MM. Philippe Dallier

I. LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE
RAPPORTEUR SPÉCIAL

Le projet de budget pour 2008 de la mission « Ville et logement » s'est efforcé d'intégrer les objectifs de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable. Ces engagements s'ajoutent aux priorités qui résultent des deux lois de programmation qui encadrent le secteur du logement et de la rénovation urbaine : la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine du 1 er août 2003 et la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005.

L'échelonnement de la réalisation du programme national de rénovation urbaine (PNRU) éloigne la perspective de la « bosse de l'ANRU » au-delà de l'année 2008.

La gestion du volet social de la politique de la ville n'a pas encore trouvé son équilibre après la création de l' agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé). Une clarification des périmètres de compétence avec la délégation interministérielle à la ville (DIV) est le préalable à l'amélioration de la performance du programme « Equité sociale et territoriale et soutien ».

A l'intérieur d'une enveloppe globale maîtrisée, les aides au logement ont gagné en efficacité dans leur objectif de stabilisation des taux d'effort nets , grâce à la généralisation de l'indexation. La question de leur recentrage sur les personnes les plus défavorisées ne doit pas être écartée pour autant.

L'essentiel de l'effort budgétaire pour 2008 est consenti au profit du programme « Développement et amélioration de l'offre de logement » en vue de réaliser les objectifs ambitieux de construction annoncés par le gouvernement : 500.000 nouveaux logements par an dont 120.000 logements sociaux.

Par les mesures fiscales , et notamment la création d'un crédit d'impôt sur le revenu accordé au titre des intérêts des prêts contractés pour l'acquisition ou la construction de l'habitation principale, un rééquilibrage des interventions de l'Etat s'opère entre le logement locatif et l'accession à la propriété .

Au 10 octobre 2007, date limite, en application de l'article 49 de la LOLF, pour le retour des réponses du gouvernement aux questionnaires budgétaires concernant le présent projet de loi de finances, 86,59 % seulement des réponses étaient parvenues à votre rapporteur spécial.

A. DES PROGRAMMES ENCADRÉS PAR DEUX LOIS DE PROGRAMMATION ET UN CHANTIER NATIONAL

La mission « Ville et logement » compte quatre programmes dont deux portent sur la politique de la ville et deux portent sur la politique du logement :

- le programme « Rénovation urbaine » (programme 202) représente 3,2 % des crédits de paiement de la mission ;

- le programme « Equité sociale et territoriale et soutien » (programme 147) représente 11,1 % des crédits de paiement ;

- le programme « Aide à l'accès au logement » (programme 109) représente 69,6 % des crédits de paiement ;

- et le programme « Développement et amélioration de l'offre de logement » (programme 135) 16,1 % des crédits de paiement de la mission. Il rassemble les crédits liés aux actions de soutien pour l'ensemble de la mission et centralise, à ce titre, l'ensemble des crédits de personnel du titre 2.

Les priorités retenues et les choix budgétaires sont étroitement encadrés par les deux lois de programmation, qui encadrent le secteur du logement et de la rénovation urbaine depuis 2003.

Depuis leur adoption, les deux lois de programmation ont été plusieurs fois modifiées. Elles ont encore évolué au cours de l'année écoulée, aussi bien dans leurs objectifs physiques de construction et de réhabilitation de logements sociaux que dans les engagements budgétaires qui leur sont associés.

Le programme national de rénovation urbaine (PNRU) est issu de la loi du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine. Sa mise en oeuvre est prévue jusqu'en 2013.

Ses objectifs en termes de réalisation physique de logements comprennent la mise à disposition de 250.000 logements locatifs sociaux, la réhabilitation de 400.000 logements locatifs sociaux et la démolition de 250.000 logements locatifs sociaux.

Le PNRU a fait l'objet d'une nouvelle réévaluation par la loi instituant le droit au logement opposable du 5 mars 2007. L'engagement de l'Etat a été porté, alors, de 5 milliards d'euros à 6 milliards d'euros sur l'ensemble de la période. Par convention, le « 1 % » logement au travers de l'UESL s'est également engagé à apporter une contribution globale du même montant.

Selon les informations fournies à votre rapporteur spécial, la répartition de l'augmentation de la contribution de l'Etat sur la durée du programme serait la suivante :

Répartition des effets du relèvement de la dotation de l'ANRU
de 5 à 6 milliards d'euros

(en millions d'euros)

2007

2008

2009

2010

2011

2012

0

+ 23

+ 57

+ 104

+ 171

+ 261

Source : ministère du logement et de la ville

Le plan de cohésion social e, établi par la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, prévoit la réalisation de 500.000 logements locatifs dans le secteur social sur cinq ans, le conventionnement de 200.000 logements à loyers maîtrisés et la remise sur le marché de 100.000 logements vacants.

