B. LE COÛT DE LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE : UNE QUESTION TRÈS DISCUTÉE

Dans quelle mesure le coût de la propriété industrielle est-il un obstacle au dépôt de brevets ?

Derrière cette question, simple d'apparence, se cache une réalité complexe et particulièrement polémique dans notre pays. Le brevet français est, comme cela a déjà été dit, unanimement considéré comme très peu onéreux et particulièrement accessible. Tout le monde s'accorde pour estimer que son coût n'est pas un obstacle au dépôt de brevet.

Pour le brevet européen, la situation est moins simple.

Partant du constat d'un surcoût -remis en cause dans sa proportion plus que dans son principe par certains professionnels du secteur 52 ( * ) - d'obtention du brevet européen par rapport aux brevets japonais et américain , les Etats membres de l'OEB -à l'initiative de la France- et la Commission européenne -au travers de la proposition de règlement sur le brevet communautaire- se sont engagés dans une démarche de réduction de ce coût.

Les différents postes potentiels de coût générés par un brevet européen peuvent être ainsi décomposés :

Coût d'obtention du brevet européen

- frais internes à l'entreprise ;

- conseils externes (conseils en propriété industrielle) variables suivant la durée et la complexité de la procédure ;

- taxes de procédure 53 ( * ) (de dépôt, de recherche, d'examen, de désignation...) ;

- traductions du brevet délivré 54 ( * ) ;

- taxes nationales et frais (mandataires) de validation et de publication des traductions ;

Coût du maintien en vigueur

- taxes de renouvellement à acquitter chaque année pendant au plus 20 ans (leur niveau est fixé par chaque Etat ; l'OEB en perçoit 50 % ; elles augmentent progressivement sur la durée de vie du brevet) ;

(éventuellement) Coût de la défense juridictionnelle du brevet

- frais de procédure et de conseils externes (avocats, conseils) ;

- (éventuellement) dommages et intérêts plus ou moins élevés suivant les systèmes juridiques (ce coût pouvant être à la charge du contrefacteur du brevet).

C'est sur le coût d'obtention du brevet européen que se sont focalisées les discussions, car il a été considéré comme une possible barrière à l'entrée, dissuasive pour un déposant potentiel.

1. La polémique sur le coût d'obtention d'un brevet européen et le coût des traductions

Ce coût peut être extrêmement variable, compte tenu :

- de la longueur du brevet et de sa complexité, éléments qui influent notamment sur le coût des traductions et des conseils ;

- du nombre de pays désignés ;

- de la complexité -imprévisible à première vue- de la procédure : y aura-t-il par exemple, opposition à la délivrance de la part d'un tiers ?

D'où une très grande difficulté des différentes parties à s'accorder sur une estimation universellement acceptée du « coût moyen d'obtention d'un brevet européen moyen ».

La question est si complexe et si âprement discutée que votre rapporteur a jugé utile -compte tenu de la confusion régnant en la matière- de lui consacrer une annexe du présent rapport. Le lecteur voudra bien se reporter, sur ce sujet, à l'annexe 3 où figurent les différentes estimations dont votre rapporteur a eu connaissance.

Nul doute qu'il existe en la matière un besoin de clarification, certains chiffres, diffusés pourtant par des organismes de renom, ayant semé -à dessein ?- la confusion. Ainsi des calculs reproduits sur le site Internet de la direction « Marché intérieur » de la Commission européenne ont-ils été remis en cause par l'ensemble des personnes entendues par votre rapporteur -y compris par l'OEB-. Il apparaît en particulier que fait défaut une estimation réaliste du coût des conseils dans les procédures de délivrance américaine et japonaise, jugés sous-évalués par nombre de personnes consultées par votre rapporteur.

Toutefois, un large consensus s'est dessiné parmi les personnes auditionnées sur le fait que le coût d'obtention serait plus élevé dans le cas d'un brevet européen (à partir de trois pays désignés seulement, estime toutefois la Compagnie nationale des conseils en propriété industrielle), même si les analyses des causes de ce surcoût divergent (traductions et/ou taxes).

* 52 Principalement la Compagnie nationale des Conseils en propriété industrielle et les traducteurs en brevets. Dans un document adressé le 6 juin dernier à votre rapporteur, la CNCPI indique qu'il n'y a pas de surcoût par rapport à un brevet américain lorsque le brevet européen ne désigne que trois pays. Dans les autres cas, le coût d'obtention du brevet européen ne dépasserait pas le double de celui du brevet américain.

* 53 Taxes récemment abaissées en deux vagues.

* 54 Tous les Etats membres de l'OEB demandent actuellement une traduction dans leur langue pour que le brevet y prenne effet.

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