II. ÉLEMENTS D'EXPLICATION

Les déficits observés dans les différents championnats européens, les pertes très importantes et régulières subies par de nombreux clubs, et tout particulièrement par ceux qui mobilisent les plus grands moyens, conduisent à s'interroger sur les ressorts d'une situation économique et financière qui apparaît particulièrement dégradée.

Des phénomènes conjoncturels peuvent expliquer les déséquilibres constatés, le cycle haussier du football européen semblant en phase de retournement sans que les clubs soient à même de s'adapter immédiatement.

Si cette explication pouvait, à elle seule, rendre compte des problèmes rencontrés par le football, ceux-ci pourraient être considérés comme purement transitoires. Cependant, outre que le cycle du football semble, par ses caractéristiques, échapper aux dynamiques économiques plus traditionnelles, des facteurs plus structurels doivent être pris en compte, qu'il convient de repérer dans la perspective d'assainir durablement l'économie du secteur.

A. UN RETOURNEMENT CONJONCTUREL, MAIS AU FORT PARTICULARISME

L'aggravation des déséquilibres financiers du secteur est, partiellement, à mettre sur le compte d'un retournement de conjoncture qui ouvre une période de transition d'autant plus difficile que les perspectives d'une nouvelle phase boursière sont improbables.

1. Un retournement de conjoncture...

a) Après l'expansion...

La croissance du chiffre d'affaires du football professionnel européen a été à la fois très forte et très rapide , caractéristiques qui signent un phénomène de boom économique .

Si en dix ans le chiffre d'affaires du football anglais a été multiplié par 7 pour atteindre le sommet de l'Europe avec 1,7 milliard d'euros, partout en Europe, les rythmes de progression des recettes des championnats ont atteint, chaque année, des nombres à deux chiffres.

Les recettes liées à la vente des droits de retransmission télévisée ont explosé dans un contexte favorable de renforcement de la concurrence entre des chaînes, principalement privées, ayant elles-mêmes traversé une période de maturation de leur activité.

Dans ce sillage, les autres recettes d'exploitation se sont développées, les recettes commerciales et de sponsoring en particulier.

En outre, un gonflement des opérations de transferts de joueurs s'est produit, les rythmes de progression annuels atteignant des chiffres sans précédent.

Cette phase de très forte expansion offre le premier visage , avant le retournement en cours, du contexte dans lequel le développement économique du football s'est déroulé . Elle n'a pas manqué de s'accompagner de très forts déséquilibres . Amplifiant des facteurs structurels, la conjoncture haussière a nourri des anticipations qui ont alimenté la dynamique des charges.

b) ... Un net ralentissement des recettes...

Depuis deux saisons , cette dynamique s'est interrompue , et c'est le second visage du contexte du développement économique du football. En dépit de l'émergence de nouveaux marchés (internet, la téléphonie mobile), les recettes issues de la commercialisation des compétitions connaissent un tassement . Elles progressent encore, quoique plus faiblement, dans certains pays (Royaume-Uni, Allemagne) mais subissent une érosion en Italie, ou encore pour la Ligue des Champions (plus encore, pour la Coupe de l'UEFA) et, au mieux, un maintien en France.

Le marché des transferts subit, quant à lui, une très forte contraction . Au Royaume-Uni, les dépenses de transferts ont reflué de 385 millions d'euros entre 2001-02 et 2002-03, passant de 610 à 225 millions d'euros. Ce net reflux s'est produit dans l'ensemble du football européen. Il a amputé les recettes tirées par les clubs de ces opérations, alors qu'elles représentaient une proportion significative des ressources des clubs. S'il est vrai qu'en contrepartie les clubs ont, du fait du même processus, réduit leurs charges, la contraction du marché des transferts n'est pas neutre pour autant. Elle touche d'abord particulièrement les championnats qui pouvaient traditionnellement compter sur un flux net positif, ce qui fut longtemps le cas de la France. Par ailleurs, elle conduit à réviser les valeurs inscrites à l'actif des bilans alors même que les opérations passées continuent de peser sur eux , les opérations réalisées dans la période d'euphorie n'étant pas entièrement amorties .

c) ... et l'apparition d'un effet de ciseaux s'amplifiant

Cet effet d'inertie est plus général et représente une caractéristique importante de la situation de retournement en cours . Celle-ci est particulièrement difficile à surmonter pour les clubs du fait des particularités de leur activité.

Le ralentissement de la progression des recettes n'a pas eu son pendant en matière de charges . Si, sur ce moyen terme celles-ci avaient augmenté plus vite que les produits, le différentiel s'est considérablement accentué depuis que les recettes se sont tassées. Un effet de ciseaux est apparu dont le graphique ci-après, qui concerne l'Italie, n'est qu'une illustration.

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