Ces objectifs ont été modifiés par la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale dite « DALO », en vue, notamment, de développer l'offre d'hébergement et de logements . Sont ainsi prévus :

- l'augmentation du nombre de logements sociaux à construire sur la période 2005-2009 qui passe de 500.000 à 591.000, afin de rééquilibrer l'offre au profit des logements « très sociaux » ;

- l'identification du nombre de PLA-I (prêts locatifs aidés d'insertion) au sein des objectifs globaux, leur nombre devant s'établir à 20.000 dès 2007 ;

- l'augmentation des capacités d'hébergement figurant dans la loi de cohésion sociale : il s'agit notamment de transformer 10.500 places d'hébergement d'urgence en places d'hébergement de stabilisation ou places de centres d'hébergement et de réinsertion sociale ;

- le renforcement des obligations fixées aux communes et groupements intercommunaux en matière de création de places d'hébergement d'urgence ;

- l'extension de l'obligation de 20% de logements sociaux à 285 nouvelles communes.

Les crédits programmés par la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale ont été réévalués en conséquence et portés au total, pour les années 2005 à 2009, de 2,7 milliards d'euros à 3,2 milliards d'euros en autorisations d'engagement.

Programmation budgétaire du plan de cohésion sociale revue par la loi « DALO »

(en millions d'euros valeur 2004)

2005

2006

2007

2008

2009

Total

Avant

Après

Avant

Après

Avant

Après

Avant

Après

Autorisations

d'engagement

442

482

482

687

482

798

482

798

2.730

3.207

Crédits de paiement

465

594

610

631

610

703

482

670

2.761

3.063

Source : loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, loi n° 2007-290 du 5 mars 2007

Au-delà de ces lois de programmation, l'engagement du ministre du logement et de la ville en faveur de la construction de logements a été rappelé à l'occasion des « réunions de chantier » organisées à Lyon du 17 au 28 septembre 2007. Traduction des engagements du Président de la République affirmés durant la campagne électorale, le « chantier national pour le logement » prévoit notamment :

- « la construction de 500.000 logements nouveaux par an dont 120.000 logements sociaux ;

- la mise en vente de 40.000 logements HLM auprès des locataires afin de promouvoir une France de propriétaires ;

- de fluidifier la chaîne du logement de l'hébergement d'urgence à l'accession à la propriété ;

- de mettre en application le Droit Au Logement Opposable (DALO) ».

Il a donné lieu à la conclusion de plus d'une quinzaine de conventions entre l'Etat et les différents partenaires intervenant dans le secteur du logement.

B. UNE MISSION QUI S'APPUIE AUTANT SUR LES CRÉDITS BUDGÉTAIRES QUE SUR LA DÉPENSE FISCALE

La mission « Ville et logement » représente :

•  3.145 emplois autorisés en équivalent temps plein travaillé (ETPT) contre 3.088 en 2007.

Le plafond d'emploi est augmenté de 100 équivalents temps plein pour tenir compte de l'application de la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable . Selon le projet annuel de performances, « ces effectifs supplémentaires viennent compléter ceux dégagés par redéploiements internes pour mettre en oeuvre la loi, notamment connaissance et analyse de la demande des publics concernés, activité des commissions de médiation 1 ( * ) et mise en oeuvre de leurs décisions ».

Tous les emplois, participant aux quatre programmes de la mission, sont comptabilisés sur le programme « Développement et amélioration de l'offre de logement ».

- 2.785 (contre 2.716 en 2007) participent à la mise en oeuvre des programmes « logement », 260 au titre de la direction générale de l'urbanisme de l'habitat et de la construction (DGHUC) et de la mission interministérielle d'inspection du logement social (MILOS) et 2.525 dans les directions régionales et départementales de l'équipement ;

- 360 (contre 378 en 2007) participent à la mise en oeuvre des programmes « ville » dont les 81 emplois équivalent temps pleins de la délégation interministérielle à la ville (DIV).

Il convient toutefois d'ajouter à ces emplois, les emplois des quatre principaux opérateurs agissant dans le cadre de la mission : l'agence nationale de l'habitat (ANAH), l'agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) et l'agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé).

Tableau des emplois des opérateurs de la mission « Ville et logement »

Opérateur

Emplois 2007

Emplois 2008

ANAH

123

138

ANRU

65,5

75

CGLLS

29

29

ACSE

311 (1)

311

(1) non compris 12 emplois par transfert de la DIV.

