MM. Yves Fréville et François Trucy

CHAPITRE II

LES DÉPENSES DE PERSONNEL ET DE FONCTIONNEMENT EN AUGMENTATION MAIS RATIONALISÉES

I. LES EMPLOIS ET LES CRÉDITS DU TITRE 2

Les dépenses de personnel augmentent de 1,26 % entre 2007 et 2008 pour s'établir à 18,299 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. A structure constante, l'augmentation est de 1,94 %.

A. UN PLAFOND D'EMPLOIS EN NETTE DIMINUTION

Le plafond d'emplois du ministère de la défense est réduit, passant de 329.907 équivalents temps plein travaillé (ETPT) en 2007, à 320.612 ETPT en 2007. La diminution nette est de 9.295 ETPT pour la mission « Défense », soit 29 % des réductions d effectifs du budget général

Cet effort de rationalisation des dépenses de personnel est très important. Il est présenté dans le tableau suivant et se décompose ainsi :

• A hauteur de 26 % du total, il s'agit de l'application du plan d'économies de personnel, soit une réduction de 2.426 ETPT pour la seule mission « défense ». Il convient de noter que le ministère de la défense procède en 2008, comme toutes les administrations à une diminution de ses effectifs par le non remplacement de la moitié des départs à la retraite. Ces diminutions représentent un effort de 6.037 emplois pour l'ensemble du ministère , soit 3.037 équivalents temps plein 13 ( * ) travaillés répartis de manière équilibrée entre le personnel civil (621 ETPT) et le personnel militaire (2.416 ETPT).

• 68,8 % des réductions d'effectifs correspondent à la suppression de postes vacants ou non réalisés, soit 6.395 ETPT ( 2.588 postes vacants ont été supprimés en 2007). Le ministre de la défense, entendu par votre commission le 30 octobre 2007 dans le cadre de la préparation de la discussion budgétaire, estime que la suppression des postes non pourvus impose une gestion des personnels en flux tendus , mais ne nuit pas à l'accomplissement des missions assignées aux forces militaires .

Viennent enfin la création de 31 ETPT , dont 24 au service de santé des armées et 8 à la direction générale de la sécurité extérieure, le transfert de 29 ETPT au profit de l'école du personnel paramédical essentiellement, et des mesures de réorganisation , entraînant la sortie du plafond ministériel d'emploi de 534 ETPT , dont 525 ETPT afin de permettre la transformation du SHOM en établissement public, et 9 ETPT transféré du centre de formation de Brest vers l'Ecole nationale supérieure des ingénieurs des études et techniques d'armement (ENSIETA).

Lors de son audition, le ministre a précisé que les réductions d'effectifs porteront sur les fonctions d'administration et de soutien afin de préserver la capacité opérationnelle des forces armées. La RGPP devra proposer des réformes d'interarmisation et de mutualisation qui permettront la réduction des effectifs et l'amélioration de l'efficacité des forces. Le ministre a indiqué qu'un de ses objectifs essentiels était la réduction de la proportion des effectifs civils et militaires du ministère qui se consacre à des fonctions de soutien non opérationnel , encore proche de 40 % . S'inspirant du modèle anglais, cette proportion pourrait descendre à 30 % .

B. LES MESURES DE GESTION DES PERSONNELS : 102 MILLIONS D'EUROS

L'ensemble des mesures retenues pour 2008 en faveur du personnel du ministère permet de poursuivre les plans de revalorisation indiciaire et indemnitaire en cours, tout en consentant un effort important de revalorisation au profit des échelons de rémunération les plus bas. Avec l'annuité 2008, ce sont au total 460 millions d'euros qui auront été consacrés à ces objectifs depuis 2002, soit une moyenne annuelle de 77 millions d'euros.

