3. Un impact environnemental à évaluer

Si les évaluations ex post des effets des taxes sur le CO 2 sont globalement rares ou rudimentaires, les informations recueillies par le groupe de travail sur les expériences suédoise et danoise dénotent un bilan contrasté .

a) Les enseignements tirés des expériences suédoise et danoise

Autorisée par le protocole de Kyoto à augmenter de 4 % le niveau de ses émissions entre 2005 et 2012, par rapport à 1990, la Suède les a diminuées de 10 % entre 1990 et 2007 81 ( * ) . En 1997, un rapport national sur le changement climatique élaboré par le ministère suédois de l'environnement a estimé que la taxe carbone avait permis de réduire les émissions de CO 2 de 15 % entre 1990 et 1995, et les réduirait de 20 % à 25 % d'ici à 2000. Selon l'enquête remise au groupe de travail par la mission économique de Stockholm, « le principal effet positif de la taxe carbone a été le recours accru des biocombustibles pour le chauffage urbain . Ainsi, la quantité de combustibles issus de la biomasse utilisés dans les installations de chauffage a doublé entre 1990 et 1995, passant de 10,2 à 20,4 térawattheures, ou de 25 % à 42 % du total du chauffage urbain fourni. Si la part des combustibles fossiles dans le chauffage urbain était restée la même, les émissions de CO 2 auraient été supérieures d'environ 1,5 million de tonnes en 2000 ».

L'enquête de la mission économique de Stockholm indique toutefois :

1) qu'un rapport de l'Institut de conjoncture de Suède 82 ( * ) a mis en évidence qu'une partie des baisses d'émissions de CO 2 constatées en Suède avait pour origine la délocalisation d'activités polluantes à l'étranger ;

2) que la classe politique suédoise pointait volontiers les « effets décevants concernant les innovations industrielles résultant de la taxe carbone » , le niveau global de la fiscalité énergétique ne semblant pas constituer un signal-prix suffisamment incitatif pour conduire à des investissements significatifs.

S'agissant du Danemark , les effets de la taxe sur le CO 2 en termes de réduction des émissions semblent limités. Selon la mission économique de Copenhague, « le principe selon lequel une taxation des émissions de CO 2 permettrait, par son caractère dissuasif, de réduire l'assiette taxable et donc les émissions ne semble pas avoir donné au Danemark les résultats escomptés. Le recours aux mécanismes de marché (renchérir la ressource pour réduire la consommation) a vite atteint ses limites car l'énergie, même dans une économie à faible intensité énergétique comme le Danemark, demeure un poste de dépense important pour les entreprises, que l'Etat ne peut se permettre de trop alourdir » .

De surcroît, une étude de 2008 du Conseil économique danois a évalué que le niveau de taxation permettant au Danemark de respecter un objectif de baisse de 20 % de ses émissions hors ETS atteignait 180 euros par tonne de CO 2 , soit un coût totalement déconnecté du prix du carbone sur le marché européen et, dans l'absolu, prohibitif. Dansk Industri , organisation patronale danoise, a ainsi fait valoir que la taxation du carbone ne saurait constituer le seul outil de réduction des émissions , sauf à assumer le risque de délocalisation.

Une dernière critique adressée à la taxe carbone danoise concerne sa tendance à générer des rentes au profit de certains acteurs économiques. En effet, la volonté de corréler le tarif de sa taxe aux prix résultant des échanges sur l'ETS a conduit les autorités danoises à recourir à la technique du grandfathering , consistant à prendre pour base de taxation des consommations historiques . Ce choix a tendance à renforcer les positions acquises et à pénaliser les nouveaux entrants sur le marché et les entreprises en forte croissance.

* 81 Selon la mission économique de Stockholm, « cette réduction des émissions a eu lieu dans un contexte de forte croissance économique, bien que celle-ci ait été surtout portée par le secteur des services ».

* 82 « A Unilateral versus a Multilateral Carbon Dioxide Tax », Charlotte Nilsson

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