Rapport d'information n° 317 (2010-2011) de M. Claude BELOT , fait au nom de la Délégation aux collectivités territoriales, déposé le 16 février 2011

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N° 317

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 16 février 2011

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation (1) sur les normes applicables aux collectivités territoriales ,

Par M. Claude BELOT,

Sénateur.

(1) Cette délégation est composée de : M. Claude Belot, président ; MM. Dominique Braye, Philippe Dallier, Yves Krattinger, Hervé Maurey, Jacques Mézard, Jean-Claude Peyronnet, Bruno Sido, Jean-François Voguet, vice-présidents ; MM. François-Noël Buffet, Pierre-Yves Collombat, secrétaires ; M. Jean-Michel Baylet, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Bérit-Débat, Pierre Bernard-Reymond, Mme Marie-Thérèse Bruguière, MM. Gérard Collomb, Jean-Patrick Courtois, Yves Daudigny, Yves Détraigne, Éric Doligé, Mme Jacqueline Gourault, MM. Charles Guené, Didier Guillaume, Pierre Hérisson, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Claude Jeannerot, Antoine Lefèvre, Roland du Luart, Jean-Jacques Mirassou, Rémy Pointereau, François Rebsamen, Bruno Retailleau, René Vestri, Mme Dominique Voynet.

INTRODUCTION

De la gestion de l'eau à la sécurité des bâtiments, des transports aux équipements sportifs, de la voirie à la restauration scolaire, la quasi-totalité des domaines d'intervention des collectivités territoriales sont aujourd'hui impactés par l'inflation normative.

Évalué à 400 000 par l'Association des maires de France, le nombre de normes techniques que les élus locaux sont censés faire appliquer (et donc connaître) a largement franchi le seuil de l'overdose : les prescripteurs ont dépassé la dose prescrite.

Le diagnostic, hélas, n'est pas nouveau. Dans son rapport public de 1991, le Conseil d'État dénonçait déjà la « surproduction normative » et ses conséquences en termes de sécurité juridique et de crédibilité du droit. Sa conclusion, « quand le droit bavarde, le citoyen ne lui prête plus qu'une oreille distraite » , résonnait comme un écho, deux siècles et demi après, à l'intemporelle formule de Montesquieu : « les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires » .

Malheureusement, il y a parfois loin des belles maximes, aussi sages soient-elles, à leur mise en pratique. Pour ne prendre qu'un seul exemple, celui du code général des collectivités territoriales (CGCT), ce sont respectivement 80 et 55 % de ses articles législatifs et règlementaires qui ont été modifiés en une dizaine d'années... sans parler des centaines de dispositions qui s'y sont ajoutées. Aujourd'hui « riche » de près de 3 500 pages, le CGCT est pourtant très loin de couvrir toutes les normes applicables aux collectivités territoriales.

Point n'est besoin de se perdre en conjectures sur les causes d'un tel gouffre entre le souhaitable, unanimement partagé, et le réel : si la condamnation des textes inutiles ne s'est pas traduite dans les faits, c'est d'abord parce que la notion même de leur utilité, et donc leur raison d'être, ont été perdues de vue.

La norme est un outil au service de l'action publique mais, dans une société qui croit en la responsabilité et au bon sens de ses décideurs, un outil subsidiaire : elle n'a aucune pertinence lorsque les différentes parties prenantes parviennent ensemble à atteindre, à la satisfaction de tous, l'intérêt public ; elle devient même nuisible lorsque, au mépris des réalités, elle fixe aveuglément des objectifs, sans doute nobles sur le papier, mais totalement inatteignables sur le terrain. Le culte de la norme n'est rien d'autre que la négation du bon sens.

Et pourtant, le pli -bien malheureux- a été pris. Pour chaque question, pour chaque risque, pour chaque doute, la réponse est la même : légiférer ou règlementer. L'obligation ou l'interdiction, selon les cas, surgit, tel un réflexe conditionné ; elle s'impose dans son uniformité, sa rigidité, ses coûts (et parfois son absurdité) au responsable local, où qu'il soit et quelles que soient les circonstances locales.

Elle s'impose... et se propage. Dans une société inquiète, voire angoissée, à la recherche du "zéro risque absolu", la norme a vite colonisé tous les secteurs de la sphère publique (et même, de plus en plus, de la sphère privée). Enfant chérie d'un principe de précaution entendu au sens le plus large, pour ne point dire aberrant, elle est énoncée « au cas où » : une commune veut-elle faire nettoyer un tag sur le quai d'une gare désaffectée, elle doit faire venir un agent de la SNCF au cas (par hypothèse impossible, mais sait-on jamais...) où passerait un train ; entreprend-elle la réparation d'un pont sur une rivière à sec, elle doit y installer une barque au cas (par hypothèse impossible..) où un employé tomberait à l'eau ; décide-t-elle d'aménager l'un de ses bâtiments en salle de cinéma, elle doit construire un ascenseur pour accéder à la salle de projection, au cas où, un jour, le projectionniste serait dans l'incapacité de prendre l'escalier...

Ces exemples, parmi tant d'autres, prêteraient sans doute à sourire si l'empilement normatif n'avait pas de conséquences plus lourdes que le ridicule de ses auteurs.

Parmi celles-ci figurent évidemment les coûts exorbitants qui en résultent pour les budgets locaux : à eux seuls, les 163 projets de normes de l'État qui ont donné lieu à une évaluation en 2009 représentaient plus de 580 millions d'euros (soit quasiment l'équivalent de ce qui correspond aujourd'hui à la dotation d'équipement des territoires ruraux) ; pour 2010, le coût des 176 projets évalués représentait 577 millions. En deux ans, le cap du milliard est donc largement dépassé, et ce pour une partie des normes de l'État qui est pourtant loin d'être le seul prescripteur. Ainsi, année après année, le coût de l'accumulation des normes atteint inévitablement, pour de plus en plus de collectivités, des montants astronomiques au regard de leur capacité financière.

Le prescripteur lui-même finit d'ailleurs parfois par devoir mettre la main à la poche lorsque sa logorrhée scripturale le place dans la situation ubuesque de devoir lancer un appel d'offres auprès des cabinets d'avocats pour l'aider à simplifier des règles qu'il a lui-même élaborées !

Mais les normes n'atteignent pas que le portefeuille du contribuable. Elles frappent aussi les organes vitaux de la démocratie : le droit, ravagé dans sa crédibilité et son autorité ; la sécurité juridique, victime directe d'une frénésie textuelle devenue chronique ; et, surtout, l'élu local, au pire infantilisé, au mieux fonctionnarisé : la norme décide pour lui ; il n'a plus qu'à faire ou à ne pas faire, selon ce qu'aura prescrit une autorité souvent éloignée des réalités du terrain. Engagé dans la vie publique pour servir ses concitoyens et l'intérêt général, il devient l'otage -d'aucuns diront l'esclave- d'une nouvelle forme de jacobinisme : le centralisme normatif, qui transforme l'élu en administrateur, substitue l'expertise technique à la légitimité des urnes et change la gestion par l'action en gestion par l'intendance.

Censée protéger le citoyen, répondre à une demande sociale, servir un intérêt public, autrement dit accompagner l'action de l'élu, la norme est peu à peu passée du statut d'instrument à celui d'entrave : elle n'aide plus le décideur, elle le bride ; elle n'accompagne plus l'action, elle la paralyse ; au final, elle ne sert plus la société, elle l'inhibe.