Le projet de loi de finances pour 2008 prévoit une revalorisation importante de la condition du personnel puisque l'enveloppe de mesures catégorielles nouvelles prévues atteint un montant de 102 millions d'euros . Les principales mesures relatives à la gestion des personnels en 2008 sont les suivantes :

- soutenir les militaires du rang et des jeunes sous-officiers : 39 millions d'euros 14 ( * ) seront consacrés dès 2008, à la revalorisation des parcours indiciaires des caporaux et caporaux-chefs (échelles de solde 2 et 3), ainsi que les deux premiers échelons du grade de gendarme et des sergents, échelle rémunérée de solde 3 15 ( * ) . Il s'agit de la première étape de la réforme statutaire en cours. Elle se poursuivra dans le cadre de la rénovation des statuts particuliers dont l'entrée en vigueur est prévue le 1 er janvier 2009 ;

- renforcer l'attractivité des carrières et la fidélisation du personnel : les mesures prévues en 2008 représenteront 28,98 millions d'euros (3,98 millions d'euros pour le fonds de consolidation de la professionnalisation 16 ( * ) -FCP- et 25 millions d'euros pour le plan d'amélioration de la condition militaire -PACM-). Ainsi, l'objectif de revalorisation de l'indemnité pour charge militaire (ICM) de + 35 % pour la région parisienne et de + 23 % pour la province sera-t il atteint en 2008 par le renforcement de l'aide apportée au logement ;

- assurer la reconversion des militaires 17 ( * ) : le principal objectif de cette politique est l'accès à l'emploi civil des militaires. En 2008, 14,9 millions d'euros seront consacrés notamment à l'orientation de 8.000 militaires, à l'inscription de 500 militaires dans un parcours d'accompagnement vers l'entreprise et à la mise en place d'une formation professionnelle pour 3.500 stagiaires ;

- promouvoir les qualifications du personnel civil : 15,9 millions d'euros (hors pensions) sont dédiés à cette action. Ainsi ce sont 98,2 millions d'euros qui auront été consacrés au plan de promotion professionnelle du personnel civil depuis 1998 ;

- améliorer l'attractivité des emplois civils du ministère de la défense : 0,6 million d'euros seront alloués en 2008 au personnel civil, au titre de l'indemnité de performance (0,2 million d'euros) et de la revalorisation du dispositif de la rémunération au mérite (0,4 million d'euros). De nombreuses indemnités seront également revalorisées, pour un montant total de 5,1 millions d'euros . Enfin, 3,94 millions d'euros bénéficieront à des mesures de revalorisation de la masse salariale des personnels civils 18 ( * ) ;

- dynamiser le déroulement de carrière et la promotion sociale : 1,95 million d'euros permettra d'optimiser la gestion des compétences et des carrières (0,57 million d'euros) et des postes d'avancement (1,38 million d'euros) dans les filières technique et administrative.

C. LES PRIMES REPRÉSENTENT 37 % DES SOMMES PERÇUES PAR LES MILITAIRES

Suite aux recommandations de l'audit de modernisation sur la gestion des centres payeurs des armées, du 2 octobre 2006, pour les militaires, la fusion de toutes les informations « Ressources humaines » nécessaires à l'établissement de la paye est en bonne voie. Elle est déjà réalisée pour les personnels civils (logiciel Alliance). L'armée de terre compte encore 5 centres de paye comprenant 150 à 200 personnes. La RGPP devra favoriser la rationalisation des moyens consacrés à la paye des militaires.

Par ailleurs, vos rapporteurs spéciaux ont souhaité connaître l'importance des primes dans les rémunérations des militaires, ce que montre le tableau suivant qui précise en particulier le montant des primes « opérationnelles ».

Il apparaît que les rémunérations principales représentent 63 % du total des soldes perçues par les personnels militaires, les primes et indemnités s'élevant à 37 % de ces soldes.

D. UN EFFORT STABLE EN FAVEUR DE LA RÉSERVE : 123 MILLIONS D'EUROS

Les effectifs et les crédits de rémunérations et charges sociales (RCS) alloués à la réserve restent stables en 2008. Les RCS s'élèveront à 123 millions d'euros en 2008 (comme en 2007, contre 110 millions d'euros en 2006), permettant de poursuivre la montée en puissance de la réserve militaire. Les réservistes , au nombre de 55.910 fin 2006, devraient être 68.500 en 2008, contre 62.220 en 2007, soit une progression de plus de 10 % . L'effectif cible est de 94.150 réservistes, prévu en 2012.

Précisons que l'adoption de la loi n° 2006-449 du 18 avril 2006, modifiant la loi n° 99-894 du 22 octobre 1999 portant organisation de la réserve militaire et du service de défense, a favorisé un usage plus souple de la réserve grâce à l'augmentation des durées de service, l'abaissement du préavis de droit commun vis-à-vis de l'employeur, la création d'une clause de réactivité et l'encouragement aux formations à vocation militaire et civile.

