B. LE DISPOSITIF D'AIDE

L'analyse du dispositif d'aide est handicapée par l'absence de document global retraçant la part prise par les différents instruments 26 ( * ) mis en oeuvre.

La juxtaposition des différents éléments fournis conduit d'abord à souligner l'ampleur des moyens engagés en Tunisie.

Enveloppe affectée à la Tunisie

Coopération culturelle, scientifique et technique

- Titre IV - programmation 2000 89 MF

- Titre VI - enveloppe FSP 2000 23 MF

Coopération économique et financière

- AFD - stock engagements fin 1999 2610 MF

- Proparco - engagements 1999 500 MF

- Protocoles conclus depuis 1992 2900 MF

- FASEP - enveloppe 1999 24,3 MF

- Lignes de crédit agro-alimentaire :

- engagements 2000 165 MF

- engagements 2000-2001 283 MF

Une analyse discursive confirme, de façon générale, l'importance des liens économiques et financiers pour l'enjeu du partenariat euro-méditerranéen dans lequel la Tunisie s'est engagée avec précocité, et donc fragilité.

Parallèlement, la coopération culturelle, scientifique et éducative semble marquée par un certain traditionalisme, qui pourrait rapidement confiner à la désuétude, et gagnerait à être mieux adaptée aux contraintes particulières d'un pays émergent appelé à renforcer simultanément " état de droit " et développement économique.

1. La coopération économique et financière

La Tunisie est un des rares pays à bénéficier de la totalité des instruments disponibles dans ce domaine : aide-projet de l'Agence française de développement, avec les prêts du guichet concessionnel ; aide-projet dans le cadre des protocoles " rénovés " : réserve pays émergents, appuis spécifiques pour soutenir la modernisation des PME-PMI du secteur privé et accompagner l'adaptation des structures publiques avec les procédures FASEP ; intervention de PROPARCO pour le soutien au secteur privé productif ; et enfin, conditions de crédit avantageuses pour les achats de céréales mis en place auprès des fournisseurs français.

L'aide française affectée à ce titre à la Tunisie, sur les dix dernières années, avoisine huit milliards de francs (PROPARCO et achats de céréales compris).

L'aide purement concessionnelle en provenance de l'Etat se situe à 6,3 milliards de francs, soit le double du montant engagé par l'Union européenne dans le cadre de MEDA I (3 milliards de francs, en totalité sous forme de dons), et le double de l'aide bilatérale débloquée par les bailleurs bilatéraux européens.

Bien que ces concours aient enregistré un repli significatif depuis 1992, l'effort français demeure à un niveau annuel moyen élevé, de l'ordre de 550 millions de francs.

Toutefois, comme l'aide française s'applique à de très nombreux secteurs d'activité (transport, santé, environnement, enseignement, formation professionnelle, irrigation, réhabilitation de quartiers populaires...), elle apparaît en définitive plutôt moins lisible que celle d'autres bailleurs bilatéraux , qui ciblent davantage leur enveloppe -l'Allemagne sur l'environnement, le Japon -très présent- sur les infrastructures et l'environnement, la Belgique, le Canada et la Suède sur l'eau, l'Espagne sur les transports ferroviaires-.

Ceci renvoie d'ailleurs à une question de fond concernant la lisibilité de notre aide, quelque soit le partenaire : faut-il se " spécialiser " ou " être présent partout " ? Faut-il travailler en bilatéral ou participer à des cofinancements dans lesquels la France disparaît au profit de personnes morales mondiales ou européennes ?

a) Protocoles financiers

L'analyse de la mise en oeuvre des protocoles amène à formuler les observations suivantes :

Trois protocoles aide-projets ont été accordés sur la période 1995-1997, respectivement pour 236 millions de francs (1995), 150 millions de francs (1996) et 150 millions de francs (1997).

Le taux d'imputation constaté sur ces trois protocoles n'a cessé de diminuer : 79 % sur le premier, 65 % sur le deuxième, et 36 % seulement sur le troisième, près de quatre ans après sa conclusion.

Les deux premiers sont devenus caducs - subsiste donc un reliquat non utilisé de 100 millions de francs- et il reste encore 96 millions de francs disponibles sur le troisième , pour une éventuelle imputation. Les services français mettent en avant la difficulté pour les autorités tunisiennes de définir des projets prioritaires à moyen terme et la lourdeur des procédures de passation de marchés publics. La situation à cet égard ne s'étant en principe pas détériorée depuis 1995, on ne peut que s'interroger sur le bien-fondé de la passation d'un troisième protocole aussi important en 1997 .

Principaux bénéficiaires des protocoles pré-1997

- Protocole de 1995

RVI : matériel de collecte et traitement des ordures ménagères 14 MF

CAPIC : cuisines universitaires 44 MF

THOMCAST : réseau d'émission en ondes courtes 54 MF

STEDEF : attaches élastiques de chemins de fer 22 MF

COGIFER : appareils de voies de chemins de fer 11 MF

- Protocole de 1996

Le Matériel de Voie : réhabilitation du secteur ferroviaire 68 MF

BOUYGUES- ALSTOM : mini-centrales hydroélectriques 19 MF

- Protocole de 1997

THOMCAST : équipement télévision nationale 30 MF

SIDES : véhicules et équipement d'incendie et de secours 12 MF

GICAR : véhicules d'incendie 12 MF

Le projet INSAT : 308 millions de francs

Lancé lors d'une visite d'Etat du Président Mitterrand en Tunisie en 1989, ce projet a bénéficié de la mobilisation la plus lourde de l'aide française en Tunisie sur un seul dossier : 30 MF.

