unique s'élève à 0,5 million d'euros.

Enfin, étant données les évolutions actuelles (réorganisation du contrôle de légalité dans le sens d'une plus grande spécialisation) et à venir (dématérialisation des titres), une interrogation peut se faire jour sur le rôle et la pérennité des sous-préfectures , dont les frais de fonctionnement pèsent sur les crédits du présent programme. A cet égard, un certain nombre de redécoupages d'arrondissements (cas du département de la Sarthe, par exemple) ont, d'ores et déjà, eu lieu afin de mieux étaler la charge de travail entre les différents services préfectoraux au sein d'un même département.

Auditionnée par votre rapporteur spécial, la responsable du programme, Mme Bernadette Malgorn, a indiqué qu'une réflexion était en cours , au sein du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur l'adaptation de la présence de l'Etat sur le territoire et l'attractivité du métier de sous-préfet, en lien avec la revue générale des politiques publiques (RGPP).

Dans ce domaine, votre rapporteur spécial estime que toute « reconfiguration » de la carte des sous-préfectures ne peut être envisagée que dans le respect de la dimension humaine et des besoins des territoires (zones de montagne, zones rurales...) .

D. DES PERFORMANCES SATISFAISANTES, MESURÉES PAR DES INDICATEURS PERTINENTS

Quatorze indicateurs illustrent les six objectifs stratégiques définis dans le projet annuel de performances du programme « Administration territoriale ». A l'exception de l'indicateur consacré au « nombre de préfectures et sous-préfectures certifiées », créé à l'occasion du projet de loi de finances pour 2007, l'ensemble de ces indicateurs figuraient déjà dans l'infocentre territorial des préfectures (INFOPREF).

Sur les six objectifs assignés au présent programme, les performances atteintes témoignent, dans la plupart des cas, de progrès notables et de la volonté de trouver de nouvelles marges de manoeuvre en 2008 (en prévision).

A titre d'exemple, l'indicateur relatif à l'évolution des coûts de téléphonie par agent traduit une baisse significative de ce poste budgétaire : 359 euros en 2005, 316 euros en 2006 et des prévisions de 316 euros et 312 euros, respectivement, pour 2007 et 2008.

Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2007, votre rapporteur spécial avait jugé nécessaire l'enrichissement du projet annuel de performances par un indicateur permettant de refléter le rôle interministériel essentiel joué par les préfets .

Votre rapporteur spécial se félicite donc de la création d'un nouvel indicateur dans le projet annuel de performances pour 2008 : l'indicateur 5.1 relatif aux « Délais d'instruction des dossiers installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) et loi sur l'eau » . Ainsi que le souligne le projet annuel de performances pour 2008, ces domaines sont en effet « sensibles, stratégiques parce que s'inscrivant dans la logique de développement durable et interministériels car ils impliquent de nombreux services de l'Etat, sous l'impulsion et la coordination du préfet. C'est bien au préfet qu'il revient de construire le « dire » de l'Etat sur ces sujets, en établissant la synthèse des contraintes réglementaires et des enjeux de protection des populations, des impératifs de préservation des milieux et des projets de développement économique. ».

Au regard de cet indicateur, le délai d'instruction des dossiers, conditionné par l'organisation de la procédure de traitement retenue par le préfet dans le cadre de son suivi des services déconcentrés concernés, s'établit à 337 jours en 2005, 347 jours en 2006, 340 jours en prévision actualisée pour 2007 et 335 jours en cible pour 2008 .

Les principales observations de votre rapporteur spécial
sur le programme 108 « Administration territoriale »

- Le périmètre du présent programme est modifié par l'intégration des Hauts-commissariats et des représentations de l'Etat outre-mer , dont les crédits sont imputés de façon transitoire à l'action 5 « Intégration des Hauts-commissariats et représentations de l'Etat à l'outre-mer et soutien du réseau des préfectures ».

- En conséquence, les crédits de paiement de ce programme enregistrent une hausse substantielle de 5,7 % et s'élèvent à 1,657 milliard d'euros .

- Opérateur du programme, l'Agence nationale nationale des titres sécurisés (ANTS) poursuit sa montée en charge avec un renforcement de ses effectifs ( 66 ETPT au total d'ici à la fin de l'année 2008) et en s'appuyant sur un financement combinant une subvention pour charges de service public ( 54,9 millions d'euros ) et une taxe affectée prélevée sur les recettes de timbre fiscal sur les passeports ( 47,5 millions d'euros ).

- Toute « reconfiguration » de la carte des sous-préfectures ne peut être envisagée que dans le respect de la dimension humaine et des besoins des territoires (zones de montagne, zones rurales...) .

- Les performances atteintes témoignent, pour la plupart des indicateurs, de progrès notables et de la volonté de trouver de nouvelles marges de manoeuvre en 2008 (exemple des coûts de téléphonie).

- Conformément au souhait exprimé par votre rapporteur spécial en 2006, le projet annuel de performances s'est enrichi d' un indicateur permettant de refléter le rôle interministériel joué par les préfets et portant sur les « Délais d'instruction des dossiers installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) et loi sur l'eau ».

* 2 En loi de finances pour 2007, l'action 5 évoquait uniquement le « Soutien et l'animation du réseau des préfectures ».

* 3 L'ANTS a été instituée par le décret n° 2007-240 du 22 février 2007.

* 4 Il s'agit, grâce à l'application GREGOIRE, d'assurer une meilleure fluidité dans le traitement de ces dossiers, l'intégration des technologies biométriques et la constitution d'une base de données statistiques sur l'évolution des flux migratoires. Le déploiement national de ce projet est prévu en 2009.