II. UNE MÉTROPOLISATION DE L'AGGLOMÉRATION PARISIENNE À ACCOMPAGNER

Si le débat sur le Grand Paris redevient aujourd'hui d'actualité, c'est d'abord parce que l'agglomération a changé depuis quelques décennies et que la concurrence internationale pose comme jamais la question de la pertinence de la gouvernance de l'agglomération. Face aux enjeux, et notamment à la nécessité de prévoir de nouveaux investissements conséquents, il devient essentiel de bien mesurer les changements en cours et d'en apprécier ensuite les conséquences en termes de gouvernance.

A. UNE MÉTROPOLISATION QUI CONCERNE TOUTES LES GRANDES VILLES

1. Une métropolisation en marche

Le débat sur la métropolisation de notre tissu urbain est devenu d'autant plus d'actualité qu'il s'inscrit maintenant dans une perspective de développement durable. L'étalement urbain consomme beaucoup d'espaces mais aussi de grandes quantités d'énergie et de CO 2 . Dans ces conditions, la ville redevient « à la mode ». En parallèle, la métropolisation est aussi devenue une dimension de la globalisation puisqu'elle se situe au carrefour des logiques locales, nationales et mondiales à travers les flux d'échanges qu'elle suscite. Lieu par excellence de la création des richesses, la métropole concentre aussi les problématiques d'exclusion. Il est donc normal qu'elle concentre aujourd'hui toutes les attentions.

Dans cette perspective, le Président de la République et le Premier ministre ont confié une mission à Dominique Perben qui a donné lieu à un rapport 7 ( * ) publié en janvier 2008. Dans ce document, le député du Rhône décrit le caractère inéluctable du processus de métropolisation qui est d'abord, selon lui, le résultat de la globalisation. La métropolisation polarise les activités à forte valeur ajoutée vers les grands centres urbains, elle détermine les investissements des entreprises et leur fournit les ressources humaines et technologiques qu'elles recherchent. Par ailleurs, les métropoles permettent de maximiser les effets des nouvelles technologies qui sont à la base du fonctionnement en réseau.

Les freins à la métropolisation sont constitués en particulier par les capacités d'échanges et de transports entre les territoires internes à la métropole. Un réseau de transport déficient favorise, en effet, l'utilisation d'un véhicule individuel et ainsi l'étalement urbain. Par ailleurs, les métropoles attractives sont celles qui se trouvent placées au coeur d'un réseau d'infrastructures multiples où se connectent les divers réseaux et qui permettent une accessibilité rapide aux autres métropoles françaises et étrangères.

Dans ces conditions, Dominique Perben identifie trois objectifs pour les villes qui souhaitent atteindre le statut de métropole :

- obtenir la taille critique qui permet d'atteindre les seuils critiques permettant le développement d'infrastructures lourdes et de services performants (administratifs, universitaires, culturels...) qui contribueront eux-mêmes au socle d'une nouvelle image urbaine ;

- installer des fonctions métropolitaines supérieures ou d'exception sachant que la condition du succès repose sur la mise en oeuvre d'investissements majeurs ;

- élargir leur territoire en s'appuyant sur des aires de métropolisation plus larges permettant l'évolution des fonctions de centre-ville et la mutation de la périphérie.

Ainsi, l'ancien ministre de l'Équipement estime que « la métropole est le résultat d'une stratégie où la ville, plutôt qu'exercer un véritable choix de développement et de mutation, accompagne et accélère un processus socio-économique existant » .

Compte tenu de ce constat, Dominique Perben estime que trois échelles métropolitaines s'observent :

- les métropoles mondiales (Paris et Londres en Europe) dont le sort est lié à la globalisation et à l'internationalisation de l'économie ;

- les métropoles continentales de type « européen » qui ne disposent pas de la totalité des fonctions de métropolisation mondiale (Bruxelles, Amsterdam, Barcelone, Milan, Stockholm...) ;

- les métropoles régionales dont l'attractivité dépasse leurs limites administratives mais qui ne peuvent pas prétendre à ce jour à une fonction d'entraînement mondial ni même européen.

Si la métropolisation est devenue une question politique, c'est d'abord parce qu'elle structure l'évolution de nos sociétés. L'étalement urbain incontrôlé autour des métropoles est ainsi consommateur d'espace et générateur de congestion urbaine, de nuisances (pollution et bruit) et de coûts supplémentaires pour les services publics et les réseaux (collecte des déchets, assainissement, ramassage scolaire...).

Les différents aspects du processus de métropolisation 8 ( * )

La métropolisation est le fruit d'une démarche volontariste qui s'appuie sur des dynamiques et des projets. Les leviers de cette dynamique sont constitués par :

- les effets de seuil quantitatifs (infrastructures et équipements lourds) et quantitatifs (universités, recherche, culture...) ;

- la notion d'excellence : une métropole investit dans la qualité de ses services, de l'urbanisme, de l'offre culturelle ;

- une nouvelle image urbaine reposant sur l'utilisation de symboles forts ;

- l'accessibilité à travers les noeuds de transports aérien, ferroviaire et routier ;

- l'exercice de fonctions d'exception qui placent la ville dans le réseau des métropoles internationales ;

- la capacité événementielle à attirer de grandes manifestations et à fédérer des évènements ;

- la mise en place d'une structure spatiale et la création d'une aire de métropolisation. Le changement d'échelle de la ville est la condition de sa métropolisation ;

- l'émergence d'un pouvoir métropolitain formel ou informel, traduction d'un consensus nécessaire au démarrage du processus de métropolisation et à sa gestion ;

- les dynamiques qui reposent sur un partenariat public-privé entre tous les acteurs métropolitains et sur un développement multifonction sortant du schéma d'une activité dominante et privilégiant la diversification ;

- enfin, la gestion de la métropolisation dans le temps ; celle-ci est un mouvement qui doit être accompagné et guidé par des schémas évolutifs permettant de gérer le développement et la croissance.

* 7 « Imaginer les métropoles d'avenir », rapport de M. Dominique Perben, janvier 2008.

* 8 Ces critères ont été établis par une étude sur la densité et les formes urbaines de l'agence de développement et d'urbanisme de Lille Métropole (2006-2007).

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