C. LA RECHERCHE D'UNE POLITIQUE EUROPÉENNE DE SOUTIEN À L'ESPACE RURAL

Deux politiques européennes sont de nature à soutenir le développement des espaces ruraux : la politique de développement rural proprement dite, qui a toujours constitué une « sous-catégorie » de la politique agricole européenne, et la politique de cohésion économique et sociale. Si la recherche d'une cohérence et d'une complémentarité entre ces deux instruments a été poursuivie au profit de la ruralité, en particulier à travers l'Agenda 2000, celle-ci semble cependant ne profiter que très accessoirement de ces politiques générales -tendance qui semble d'ailleurs perdurer dans les programmations de ces dernières pour la période 2007-2013-.

Se pose dès lors la question de l'opportunité d'une politique européenne clairement identifiée, tant dans son contenu que dans son financement, de soutien des espaces ruraux . En effet, plus de 56 % de la population des 27 Etats membres de l'Union européenne vit dans des zones rurales, qui représentent 91 % du territoire communautaire. Entre une politique agricole dont la composante rurale reste centrée sur le secteur primaire et une politique de cohésion ciblant des territoires précis, il semble qu'il y aurait légitimement la place pour une politique rurale intégrée, coordonnant chacun des instruments d'intervention existants, couvrant l'ensemble des territoires ruraux et axée sur leurs spécificités socioéconomiques.

1. La politique européenne de développement rural

Depuis 1999, la PAC a revêtu deux dimensions théoriquement distinctes : à côté du soutien à la production agricole et au marché , qui relève du premier pilier, la politique européenne de soutien à l'agriculture comporte un second volet expressément dédié au développement rural et comportant des mesures cofinancées par l'Union et les Etats membres. Or, ce choix d'adosser les mesures en faveur de la ruralité à celles favorisant le développement du secteur primaire s'est traduit par un déséquilibre en faveur du second, qui perdure aujourd'hui malgré les ajustements auxquels il a été procédé dans le cadre du plan de développement rural pour la période 2007-2013.

a) De la programmation 2000-2006 à la programmation 2007-2013

? Si des traces ponctuelles peuvent en être retrouvées dès la mise en place de la PAC, au début des années 60, c'est en 1999 qu'un cadre d'action règlementaire cohérent est défini en matière de développement rural : il prendra la forme d'un second pilier dont la première programmation s'est étendue sur la période 2000-2006 .

Le règlement de développement rural (RDR) de 1999 qui en constituait le socle déclinait 22 mesures s'organisant en deux groupes : 4 mesures d'accompagnement de la PAC visant au soutien des zones défavorisées d'un point de vue agricole, les 18 autres concernant la modernisation des exploitations agricoles ainsi que le développement des zones rurales.

Leur mise en oeuvre s'est faite dans les Etats membres, au travers de plans de développement rural de portée à la fois nationale (à travers le plan de développement rural national, ou PDRN) et régionale (dans les programmes régionaux et les documents uniques de programmation, ou DOCUP) afin, pour ces derniers, de les intégrer dans la politique de cohésion européenne. Ces mesures ont été financées par des fonds communautaires , notamment le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole, section garantie (FEOGA-G). Ont également été mobilisés la section orientation du même fonds (FEOGA-O) et les fonds structurels, alimentant la politique européenne de cohésion, que sont le Fonds européen de développement rural (FEDER) et le Fonds social européen (FSE).

L'évaluation de cette première programmation a montré ses aspects positifs (impact appréciable sur la valeur ajoutée des productions agricoles, effet de rattrapage marqué dans les zones d'exploitation agricole les plus défavorisées), tout en soulignant ses carences (insuffisante association des départements et régions à la mise en oeuvre du PDRN, faible ciblage sur les zones à enjeu environnemental, coordination délicate entre les fonds).

? Tenant compte de ce bilan, la programmation 2007-2013 , reposant sur un nouveau RDR du 20 septembre 2005, introduit plusieurs nouveautés :

- une approche plus stratégique , avec la définition d'orientations stratégiques communautaires (OSC) dans lesquelles doit s'inscrire un plan stratégique national (PSN) pour chaque Etat membre ;

- une simplification , à la fois au niveau du financement, par l'utilisation d'un fonds unique et nouveau, le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), et le choix d'un niveau unique de mise en oeuvre par Etat membre, qui peut être national ou régional ;

- une nouvelle organisation des mesures , qui passent à 26, articulées autour de quatre grands axes rappelés ci-dessous :

Le Fonds européen agricole de développement rural (FEADER) et la traduction du règlement de développement rural (RDR) pour 2007-2013

- Axe 1 : compétitivité de l'agriculture et de la sylviculture (devant représenter au moins 10 % de l'enveloppe financière totale du programme)

. Ressources humaines : formation, jeunes agriculteurs, conseil, préretraite

. Capital physique : investissements, transformation, infrastructures. Qualité des productions : mise aux normes, promotion de la qualité

- Axe 2 : environnement et gestion de l'espace (au moins 25 % de l'enveloppe)

Terres agricoles : agroenvironnement, bien-être animal (obligatoire), investissements non productifs, soutien aux zones de montagne et autres zones défavorisées, Natura 2000

- Axe 3 : diversification de l'économie et qualité de vie (au moins 10 % de l'enveloppe)

. Qualité de vie : services pour l'économie, rénovation de villages, appui/formation, appui aux stratégies de développement local

. Diversification économique : aides aux micros entreprises, tourisme, conservation du patrimoine naturel et vernaculaire

- Axe Leader (au moins 5 % de l'enveloppe)

Démarche participative de développement rural associant les différentes activités du monde rural. Cette démarche, qui peut concerner les trois axes précédents, est portée par les groupes d'action locale (GAL).

La France , qui bénéficie d'une enveloppe de 6,4 milliards d'euros pour la nouvelle programmation 2007-2013 -ce qui la place au cinquième rang des bénéficiaires du FEADER- a fait plusieurs choix pour sa mise en oeuvre :

- six programmes de développement pour couvrir l'ensemble du territoire : un pour l'hexagone, le plan de développement rural de l'hexagone (PDRH), qui n'est pas zoné et s'étend donc à tout le territoire rural 137 ( * ) , un pour la Corse et un pour les départements d'outre-mer ;

- une déconcentration du PDRH qui, tout en respectant l'exigence d'un niveau unique de programmation, est constitué d'un socle national et de volets régionaux -à travers les documents régionaux de développement rural, ou DRDR- permettant de répondre à l'exigence de régionalisation ressortant de l'évaluation de la précédente programmation ;

- une sélection de mesures , 9 parmi les 26 proposées n'ayant pas été retenues par la France ;

- un décofinancement de certaines mesures , la prime herbagère agro-environnementale (PHAE) et la mesure rotationnelle (MAE) reposant uniquement sur des fonds nationaux à partir de cette année.

* 137 Dont la définition est similaire à celle de l'Insee retenue au début du présent rapport, couvrant à la fois l'espace à dominante rurale et le périurbain.

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