4. L'approche par les pathologies

Après avoir rappelé que diverses modalités de recensement des pathologies au niveau national existent (grâce aux ministères en charge de la santé ou de l'écologie, aux assurances sociales, au patronat...), les résultats du recensement des substances les plus dangereuses seront examinés.

En combinant les trois approches décrites précédemment, à savoir l'approche par la substance chimique, par les produits, par les milieux, il apparaît qu'il importe de :

- recenser les pathologies les plus graves ;

- identifier leurs liens avec les polluants domestiques ou avec ceux utilisés en milieu professionnel en prenant en considération les sujets atteints (enfants, femmes enceintes, hommes en âge de procréer, personnes asthmatiques, allergiques, immuno-déprimées...) ainsi que leurs pratiques de vie (enfant proche d'un animal traité avec un biocide, par exemple) ;

- repérer les substances et les produits à l'origine de ces pathologies ;

- repérer les substances contenues dans les produits identifiés ;

- s'interroger sur l'emploi des substances dangereuses - a t-il un caractère impérieux ? ;

- identifier des substances ou des produits de substitution .

Quelques points saillants se dégagent.

Augmentation annuelle du nombre des cancers entre 1978 et 2000 (en particulier des cancers de la prostate et du sein) ; le cancer est la deuxième cause de mortalité en France et la première cause de mortalité pour les personnes âgées de moins de 65 ans ;

Alors que l'on dispose de données chiffrées concernant l'évolution des cancers au cours des dernières décennies, les autres pathologies en progression (hypofécondité, stérilité, malformations néonatales, troubles endocriniens, allergies, insuffisance rénale) sont moins précisément documentées.

Pour l'OMS en 2006, 24 % des maladies sont causées par des expositions environnementales qui peuvent être évitées . Un tiers de ces maladies touche des enfants de moins de cinq ans.

Quant au cancer , selon l'INSERM 7 ( * ) « l'augmentation de l'incidence des cancers en France, entre 1980 et 2000, est estimée à environ 60 %. Cette augmentation est due en partie au vieillissement de la population ; mais lorsque ce taux d'incidence est standardisé sur l'âge, il reste une augmentation de 30 % de l'incidence des cancers en France ».

Cette augmentation peut résulter à la fois d'un meilleur diagnostic, d'une surveillance plus efficace de la population comme d'une susceptibilité plus importante à développer la pathologie. Qu'en est-il exactement ?

cancers

1980

nombre de cas

2000

nombre de cas

variation

Hommes

97.000

161.000

+ 66 %

Femmes

73.000

117.000

+ 60 %

Total

170.000

278.000

+ 63 %

Dans cette croissance du nombre de cas, 45 % résulteraient des évolutions démographiques (croissance et vieillissent de la population) et 55 % seraient dus à une progression de la fréquence des cancers à âge constant . Aucune politique de santé publique ne saurait s'en désintéresser.

Pas d'augmentation des cancers chez l'enfant en France sur la période 1990-1999 (les cancers les plus fréquents sont les leucémies, les tumeurs cérébrales, rénales ou osseuses) alors qu'une telle augmentation est constatée sur le plan européen de 1970 à 1990. Seule l'exposition aux radiations ionisantes a une responsabilité démontrée . Les champs électromagnétiques d'extrêmement basse fréquence, les pesticides et la pollution atmosphérique générée par le trafic automobile sont suspectés.

Explosion prévisible du nombre de cancers du poumon chez les femmes dans les vingt ans à venir alors que ce type de cancer était pratiquement inexistant dans cette population.

Anomalies de l'appareil génital pour les deux sexes .

Anomalies lors du développement intra-utérin .

Détérioration du système nerveux dont augmentation de l'occurrence de la maladie de Parkinson en cas d'exposition professionnelle à certains produits, en particulier aux pesticides.

Mais, pour le CIRC, il y aurait augmentation des cancers de l'enfant en France, entre 1990 et 1999 ; de même, une augmentation est constatée sur le plan européen de 1970 à 2000 (+1 % par an pour le cancer de l'enfant et + 1,5% par an pour le cancer de l'adolescent) avec une accélération de cette tendance. De plus, l'idée que cette augmentation n'ait pas été observée en France est remise en cause par une étude récente de l'ORS Ile de France.

De prime abord, les données semblent divergentes selon les sources consultées. En réalité, ces divergences résultent surtout de différences de présentation ou de méthodologie.

C'est en partie pourquoi les conclusions de l'Institution national du cancer (INCa), celles de l'Académie de médecine, l'Académie des sciences ou de l'Institut national de veille sanitaire (InVS) ne recoupent pas celles du Pr. Dominique BELPOMME dans son Mémorandum de l'Appel de Paris (voir leurs auditions). La différence vient du fait que, dans un cas, sont prises en compte les données épidémiologiques tandis que, dans l'autre cas, une alerte de santé publique est construite sur un bruit de fond inquiétant résultant de données non exhaustives. Cela illustre en partie le changement de regard induit par le passage d'une logique de prévention à une logique de précaution.

* 7 INSERM, expertise collective 2005 : « Approche méthodologique du lien avec l'environnement ».

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