Rapport d'information n° 35 (2002-2003) de M. Joseph KERGUERIS , fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification, déposé le 29 octobre 2002

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B. FACILITER LE FINANCEMENT DES PME

Le soutien public au financement des PME est ancien. Dès 1936, une loi autorisait la Caisse nationale des marchés de l'Etat 58 ( * ) à intervenir pour garantir la solvabilité de certaines catégories d'entreprises. A partir de 1979, l'Etat met en place des fonds de garantie, destinés à supporter une partie du risque encouru par les banques. Cette sollicitude ancienne pour les petites et moyennes entreprises s'explique par leur poids dans l'économie française, mais aussi par la prise en compte des enjeux particuliers que représente pour elles l'accès au crédit bancaire.

Concernant l'importance des PME pour l'économie française, il peut être utile de rappeler quelques chiffres : les petites et moyennes entreprises emploient environ 70 % des effectifs salariés, produisent plus de 60 % de la valeur ajoutée, et supportent plus des deux tiers de l'endettement des entreprises françaises.

Un bon accès des PME au crédit, condition nécessaire à leur développement, revêt donc une grande importance au plan macroéconomique.

En effet, les PME 59 ( * ) sont souvent confrontées au problème d'un accès difficile au crédit. Les hésitations des organismes financiers à prêter aux PME s'expliquent par la corrélation négative forte, qui existe entre taille de l'entreprise et taux de défaillance : autrement dit, les petites entreprises ont un taux de défaillance plus élevé que les grandes 60 ( * ) . Le risque associé au prêt à une PME est donc important.

En outre, les banques, manquant d'informations sur les PME, ont tendance à traiter de manière très globale cette catégorie d'emprunteurs, sans discriminer suffisamment en fonction de la solvabilité de chaque entreprise. Cette faible capacité à discriminer les entreprises débitrices se traduit par une tarification des prêts peu différenciée, qui pénalise les entreprises présentant le plus de garanties, et par une tendance au « rationnement » du crédit.

Placés en situation d'asymétrie d'information, les établissements de crédit sont réticents à prêter pour financer des projets qu'ils estiment, à tort ou à raison, trop risqués, et ce, même à des taux d'intérêt très élevés. Les banques peuvent estimer, en effet, que seules les entreprises les plus « risquées » (les moins à même de rembourser leurs emprunts) accepteraient d'emprunter à de telles conditions. Un véritable cercle vicieux du crédit peut alors s'enclencher.

Une intervention publique peut alors être utile pour limiter ces phénomènes de rationnement du crédit, et pour réduire la prime de financement imposée aux PME, en raison du risque élevé associé à leurs emprunts.

L'instrument privilégié d'intervention publique en faveur des PME est aujourd'hui la Banque de développement des PME (BDPME), créée en 1997 par la fusion de la CEPME et de la SOFARIS (Société française de garantie des financements des petites et moyennes entreprises). L'Etat et la Caisse des Dépôts et Consignations contrôlent cette institution.

Les interventions de la BDPME empruntent plusieurs modalités :

Partage du risque : la BDPME partage, avec les établissements de crédit qui souhaitent une garantie, le risque encouru en cas de défaillance d'entreprise. Lorsqu'un prêt n'est plus remboursé par une société, la moitié du capital restant à régler est payée par la BDPME à la banque de l'entreprise défaillante. Cette possibilité de garantie réduit les risques encourus par l'établissement créditeur, ce qui limite les phénomènes de rationnement du crédit. En 2000, la BDPME a accompagné en garantie plus de 3,6 milliards d'euros de crédits bancaires d'investissement.

Cofinancement de projets : comme une banque classique, la BDPME accorde des prêts aux entreprises, pour venir compléter les prêts accordés par les autres établissements de crédit. En 2000, la BDPME a accompagné en cofinancement plus de 3 milliards d'euros d'investissement.

Produits spécifiques : la BDPME développe également des produits spécifiques : avances de paiement sur marchés publics (4,2 milliards d'euros en 2000, au bénéfice de 7 600 entreprises) ; prêt à la création d'entreprise (13 000 créations aidées en 2000, pour un montant de prêts de 625 millions d'euros), qui permet de compléter un prêt fait par une banque à un jeune créateur ; prêt de reprise industrielle, destiné à faciliter la transmission d'entreprises (3 000 entreprises concernées en 2000, pour un coût de 1 milliard d'euros).

Les modes d'action de la BDPME ne lui permettent pas de mener une politique volontariste de financement des entreprises, indépendante des signaux du marché. La BDPME a pour vocation de soutenir des initiatives de marché. Elle aide à finaliser des projets engagés par un chef d'entreprise et un banquier, qui croient suffisamment dans leurs chance de succès pour conserver pour eux-mêmes une part du risque. Son activité est donc conditionnée par la situation économique d'ensemble.

L'impact macroéconomique de l'activité de la BDPME n'est pas négligeable. En 2000, les 3 milliards d'euros de crédit, accordés en cofinancement par la BDPME, représentaient environ un cinquième des crédits à moyen et long terme mis en place pour les PME en France. 13 000 créateurs d'entreprises ont bénéficié d'un prêt, soit 7,65 % du total des créateurs. Et 6 % des opérations de transmission d'entreprises ont bénéficié d'un prêt BDPME pour la reprise industrielle.

Au-delà de ces données brutes, on peut regretter cependant qu'il n'existe pas d'estimation du nombre de projets qui n'auraient pas abouti en l'absence de soutien. De telles données permettraient d'évaluer de manière plus fine l'effet de l'activité de la BDPME.

* 58 La CNME a fusionné en 1981 avec le Crédit hôtelier pour donner naissance au CEPME (Crédit d'équipement des PME).

* 59 La définition des PME retenue ici est celle de l'INSEE : sont considérées comme des PME les entreprises employant de 10 à 500 salariés.

* 60 Pour une confirmation de ces données, voir Biais B., Malecot J.F., « Incentives and efficiency in the bankruptcy process : the case of France », The World Bank, Occasional paper n° 23, April 1996 ; ou Bardos M., « Défaillance d'entreprises et délais de paiement », note pour l'Observatoire des délais de paiement, 1997. En 2000, les trois quarts des défaillances d'entreprises ont concerné des entreprises dont le chiffre d'affaires était compris entre 1 et 5 millions de francs.

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