II. FAVORISER LA MISE EN VALEUR DES RESSOURCES NATURELLES : L'EXEMPLE DE L'EAU ET DE LA FORÊT

A. ENCOURAGER UNE GESTION INTÉGRÉE DES HAUTS BASSINS VERSANTS

1. Le rôle stratégique des zones de montagne au regard de la ressource en eau

a) Des réservoirs naturels

Les zones de montagne sont les « châteaux d'eau » de la planète et vu leur étendue et leur altitude, elles concentrent une part importante des précipitations dans les parties hautes des bassins versants. En outre, la plupart des grands fleuves prennent leur source en zone de montagne.

Mais, compte-tenu de la pente et du relief, conjugués à une végétation souvent rase et fragile du fait d'un climat plus rude, les montagnes sont des zones d'intense érosion et de concentration rapide des eaux , ce qui entraîne des crues et inondations qui pourront être ravageuses pour les parties basses des bassins et les plaines.

Ces situations peuvent être aggravées sous l'effet des activités humaines. Ainsi en est-il de l'imperméabilisation du sol par les constructions, les aires de stationnement et les routes, en particulier dans les zones de fort développement urbain et touristique. A l'inverse, l'abandon des secteurs les plus difficiles par la population et les activités économiques traditionnelles, comme le pastoralisme, peuvent avoir pour conséquence la destruction des ouvrages collectifs, les terrasses, les drainages et le retour à la friche...

En définitive, on peut caractériser les « têtes de bassin » comme des zones à forte pluviométrie donnant naissance à de nombreuses rivières. Il s'agit de zones de relief, avec des chevelus de cours d'eau de bonne qualité, plus ou moins préservés de la pollution, mais artificialisés avec la présence de barrages, de microcentrales ou encore le drainage des zones humides. Ce sont parfois des territoires en déprise économique et humaine avec néanmoins un fort potentiel de développement économique lié à l'eau.

b) Mais une qualité des eaux qui se détériore

D'une part, il convient de souligner qu'en dépit de son abondance apparente, l'eau naturellement potable peut être rare en zone de montagne compte tenu de la géologie complexe des massifs. Les ressources en eau ne présentent pas toujours les qualités physico-chimiques requises car elles peuvent être séléniteuses, turbides ou contenir des métaux toxiques tels que l'arsenic ou l'antimoine. Le renforcement des normes communautaires sur ces paramètres pourrait ainsi conduire à l'abandon de certains captages. En outre, les eaux parfois très agressives, caractéristiques des massifs cristallins présentent des risques de dissolution des matériaux constitutifs des canalisations et notamment du plomb.

D'autre part, ces ressources de type granitaire sont très vulnérables et sensibles aux pollutions de surface, notamment aux contaminations bactériologiques.

Force est de constater que la qualité des petits cours d'eau en amont se détériore, et ceci est dû à la combinaison de plusieurs facteurs, la réalité des problèmes différant fortement d'un bassin à l'autre, comme le soulignait M. Jean-Paul Chirouze, directeur de l'Agence Rhône-Méditerranée-Corse devant la mission commune d'information : « Les problèmes de l'eau dans les Alpes ne sont pas les mêmes que dans le Massif central. C'est ainsi qu'il peut non seulement y avoir des pollutions locales fortes dans des grandes villes telles Grenoble, mais aussi des pollutions diffuses dans les domaines de l'industrie et de l'agriculture, à prendre spécifiquement en compte. A titre d'exemple, le bassin de l'Arve en Haute-Savoie connaît des problèmes de pollution liés à l'activité de la mécanique ou du traitement de surface concernant plus d'un millier de petits industriels. Autre exemple sur le bassin Rhône-Méditerranée-Corse : le Jura qui subit, lui, la pollution organique d'activités laitières et fromagères, ces coopératives ayant dû travailler ensemble pour améliorer en six ans la situation des cours d'eau ».

En outre, et de manière paradoxale, ajoutait-il « l'assainissement réalisé dans de petites communes a pu être défavorable, car de telles infrastructures ont conduit à concentrer les rejets ».