Il est donc grand temps d'en revenir à la raison d'être de la norme, de la recentrer sur les intérêts publics qu'elle seule peut garantir et de l'affranchir du diktat du conditionnel pour réapprendre à la conjuguer à l'indicatif.

Il ne s'agit pas de se faire le chantre d'une dérèglementation aveugle, mais de travailler à l'établissement d'un corpus juris adapté aux buts poursuivis, proportionné et, au final, efficace. L'objectif n'est pas de condamner la norme, au nom d'une « normophobie » qui serait tout aussi vide de sens que l'idolâtrie de la règle ; il est au contraire de la réhabiliter, car, on le sait bien, l'excès nourrit l'échec.

Ni totem, ni tabou, la norme doit tenir sa place dans notre société... mais rien que sa place.

Cet objectif fait depuis longtemps consensus. Près de deux décennies après le signal d'alarme tiré par le Conseil d'État, les plus hautes autorités ont enfin pris la question à bras le corps.

Le Parlement, tout d'abord, avec la création de la Commission consultative d'évaluation des normes (CCEN) qui, sous la présidence de notre ancien collègue Alain LAMBERT, effectue un travail unanimement reconnu d'examen des conséquences des projets de norme pour les collectivités territoriales ; le législateur s'est aussi lancé dans une entreprise ambitieuse de simplification du droit, à la suite notamment des travaux remarquables de M. Jean-Luc WARSMANN, Président de la commission des Lois de l'Assemblée nationale ; en 2010, le Premier ministre a nommé un commissaire chargé de la simplification du droit et décidé un moratoire partiel.

Ces initiatives, n'ont cependant pas suffi à desserrer l'étau normatif qui, aujourd'hui, étouffe les collectivités et leurs élus :

- un large pan de normes y échappe, telles que les mesures règlementaires d'application des lois ou directives communautaires (dont la charge pour les collectivités, évaluée à 191,11 millions d'euros en 2009, représente un tiers des coûts évalués en 2009) ou celles adoptées par les fédérations sportives ;

- elles ne portent -ce qui est déjà un effort louable- que sur la maîtrise des flux dont le nombre est sans commune mesure avec le stock de plusieurs centaines de milliers de normes auxquelles sont aujourd'hui confrontés les élus.

Fermement décidés à aller plus loin, le Président de la République et le Premier ministre ont souhaité pouvoir s'appuyer sur les avis des instances politiques représentant les collectivités territoriales.

Le chef du Gouvernement en a saisi les associations de chaque niveau : l'Association des Maires de France (AMF), l'Association des départements de France (ADF) et l'Association des Régions de France (ARF). Chacune a remis sa contribution dans le courant de l'automne.

Quant au Président de la République, c'est au Sénat et à ses membres qu'il s'est adressé : notre collègue Éric DOLIGÉ a ainsi été chargé d'une mission afin d'identifier les normes « qui doivent être prioritairement modifiées en raison de leur caractère inadapté et coûteux » et de « proposer des mesures de simplification, ambitieuses et concrètes, pour desserrer les contraintes et alléger les coûts excessifs qui pèsent parfois sur nos collectivités territoriales » .

Le présent rapport, lui aussi, s'inscrit dans le cadre d'une demande du chef de l'État qui a émis le voeu que l'assemblée représentant institutionnellement les collectivités territoriales apporte collectivement sa contribution à cette réflexion d'intérêt national. M. le Président Gérard LARCHER s'en est fait le relais en chargeant votre Délégation à la décentralisation d'émettre des propositions avant le 15 février 2011, sur la base notamment des contributions des cinq commissions permanentes les plus directement concernées par les normes imposées aux collectivités territoriales (commissions des Affaires sociales, de la Culture, de l'Économie, des Finances et des Lois).

Votre rapporteur s'est acquitté de sa mission dans le parfait respect de celle confiée à M. Éric DOLIGÉ, et en étroite coopération avec lui, via notamment la tenue d'auditions en commun. Il ne doute pas que les conclusions de votre Délégation seront complétées et enrichies par celles de notre excellent collègue, attendues pour le mois de mars.

I. DESSERRER L'ÉTAU NORMATIF : UN CASSE-TÊTE À MULTIPLES DIMENSIONS

Objectif unanimement partagé, l'allègement du fardeau normatif qui pèse sur les élus locaux ne se traduit guère dans le droit. Le fait est que de nombreux obstacles rendent l'exercice particulièrement complexe : l'atomisation du pouvoir prescriptif, l'extrême diversité des secteurs concernés et la nécessité de se livrer à une analyse quasiment norme par norme.

A. UNE MULTITUDE DE PRESCRIPTEURS

L'État, régulièrement pointé du doigt, n'est pas, loin de là, l'unique artisan du harcèlement textuel des élus. Le centralisme normatif peut ainsi être considéré comme le commun dénominateur de toutes les strates du pouvoir, législatif ou règlementaire, européen, national ou infra-étatique.

1. Les normes de l'État

L'État porte, indéniablement, une part de responsabilité. Celle-ci est d'ailleurs partagée entre le législateur et le pouvoir règlementaire.

a) Les lois

De l'urbanisme aux gens du voyage, en passant par l'encadrement des centres de loisir ou la protection juridique des majeurs, c'est par centaines que se comptent les dispositions législatives qui s'appliquent directement aux collectivités territoriales.

La loi impose en outre l'adoption de mesures d'application qui, elles aussi, se comptent par centaines et s'appliquent dans une large proportion aux collectivités. Selon les estimations de la direction générale des collectivités locales (DGCL), la loi du 13 juillet 2010 portant engagement pour l'environnement (dite « Grenelle II ») représenterait un « potentiel » de 173 décrets d'application !

b) Les normes édictées par le pouvoir règlementaire

Les montants précités, mis à la charge des collectivités territoriales en 2009 et 2010 (580 et 577 millions d'euros), résultent intégralement de normes provenant du pouvoir règlementaire.

Parmi elles, une place à part doit être faite à l'estimation des mesures de revalorisation du point d'indice de la fonction publique (qui ont représenté, pour les collectivités, des coûts de 330 millions et 177 millions d'euros en 2009 et 2010). Celles-ci présentent en effet une double spécificité : par leur objet, tout d'abord, puisque, sans être imposées juridiquement, elles répondent à une nécessité sociale évidente, que l'on ne saurait sérieusement reprocher à l'État de prendre en considération ; par leurs conséquences, ensuite, puisque, en tant qu'employeur, l'État doit directement assumer les coûts de ses décisions en la matière, ce qui constitue un évident facteur de responsabilisation.

Ainsi, hors revalorisation du point d'indice de la fonction publique, les normes de l'État ont, pour les collectivités territoriales, représenté en 2009 et 2010 :

- 191 et 360 millions d'euros pour les mesures d'application des lois et des textes communautaires. Ces coûts trouvent certes leur origine dans la loi ou le droit communautaire, mais le pouvoir exécutif y a sa part de responsabilité lorsqu'il adopte un règlement plus exigeant que le texte qu'il s'agit d'appliquer. Ainsi, un décret exigeant des portes d'une largeur de 90 cm (supposant une mise aux normes lorsqu'elles n'en font que 89) est plus contraignant qu'une loi qui requiert simplement que les locaux soit accessibles aux personnes à mobilité réduite ;

- 59 et 38 millions d'euros pour les règlements autonomes, édictés directement par le pouvoir exécutif sans qu'un texte législatif l'y oblige. On constate ainsi que, sur les deux années considérées, les règlements autonomes ont représenté près de 18 % des coûts générés par les normes de l'État, hors fonction publique (et ce, malgré le moratoire intervenu au milieu de l'année 2010 qui concerne précisément les règlements autonomes) : 97 millions sur 551.

