CROISSANCE PLUS RICHE EN EMPLOIS OU CROISSANCE POTENTIELLE PLUS FORTE :

QUEL CHEMINEMENT VERS LE PLEIN EMPLOI EN 2010 ?

Aujourd'hui, la perspective du plein emploi en France est à nouveau devenue réaliste alors qu'il y a à peine quelques années la persistance du chômage en Europe constituait un point central dans toutes les analyses sur les faiblesses et les performances du système économique européen. Pourquoi ce retournement ? Plusieurs raisons sont à l'origine de ces nouvelles perspectives optimistes. La première est conjoncturelle : le rythme accéléré de la croissance économique en France et en Europe (et relativement plus au plan national) permet une décrue du chômage dit conjoncturel ce qui se traduit par une baisse significative du taux de chômage effectif. Bien que la question des fluctuations conjoncturelles et de leurs répercussions sur l'emploi soit importante car elle renvoie aux choix de politique économique appropriée à court terme (stimuler la demande plutôt que de favoriser l'offre sur le moyen terme ?) elle est, par définition insuffisante, pour aborder la problématique du plein emploi. Atteindre le plein emploi signifie que l'on puisse également résorber le chômage dit structurel. L'adoption de politiques économiques qui peuvent accompagner un tel mouvement est déterminante. C'est le cas en France avec, d'une part, une politique de baisse du coût du travail suivie depuis 1993 (particulièrement orientée vers une population de travailleurs non qualifiés constituant une part significative du chômage dit structurel) améliorant les conditions d'offre globale de l'économie et, d'autre part, la politique plus récente de baisse de la durée du travail qui, au moins provisoirement, permet des créations d'emploi plus amples. Cette composante politique constitue la seconde raison pour laquelle le plein emploi est envisageable aujourd'hui.

Enfin, la troisième cause à l'origine de perspectives favorables sur la réduction du chômage effectif se rapporte aux évolutions démographiques attendues pour la décennie en cours (les évolutions attendues pour la population active étant plus faibles, le chômage pourrait diminuer fortement pour un même volume d'emplois créés). Cependant, cette dernière raison, a priori favorable à la résorption du chômage, constitue un frein au développement de la croissance potentielle en France. Or, ce n'est qu'à travers une augmentation durable de l'offre potentielle, autorisant une croissance à moyen terme de l'économie française plus forte, que l'on pourra aussi maintenir durablement un chômage structurel (ou d'équilibre) à des niveaux faibles .

A ce stade, il est indispensable de clarifier le concept de plein emploi. La variété des définitions relatives à ce concept témoigne de la difficulté que peut représenter son évaluation. Parle-t-on de taux de chômage naturel, de NAIRU, de taux de chômage d'équilibre ?

Ces différents concepts reflètent la diversité des analyses relatives au marché du travail mais font tous référence à une notion de seuil. La notion de NAIRU, en particulier, définit une limite au-delà de laquelle le cheminement autour du sentier de croissance peut être affecté par des pressions inflationnistes appelant dès lors des décisions de politique économique. Le taux de chômage naturel (tel que défini par Friedman et Phelps) serait plus proche de l'idée d'un chômage frictionnel qui persisterait dans le cas où tous les marchés satisferaient à l'équilibre de long terme. C'est celui vers lequel devrait tendre une économie utilisant ses facteurs de production de manière optimale (à rapprocher de la notion de croissance potentielle bien que cette dernière puisse également être circonscrite à la définition d'une limite déclenchant des décisions de politique économique, différente alors du concept de croissance de long terme). Les seuils sont, ici, de nature démographique ou bien relatifs à la formation et aux qualifications disponibles mais peuvent aussi relever d'un contenu plus institutionnel.

Dans l'étude que nous présentons, c'est le concept de NAIRU qui est retenu. Il intervient à la fois sur la boucle prix-salaires en ajustant l'indexation de ces derniers sur les prix en fonction de la tension existante sur le marché du travail (matérialisée par la convergence du chômage effectif vers le NAIRU) et sur la détermination du niveau du salaire (plus le taux de chômage approche le NAIRU, plus la pression à la hausse sur le niveau du salaire est forte).

La première partie de cette étude portant sur la croissance plus riche en emplois et le cheminement crédible vers le plein emploi à l'horizon de 2010 retient comme taux de chômage effectif à cette date un niveau de 5% qui pourrait être considéré comme le plein emploi. Nous envisageons, par conséquent, un cheminement progressif vers ce niveau, très proche du NAIRU estimé pour cette date. Pour y parvenir, il est supposé que des suppléments d'emploi résultent d'une tendance de la productivité apparente du travail qui se situerait sur le trend observé dans les années 1990 (par opposition à celui estimé pour les années 1980). Il apparaît néanmoins que les éléments favorables de la fin de la décennie 1990 ne peuvent être projetés à l'identique (effet de la mise en place des 35 heures, emplois jeunes mais aussi baisse massive des cotisations sociales employeurs).

Dans un second temps, nous nous intéressons à un scénario alternatif qui serait celui d'une croissance potentielle plus forte. A long terme, cette dernière devrait autoriser le maintien à des niveaux plus faibles du taux de chômage d'équilibre. Il n'est donc plus question de productivité ralentie. Au contraire, l'idée sous-jacente est celle d'un progrès de la productivité globale alimentant durablement la croissance. La seconde partie de cette étude propose, donc, de balayer les différents scénarios pouvant conduire à un sentier de croissance plus élevé.

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