Il a financé la réalisation d'un établissement d'enseignement technologique et supérieur (INSAT).

Conçu pour accueillir 2.000 étudiants et près de 300 enseignants, l'INSAT compte actuellement 1.300 étudiants et 100 enseignants.

La réalisation technique a été effectuée par Bouygues (coût du chantier : 161 MF).

Il reste sur le dernier protocole de 1997, seul encore valide, un reliquat de 78 MF.

La proposition de Bercy de financer les équipements nécessaires à la création d'un centre d'innovation et de développement faisant le lien entre les élèves issus de l'INSAT et le monde de l'entreprise est intéressante.

Mais elle doit impérativement être étudiée en liaison et en coordination étroite avec les services de coopération chargés notamment de la politique de coopération universitaire et de la formation professionnelle. A ce jour, ceci ne semble pas encore fait.

b) Aide au secteur privé
(1) Procédure réserve pays émergents

La procédure réserve pays émergents , issue de la réforme des protocoles financiers intervenue en 1998, bénéficie à la Tunisie depuis 1999 27 ( * ) .

Aucun projet n'a toutefois, à ce jour, encore fait l'objet d'un examen par le comité des projets parisien, malgré les propositions concrètes du poste : dix projets identifiés, représentant un montant global de 605 millions de francs, et susceptibles d'intéresser notamment le CEA, Alcatel, Sofrelog, Tractebel, Total-Energie...

Ce retard paraît regrettable, surtout compte tenu de l'ampleur de la concurrence actuelle sur un marché qui bénéficie de la considération appuyée des agences de rating...

(2) Procédures FASEP

Egalement issue de la réforme des protocoles, les procédures FASEP ( fonds d'aide au secteur privé ) bénéficient à la Tunisie depuis 1998.

Les procédures FASEP

1. FASEP - garantie

Le FASEP-garantie a pour vocation de faciliter la création et le développement des PME françaises à l'étranger et de simplifier les instruments mis à leur disposition.

Il comporte un volet spécifique à la Tunisie, le FASEP-crédits, appelé couramment FASEP-PME-PMI.

La responsabilité de la promotion et de la gestion de ce fonds a été confiée conjointement à SOFARIS (filiale de la BDPME), à l'AFD et à la COFACE.

Volet fonds propres : garantie du risque économique

. Bénéficiaires : tous pays, hors ACP et OCDE ;

. Procédure : garantie d'apports en fonds propres de la maison-mère française à sa filiale tunisienne, de participations des sociétés de capital-risque ou à un fonds commun de placement ;

. Entreprises éligibles : filiale étrangère détenue majoritairement par une maison-mère française dont le chiffre d'affaires ne doit pas excéder 3 milliards de francs ;

. Taux de garantie : 50 % du montant de l'intervention éligible.

FASEP-PME-PMI

. Mêmes conditions d'application ;

. Garantie de prêts consentis à la filiale tunisienne par un établissement de crédit, tunisien ou non, dans le cadre d'un programme d'implantation et de développement ;

. Le crédit-bail et le besoin en fonds de roulement ne sont pas éligibles.

2. FASEP - études

Le FASEP-études a vocation à financer des études en amont de projets, des prestations d'assistance technique et des actions de coopération institutionnelle, " dans le cadre de la politique française d'aide publique au développement ".

- bénéficiaires : pays en voie de développement, en particulier pays émergents, hors ZSP, pays en transition (PECO et CEI) - les opérations militaires sont exclues ;

- Montant du financement limité à 5 millions de francs par opération ;

- Les principaux critères d'appréciation des opérations, en particulier pour les études de faisabilité, sont les perspectives de réalisation de projets impliquant la technologie et le savoir-faire français et la possibilité de mobiliser des financements bi ou multilatéraux ;

- Depuis sa création (fin 1996), cette procédure a financé 175 projets pour un montant total de 460 millions de francs, pour plus de la moitié dans les secteurs eau et transports, et concernant à hauteur de 25 % l'Afrique et le Moyen-Orient.

Source : Documents du ministère de l'Economie, des finances et de l'industrie et documents fournis par les postes.

Pour la Tunisie, à la mi-juillet 2000, les opérations couvertes par la procédure garantie-fonds propres , représentent, au titre des dossiers acceptés, 5,7 millions de francs de garanties, pour deux projets, d'un montant global de 19 millions de francs et, au titre des dossiers en cours d'instruction, 10,2 millions de francs de garanties demandés, pour trois projets d'un montant global de 28 millions de francs.

Le volet PME-PMI propre à la Tunisie représente 9,3 millions de francs de dons pour huit projets d'un montant global de 76 millions de francs.

Le volet études s'élève à 9,2 millions de francs de dons, pour un montant total de prestations de 15,5 millions de francs, sur cinq projets, dont les retombées commerciales potentielles sont évaluées à 150 millions de francs.

* 26 Il s'agit là d'une remarque générale et systématique à l'ensemble des pays visités. A vrai dire, on voit mal comment cohérence, coordination et hiérarchisation des priorités peuvent être assurées en l'absence d'un tel document de synthèse.

* 27 La liste des pays éligibles est définie chaque année.

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