L'État porte en outre la responsabilité de décisions prises par ses services déconcentrés (agences, académies...). Pour ne citer qu'un seul exemple, les taux d'encadrement des élèves exigés pour les heures de piscine ou pour les activités périscolaires donnent parfois lieu à des décisions s'affranchissant totalement des conséquences pratiques qui peuvent en résulter pour les collectivités, alors même que l'apport des modifications décidées au regard de la sécurité reste à démontrer ; notre collègue Marie-Hélène DES ESGAULX a ainsi porté à la connaissance de la commission des Finances la toute récente décision (en plein milieu d'année scolaire) d'un Inspecteur d'académie d'exclure désormais les intervenants bénévoles agréés du taux minimum

2. Les autres prescriptions applicables aux collectivités territoriales

Les normes autres que celles de l'État proviennent de décideurs multiples, d'ailleurs bien identifiés :

- les autorités communautaires, dont les décisions, on le sait, interviennent dans de nombreux domaines relevant des collectivités territoriales et qui représentent aujourd'hui l'essentiel du corpus juris au respect duquel elles sont astreintes ;

- les prescriptions édictées par des organismes de droit privé investis d'un pouvoir réglementaire, tels que les fédérations sportives ;

- les collectivités territoriales elles-mêmes, qui peuvent par exemple être tentées de subordonner leurs subventions au respect, par la collectivité potentiellement bénéficiaire, de telle ou telle exigence technique ;

- les normes correspondant à de « bonnes pratiques », à l'instar de celles de l'Association française de normalisation (AFNOR), qui sans être juridiquement contraignantes, s'imposent souvent en pratique aux collectivités.

Typologie des normes applicables aux collectivités territoriales

En s'inspirant de la typologie présentée par M. Pierre RICHARD, Président de DEXIA, dans son rapport rédigé en 2006 sur « les enjeux de la maîtrise des dépenses publiques locales », les normes applicables aux collectivités territoriales peuvent être classées en trois catégories :

- les règles prescrites par les pouvoirs publics, en particulier de l'État (lois ou règlements) ou des institutions communautaires ;

- les normes techniques édictées par des titulaires de délégation, dont la règlementation des fédérations sportives constitue l'exemple type ;

- les normes professionnelles, au sens de l'AFNOR, c'est-à-dire des éléments de référence approuvés par des instances de normalisation. D'une valeur théoriquement indicative, elles sont de fait souvent obligatoires : elles permettent de définir un « langage commun » entre les différents acteurs économiques et, dès lors, ne sauraient être ignorées par les collectivités territoriales qui doivent s'y référer dans le cadre de leurs marchés publics ; une partie conséquence de ces normes « facultatives », à l'instar de celles définies dans les domaines de la construction et de la sécurité, emportent une présomption de conformité des travaux et, si elles ne sont pas suivies, peuvent donc avoir de lourdes conséquences en cas de mise en cause de la responsabilité d'une collectivité devant le juge (exemples : normes relatives à la sécurité des ascenseurs, des aires de jeux ou des piscines).

CONCLUSION

L'atomisation du pouvoir prescriptif complique forcément la recherche d'une régulation du flux de normes. Il semble en particulier difficile, voire illusoire, d'espérer une solution générique, applicable aussi bien aux lois qu'aux règlements des fédérations sportives, aux normes européennes, aux bonnes pratiques de l'AFNOR ou autres.

Cette atomisation complique aussi toute entreprise de simplification du fait de la nécessité de respecter la hiérarchie des normes : si des mesures contenues dans des règlements, a fortiori autonomes, peuvent assez aisément être modifiées ou abrogées, la tâche est plus complexe pour les dispositions législatives... sans parler des normes résultant du droit communautaire.

B. LA MULTIPLICITÉ DES SECTEURS

Les normes, on le sait, n'épargnent aucun des domaines d'intervention des collectivités territoriales. C'est notamment pour essayer d'identifier les matières sur lesquelles mettre l'accent en priorité qu'ont été consultées les associations d'élus (à l'initiative du Premier ministre) et les commissions permanentes du Sénat directement concernées (à l'initiative de M. le Président Gérard LARCHER).

1. Des secteurs multiples mentionnés par les associations d'élus...
a) Les secteurs pointés par l'Association des Maires de France

L'AMF cite en premier lieu les normes relatives à l'accessibilité des bâtiments par les personnes en situation de handicap, tout en précisant que ses adhérents n'en remettent pas en cause le bien-fondé. Elle souhaite seulement que l'État prenne la mesure des « efforts financiers considérables » qui leur sont ainsi imposés et qui pourraient nécessiter une aide de sa part à certaines communes.

L'AMF cite également, sans entrer dans le détail, les normes de sécurité relatives aux bâtiments et celles prises dans les secteurs de l'environnement, de l'enfance et de l'urbanisme. Elle ajoute cependant que « là encore, partout où les normes sont prévues pour le bien et la sécurité des personnes, leur légitimité n'est pas mise en cause » .

En définitive, les doléances de l'AMF se concentrent sur « un sujet majeur de mécontentement des maires et présidents d'EPCI » : les prescriptions édictées par les fédérations sportives.

b) Les secteurs pointés par l'Association des Départements de France

L'ADF dresse une liste, qualifiée de non exhaustive, de quatre secteurs :

- le secteur social et médico-social ;

- la sécurité civile, à propos de laquelle l'ADF dénonce les « conséquences financières particulièrement onéreuses » des textes de nature statutaire, ou relatifs aux équipements et matériels ou à l'organisation interne des services départementaux d'incendie et de secours ;

- les installations et équipements sportifs, régis par des normes imposées par les fédérations ;

- les établissements accueillant du public, à propos desquels les normes ne se révèlent pas seulement coûteuses du fait des dispositifs d'accessibilité. L'ADF cite aussi la fréquence des contrôles techniques des installations ainsi que les coûts indirects résultant, par exemple des changements de programmes pédagogiques.

c) Les secteurs pointés par l'Association des Régions de France

L'ARF insiste tout particulièrement sur le secteur des transports (mise en accessibilité des quais de gare, suppression des passages à niveaux, procédures d'homologation des matériels roulants entre pays frontaliers...).

Le second point qu'elle développe concerne la formation. Elle mentionne la mise en accessibilité des établissements de formation. Elle s'arrête plus longuement sur les coûts indirects générés en la matière par :

- les normes relatives aux référentiels de formation, qu'elles concernent le contenu (un changement de programme du baccalauréat professionnel, par exemple, peut nécessiter l'achat de nouveaux matériaux et la construction d'ateliers) ou la durée ;

- les modifications du statut financier des étudiants (régimes des bourses étudiantes, rémunération des stagiaires...).