De même, la loi de finances rectificative de décembre 2005 19 ( * ) , créant un crédit d'impôt pour les employeurs autorisant leurs salariés à participer aux activités de la réserve, a permis de renforcer l'efficacité des réservistes 20 ( * ) .

L'activité moyenne annuelle par réserviste demeurera stable autour de 21 jours en 2008.

E. LES DÉPENSES DE PENSION AU SEIN DU TITRE 2

Le montant des cotisations de pensions affectées à la mission « Défense » et incluses dans les dépenses de personnel du titre 2 s'élève à 6,818 milliards d'euros. Ces cotisations de pensions correspondent aux cotisations-retraite salariales et patronales.

Le montant des pensions « en périmètre ministère » atteint 9,191 milliards d'euros Le nombre de pensionnés militaires (ayants-droit et ayants-cause) a progressé, de 1998 à 2005, de 4,2 %, puis a diminué de 0,5 % pour s'établir à 513.000 pensionnés en 2008. Le montant des pensions versées a continué de progresser entre 2005 et 2007, de 3,1 % en euros courants et 0,08 % en euros constants, pour s'établir à 8,4 milliards d'euros courants en 2007 .

Le nombre de pensionnés ouvriers de l'Etat , soit 94.200 personnes , a diminué de 5,9 % depuis 1998. Le montant global de leurs pensions atteint 1,5 milliard d'euros (courants), soit une progression de 22,2 % depuis 1998 (et une augmentation limitée à 7,3 % en euros constants sur la même période).

Vos rapporteurs spéciaux soulignaient dès l'année dernière que le rapport entre militaires actifs et militaires pensionnés était assez défavorable, s'établissant à 0,8 actif pour un militaire pensionné en 2007, et 0,7 actif en 2010 . Le rapport démographique pour les personnels civils se dégrade également, soit 1,6 actif pour un fonctionnaire pensionné en 2007 et 1,3 actif en 2010 . En conséquence, les taux de « contribution employeur » de l'Etat au compte d'affectation spéciale « Pensions » ont augmenté, passant de 49,9 % en 2006 à 50,74 % en 2007 puis 55,71 % en 2008 au titre des personnels civils, et 100 % en 2006 à 101,05 % en 2007 et 103,5 % en 2008 au titre des personnels militaires.

La fixation du taux résulte du besoin de financement du Compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » et de l'assiette indiciaire. La réduction des effectifs en 2007 a contribué à augmenter le taux de cotisations, il en sera de même en 2008. Les 160 millions d'euros d'économie attendus des réductions d'effectifs en 2008 ne concernent que les traitements d'active et non des économies sur la part pensions (ce qui se traduit donc par une augmentation du taux de cotisations). Ceci s'explique par le fait qu'il ne s'agit pas d'un système de régime de pensions mais bien d'un système de subventions d'équilibre d'un compte d'affectation spéciale.

F. LE CAS PARTICULIER DU SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES

Placé sous l'autorité du chef d'état-major des armées , au sein du programme 178 « Préparation et emploi des forces », le service de santé des armées (SSA) a pour mission le soutien des forces armées, tant en opérations extérieures que sur le territoire national.

Ses crédits sont regroupés au sein de la sous-action 05-80 « Fonction santé » de l'action 5 « Logistique interarmées » du programme 178. Leur gestion est unifiée au sein d'un BOP spécifique . Les crédits de paiement de la sous-action 05-80 augmentent de 3,6 % entre 2007 et 2008, pour s'établir à 849,57 millions d'euros ( 1.309 millions d'euros , attributions de produits comprises).

Les crédits de personnel s'élèvent à 662,77 millions d'euros , ceux de fonctionnement à 166,16 millions d'euros et ceux d'investissement à 20,64 millions d'euros .

En dehors d'un sous-effectif conjoncturel en officiers militaires infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées (MITHA) lié à la montée en puissance du corps, le sous-effectif militaire est principalement lié à un déficit en médecins et en personnels paramédicaux (infirmier anesthésiste, manipulateurs d'électroradiologie médicale, etc.).