2. L'eau en montagne, une source de richesse et de développement, donnant lieu à des conflits d'usage

a) L'importance de l'énergie hydraulique
(1) Etat des lieux de l'énergie hydraulique produite en zone de montagne

La production hydroélectrique française représente 14 % de la production totale d'électricité, soit 70 térawatt/heure (TWh), ce qui correspond à une puissance installée totale d'environ 25 gigawatts (GW).

A l'heure actuelle, plus de 2.000 centrales sont exploitées en France, dont :

- 1.810 de puissance inférieure à 10 MW (total de 2 GW) ;

- 281 de puissance supérieure à 10 MW (total de 22,5 GW) ;

La production d'hydroélectricité est principalement située dans les Alpes (70 %), puis dans le Massif central (20 %) et les Pyrénées (10 %).

EDF, au titre de sa production d'hydroélecticité, exploite :

- 150 barrages où sont stockés 7 milliards de m3 d'eau, soit ¾ des réserves nationales en eau de surface ;

- 500 centrales pour une puissance installée de 20 GW.

Ces installations hydrauliques représentent 20 % de la puissance installée totale d'EDF. Elles sont très rapidement mobilisables et capables de stocker de l'eau, donc de l'énergie pour les périodes de pointe hivernales.

En dehors d'EDF, qui est le principal producteur, il convient de citer la CNR (Compagnie Nationale du Rhône) qui produit 16 TWh, soit 25 % de la production hydroélectrique française. Les producteurs indépendants produisent 4 TWh/an en moyenne. Le secteur de la petite hydroélectricité (7 TWh au total) est adossé à un secteur industriel performant.

En dehors des performances de l'énergie hydraulique dans la lutte contre l'effet de serre, il faut souligner l'intérêt d'une telle activité en matière d'aménagement du territoire. Dans certaines zones de montagne, c'est bien souvent la seule activité économique qui subsiste, avec un certain nombre d'emplois à la clef.

(2) Les handicaps de l'énergie hydraulique

Des contraintes environnementales à prendre en compte

Sur le plan environnemental, la loi du 29 juin 1984 relative à la pêche, ou encore la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau ont eu un impact direct sur la production hydraulique, soit que l'eau ne soit plus turbinée, soit qu'elle le soit différemment et de façon moins optimisée par rapport aux besoins. Ainsi, le relèvement des débits réservés au dixième du module, comme le prévoit l'article L. 432-5 du code de l'environnement représente une perte de près de 4 % de la production hydroélectrique et est évalué à 1 % du coût du kWh.

Plus généralement, et il convient de s'en féliciter, chaque renouvellement de concession s'accompagne de nouvelles mesures environnementales, qui ne sont pas sans impact sur le niveau de la production.

Mais, néanmoins, l'opposition reste forte entre les partisans de l'équipement des rivières en micro-centrales pour développer la production d'énergies renouvelables et ceux qui dénoncent les atteintes environnementales de ces infrastructures et l'impact lourd en matière de pêche.

Une fiscalité pénalisante

La fiscalité pesant sur l'hydroélectricité n'a cessé de progresser ces dernières années et les taxes représentent désormais 40 % du coût de production, ce qui ne favorise pas son développement.

L'évolution des principaux postes sur les cinq dernières années est :

EVOLUTION DE LA FISCALITÉ EN M€ RECONSTITUÉE POUR LE PARC EDF ACTUEL

Source : EDF

Comme le soulignait Mme Claude Nahon, déléguée au domaine hydraulique d'EDF, lors de son audition devant la mission commune d'information, les gains de productivité obtenus ont été intégralement compensés par des augmentations de la fiscalité. Par ailleurs, les charges d'amortissement s'élèvent en moyenne à 15 ou 20 % et ne baissent que très faiblement compte tenu des charges d'entretien des ouvrages.

