II. UN BILAN LARGEMENT POSITIF DE DIX ANS DE RÉGULATION DES COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES

Dix ans après sa création, et après avoir entendu une grande part des acteurs concernés, votre commission considère que le bilan du régulateur des communications électroniques est largement positif : la régulation sectorielle a acquis une crédibilité certaine auprès des acteurs économiques ; en outre, cette régulation a été efficace puisqu'elle a permis au régulateur de remplir convenablement ses missions, parfois délicates à concilier.

A. UNE RÉGULATION CONCURRENTIELLE RESPECTÉE

1. Un régulateur juridiquement fiable

Les décisions de l'ARCEP sont soumises au contrôle juridictionnel du Conseil d'Etat, qui est l'instance d'appel naturelle d'une telle autorité administrative. En revanche, les décisions de règlement des différends, pour leur part, ne peuvent être frappées d'appel que devant la Cour d'appel de Paris en raison de la nature des contrats conclus entre opérateurs -conventions de droit privé-. Or, non seulement les décisions de l'Autorité sont rarement attaquées et, quasiment, jamais annulées, contribuant ainsi à la sécurité juridique du secteur, mais la rapidité avec laquelle l'ARCEP rend ses décisions est tout à fait satisfaisante.

En effet, l'ARCEP respecte les délais de procédure que lui impose le Code des postes et des communications électroniques : tenue de trancher un litige dont elle est saisie dans les quatre mois suivant sa saisine, ou dans les six mois dans certaines circonstances exceptionnelles, l'Autorité a toujours respecté ces délais, n'usant du délai de six mois qu'à de très rares occasions.

Ensuite, alors que l'ARCEP a pris 85 décisions de règlement des différends depuis 1997, la Cour d'appel n'a eu à connaître que d'une vingtaine de recours qui ont donné lieu à des arrêts de rejets pour la quasi-totalité d'entre eux 24 ( * ) . De même, le Conseil d'Etat , compétent pour les recours contre les autres décisions de l'ARCEP, a en grande partie rejeté les recours dont il a été saisi depuis 1997, à quelques exceptions près 25 ( * ) . Sur la forme, il convient de relever que le vice-président du Conseil d'Etat, M. Jean-Marc Sauvé, note, comme il l'a déclaré à l'occasion de la célébration du dixième anniversaire de l'Autorité, le 9 janvier 2007, que « à ce jour, le Conseil d'Etat n'a jamais annulé une décision de l'ARCEP pour vice de forme ou de procédure. Les précautions méthodologiques n'ont d'ailleurs pas seulement concouru à la légitimité de l'institution mais aussi à la qualité juridique des décisions prises. »

Les différents arrêts de rejet rendus par les juridictions d'appel, qui ont pour mission de contrôler les décisions du régulateur, démontrent la bonne qualité de ces décisions. Cette qualité repose notamment sur le soin mis par l'Autorité à motiver ses décisions en droit et en fait. Elle donne au secteur un niveau de sécurité juridique favorable à son développement.

Outre le sérieux juridique de ses décisions, l'Autorité de régulation garantit la conformité de son processus décisionnel aux règles pour un procès équitable . A la suite des arrêts de la Cour d'Appel de Paris, de la Cour de Cassation et du Conseil d'Etat 26 ( * ) , relatifs aux procédures de sanctions administratives, il était en effet apparu nécessaire à l'Autorité de procéder à une révision substantielle de son règlement intérieur afin d'assurer aux personnes mises en cause des garanties de procédures au moins comparables à celles dont elles auraient bénéficié devant une juridiction, dans le strict respect des stipulations de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH), telles qu'elles ont été interprétées par les juridictions précitées. Ainsi, dans le nouveau règlement intérieur de 1999 pris adopté par l'ART de sa propre initiative, il n'y a pas de confusion, dans le même organe de décision, entre les fonctions de poursuite, d'instruction et de constatation de la culpabilité. Ainsi, la phase d'instruction d'une procédure de sanction est strictement séparée de la phase de décision : la première relève de la seule compétence du directeur général et des rapporteurs désignés, la seconde incombe aux seuls membres du collège qui délibèrent hors la présence des rapporteurs et agents de l'ARCEP.

Enfin, l'ARCEP a adopté le 8 mars 2007 une charte de déontologie qui s'applique aux membres du collège . Non seulement elle rappelle les principes déontologiques s'appliquant à tout agent public (respect du secret professionnel, obligation de discrétion, devoir de réserve, interdiction de prise illégale d'intérêts...), mais elle précise aussi les dispositions déontologiques spécifiques applicables aux membres de l'ARCEP, pendant la durée de leur mandat, qui est non renouvelable et non révocable, mais aussi après la cessation de leurs fonctions. Ces interdictions et incompatibilités visent à asseoir l'indépendance des membres du collège, à l'égard tant des pouvoirs publics que des acteurs économiques et sociaux. Notamment, l'obligation faite aux anciens membres de l'ARCEP de recueillir l'avis de la commission de déontologie s'ils souhaitent exercer une activité dans le secteur privé, alors qu'ils ont quitté l'ARCEP depuis moins de cinq ans, vise à éviter l'ambiguïté qu'avait pu faire naître dans les esprits la trajectoire suivie par certains membres du collège après leur départ de l'ARCEP.

* 24 Les deux recours non rejetés ont donné lieu à un désistement et à un arrêt d'annulation pour vice de forme, mais confirmant la décision de l'ARCEP au fond. Enfin, si une décision de mesures conservatoires a été annulée par la Cour qui a ensuite confirmé la décision au fond de l'Autorité, cet arrêt a été cassé par la Cour de cassation dernièrement et l'affaire doit être rejugée.

* 25 Il s'agit essentiellement des recours relatifs au service universel, où de nombreux contentieux en cascade liés à une première annulation en 2002 sont encore en cours d'examen. Les autres affaires ont donné lieu à désistement pour l'une d'elles, après expertise diligentée par le Conseil, ou à annulation pour trois autres (notamment en matière de dégroupage, mais sans effet rétroactif).

* 26 Voir notamment Arrêts Didier du 3 décembre 1999 et Société Habib Bank du 20 octobre 2000.

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