OUVERTURE DU COLLOQUE - JEAN-PAUL EMORINE, SÉNATEUR DE SAÔNE-ET-LOIRE, PRÉSIDENT DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

Messieurs les Présidents,

Mesdames, Messieurs,

Je vous remercie pour votre présence à cette rencontre. Votre nombre témoigne que l'initiative prise en décembre dernier par la commission des affaires économiques, d'organiser ce colloque sur le thème de l'entreprise et des jeunes diplômés, répond à une forte attente.

Il est en effet un mal profond qui ronge notre société : le chômage des jeunes, et notamment celui des jeunes diplômés. Cette situation est inacceptable car, au-delà de l'inefficacité économique, elle suscite un gâchis humain qui affecte la confiance que la jeunesse doit avoir en l'avenir pour progresser.

Avec le CPE, le Gouvernement avait tenté de proposer quelque chose d'innovant pour lutter contre ce mal. Cet outil n'a pas été compris par ceux auxquels il s'adressait. Comme vous le savez, le Sénat a contribué à résoudre la crise et une solution de nature à calmer les passions a été retenue.

Bien sûr, nous ne pouvons que nous en féliciter. Mais le problème n'a pas disparu avec le retour des étudiants dans les universités, loin s'en faut ! Les différentes enquêtes publiées récemment en témoignent, qu'il s'agisse de celles de l'INSEE ou, tout récemment, de la Conférence des Grandes Écoles : 15 à 20 % des diplômés sont toujours en recherche d'un emploi un an après la fin de leurs études supérieures.

Le constat est là : aujourd'hui, il y a encore une véritable inadéquation entre la formation initiale des jeunes diplômés et les offres des entreprises sur le marché du travail. Cette inadéquation, elle porte parfois sur les savoirs et les compétences, mais elle concerne aussi les savoir faire.

Semblant résulter d'un fort cloisonnement entre l'université et le monde du travail, elle explique la longue attente entre l'acquisition du diplôme et l'insertion durable dans l'entreprise, ainsi que la diversité des étapes, souvent laborieuses, de l'entrée sur le marché du travail. Les spécialistes et les praticiens du monde universitaire le savent : ils ont été nombreux, ces derniers mois, à le dire et à l'écrire, qui dans des articles de presse, qui dans des ouvrages, parfois décapants, et je pense notamment à celui, tout récent, de Jean-Robert Pitte, Président de l'université Paris-Sorbonne.

Pourtant, des outils existent pour faciliter le passage, outils qui, notamment, imbriquent le temps d'études et le temps en entreprise : apprentissage, formation en alternance, stages en cours de scolarité. Mais ces modalités sont-elles suffisamment développées ? Sont-elles pertinentes pour toutes les filières ? Ne peut-on mieux les promouvoir ?

Quant aux formes du contrat de travail lui-même, sont-elles adaptées ? Ne devrait-on pas les calibrer, voire imaginer un dispositif nouveau, par exemple pour faciliter le recrutement par les entreprises de futurs diplômés en leur permettant de poursuivre leurs études ? Certaines entreprises en expriment le souhait.

Notre réflexion doit bien entendu s'inscrire dans le nouveau contexte de l'emploi qui se dessine pour les jeunes diplômés aujourd'hui. Quel est-il ? Pour ma part, il m'apparaît marqué par trois facteurs économiques et trois évolutions politiques et sociales.

Les facteurs économiques tout d'abord. Ce sont à mon sens :

1. Le renouvellement démographique lié au départ en retraite des générations du baby boom. Il va susciter une sorte d'appel d'air de jeunes collaborateurs dans les entreprises.

2. Les bouleversements structurels du marché du travail que portent en eux les phénomènes de mondialisation et de tertiarisation des processus de production, mais aussi le « chamboulement » de la notion traditionnelle de carrière, qui emporte de nouvelles exigences pour les jeunes diplômés : mobilité professionnelle et géographique, parfois internationalisation, adaptabilité permanente...

3. Dernier facteur économique et non le moindre : la logique de formation tout au long de la vie, qui doit maintenant être intégrée par les jeunes comme par les entreprises.