Ainsi, la rentabilité des investissements en matière d'hydroélectricité n'est pas jugée satisfaisante comme le relevait Mme Claude Nahon : « l'hydroélectricité n'est pas rémunérée en France à la hauteur des ambitions de sa politique énergétique. Dans l'état actuel des choses, il nous manque 10 % pour boucler un projet d'investissement dans ce secteur... Il n'est guère possible de développer un produit en le surtaxant. »

(3) Un potentiel de développement limité

L'engagement français au plan communautaire est fort

La directive 2001/77/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 septembre 2001, prévoit qu'à l'horizon 2010, la production d'électricité d'origine renouvelable devra atteindre 22 % en Europe et 21 % en France (contre 14 % aujourd'hui), cet engagement ayant pour objectif de limiter le taux de dépendance énergétique de l'Union européenne (évalué à 70 % en 2030) et de limiter les émissions de gaz à effet de serre.

Le potentiel techniquement utilisable est limité

Le potentiel « sauvage » a été évalué à 270 TWh, mais techniquement, le potentiel « équipable » est estimé à 100 TWh, mais à des coûts très élevés, qui ne permettent pas de rentabiliser les projets. En définitive, le potentiel économique est évalué entre 4 et 8 TWh. En outre, la prise en compte des exigences environnementales renchérit le coût des projets.

Le développement de la PHE (petite hydroélectricité d'une puissance inférieure à 8 MW) nécessite, d'un point de vue économique, une tarification incitative pour équiper les sites restant à exploiter. Plus généralement, il est tributaire des arbitrages qui seront rendus sur l'évaluation de son impact global sur l'environnement. L'objectif de 4 TWh/an attribué à la PHE proposé par les syndicats de producteurs d'hydrauliques, implique en effet la réalisation de nouvelles installations, ce qui, a priori, ne peut se faire sans modifier le classement des rivières réservées au titre de la loi du 16 octobre 1919. En contrepartie, il doit être procédé à une évaluation précise de la contribution de la PHE à la lutte contre les effets du changement climatique et de l'impact des dispositifs annexes aux micro-centrales comme les échelles à poisson et les mécanismes de dévalaison conçus pour atténuer les conséquences négatives de ces équipements hydrauliques sur leur environnement immédiat.

b) Des conflits d'usage de plus en plus marqués
(1) Une méconnaissance mutuelle entre l'aval et l'amont

L'interdépendance géographique et physique résultant de l'unité de la rivière et du partage de la ressource ne s'est pas -loin s'en faut- traduit dans la mise en place de structures permettant de tenir compte des intérêts de l'amont et de l'aval. Les intérêts légitimes des uns et des autres sont perçus négativement et leur non prise en compte génère des conflits. Faute de réglementation sur la solidarité financière inter-bassin ou de mise en commun des connaissances, des actions contradictoires sont parfois mises en oeuvre par une multitude d'acteurs aux intérêts concurrents.

L'unité des rivières ne correspond plus à une réalité et le sentiment de solidarité et d'appartenance à un même bassin versant s'est fortement estompé.

Or, cet enjeu est stratégique dans de nombreux domaines. Ainsi, une politique de prévention des inondations se doit d'être globale pour être pertinente. Elle passe par une nouvelle gestion de l'espace et de l'eau qui intègre la dimension « amont/aval ». Certes, l'aval doit repenser son développement urbain hors zone d'expansion des crues pour ne pas augmenter le risque d'inondation, mais les têtes de bassin ont également un rôle primordial à jouer pour ralentir le débit des rivières en période de crue, à la faveur de la gestion des sols et des cours d'eau.

Malgré l'identification de tels enjeux, force est de constater que les problèmes restent traités au coup par coup. Ainsi très peu de schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE), institués pourtant par la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau, ont été mis en place . Ce document permet de définir des objectifs d'intervention concernant la ressource, les inondations, la dépollution ou encore la protection des captages d'eau potable. Elaboré à partir d'une longue concertation entre les différents usagers, il constitue, une fois adopté, un document opposable aux tiers.

Par ailleurs, la procédure des contrats de rivière, qui peut constituer une étape préalable intéressante avant la rédaction d'un SAGE ou, à tout le moins, lui apparaît comme complémentaire, reste aujourd'hui excessivement centralisée.

