Rapport d'information n° 35 (2002-2003) de M. Joseph KERGUERIS , fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification, déposé le 29 octobre 2002

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CONCLUSION

L'évolution de l'investissement, dans les années 1990, a été globalement décevante dans notre pays. Au-delà de l'observation des tendances passées, ce sont les conséquences défavorables, pour la croissance et l'emploi, de l'insuffisance de l'investissement qui méritent d'être soulignées. Une amélioration, durable et significative, du niveau de vie des Français ne peut résulter que d'une élévation du potentiel de croissance de l'économie. Or, ce potentiel de croissance est aujourd'hui borné par l'insuffisance du stock de capital.

La crise qui frappe le secteur des TIC depuis deux ans ne doit pas conduire à sous-estimer les évolutions structurelles de l'économie dont les nouvelles technologies sont porteuses. L'investissement des entreprises américaines dans des équipements de haute technologie a eu un impact significatif, au niveau macroéconomique, en termes d'amélioration des gains de productivité. La France, comme ses grands partenaires européens, continue d'accuser un retard important en ce domaine.

Le détour par l'analyse théorique des déterminants de l'investissement a montré que c'est la demande qui est, traditionnellement, considérée comme son déterminant majeur. Pourtant, la faiblesse de l'investissement en France, dans la dernière décennie, a été plus prononcée que ce que les relations habituelles entre demande et investissement laissaient prévoir. L`interprétation de cet écart ne fait, comme on l'a vu, pas l'unanimité. Il peut être attribué au comportement particulier de l'investissement en construction des entreprises ou, comme c'est probable, être la conséquence d'une sensibilité plus forte des firmes au niveau de leur endettement. Les analyses des modélisateurs confirment les observations relatives au partage de la valeur ajoutée, qui témoignent d'un effort notable de désendettement des entreprises jusqu'en 1997.

Ces analyses suggèrent que l'investissement serait devenu plus sensible aux contraintes financières qui pèsent sur les entreprises. Si cette hypothèse est avérée, l'attention des pouvoirs publics devrait se porter, principalement, sur l'amélioration des conditions de financement des investissements, de préférence à des stratégies de gestion de la demande, dont les effets se font sentir essentiellement à court terme. D'autant plus que la forte croissance de la fin des années 1990 s'est accompagnée d'une importante remontée du taux d'endettement des sociétés, qui peut faire craindre, pour les années à venir, une nouvelle phase d'atonie de l'investissement.

L'action des pouvoirs publics peut porter sur l'allégement de la fiscalité pesant sur les investissements. Si l'on en croit les calculs de la Commission européenne, une diminution d'un cinquième de l'imposition effective des investissements serait nécessaire pour ramener la France au taux moyen d'imposition observé dans l'Union européenne. Outre la baisse de la fiscalité, les pouvoirs publics pourraient réfléchir à une réforme des incitations fiscales à la recherche, afin d'éliminer les défauts du dispositif actuel.

L'action publique doit se préoccuper également de créer, pour les entreprises, un environnement favorable à l'expansion de l'investissement. La réduction de l'incertitude doit être l'objectif prioritaire, tant il est vrai qu'un environnement incertain dissuade l'investissement. La stabilité de la politique macroéconomique doit être complétée par celle du cadre juridique et fiscal. Si l'investissement présente un certain degré de réversibilité, la prise de risque associée à la décision d'investissement diminue d'autant, ce qui est susceptible d'encourager aussi l'investissement. Ceci pose la question du degré de flexibilité supplémentaire à accorder au marché du travail, puisque les rigidités qui caractérisent ce marché sont souvent citées comme l'obstacle principal à la réorganisation des unités de production.

Un haut niveau d'investissement public contribue à créer un environnement favorable à l'investissement privé, en raison notamment des externalités positives qui découlent de ce type d'investissement. Il faut donc veiller à ce que la régulation budgétaire ne se fasse pas au détriment de l'investissement public.

L'investissement productif, comme d'autres grandeurs économiques, évolue de manière cyclique. Pour éviter que des phases de surinvestissement ne soient suivies de longues périodes de stagnation, les autorités en charge de la politique économique, dans les grands pays développés, devraient réfléchir au développement d'outils nouveaux de régulation. Les autorités bancaires et monétaires semblent les mieux placées pour assumer cette mission de surveillance. Leurs interventions pourraient contribuer à orienter les anticipations des investisseurs, et à modérer leur confiance ou leur défiance, parfois excessives.

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