2. ...qui ne coïncident pas entièrement avec ceux pointés par les commissions du Sénat
a) La contribution de la commission des Lois

Le Président de la commission des Lois identifie trois pistes sur lesquels il conviendrait de mettre l'accent :

(1) Le droit des sols

Sur ce point, la commission dénonce « une sédimentation contraire à la lisibilité de la loi » . Sa contribution sur les normes en la matière peut se résumer en trois mots : pléthoriques, incohérentes et complexes.

- pléthoriques : la commission des Lois juge trop nombreux les types de documents d'urbanisme (directives territoriales d'aménagement, SCOT, PLU, POS, cartes communales, servitudes d'utilité publique diverses...) ;

- incohérentes : la commission soulève la question de l'articulation entre eux de documents qui peuvent se multiplier sur un même périmètre : PLU ou POS ou cartes communales qui doivent parfois être combinés avec des plans de prévention des risques contenant des prescriptions relevant de ces documents (notamment des règles de constructibilité) ;

- complexes : la commission cite d'abord l'exemple de la préemption, dont elle dénombre au moins sept dispositifs différents ; elle mentionne également les règles de délivrance des autorisations d'urbanisme, soulignant que chaque type (permis de construire, permis d'aménager, déclaration de travaux...) répond à des règles spécifiques.

(2) La protection civile

Sur ce point, la commission des Lois en appelle à un examen du stock des spécifications techniques des matériels et des équipements. Elle souligne par ailleurs la difficulté pour un SDIS de respecter l'obligation d'emploi de 6 % de travailleurs handicapés.

(3) L'outre-mer

Le droit ultra-marin se caractérise par « un ordonnancement complexe » à plusieurs titres.

D'abord, la simple identification de la norme en vigueur peut être difficile. Les DOM, par exemple, dont le régime est pourtant moins complexe que celui des autres collectivités d'outre-mer (COM), ne savent pas si, lorsqu'existe une norme antérieure à la départementalisation (1946), c'est cette norme ou le droit commun qui s'applique.

Ensuite, de nombreux textes ne sont rendus applicables aux COM qu'avec retard « parce que, parallèlement à leur élaboration, l'extension de ces normes à l'outre-mer n'a pas été déterminée » .

Le droit applicable en outre-mer est parfois obsolète, à l'image du statut des communes en Nouvelle-Calédonie. Il est souvent complexe, du fait notamment d'une imbrication des compétences et des responsabilités, sans parler des difficultés d'application et d'adaptation du droit communautaire dans les COM concernées.

b) La contribution de la commission des Finances

Se référant au dernier rapport annuel de la CCEN (2009), la commission des Finances souligne que les coûts les plus significatifs ont résulté, en 2009, des normes relevant de trois ministères :

- fonction publique (330,6 millions d'euros de coût pour les collectivités territoriales) ;

- secrétariat d'État au logement (87 millions, du fait notamment des règles d'urbanisme) ;

- l'écologie (37 millions).

La contribution de la commission des Finances comprend une double analyse.

Tout d'abord, une analyse par prescripteur, puisque, en citant les normes issues des fédérations sportives, des collectivités territoriales elles-mêmes et de l'Union européenne, elle met en avant le fait que l'État (Parlement ou Exécutif), n'est pas l'unique responsable de l'inflation normative.

Ensuite, la commission des Finances se livre à une analyse par secteur. Elle mentionne cinq domaines dans lesquels les normes se révèlent particulièrement coûteuses pour les collectivités :

- les SDIS, avec la tendance du ministère de l'Intérieur à édicter des normes sans impact pour son propre budget mais grevant les finances locales (à l'image de la récente décision d'exiger que chaque SDIS dispose désormais d'un pharmacien pompier professionnel, ce qui entraîne un surcoût par rapport au recours au volontariat) ;

- l'accessibilité. Sans remettre en cause le principe de normes en ce domaine, la commission indique que certaines d'entre elles semblent appliquées avec une rigidité excessive. Elle s'interroge ainsi, à titre d'exemple, sur l'obligation à laquelle a dû faire face une petite commune de prévoir un ascenseur pour accéder à la cabine du projectionniste de sa salle de cinéma, au cas où le poste serait occupé par une personne handicapée ; elle cite également le cas d'un maire d'une autre petite commune qui a dû en faire élargir les trottoirs au cas, hautement improbable, où deux fauteuils roulants seraient appelés à se croiser ;

- les normes de sécurité, notamment dans le domaine de l'aménagement urbain : au nom de la lutte contre les incendies dans les zones rurales, l'obtention d'un permis est soumis au respect d'un diamètre minimal pour les conduites d'eau... dont les pompiers, qui disposent de leur propres citernes, n'ont en pratique pas besoin. Des normes drastiques et d'un intérêt « très limité » s'appliquent aux surveillances de nuit dans les maisons de retraite, avec un impact sur le coût des prestations offertes aux pensionnaires âgés. Les taux d'encadrement des élèves exigés pour les heures de piscine ou pour les activités périscolaires sont parfois modifiés sans prise en compte des conséquences pratiques qui peuvent en résulter pour les collectivités, alors même que l'apport des modifications décidées au regard de la sécurité reste à démontrer (comme le montre l'exemple précité porté par Mme DES ESGAULX a la connaissance de la commission des Finances) ;

- la règlementation des travaux publics, parfois excessivement stricte, à l'instar de l'obligation déjà mentionnée de prévoir systématiquement une barque en cas de chantiers portant sur des ponts ;

- les plans d'urbanisme, en particulier en ce qui concerne les règles de publicité. La commission des Finances évoque ainsi la possibilité de voir un PLU annulé pour le motif « futile » selon lequel il n'aurait fait l'objet que d'un affichage en mairie au lieu de trois affichages successifs exigés par les règles en vigueur.

c) La contribution de la commission des Affaires sociales

La contribution de la commission des Affaires sociales porte sur deux secteurs :

(1) La politique du handicap

La commission rappelle d'abord le non respect par l'État de ses engagements à propos des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Elle souligne que la proposition de loi de M. Paul BLANC, adoptée par le Sénat le 25 octobre dernier, et qui apporterait des réponses à ces difficultés, est toujours en attente d'examen à l'Assemblée nationale ; elle regrette au passage la suppression au Sénat, contre l'avis du rapporteur, de la disposition prévoyant d'exonérer les MDPH du paiement de la taxe sur les salaires.

La commission des Affaires sociales met ensuite l'accent sur :

- le droit à scolarisation des enfants handicapés, soulignant les efforts d'aménagements réalisés par les communes (pour les écoles maternelles) et départements (pour les collèges) et espérant que l'échéance de 2015 sera tenue ;

- l'obligation d'emploi de 6 % de travailleurs handicapés, applicable aux collectivités territoriales depuis 2005. La commission souligne leur « réelle implication » , mais suggère un assouplissement des obligations de recrutement pour certaines « professions exigeant des conditions d'aptitude particulières » , en l'occurrence les pompiers (via, propose-t-elle, une disposition neutralisant les effectifs opérationnels des SDIS dans le décompte de l'obligation d'emploi) et les assistantes maternelles (dont l'agrément est conditionné à leur état de santé physique) ;

- l'accessibilité des bâtiments, moins problématique pour les nouveaux bâtiments que pour ceux qui existent déjà. La commission estime que les attentes des personnes handicapées sont légitimes, mais en appelle à la cohérence des normes en la matière : ainsi, il convient de veiller à ce que l'extension d'un bâtiment n'oblige pas à démolir le bâtiment initial au motif que, pour celui-ci, ont été édictées des normes d'accessibilité sur la largeur des couloirs différentes (parfois de quelques centimètres) de celles qui prévalaient à l'origine.