Ce dispositif, créé en 1981 et adapté par des circulaires successives 12 ( * ) , a évolué vers une prise en compte globale et intégrée de la rivière et de son écosystème, les efforts financiers de l'Etat étant recentrés sur les travaux de restauration du lit et des berges, ainsi que sur la mise en place de structures pérennes de gestion.

Il s'agit d'un contrat signé entre l'Etat, les collectivités locales, les propriétaires riverains et les agences de l'eau, qui constitue un label national.

L'accord sur le contrat de rivière doit être soumis, tant pour le dossier préalable présenté à l'initiative des élus locaux, que pour le dossier définitif incluant le programme d'actions défini par le comité de rivière, à l'avis favorable du comité national d'agrément des contrats de rivière ou de baie, défini par l'arrêté ministériel du 22 mars 1993, et dont le président est désigné par le ministre.

La mission commune d'information souligne tout l'intérêt qu'il y aurait à déconcentrer la procédure des contrats de rivière à une échelle pertinente, qui lui paraît être celle d'un bassin hydrographique.

Proposition n° 3. : Déconcentrer la procédure d'élaboration d'un contrat de rivière, au niveau du préfet coordonnateur de bassin.

(2) Des conflits d'usage plus marqués au sein des « têtes de bassin »

L'évolution rapide d'une société agropastorale vers une société touristique s'est traduit par une véritable révolution des usages de l'espace et de la ressource en eau dans les zones de montagne.

Dans les vallées des têtes de bassin versant, où les terrains plats sont rares, le développement des constructions se heurte à la nécessaire prise en compte de la rivière.

Les conflits d'usage résultant du développement touristique portent d'une part sur la gestion qualitative et quantitative de la ressource en eau en période hivernale ; l'afflux de touristes concentré sur une très courte période accroît la demande en eau potable. Ainsi, en Haute-Savoie, les collectivités situées en tête des hauts bassins reçoivent en haute saison touristique plus de la moitié du flux touristique, soit 400.000 lits concentrés sur 20 % du territoire du département. La population est multipliée par 7 ou 10 alors que les débits d'étiage peuvent être au plus bas. En effet, dans les territoires de haute montagne, si la ressource hydrographique est globalement abondante, la ressource effectivement mobilisable en hiver est faible, surtout sur des bassins versants de taille réduite.

RESSOURCE EN EAU MOBILISABLE EN FÉVRIER

Cours d'eau à régime glaciaire : < 10 l/s/km²

Cours d'eau à régime nival : > 20 l/s/km²

Cours d'eau de plaine à régime pluvial : < 20 l/s/km²

Pour une station de sports d'hiver, dont la population atteint 30.000 habitants, les besoins sont évalués à 6.000 m 3 /j, soit un débit moyen journalier d'environ 70 l/s.

En outre, toute baisse du débit d'étiage restreint la capacité auto-épuratoire du cours d'eau.

Les besoins en neige de culture sont amenés à se renforcer pour augmenter la sécurité sur les pistes et assurer le bon déroulement du début et de la fin de saison. La production de neige de culture, qui se caractérise par une consommation d'eau importante, se concentre de novembre à février et donc à une période de faible étiage. La ratio de consommation « théorique » communément admis pour la production de neige de culture est de 1 m 3 d'eau pour 2 m 3 de neige fabriquée.

Un état des lieux réalisé dans le périmètre de l'Agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse fait état de 104 stations équipées, pour 15 % des surfaces skiables en moyenne et la consommation d'eau observée sur un an est estimée de 6,6 millions de m 3 .

Les trois types de mobilisation de l'eau pour la fabrication de la neige de culture sont :

- le prélèvement direct dans la ressource (cours d'eau ou plus rarement ressources souterraines), ce qui pose des problèmes compte tenu du faible niveau d'étiage ;

- le prélèvement dans les réseaux d'eau potable, ce qui est peu satisfaisant. Des pénuries ont déjà été recensées et la priorité doit être donnée au maintien de la distribution d'eau potable aux populations ;

- la mise en place de retenues collinaires, solution la plus utilisée, car elle présente l'avantage « de décaler » dans le temps le prélèvement sur le cours d'eau et de mobiliser par drainage les eaux de ruissellement.

