4. Des éléments plus favorables à l'introduction des NTIC

Aux résistances bien réelles, des éléments plus dynamiques du système éducatif esquissent des contours favorables à l'introduction des techniques de l'information. Au demeurant, ces éléments restent relatifs, parfois contradictoires et n'annoncent pas un avenir assuré.

- Les positions syndicales [91]

La FEN [92] insiste fortement sur la nécessaire formation initiale des enseignants, ne considérant pas comme irréaliste de rendre obligatoire l'usage des NTIC dans les IUFM. Cette approche semble d'autant plus pertinente à la fédération de l'Éducation nationale que la jeunesse des étudiants constitue un facteur favorisant la maîtrise de ces nouveaux moyens.

La FSU, constatant les insuffisances de la formation continue comme celles de la formation initiale, sans pour autant se prononcer sur le caractère obligatoire de la formation aux NTIC, semble insister davantage sur l'aspect pédagogique : " Les enseignants ne doivent se consacrer qu'à la pédagogie [93] ". Cette expression traduit la nécessité d'un accompagnement technique, de la nécessaire présence d'un personnel spécifique chargé de la maintenance de tous ces matériels. La gestion de la " panne " ne ressort pas d'abord de la responsabilité pédagogique.

Les deux syndicats semblent très favorables à une politique tendant à généraliser l'usage des NTIC. La FEN considère cette généralisation indispensable pour " préserver l'égalité des élèves ". La FSU, dans un communiqué commun rendu public en mai 1997 et signé par d'autres syndicats enseignants [94] , en appelle même à " une politique globale des sciences et technologies de l'information et de la communication dans le système éducatif. Celle-ci doit concerner les équipements, la formation des enseignants, l'évolution des programmes d'enseignement, la conception de logiciels et de produits éducatifs multimédias, et doit s'attacher à définir une nouvelle discipline qui assure la maîtrise des principes et des pratiques de ces sciences. […] "

Les syndicats comme les enseignants, n'ont pas de position sur la place de l'ordinateur dans l'école : fond de classe, salle multimédia, BCD ou CDI, toutes ces hypothèses sont évoquées. Pour la FEN, dans une première étape, le lieu où l'accès à la machine est le plus démocratisé, est la BCD ou CDI à équiper en premier [95] .

Parmi les centrales syndicales sollicitées, la CFTC a eu une réflexion importante sur ce sujet. Notre interlocuteur considère comme indispensable la maîtrise des ordinateurs par les jeunes : " il est certain que les jeunes arrivant sur le marché du travail et qui ne disposeraient pas d'une approche de l'ordinateur seraient défavorisés par rapport à ceux qui ont pu dépasser l'étape d'appréhension de la machine ". Cette problématique pose donc clairement une responsabilité du système éducatif : "la pédagogie doit pouvoir être adaptée à ces nouveaux outils. Il faut faire comprendre aux enseignants que leur formation ne sera jamais terminée. "

- Les réflexions des parents d'élèves [96]

Les positions respectives des deux organisations de parents d'élèves semblent radicalement contradictoires.

La PEEP [97] exprime une inquiétude forte face à l'arrivée des NTIC à l'école et la considère " prématurée " ; elle estime plus urgent, voire prioritaire, de mener à bien l'apprentissage scolaire de la télévision, point de départ d'une démarche critique. L'inquiétude à l'égard de ces outils, exprimée par cette organisation, porte essentiellement à l'encontre d'Internet qui constitue " avant tout un réseau commercial ".

La FCPE [98] , en revanche, affirme des positions beaucoup plus favorables à l'évolution du multimédia ; elle a déjà engagé de nombreuses réflexions sur les conséquences pédagogiques de ce nouvel outil. Elle considère " important de réussir l'introduction des NTIC à l'école " ; elle met en avant la spécificité de l'outil multimédia dans son utilisation des liens hypertextuels : " l'hypertexte prédétermine le cheminement de l'élève. Contrairement au dictionnaire, la construction de la pensée est enfermée dans un parcours a priori. Cet apprentissage suppose donc que les élèves disposent de la capacité de discernement qui les rende aptes à utiliser cet outil ". C'est en devenant producteurs eux-mêmes de produits multimédia et surtout d'hypertextes que les élèves seront les mieux préparés à la compréhension de ces nouvelles formes de rédactions .

La FCPE, comme l'ensemble des acteurs du système éducatif, affirme la nécessité de la formation des enseignants. Pourtant, non sans justesse, les parents d'élèves mettent en avant un aspect ignoré : il ne suffit pas de former les futurs enseignants dans le cadre des IUFM, il faut que l'universitté permette la familiarisation à ces outils par tous les étudiants. La pertinence d'une formation obligatoire au sein des IUFM serait ainsi d'autant plus assurée.

- Les élèves

Une chose est certaine : les élèves sont enthousiastes pour utiliser des ordinateurs. Toutes les raisons relevées, dans le cadre des réflexions pédagogiques, sont vraies : la remotivation des élèves, la confiance renouvelée, les relations changées avec les enseignants sont autant d'arguments susceptibles de favoriser, voire d'accélérer, le processus d'équipement.

Beaucoup de ceux qui réfléchissent sur ce sujet ont la conviction que la généralisation pourra se faire grâce aux élèves. Comment ? Toute la question est là.

La pression des élèves et des parents d'élèves viendra-t-elle du fait de l'équipement outil multimédia par les plus favorisés ? Faut-il laisser, comme certains l'envisagent non sans un certain regret [99] , le marché créer le besoin pour qu'enfin l'Éducation nationale prenne les mesures s'imposant ? Quelles seront les conséquences d'une telle logique, notamment en terme de contenus éducatifs ? Ne sera-t-il pas trop tard, l'obstacle financier demeurant réel pour encore quelques temps ?