(2) La politique de la petite enfance

A propos des crèches, tout d'abord, la commission des Affaires sociales constate un certain zèle des services de PMI des départements et propose que les communes soient informées du fait que, depuis la loi portant création des maisons d'assistantes maternelles du 9 juin 2010, les PMI ne peuvent plus rendre les normes nationales plus contraignantes.

A propos des maisons d'assistantes maternelles, la commission souligne qu'il s'agit, dans l'immense majorité des cas, de petites structures montées par les assistantes maternelles elles-mêmes. Le coût de l'application des normes d'accessibilité à ces établissements peut rendre le projet impossible, car trop onéreux. Dans les communes qui ne peuvent elles-mêmes financer des crèches, il en résulte que les familles se retrouvent sans solution de garde (solution d'autant plus absurde qu'il n'y a parfois aucun parent, voire aucune personne à mobilité réduite dans la commune). La commission suggère donc que les maisons d'assistantes maternelles soient considérées non pas comme des établissements recevant du public, mais comme des prolongements des domiciles des assistantes maternelles.

d) La contribution de la commission de l'Économie

Pour la commission de l'Économie, ce sont plus particulièrement trois secteurs qui comportent des normes « lourdes et exigeantes financièrement » pour les collectivités :

(1) La construction

La commission se réfère sur ce point à la note de l'AMF dans ses observations sur l'accessibilité des bâtiments par les personnes en situation de handicap (cf. supra). Elle rappelle que le coût de travaux de mise en accessibilité se chiffrerait, selon Dexia, à 15 milliards d'euros.

Elle cite également les contraintes résultant des normes liées à l'environnement (haute qualité environnementale, bâtiments basse consommation) ou à la sécurité (électricité, gaz...).

(2) L'urbanisme

Comme la commission des Lois, la commission de l'Économie appelle de ses voeux une simplification des documents d'urbanisme et de l'instruction des permis de construire. Elle cite en outre la mise en oeuvre de la loi montagne et de la loi littoral.

La commission indique cependant que, sur ces points, des améliorations peuvent être attendues après que, d'une part, le Grenelle II a habilité le Gouvernement à apporter des simplifications en matière d'urbanisme et, d'autre part, le secrétaire d'État au logement a mis en place des groupes de travail dont les conclusions sont attendues pour mars prochain.

(3) L'environnement

Se référant à une enquête de l'AMF, la commission considère que devraient prioritairement être examinés les domaines suivants :

- l'assainissement non collectif (élaboration du zonage, incidences financières et techniques des normes en matière d'équipement, visites diagnostic des installations) et collectif (conséquences de la loi sur l'eau sur les réseaux existants) ;

- les normes de qualité de l'eau potable ;

- la création de réserves d'eau (lutte contre les incendies et alimentation du bétail) ;

- les inventaires des zones humides et la gestion des pistes et sentiers forestiers.

La commission appelle également de ses voeux une « réduction des contraintes qui freinent, voire qui bloquent, la réalisation des projets » , en allégeant le « parcours du combattant » des porteurs de projets : la multiplicité des études, des consultations et enquêtes publiques.

e) La contribution de la commission de la Culture

La commission de la Culture insiste tout particulièrement sur les normes décidées par les fédérations et les ligues sportives.

Le débat auquel elle a procédé dans la perspective de sa contribution a cependant mis en avant d'autres sources de préoccupation telles que celle, déjà mentionnée, relative à l'encadrement des élèves lors des séances de piscine. Notre collègue Françoise CARTRON a jugé cette activité mise en péril par la récente publication d'un décret qui, en renforçant les exigences en la matière, lui semble devoir conduire à un nombre insuffisant d'adultes formés à cette fin. Pour sa part, M. Jean-Pierre LELEUX s'est inquiété des changements, quasiment chaque année, des normes applicables aux jeux d'enfants.

Pour sa part, M. Pierre MARTIN a apporté un témoignage soulignant que, au-delà des prescriptions de fond, c'est également la manière dont elles sont mises en oeuvre qui peut parfois être difficile à supporter pour une collectivité territoriale : le fait que des commissions de sécurité demandent la modification d'équipements installés trois ans auparavant, le fait qu'il ait pu être nécessaire de faire appel à un bureau de contrôle (avec les coûts que cela implique) pour obtenir un certificat de conformité aux normes d'une installation...

Conclusion sur les contributions des commissions :

Quatre commissions citent directement ou indirectement (via les problèmes que cela pose pour les SDIS) les normes relatives à l'accessibilité, tout en reconnaissant leur nécessité sur le fond.

Sont mentionnées par au moins trois commissions les normes concernant les SDIS et l'urbanisme.

L'environnement, le sport et les règles de sécurité constituent également un champ d'inquiétude, implicite ou exprès, pour les commissions.

Dans une contribution écrite personnelle accompagnant celle de la commission de la Culture, M. Jean-François VOGUET s'est inquiété de l'éventuelle mise en place d'une « règlementation low-cost », estimant notamment inconcevable de remettre en cause des normes de sécurité, d'hygiène ou de santé publique. Tel n'est pas, loin de là, l'objectif de votre Délégation qui partage le point de vue de notre collègue sur l'importance d'une règlementation en ces domaines (et en d'autres) ; ses observations, qui montrent la pertinence de certaines normes, mettent ainsi le doigt sur une troisième série de difficultés, qu'il convient à présent d'aborder.

C. LA DIFFICILE APPRÉCIATION DE LA PERTINENCE DE LA NORME

Desserrer l'étau normatif auquel sont confrontés les élus locaux suppose de faire la part des choses, tout particulièrement en ce qui concerne le « stock » de normes, entre :

- celles dont l'abrogation pure et simple est possible et souhaitable ;

- celles qui pourraient être assouplies ;

- celles à maintenir, soit parce qu'elles sont parfaitement justifiées sur le fond, soit parce que leur suppression entraînerait plus de problèmes qu'elle n'en résoudrait.

L'exercice, simple à énoncer dans son principe, se révèle « diabolique » dans sa mise en oeuvre.

1. Des critères d'appréciation identifiés en théorie

La pertinence d'une norme soulève d'abord, conformément à la maxime de Montesquieu, la question de son utilité. Celle-ci conditionne celle-là.

Néanmoins, si la pertinence suppose nécessairement l'utilité, la réciproque n'est pas forcément vraie : une fois constatée l'utilité de la norme, la bonne gouvernance implique de veiller à ce qu'elle n'entraîne pas de coûts disproportionnés par rapport à l'avantage attendu.

Bien entendu, le fardeau des normes sous lequel ploient tant d'élus locaux ne saurait être allégé pour de stricts motifs financiers : comme indiqué ci-dessus à propos des revalorisations indiciaire dans la fonction publique, ce n'est pas parce qu'une décision se révèle coûteuse pour les collectivités territoriales qu'elle ne doit pas être prise. De même qu'il est aberrant d'imposer une mesure sans se préoccuper en aucune manière de la charge qu'elle représentera pour ses destinataires, il serait inadmissible de décider d'interdire ou d'abroger des normes en considération de leurs seules conséquences financières. Un tel raisonnement conduirait par exemple à l'abrogation pure et simple des normes relatives à l'accessibilité sous le prétexte, évidemment irrecevable, que le coût qui en résultera pour les collectivités territoriales s'élèvera, selon les estimations de DEXIA, à 15 milliards d'euros.