En 2007, la cible en effectifs des médecins des armées est de 2.237 pour un effectif réalisé au 31 mai de 2.012, soit un sous-effectif de 225 . Le sous-effectif au 31 mai 2007 se répartit en 17,8 % dans les forces et 9,5 % dans les HIA et centres d'expertises. Pour y faire face, le SSA a initié des recrutements complémentaires de médecins ayant soutenu leur thèse, avec des résultats mitigés.

L'accélération des départs constatés ces dernières années et la difficulté de procéder à un recrutement complémentaire s'expliquent, en grande partie par la forte attractivité du secteur civil (privé et public) plus marquée encore dans les spécialités sensibles (radiologie, urgentiste, anesthésie réanimateur...) A titre d'exemple, des départs importants des radiologues sont constatés depuis plusieurs années : 7 en 1999, 12 en 2000, 8 en 2001, puis 14 en 2002, 6 en 2003, 9 en 2004, 9 en 2005, 10 en 2006 et 6 en 2007.

Le projet de loi de finances pour 2008 prévoit la création de 24 postes au profit du SSA, ce qui lui permettra de poursuivre la mutation entreprise lors de la professionnalisation des armées.

Comme les unités des armées, le SSA est amené à contribuer aux OPEX , à hauteur des effectifs d'un hôpital militaire entier (soit environ 1.500 personnels mobilisés sur l'année), ce qui est conséquent pour un service qui compte 9 HIA. L'activité du SSA en OPEX est présentée en annexe.

Le déroulement des grands programmes d'infrastructure du service de santé des armées ne pose pas de problème. L'opération hôpital Sainte-Anne de Toulon, classée majeure, reste prioritaire. Les dérives calendaires et budgétaires sont supportables. L'opération relative à l'HIA Begin se poursuit normalement. L'opération de mise aux normes incendie et de restructuration de l'HIA du Val-de-Grâce subi un décalage calendaire d'environ six mois. Les opérations nouvelles infrastructures prévues par le projet de loi de finances pour 2008 sont les suivantes :

- poursuite de la deuxième tranche de travaux de l'opération hôpital Sainte-Anne de Toulon ;

- début des opérations de restructuration du service de psychiatrie et de l'opération de refonte de l'alimentation et de la distribution électriques à l'HIA Clermont Tonnerre ;

- rénovation des réseaux électriques secondaires à l'HIA Laveran ;

- mise aux normes de sécurité et modernisation des ascenseurs et monte charges de l'HIA Robert Picqué ;

- amélioration de la sécurité incendie et l'extension de l'unité de parasitologie de Institut de Médecine Tropicale du Service de Santé des Armées - Le Pharo.

* 13 On suppose que les économies de personnel s'étalent régulièrement sur l'année, de 0 en début d'année à 6.000 fin décembre, ce qui correspond en moyenne à 6000 équivalents temps plein travaillés.

* 14 5,82 millions d'euros s'ajouteront à ces crédits, issus de la mission « Sécurité » (programme « Gendarmerie nationale »).

* 15 Sur la base des recommandations formulées par le Haut Comité d'évaluation de la condition militaire (HCECM).

* 16 Ceci permettra de financer la quatrième tranche des revalorisations des indices sommitaux des majors, des sous-officiers et des caporaux-chefs pour 3,98 millions d'euros. En 2008, ces mesures concerneront près de 20.000 militaires non officiers. La mise en oeuvre complète de ces mesures s'échelonnera jusqu'en 2012.

* 17 En 2006 et 2007, l'ensemble des aides à la reconversion a augmenté. Cette progression s'est traduite par une amélioration notable, en 2006, du taux de reclassement des militaires en secteur privé (+ 4 %), une diminution du nombre d'anciens militaires au chômage (- 2,6 %) et du coût de leurs indemnités (- 3,8 %).

* 18 Dont 3 millions d'euros pour les cadres et techniciens technico-commerciaux de la délégation générale pour l'armement.

* 19 Loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005.

* 20 Le crédit d'impôt, plafonné à 30.000 euros par entreprise, est égal à 25 % de la différence entre le montant du salaire brut journalier du réserviste (dans la limite de 200 euros) versé par l'employeur lors des périodes de réserve effectuées hors congés, et la rémunération brute journalière perçue au titre de ces périodes de réserve. Le dispositif fiscal devrait avoir un coût de 1 million d'euros en 2006 et 2 millions d'euros en 2007.