MM. Thierry Foucaud et Bertrand Auban

III. PROGRAMME 742 « OUVRIERS DES ÉTABLISSEMENTS INDUSTRIELS DE L'ETAT »

A. LA RÉPARTITION DES CRÉDITS PAR ACTION

La deuxième section du compte d'affectation spéciale « Pensions » retrace principalement les opérations du Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat (FSPOEIE). Les plus gros employeurs des ouvriers de l'Etat sont les ministères de la défense (91.100 pensionnés, soit 87 %, et 41.700 cotisants, soit 78 %) et de l' équipement (8.700 pensionnés et 9.000 cotisants).

Les quatre premières actions de la présente section concernent respectivement les prestations vieillesse et invalidité , les cessations anticipées d'activité mises en place depuis 1993 dans le cadre de plans de restructuration, les « autres dépenses spécifiques » et la gestion du régime. La cinquième et dernière action du programme 742 retrace les dépenses et les recettes du fonds relatif aux rentes accidents du travail des ouvriers civils des établissements militaires (RATOCEM) .

Le FSPOEIE, dépourvu de personnalité morale, est géré par la Caisse des dépôts et consignations . Ce régime connaît un fort déséquilibre démographique avec, à fin 2006, 53.439 cotisants pour 105.140 pensionnés , soit 0,51 cotisant pour un pensionné .

L'enjeu du programme 742 est celui d'une plus grande transparence des mouvements du FSPOIE, les charges relatives au paiement des pensions n'étant pas, jusqu'alors, retracées dans les comptes de l'Etat. Cependant, à la différence de la première section du CAS « Pensions », le présent programme ne fait pas apparaître des taux de contribution employeurs correspondant à la charge réelle des pensionnés .

En effet, la contribution patronale, maintenue au taux de 24 % , ne permet pas d'équilibrer le FSPOEIE, et une subvention de l'Etat continue à être versée en complément. Cette subvention est répartie au prorata des effectifs des pensionnés relevant des programmes concernés (en lieu et place des sections budgétaires jusqu'en 2005).

Ainsi, le degré de responsabilisation des gestionnaires est ici inchangé par rapport à la situation qui prévalait avant la mise en place du CAS « Pensions » . Si ce degré de responsabilisation était alors « supérieur » à celui qui prévalait pour les pensions civiles et militaires en l'absence de contribution patronale, il est désormais « inférieur » à celui qui résulte du fonctionnement de la première section du présent CAS , caractérisée par une contribution patronale d'équilibre entièrement assise sur les effectifs employés (alors que la subvention d'équilibre qui complète la contribution patronale est ici répartie en fonction de la politique de recrutement passée).

Le tableau suivant retrace l'évolution des crédits destinés au programme 742 :

Evolution du montant des crédits destinés au programme 742

(en millions d'euros)

Crédits de paiement pour 2007

Crédits de paiement pour 2008

Part des crédits du programme

Variation 2007/2006

Action 1 « Prestation vieillesse et invalidité »

1.515,63

1.617,05

92,10 %

6,69 %

Action 2 « Cessations anticipées d'activité »

122,47

75,38

4,29 %

-38,45 %

Action 3 « Autres dépenses spécifiques »

1,86

1,66

0,09 %

-10,75 %

Action 4 « Gestion du régime »

8,6

8,65

0,49 %

0,58 %

Action 5 « Rentes accidents du travail des ouvriers civils des établissements militaires »

59,8

52,94

3,01 %

-11,47 %

Total du programme « Ouvriers des établissements industriels de l'Etat »

1.708,4

1.755,71

100 %

2,77 %

Le nombre total de pensionnés (droits directs et réversions) sera en baisse en 2008 (102.821 pensionnés) par rapport à 2007 (103.974 pensionnés). Toutefois, le montant dévolu au règlement des pensions devrait croître de 1,3 % en raison de l'augmentation du montant moyen des pensions.

La baisse significative de 38,4 % de la dotation de l'action 2 « Cessations anticipées d'activité » correspond à la fin du cycle de départs anticipés initié en 1993 dans le cadre des plans de restructuration, notamment de GIAT-industrie et de DCNS.

B. LA JUSTIFICATION DES DÉPENSES

Les charges du programme 742 comprennent au titre de ses quatre premières actions :


les dépenses de pension

- les prestations de vieillesse et d'invalidité ;

- les majorations de pensions au titre du minimum vieillesse ;

- le coût de cessation anticipée d'activité financée par les établissements ou organismes sous tutelle du secteur de la défense ;


les transferts financiers à la CNAV et à l'IRCANTEC au titre des titulaires sans droits (c'est-à-dire ayant moins de 15 années de service) ;


le coût des charges de gestion du régime, qui est ici pris en compte, à la différence de la première section du CAS « Pensions ».