Pour résumer, l'on peut dire que la portée financière des normes doit être prise en considération, mais non à titre principal. Elle peut se poser dans un second temps, une fois établie l'utilité de la norme, si bien que la pertinence de celle-ci s'apprécie au regard d'un double critère :

- d'une part, la norme est conforme au principe d'utilité : qu'elle interdise ou qu'elle oblige, elle doit permettre d'assurer un intérêt public qui, sans elle, ne le serait pas ou le serait insuffisamment ;

- d'autre part, la norme est conforme au principe de proportionnalité : l'avantage qui en est attendu ne doit pas générer de coûts disproportionnés. Il convient d'ailleurs de préciser que cette notion de « coûts » doit s'entendre au sens large (financiers ou autres, par exemple en termes de lourdeurs administratives, d'environnement, de difficultés techniques...).

2. Des critères difficiles à mettre en oeuvre
a) Des critères qui ouvrent nécessairement la porte à une certaine subjectivité

L'utilité et la proportionnalité sont des notions relatives, donc forcément empreintes d'une certaine subjectivité.

L'intervention du pouvoir normatif pourra, dans le même domaine, être jugée nécessaire par certains, superflue par d'autres, voire nuisible ou attentatoire à la liberté : on se souvient des discussions suscitées, en leur temps, par l'obligation du port de la ceinture de sécurité.

De même, l'utilité d'une norme interdisant de fumer dans les lieux publics est évidemment perçue différemment selon les personnes (fumeurs et non fumeurs), les époques (en fonction notamment des connaissances sur les conséquences du tabagisme) et les endroits (la lutte contre le tabagisme n'étant pas, loin de là, une priorité dans tous les pays du monde...). Il en va de même pour les coûts générés par cette mesure, et donc pour la proportionnalité.

L'appréciation de l'utilité et de l'opportunité reste d'ailleurs relative y compris sur les questions unanimement reconnues comme d'intérêt public :

- en matière de sécurité, objectif pourtant incontestable dans son principe, les avis sur la pertinence des normes diffèreront selon la manière doit être entendu le principe de précaution ;

- en matière d'accessibilité, les opinions pourront varier sur le fait d'obliger toutes les communes à élargir leurs trottoirs pour que deux fauteuils roulants puissent se croiser, sachant que la probabilité pour que cela se produise dans un très petit village est quasiment nulle.

b) Des critères qui peuvent s'appliquer à des réalités différentes et mouvantes

Il en va tout particulièrement ainsi pour le critère de proportionnalité :

- d'abord, toute norme ne génère pas forcément des coûts. Ainsi, en 2009, les ministères ont évalué à 28 millions d'euros les recettes potentielles générées par les projets de textes soumis à la CCEN. Au demeurant, les coûts peuvent être fort variables d'une collectivité à l'autre, ce qui renforcera le caractère relatif de l'appréciation de la proportionnalité ;

- ensuite, les coûts peuvent être plus ou moins répartis dans le temps : certaines normes ont des effets lourds à court terme mais n'impliquent ensuite aucun coût particulier (par exemple, l'obligation d'élargir les portes des bâtiments publiques à 90 cm pour le passage de fauteuils roulants) ; d'autres ont des effets lourds à court terme et génèrent en outre des frais récurrents plus ou moins importants (entretien d'un ascenseur...) ; d'autres encore, entraînent des charges qui se renouvellent chaque année (augmentation du point d'indice de la fonction publique,...) ou, au contraire, très occasionnellement (mesures de sécurité sur les chantiers...) ; certaines normes peuvent même entraîner des coûts à court terme et générer des bénéfices ou des économies à long terme (mises au normes pour les économies d'énergie...). Dans tous ces cas se pose la question de savoir sur quel élément, et donc à quel moment, doit s'apprécier la proportionnalité de la norme envisagée.

c) Des critères qui, même remplis, ne suffisent pas toujours à justifier l'abrogation d'une norme

Autant que le stock de normes, sinon plus, c'est leur volatilité qui pose problème aux collectivités territoriales. Il peut donc y avoir plus d'inconvénients à abroger ou à modifier une norme, même jugée non pertinente, qu'à la maintenir en l'état. Cette observation s'applique en particulier aux normes qui ont été mises en application : quelle serait l'utilité de l'abrogation d'une réglementation relative à la sécurité des ascenseurs ou à la taille de terrains de sport ou de buts, même disproportionnée, à partir du moment où toutes les collectivités auraient procédé à la mise aux normes ? L'abrogation pourrait même, dans certains cas, aggraver le problème si elle imposait une remise à l'état antérieur...

En définitive, c'est avant tout sur les cas les plus flagrants que peut, sans trop de difficultés, porter une entreprise de réduction du stock normatif. Pour le reste, le décideur désireux d'aider les élus locaux à retrouver une certaine respiration dans leur gestion se trouve rapidement confronté à une « zone grise », lui imposant des choix qui impliqueront nécessairement une certaine contestation. Ce n'est pas, en elle-même, la nécessité de ces arbitrages (qu'un décideur doit en tout état de cause assumer) qui pose problème ; c'est dans l'analyse, quasiment norme par norme, qu'elle impose. Face à un stock de 400 000 normes, il est donc indispensable de mettre en place une méthodologie permettant un passage au crible rapide et dont les résultats seront largement acceptés.

II. LA NÉCESSITÉ DE SOLUTIONS DIVERSES ET COMPLÉMENTAIRES

A. ENDIGUER LE FLUX NORMATIF PAR UNE RÉELLE RESPONSABILISATION DES PRESCRIPTEURS

1. Responsabiliser l'État

Que ce soit dans les contributions des commissions du Sénat ou dans celles des associations, l'accent est mis sur les conséquences du découplage entre l'autorité prescriptrice et le responsable du financement lorsque l'État intervient dans des domaines dont la compétence a été transférée aux collectivités. La rupture du principe prescripteur-payeur donne le sentiment d'une insuffisante responsabilisation du premier.

Les impératifs liés à la solidarité nationale et à l'égalité entre les citoyens, quel que soit leur lieu de résidence, font obstacle à ce que le payeur, en l'occurrence les collectivités, soit érigé en prescripteur.

C'est au prescripteur, et donc à l'État, de devenir -ou redevenir- payeur en prenant en charge financièrement les conséquences de ses normes.

La CCEN a à cet égard un rôle essentiel à jouer en se prononçant sur la juste évaluation et, le cas échéant, sur le niveau et les modalités de compensation proposées par l'État prescripteur.

Pour autant, elle n'intervient qu'à titre consultatif : même si l'avis de la CCEN est favorable dans près de 99 % des cas, l'État reste maître de la décision finale.

Une solution, sur laquelle s'est notamment interrogé le président du Comité des Finances locales lors de son audition devant la délégation aux collectivités territoriales, pourrait consister à soumettre l'adoption des normes de l'État à un avis conforme de la CCEN. Cependant, à supposer que cette solution soit opportune sur le fond, son orthodoxie au regard de la Constitution n'est pas absolument établie.