Tout cela est à envisager dans une perspective politique et sociale plus large :

- la réhabilitation de l'apprentissage, mais surtout de manière plus globale de la voie professionnelle (alternance et enseignement professionnel) parallèlement à la filière générale ;

- l'importance fondamentale des jeunes pour notre société : les entreprises, notre pays, l'Europe, ont un besoin vital des jeunes... ;

- l'investissement du Gouvernement sur le sujet : apprentissage, contrat de professionnalisation, contrat d'insertion dans la vie sociale (le CIVIS), parcours d'accès à la vie active (le PAVA), plan banlieue...

Ces questions, nous avons voulu que les principaux intéressés, les chefs d'entreprises, les directeurs des ressources humaines, les étudiants, les universitaires, les représentants syndicaux, en débattent eux-mêmes, autour du ministre et des parlementaires. Qu'ils formulent leurs attentes. Qu'ils développent leurs idées. Qu'ils discutent des bonnes pratiques et des meilleurs moyens d'en favoriser la diffusion...

Pour cela, avec le Ministre Gérard Larcher, que je remercie pour sa participation, avec mes collègues Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles et Nicolas About, président de la commission des affaires sociales, nous avons jugé opportun d'organiser notre rencontre sur l'emploi des jeunes diplômés en deux temps.

D'une part, susciter un premier débat autour de l'offre et de la demande, pour aborder sans tabou les questions relatives aux filières, à leur adéquation aux débouchés professionnels, au rapprochement des mondes de l'enseignement supérieur et de l'entreprise...

D'autre part, au cours d'une seconde table ronde, évoquer les outils de l'insertion, voir comment améliorer ceux qui existent, assurer le développement de ceux qui fonctionnent bien, mais aussi ouvrir, pourquoi pas ?, des voies sur des mécanismes nouveaux...

Avec le ministre, comme avec mes collègues sénateurs, dont je salue la présence, nous attendons beaucoup de cette après-midi de travail, que nous espérons fructueuse. Car on parle beaucoup de déficit : déficit budgétaire, déficit commercial, déficit de confiance. Mais le pire de tout, ce serait un déficit de lucidité, d'idées et de volonté. Or, nous sommes certains que la lucidité est possible, et que les idées et la volonté existent : encore faut-il les faire émerger par le débat.

Le Sénat est le lieu du débat : il le démontre dans son activité quotidienne, et ce colloque en est l'un des témoignages.

Mais, pour être utile, il me semble important qu'au-delà des participants, il atteigne directement celles et ceux auquel il s'adresse au premier chef. Aussi, j'ai souhaité que Public Sénat en assure la diffusion sur la Chaîne Parlementaire et, surtout, que le site Internet du Sénat offre aux internautes, outre les documents essentiels parus récemment sur le sujet, les enregistrements du colloque en vidéo à la demande ainsi que les actes du colloque.

Évidemment, le Sénat n'est pas le seul lieu du débat. Il en existe d'autres, mais il en est un particulièrement important en la matière : c'est le grand débat national université/Emploi engagé le mois dernier par le Gouvernement. Monsieur le Recteur Hetzel, qui préside la commission nationale, a bien voulu venir nous faire le point de ses travaux, et je l'en remercie. Qu'il sache qu'il pourra reprendre tout ce qui sera dit et échangé aujourd'hui dans cette salle !

C'est pourquoi je vous invite maintenant, Mesdames et Messieurs, à libérer votre parole, vos analyses et votre imagination, en vous remerciant une nouvelle fois d'avoir bien voulu, par votre présence, assurer l'intérêt de nos travaux.

Jean-Claude LEWANDOWSKI, rédacteur en chef des Echos Sup

Je voudrais remercier l'ensemble des participants et des intervenants pour leur présence.

Chacune des deux tables rondes sera ouverte par l'exposé introductif d'un expert : Louis Chauvel présentera la première et Florence Lefresne la seconde.

Lors de chacune de ces tables, des « grands témoins » réagiront par rapport au témoignage, développeront une idée ou proposeront un plan d'action, tandis qu'au premier rang de la salle, des « grands intervenants » leur poseront des questions. Enfin, les participants présents dans la salle pourront faire part de leurs remarques aux témoins qui seront intervenus.

Nous devons avoir pour objectif de réfléchir ensemble au problème que peut constituer l'insertion professionnelle des jeunes diplômés. Nous pouvons donc aborder maintenant la première des tables rondes, celle ouverte par Louis Chauvel, Professeur à Sciences-Po-Paris et chercheur associé à l'Observatoire français de conjoncture économique (OFCE).

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