Figurent en recettes:


• les cotisations et contributions
:

- les cotisations salariales au taux reconduit de 7,85 % ;

- une contribution de l'employeur (Etat ou établissement concerné) au taux reconduit de 24 % ;

- la contribution du ministère de la défense , qui représente le surcoût engendré par les départs anticipés avec bonification d'annuités prévus par différents dispositifs de cessation anticipée d'activité mis en place depuis 1993 39 ( * ) ;

- la subvention d'équilibre inscrite sur les programmes ministériels rémunérant des ouvriers des établissements industriels de l'Etat ;


• les transferts :

- un transfert de compensation inter-régimes qu'explique une situation démographique ici très dégradée par rapport aux autres régimes de sécurité sociale ;

- diverses recettes dont, notamment, le remboursement par le fond de solidarité vieillesse des majorations de pensions au titre du minimum vieillesse.

Le taux de cotisation employeur , fixé à 24 % est inchangé depuis le 1 er janvier 1999 (au lieu de 10,34 %) . Il peut paraître étonnamment faible au regard des taux d'équilibre de l'Etat. Pour les fonctionnaires militaires, dont le rapport démographique est cependant plus favorable que celui des ouvriers de l'Etat, le taux d'équilibre est fixé à 100 %.

Comme pour les organismes publics et semi-publics, il paraîtrait logique de réviser à la hausse 40 ( * ) le taux de 24 % afin d'aboutir à une responsabilisation équitable des gestionnaires.

Cependant, votre commission des finances estime qu'une démarche purement comptable pourrait entraîner des effets pervers : faire supporter l'intégralité des coûts des pensions des ouvriers de l'Etat par les cotisations employeurs pourrait avoir un effet totalement dissuasif pour les gestionnaires. De plus, certains des plus gros employeurs d'ouvriers de l'Etat (Giat, imprimerie nationale, monnaies et médailles) évoluent dans un environnement concurrentiel qui justifie de prendre en considération le niveau globalement plus faible des taux de cotisation de retraite du secteur privé.

C. LA PERFORMANCE DU PROGRAMME

L'évolution du besoin de financement du régime est liée à l'évolution du rapport démographique. Celui-ci était de 1.96 retraité pour 1 actif et devrait augmenter du fait de l'arrivée prochaine à l'âge de la retraite des générations du baby-boom.

Le régime de retraite des ouvriers de l'Etat a été concerné par la réforme des retraites dont la transposition a été permise par deux décrets 41 ( * ) . Le suivi des indicateurs portant sur l'âge moyen de la radiation des cadres et la durée moyenne de cotisation est intéressant pour évaluer les effets des mesures prises et le potentiel d'évolution du régime. Ici aussi, les chiffres que comportent ces indicateurs, retracés dans le tableau suivant, suggèrent que la réforme des retraites n'a pas encore produit ses effets :

Impact de la réforme des retraites à court terme

Age moyen de la radiation des cadres

Durée moyenne de cotisation

Réalisation 2005

57,9

31,5

Réalisation 2006

58,96

31,5

"Cible" 2010

59

31,5

Source : à partir du « bleu » « Pensions »

Observations de votre commission des finances sur le programme 742 « Ouvriers des établissements industriels de l'Etat »


• Malgré les observations réitérées lors de l'examen de chaque projet de loi de finances par votre commission des finances depuis l'examen du PAP pour 2006, le « taux employeur », est reconduit pour 2008 à 24 %. Il demeure très en-deçà du niveau des fonctionnaires civils, et maintenant des organismes publics et semi-publics pour guider les gestionnaires vers une plus grande responsabilisation de l'emploi des ressources humaines.

* 39 Dans le cadre de plans de restructuration (Giat Industries, DCNS).

* 40 Un taux de cotisation de l'ordre de 50 % -celui des organismes publics et semi-publics-, entraînerait une diminution substantielle de la subvention d'équilibre, de l'ordre de 350 millions d'euros et aboutirait à un financement du FSPOEIE plus conforme à la recherche d'équité et de vérité des coûts imprimée par la LOLF.

* 41 Voir notamment le décret n° 2004-1056 du 5 octobre 2004 relatif au régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat prévoyant en particulier l'instauration d'une décote progressive analogue à celle instaurée pour les fonctionnaires.