Aussi pourrait-on concevoir un arbitrage par le juge -administratif, en l'occurrence- à condition de lui donner un support lui permettant d'annuler, le cas échéant, une norme qui ne respecterait pas l'exigence d'une juste compensation de ses conséquences financières.

A cette fin, il pourrait être exigé une motivation spécifique de tout projet de norme ayant fait l'objet d'un avis défavorable de la CCEN (une motivation spécifique paraissant superflue lorsqu'il y a consensus sur la compensation). Cette motivation devrait contenir une évaluation sincère des conséquences financières de la norme et préciser les modalités d'une prise en charge équivalente par l'État.

Le juge pourrait donc annuler pour erreur de motivation les normes qui ne sont pas accompagnées d'une évaluation sincère ou qui donnent lieu à une compensation non équivalente (son examen bénéficierait de celui exercé en amont par la CCEN qui, par hypothèse, aurait conclu à la « non-sincérité » ou à la « non-équivalence »).

Proposition : Exiger, sous peine d'irrégularité, une compensation équivalente par l'État des conséquences pour les finances locales des normes qu'il édicte dans les domaines transférés aux collectivités territoriales.

Pour traduire cette proposition dans les faits, une solution pourrait consister en un fonds de soutien à l'application des normes pour aider financièrement les collectivités territoriales à mettre en oeuvre les prescriptions pesant sur elles. C'est ce que préconisent les sénateurs du groupe socialiste, apparentés et rattachés de la commission des Finances. Ceux-ci proposent que ce fonds soit destiné aux collectivités les plus pauvres. La suggestion mérite d'être envisagée (elle instaurerait de surcroît un dispositif venant, en pratique, renforcer la péréquation), mais risque d'être difficile à mettre en oeuvre (selon quels critères décidera-t-on que telle ou telle collectivité a ou n'a pas de difficultés à appliquer une norme) ; elle reviendrait par ailleurs à n'exiger de l'État qu'une compensation partielle des charges imposées globalement aux collectivités (ce qui serait néanmoins déjà un grand progrès...). Aussi est-il proposé une solution générale :

Proposition : Instaurer un fonds de compensation des conséquences financières des normes de l'État.

2. Responsabiliser les fédérations et, plus généralement, l'ensemble des structures normatives

Plusieurs contributions ont insisté sur les conséquences des prescriptions des fédérations sportives.

Un premier pas pourrait consister à soumettre expressément leurs propositions à l'avis de la CCEN, levant ainsi toute ambigüité sur la compétence de celle-ci en la matière. Cette piste pourrait d'ailleurs concerner toutes les structures investies d'un pouvoir normatif.

Proposition : Soumettre les prescriptions des fédérations sportives, et de tout autre organisme normatif, à un avis de la CCEN.

On est néanmoins en droit de se demander si le Gouvernement (dont le chef est, selon la Constitution, le détenteur de droit commun du pouvoir réglementaire) peut rester ainsi en dehors de l'exercice d'un pouvoir normatif qui, même encadré conformément à la proposition ci-dessus, ne ferait intervenir que l'organisme délégataire et, pour simple avis, la CCEN. La responsabilité de toute décision contraignante à portée générale doit, dans une démocratie, incomber clairement à des autorités politiques.

Aussi est-il souhaitable que tout projet de norme émanant d'une structure normative autre qu'une autorité politiquement responsable (Gouvernement, Parlement, élus locaux) soit subordonner à l'accord explicite du pouvoir exécutif (par exemple du ministère en charge de la matière concernée par le projet).

Cette piste mérite d'autant plus d'être explorée qu'elle permettra de « soulager » la CCEN des projets qui n'auront pas été avalisés par le Gouvernement : celle-ci n'interviendrait que comme « filet de sécurité » sur les prescriptions des organismes normatifs, en cas d'accord de l'Exécutif sur un projet, et non systématiquement.

Proposition : Soumettre, préalablement à leur transmission à la CCEN, les prescriptions des fédérations sportives, et de tout autre organisme normatif à un avis favorable du pouvoir exécutif.

B. REVENIR À L'ÉTAT-PARTENAIRE

1. Mettre en place, dans les préfectures, un « correspondant normes », interlocuteur clairement identifiable par les collectivités territoriales

La RGPP a modifié la perception de l'État par les collectivités territoriales. La suppression de services déconcentrés a privé les décideurs locaux d'interlocuteurs habituels et de guides dans le dédale des règlementations. A leurs yeux, l'État, qui agissait tantôt comme conseiller, tantôt comme contrôleur, n'incarne plus désormais que cette seconde fonction.

Dans un tel contexte, toute intervention dans un secteur soumis à une réglementation complexe peut se traduire par deux conséquences dommageables :

- l'application d'un « principe de précaution juridique » paralysant inutilement les initiatives locales d'intérêt public : dans le doute sur la parfaite orthodoxie de son projet au regard des normes existantes, le décideur local s'abstient de le mettre en oeuvre (voir l'exemple des crèches, cité par la commission des Affaires sociales) ;

- le recours à des bureaux d'études privés, dont le coût vient s'ajouter à ceux générés par la norme elle-même.

Pour remédier à cette situation, les préfectures pourraient mettre à la disposition des collectivités un « guichet », composé d'un nombre de juristes variable selon les départements

Ce « correspondant normes » aurait une double mission :

- répondre aux demandes des collectivités, en particulier des plus petites, sur la portée réelle des normes afin d'éviter une application trop rigide du « principe de précaution juridique ». Dans le doute, au lieu de renoncer d'emblée à son projet, le responsable local demanderait conseil à la préfecture. Cette procédure constituerait un pendant logique au contrôle de légalité (tous deux s'appliquent en cas de doute sur la légalité d'une initiative, mais celui-ci est mis en oeuvre a posteriori par l'État alors que la « consultation normes » serait mise en oeuvre a priori par la collectivité) ; elle faciliterait son exercice (le contrôle ayant déjà été effectué en amont de la décision), et le temps ainsi gagné par les personnels en charge du contrôle de légalité compenserait dans une large partie la charge de travail supplémentaire générée par la « consultation norme » ;

- plus généralement (et sans doute moins fréquemment), alerter les collectivités sur les assouplissements normatifs décidés par l'État (voir, par exemple, le souhait de la commission des Affaires sociales d'informer les mairies de l'impossibilité pour les PMI, décidée en 2010, de rendre les normes nationales plus contraignantes).

Bien entendu, comme l'a notamment souligné notre collègue Pierre JARLIER devant votre Délégation, le « correspondant normes » devrait avoir pour mission de faciliter la tâche des collectivités territoriales et ne pas donner lui-même des interprétations « intégristes » qui reviendraient à paralyser les initiatives locales : il devrait être un interlocuteur « du bons sens ».

Proposition : Créer, pour les collectivités territoriales, un « correspondant normes » au sein de chaque préfecture garant du « bon sens » dans leur interprétation.

2. Harmoniser les dates d'entrée en vigueur des normes pour assurer la meilleure information des collectivités

A l'instar des fameuses « hausses de l'été » (tarifs EDF, SNCF, SMIC, allocations chômage...), nombre de prescriptions intéressant directement les citoyens entrent en vigueur à date fixe et sont par conséquent attendues.