Mais l'autorisation administrative de construire une retenue tient compte de trois paramètres, liés au respect du débit réservé du cours d'eau, à la préservation des milieux naturels remarquables ou préservés, notamment les zones humides, et aux impératifs de sécurité. Ceci explique que certains projets ne puissent être réalisés.

Les conséquences du développement touristique sur la demande d'eau doivent également tenir compte de la production hydroélectrique qui mobilise une ressource en eau très importante.

Enfin, le développement de produits touristiques estivaux peut donner lieu à des conflits d'usage. Il s'agit des sports d'eaux vives sous toutes leurs formes (du canoë cayak au canyonning).

Là également, les usages liés à ces pratiques viennent concurrencer d'autres utilisations de la ressource en eau : les besoins en irrigation de l'agriculture, mais surtout la production d'hydroélectricité. Ainsi, EDF a dû savoir prendre en compte ces nouveaux usages de l'eau à travers des partenariats, des protocoles signés au niveau national ou des conventions avec des acteurs régionaux ou locaux.

Dès l'origine, l'aménagement du lac de Serre-Ponçon (200 millions de m 3 réservés) a été prévu pour alimenter la Durance en aval en eau d'irrigation. C'est également un outil remarquable pour l'économie touristique des Haute-Alpes.

En outre, EDF a conclu une convention sur quatre ans avec la Fédération française de canoë kayak (FFCK) qui est régulièrement reconduite pour promouvoir la pratique des sports d'eaux vives et un protocole annuel définit un programme de lâchers d'eau pour permettre diverses manifestations.

3. Promouvoir une gestion intégrée des hauts bassins versants

a) Prendre en compte les obligations communautaires à venir

La directive du 23 octobre 2000 établissant un cadre communautaire de l'eau affiche des objectifs ambitieux et exige un cadre d'organisation très rigoureux.

(1) Les objectifs poursuivis par la directive-cadre

Le principe général de la directive-cadre est de définir, pour tous les milieux aquatiques continentaux et côtiers un cadre poursuivant les objectifs suivants :

- Sur le plan technique, est fixée une obligation de résultats ; d'ici à 2015 il faudra attendre le « bon état » -chimique, biologique, physique et hydrologique- pour l'ensemble des milieux considérés.

Des dérogations seront possibles mais dans des cas limités et elles devront être motivées. Elles pourront porter sur les délais, l'objectif de « bon état » pour les milieux très pollués ou encore la définition de dispositions spéciales s'agissant de milieux artificiels ou fortement modifiés.

- Sur le plan de l'organisation, le cadre de la planification s'appuie sur la constitution de « districts hydrographiques », unités de base de la gestion de l'eau et la désignation des « autorités compétentes » responsables de la mise en oeuvre des mesures.

Au préalable un état global du bassin doit être effectué en 2004 sur la base duquel doit être élaboré un plan de gestion en 2006, décliné à travers un programme de mesures défini en 2009 et opérationnel en 2012 afin d'atteindre l'objectif de « bon état » du milieu aquatique concerné. Le plan de gestion s'inscrit dans une révision et un élargissement du contenu du SDAGE (schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux).

- La directive-cadre introduit également une forte dimension économique à travers la notion de coût disproportionné pouvant justifier un régime dérogatoire et une approche « coût-bénéfice » dans l'analyse et le choix des actions à conduire. En outre, d'ici à 2010 les systèmes de tarification des usages de l'eau doivent inciter à une utilisation rationnelle de cette ressource et permettre une contribution appropriée de chaque secteur (domestique, industriel et agricole) aux coûts réels (techniques et environnementaux) de consommation d'eau.

- Enfin, la directive-cadre affirme la nécessité d'une meilleure participation du public au processus de planification, à travers une communication en amont lors des différentes étapes d'élaboration du plan de gestion et du programme de mesures, et l'obligation, à chaque étape de la consultation, de respecter un délai de six mois pour recueillir l'avis du public.