Source : projet annuel de performances « Ville et logement » ; annexe au projet de loi de finances pour 2008

• Plus de 10 milliards d'euros de dépenses fiscales, en progression de 10,6 % par rapport à 2007 2 ( * ) .

Les dépenses fiscales sont pour leur quasi-totalité rattachées au programme « Développement et amélioration de l'offre de logement ».

Poids des dépenses fiscales rattachées par programme de la mission

(en millions d'euros)

Programme

Evaluation 2007

(révisée)

Evaluation 2008

Evolution

2008/2007

Dépenses fiscales/crédits budgétaires du programme(CP)

Rénovation urbaine

100

150

+ 50,0%

65,22%

Equité sociale et territoriale et soutien

211

210

- 0,5%

26,44%

Aide à l'accès au logement

35

35

0,0%

0,70%

Développement et amélioration de l'offre de logement (1)

9.394

10.374

+ 10,4%

895,72%

Total

9.740

10.769

+ 10,6%

150,06%

(1) Hors DOM et crédit d'impôt pour dépenses d'équipements de l'habitation principale en faveur des économies d'énergie.

Source : projet annuel de performances « Ville et logement » ; annexe au projet de loi de finances pour 2008.

• En termes de crédits budgétaires :

- 7.691 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 7.176 millions d'euros de crédits de paiement .

Ces crédits seront complétés par un montant très limité de fonds de concours , pour un total envisagé de 150.000 euros, provenant de contributions de tiers aux études locales sur le logement.

Les crédits de la mission « Ville et logement » sont en hausse respectivement de 5,27 % en autorisations d'engagement et de 0,25 % en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2007.

Evolution des crédits, détaillée par action de la mission

(en euros)

AE 2007

AE 2008

Variation

CP 2007

CP 2008

Variation

Programme "Rénovation urbaine"

Logements participant à la rénovation urbaine

397.576.610

385.000.000

- 3,17 %

353.576.610

200.000.000

- 43,44 %

Aménagement des quartiers participant à la rénovation urbaine

15.000

30.015.000

30.000.000

- 0,05 %

Programme "Equité sociale et territoriale et soutien"

Prévention et développement social

348.581.385

341.800.000

- 1,95 %

378.981.385

369.000.000

- 2,63 %

Revitalisation économique et emploi

359.130.000

375.400.000

+ 4,53 %

366.730.000

382.200.000

+ 4,22 %

Stratégie, ressources et évaluation

43.508.000

43.030.000

- 1,10 %

44.508.000

43.030.000

- 3,32 %

Programme "Aide à l'accès au logement"

Aides personnelles

4.933.010.000

4.985.900.000

+ 1,07 %

4.933.010.000

4.985.900.000

+ 1,07 %

Accompagnement des publics en difficulté

8.025.500

8.000.000

- 0,32 %

8.025.500

8.000.000

- 0,32 %

Programme "Développement et amélioration de l'offre de logement"

Construction locative et amélioration du parc

1.004.987.108

1.343.860.000

+ 33,72 %

827.764.949

951.860.000

+ 14,99 %

Soutien à l'accession à la propriété

7.657.700

6.450.000

- 15,77 %

14.603.845

6.200.000

- 57,55 %

Lutte contre l'habitat indigne

25.857.170

25.000.000

- 3,32 %

22.849.554

25.000.000

+ 9,41 %

Réglementation de l'habitat, politique technique et qualité de la construction

7.359.348

8.200.000

+ 11,42 %

7.351.595

7.200.000

- 2,06 %

Soutien

157.626.816

168.910.000

+ 7,16 %

157.618.199

167.910.000

+ 6,53 %

Total

7.293.334.637

7.691.550.000

+ 5,46 %

7.145.034.637

7.176.300.000

+ 0,44 %

Source : projet annuel de performances « Ville et logement » ; annexe au projet de loi de finances pour 2008

*
* *

* 1 Les commissions de médiation, instituées par l'article 7 de la loi DALO, doivent être mises en place au 1 er janvier 2008 dans tous les départements. Elles peuvent être saisies par toute personne qui, satisfaisant aux conditions réglementaires d'accès à un logement locatif social, n'a reçu aucune proposition adaptée en réponse à sa demande de logement dans le délai défini après concertation par arrêté du préfet de département. Les commissions de médiation désignent les demandeurs qu'elles reconnaissent prioritaires et auxquels un logement doit être attribué en urgence.

* 2 La dépense liée au crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt, institué par la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat n° 2007-1223 du 21 août 2007 et que propose de modifier l'article 7 du présent projet de loi de finances pour 2008, n'est prise en compte qu'à hauteur de 220 millions d'euros en 2008 Elle est estimée, en année pleine, à 4.570 millions d'euros.