B. LA TRADUCTION DES NOUVELLES ORIENTATIONS DE LA COOPÉRATION SUR LE TERRAIN : LES EXEMPLES DE MADAGASCAR ET DU KENYA

Vos rapporteurs se sont rendus à Madagascar et au Kenya du 9 au 18 février 2001. Leur mission poursuivait quatre objectifs complémentaires : évaluer les actions de coopération conduites jusqu'à présent, mesurer, le cas échéant, les modifications introduites par la réforme, mieux appréhender sur place les attentes des personnels de la coopération et de l'ensemble des acteurs français -ONG, entreprises- impliqués dans le développement, prendre en compte enfin les attentes de nos partenaires. Elle a pu bénéficier du concours constant de nos ambassadeurs, M. Stanislas Lefebvre de Laboulaye, à Tananarive et de M. Pierre Jacquemot à Nairobi, de leurs collaborateurs ainsi que de l'ensemble des services français intéressés, notamment ceux de l'AFD. Qu'ils en soient vivement remerciés.

1. Madagascar : les voies d'une coopération rénovée

Par bien des aspects, la coopération à Madagascar se prête à une appréciation approfondie des atouts et des limites de la politique française en matière d'aide au développement. En premier lieu, le pays se range parmi les plus pauvres du monde (l'indice de développement humain classe ainsi la Grande île au 153 ème rang sur 174). Ensuite, notre coopération mobilise des moyens considérables : près d'un milliard de francs si l'on prend en compte toutes les formes de coopération et les quotes parts françaises dans les financements internationaux (FED, Banque mondiale, FMI...). Par ailleurs, notre action dans ce pays présente d' importants enjeux liés à trois facteurs : la présence de la plus importante communauté française d'Afrique subsaharienne -devant la Côte d'Ivoire- forte de 25 000 compatriotes, dont 20 000 immatriculés, parmi lesquels beaucoup de binationaux ; le rôle des entreprises françaises au nombre de 500 -la France représente le tiers du commerce extérieur et 65 % du stock total des investissements étrangers ; enfin Madagascar est situé au coeur d'un espace marqué par l'influence française et la francophonie- avec les îles éparses, Mayotte, la Réunion, les Comores, Maurice et les Seychelles.

Enfin, une commission mixte, exercice qui associe l'ensemble des acteurs de la coopération française pour définir avec le pays partenaire les grands axes de la coopération, s'était tenue en mai 2000. Elle ne s'était pas réunie depuis dix ans. Elle a permis de dresser un état assez complet de l'action de la France.

Au cours de leur déplacement qui les a conduits à Tananarive, à Antsirabé et à Tamatave, vos rapporteurs ont pu visiter une dizaine de projets illustrant l'étendue et la variété de la coopération française (développement rural, humanitaire, secteur privé, développement social, éducation, institutionnel). Ils ont pu s'entretenir de manière approfondie avec les représentants de l'assistance technique, de l'Agence française de développement ainsi qu'avec les responsables des principaux investisseurs français à Madagascar. Enfin, ils ont également pu rencontrer les autorités malgaches -le Premier ministre, M. Tantely Andrianarivo, le ministre des affaires étrangères, Mme Lila Atsifandrihamanana, le ministre des forces armées, le général Marcel Ranjeva- afin de recueillir leur sentiment sur l'évolution de l'action française. Par ailleurs, un déjeuner organisé sous les auspices de notre ambassadeur a permis des échanges très fructueux avec les représentants des bailleurs de fonds -pays ou instances multilatérales- les plus actifs à Madagascar.

Avant de présenter les principaux enseignements de cette mission, vos rapporteurs analyseront le cadre général dans lequel s'inscrit la coopération française ainsi que les principaux axes de notre action.

a) Un contexte général marqué par la stagnation, voire la dégradation des conditions de vie.

Depuis 1996, Madagascar a retrouvé une certaine stabilité politique. Le pays s'apprête aujourd'hui à mettre en oeuvre le chantier de la décentralisation tout en évitant que ne resurgisse, à la faveur de cette réforme, le clivage traditionnel entre les côtiers et les habitants des hauts plateaux.

Dans le domaine économique, la conjoncture paraît plus favorable depuis 1997, même si les fruits de cette croissance demeurent très inégalement répartis et ne touchent guère les campagnes. Le pays, l'un des premiers concernés par l'initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE), est désormais assez avancé dans le processus mis en place par les organisations de Bretton Woods : il a ainsi obtenu l'accord du FMI à la fin de l'année 2000 pour atteindre le « point de décision » qui lui permet d'être exonéré du service de la dette ; les économies correspondantes devront être affectées aux dépenses de caractère social.

Par ailleurs, les autorités malgaches ont engagé un programme de privatisations des entreprises étatisées, pour la plupart d'entre elles, dans les années soixante-dix. Les premières opérations se sont traduites par un net renforcement du capital français dans l'économie du pays. Il reste sans doute à mieux impliquer les opérateurs privés malgaches dans les futures privatisations.

Le niveau de vie de la population apparaît très préoccupant, comme le traduisent quelques indices : l'espérance de vie du tiers de la population ne dépasse pas 40 ans ; 80 % des Malgaches n'ont pas accès à l'eau potable ; la population compte plus de 50 % d'analphabètes- et cette proportion est encore plus forte pour les jeunes, signe de la dégradation de l'enseignement au cours des deux dernières décennies. D'une manière générale, les infrastructures sont sans rapport avec les besoins des pays, en particulier dans les secteurs de l'éducation et de la santé.

On mesure mieux à travers ces quelques indicateurs les défis que doit relever notre coopération.

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