(2) Les implications de la directive-cadre pour les zones de montagne

Le cadre général de la directive n'établit pas de distinction directe selon les milieux géographiques, mais les conditions de sa mise en oeuvre présentent des enjeux spécifiques pour les zones de montagne.

- S'agissant de l'objectif fixé quant au bon état des milieux aquatiques, les têtes de bassin peuvent être prises comme référence. A l'inverse, les dérogations sur cet objectif admises pour les milieux fortement modifiés pourront trouver à s'appliquer sur les cours d'eau ou plans d'eau, supports d'équipements nécessaires à la production d'hydroélectricité.

- La mise en oeuvre de la directive relative au traitement des eaux résiduaires urbaines, adoptée en 1991, impose des obligations lourdes aux collectivités locales, tant en ce qui concerne la collecte que le traitement des eaux usées à mettre en oeuvre avant fin 2005. En particulier, les difficultés seront importantes pour les stations touristiques caractérisées par des fortes variations de population, et des pics de fréquentation concentrés sur de courtes périodes pendant lesquelles les capacités d'auto-épuration des cours d'eau sont faibles en raison du niveau d'étiage.

- La nouvelle directive sur la qualité de l'eau potable adoptée en 1998 impose des règles strictes s'agissant des points de captage. En zone de montagne, ces points de captage sont multiples et de faible importance unitaire ; une évaluation de leur protection devra être établie, sans doute en privilégiant l'approche « coût-bénéfice ».

b) Les conditions d'une gestion intégrée des ressources en eau

Lors du colloque organisé à Megève en septembre 2002 sur la gestion intégrée des hauts bassins versants, auquel ont participé les délégués de plus de vingt pays, il a été réaffirmé la nécessité d'organiser une gestion effective et intégrée au niveau des bassins versants, en définissant le rôle et les compétences de chaque intervenant. La mission commune d'information fait siennes les recommandations et les propositions qui ont été faites au cours de ce colloque.

(1) Un cadre décentralisé de gestion

Il faut ainsi réaffirmer que le niveau des prises de décision, de maîtrise d'ouvrage et d'exploitation doit être décentralisé au plus près du terrain.

- A côté des administrations gouvernementales compétentes, la participation des représentants des autorités territoriales concernées, des différentes catégories d'usagers de l'eau et des écosystèmes aquatiques, ainsi que des associations porteuses d'intérêts collectifs de la société civile, doit être assurée au sein des conseils ou comités de bassin.

Il convient de prévoir et organiser l'information et la formation des cadres des administrations et des organismes de bassin, ainsi que celle, sous des formes appropriées, des membres des comités de bassin, des élus locaux et des représentants des usagers.

Proposition n° 4. : Des schémas d'aménagement doivent être élaborés par bassin versant, dans la concertation, le consensus et la co-responsabilité pour fixer les objectifs à atteindre à moyen terme.

- Pour connaître l'état de la ressource et des milieux, il faut recenser les usages, faire le bilan des pollutions et par la suite évaluer l'efficacité des programmes mis en oeuvre. Pour cela, il faut pouvoir disposer de systèmes d'information harmonisés afin de permettre des synthèses et des comparaisons inter-bassins.

Proposition n° 5. : Elaborer pour chaque bassin versant un système intégré d'observation et de monitoring fiable et représentatif et constituer des bases de données.

(2) Des moyens financiers adaptés

Il est certain que la réalisation des programmes d'intervention nécessaires pour remplir les objectifs fixés par le schéma directeur entraînera nécessairement des investissements importants pour gérer et préserver la ressource en eau et les écosystèmes et pour assurer la maintenance et le renouvellement des équipements. Ceci mobilisera des moyens financiers considérables.

Le mécanisme des redevances de bassin fondé sur l'application du principe « pollueur-payeur » et « utilisateur-payeur » doit être renforcé. En outre, les services collectifs d'eau potable, d'assainissement et d'irrigation doivent être facturés à leur coût véritable, tout en assortissant ce mécanisme de dispositifs de péréquation.

* 12 La dernière, en date du 24 octobre 1994, adapte le dispositif aux objectifs du « plan décennal de restauration et d'entretien des rivières ».

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