Sur ce modèle, le pli pourrait être pris, sauf circonstances exceptionnelles, de fixer l'entrée en vigueur des normes, quel que soit leur domaine, à des dates fixes (une ou deux dans l'année) ; le Premier ministre a d'ailleurs chargé le nouveau commissaire à la simplification de formuler des propositions pour parvenir, à terme, à deux dates.

La régularité permettrait aux prescripteurs, et en premier lieu à l'État-partenaire, de communiquer sur les échéances. Cette communication pourrait prendre deux dimensions complémentaires :

- une information sur le court terme (« ce qui va changer le... ») ;

- une information sur le long terme, sous la forme, par exemple, d'un tableau des échéances sur plusieurs années, mis à jour par l'État au fur et à mesure de l'adoption des normes. Accessible par Internet, ce tableau permettrait aux collectivités de se préparer le plus tôt possible aux échéances ; dans certaines hypothèses, cette information très en amont pourrait conduire à anticiper des difficultés d'application des normes (délais trop brefs, impossibilité pratique de mise en oeuvre dans certaines communes...) et ainsi permettre, le cas échéant, de « corriger le tir ».

Proposition : Fixer une ou deux dates « traditionnelles » de principe pour l'entrée en vigueur de toute nouvelle norme, sauf urgence avérée.

C. REVENIR À LA RAISON D'ÊTRE DE LA NORME : UN OUTIL ET NON UNE FIN EN SOI

La rigidité avec laquelle sont trop souvent appliquées les normes conduit à penser qu'elles sont devenues une fin en elles-mêmes. A l'instar du pont de Coluche, sur lequel les gens passeraient systématiquement même s'il n'y avait pas d'eau en-dessous, l'existence de la norme suffit à justifier sa nécessité et, partant, son application systématique. On en oublie sa raison d'être : le service d'un objectif (l'accessibilité, la sécurité, l'environnement, etc.)... et l'application de la norme reste exigée même lorsque, du fait des circonstances, son objectif n'est en aucune manière menacé et même s'il apparaît que cette application heurte de front un autre objectif tout à fait légitime... et qui fait lui-même souvent l'objet de normes. On peut ainsi en arriver à la situation ubuesque où les collectivités sont obligées de se soumettre à des prescriptions vidées de leur utilité par les normes édictées au service d'un autre objectif, auquel elles doivent aussi se soumettre !!!

Face à un tel constat, il est plus que temps de remettre l'église au milieu du village : toute norme, notamment législative, est énoncée dans un esprit qu'il ne faut jamais perdre de vue ; toute norme est énoncée au service d'objectifs qui peuvent être plus ou moins prégnants et plus ou moins menacés selon des circonstances que les parties prenantes sont bien mieux à mêmes d'apprécier dans leur réalité que les administrations parisiennes.

1. Préserver l'esprit des lois

L'efficacité des lois, et au bout du compte la crédibilité de la loi en général, ne peut que pâtir des applications qui, à l'évidence, en contredisent l'esprit et la logique.

Trois exemples peuvent en être cités, à la lumière des contributions des commissions.

a) Prendre en compte, dans certains secteurs, les contraintes particulières pesant sur les petites communes

La loi, dans un souci de réalisme, opère souvent des distinctions selon la taille des collectivités territoriales, en particulier des communes : en deçà d'un certain seuil de population, elles sont fréquemment soumises à un régime plus souple dans l'application des dispositions édictées.

Cette volonté, régulièrement affichée, peut entrer en contradiction avec des normes qui n'opèrent aucune distinction selon la taille des collectivités, alors même que le nombre d'habitants peut rendre la norme sans utilité pratique.

La commission des Finances cite ainsi l'exemple de l'obligation d'élargir les trottoirs afin d'assurer que deux fauteuils roulants puissent se croiser, alors qu'une telle hypothèse est proche de zéro dans les très petites communes.

Bien entendu, tous les domaines ne peuvent être concernés par cette recherche de modulation en fonction de la taille des collectivités : elle est, par exemple, inconcevable en matière de sécurité (on n'imagine pas que les règles relatives à l'hygiène alimentaire soient moindres pour les enfants des petites communes que pour ceux des autres collectivités).

Proposition : Examiner, tout particulièrement parmi les normes qui ne sont pas encore entrées en vigueur, la nécessité de les imposer à toutes les collectivités territoriales, quelle que soit l'importance de leur population.

b) Chasser les objectifs contradictoires

Un exemple de contradiction d'objectifs est donné à propos des SDIS par la commission des Lois et par celle des Affaires sociales : les SDIS, en tant qu'employeurs de pompiers, doivent recruter des personnels dans leur quasi-totalité en pleine possession de leurs moyens physiques... tout en état soumis à l'obligation d'employer 6 % de personnes handicapées. La commission des affaires sociales cite aussi l'exemple des assistantes maternelles, dont l'agrément est conditionné à leur état de santé physique.

En d'autres termes, les collectivités territoriales ou leurs établissements publics peuvent, pour certains métiers, être à la fois interdits de recruter des personnes handicapées et tenus à l'objectif d'emploi.

Proposition : Dresser l'inventaire des métiers territoriaux soumis à des conditions d'aptitude particulières ; ne pas décompter les personnels concernés dans les effectifs servant de référence à l'obligation d'emploi.

c) Mettre en place un dispositif encadré d'adaptation des normes aux circonstances locales

Lors de l'examen du présent rapport, notre collègue Pierre-Yves COLLOMBAT a émis l'idée, relayée par M. Pierre JARLIER, de prévoir des instances de l'État habiliter à moduler au niveau local des orientations définis par l'État au niveau national. Cette adaptation pourrait être le fait d'une commission (départementale ou régionale, selon les cas), qui prendrait en considération les particularités du terrain, en liaison avec les différentes parties prenantes (et notamment avec les élus) ; elle serait placée sous l'autorité du préfet, afin que l'adaptation au niveau local relève de l'État.

Proposition : Permettre à des instances placées sous la responsabilité des préfets d'adapter, au niveau local, des orientations définies par l'État au niveau national.

2. Substituer, dans toute la mesure du possible, l'approche non contraignante à l'approche normative
a) Privilégier la circulaire au décret

L'acteur local peut parfois avoir besoin de références claires pour savoir comment se conformer à une exigence légale. Il est par exemple difficile, pour un non expert, d'apprécier la portée concrète de l'obligation de rendre les bâtiments accessibles en totalité aux personnes à mobilité réduite. Le fait qu'un texte lui indique que cela suppose des portes d'une certaine dimension peut alors lui être effectivement utile.

Pour autant, ce texte, qui constitue une sorte de « mode d'emploi » de la législation, doit-il forcément prendre la forme d'un dispositif contraignant : dès lors qu'une porte de 88 cm est suffisamment large pour permettre le passage d'un fauteuil roulant, à quoi bon exiger son agrandissement au motif qu'un règlement exige 90 cm ? Cet ordre de grandeur a-t-il besoin d'être juridiquement contraignant et permettre ainsi d'éventuels contentieux alors que l'obligation posée par la loi est respectée ? Ne peut-il figurer, à titre indicatif, dans une circulaire ou dans un guide de bonnes pratiques ?

Le recours à un texte indicatif ne fait d'ailleurs aucunement obstacle à l'application de la loi dès lors que celle-ci est directement applicable (en l'espèce, quand bien même aucun document contraignant ne précisera la largeur des portes, celle-ci devrait en tout état de cause être suffisante pour permettre le passage d'un fauteuil roulant).

Proposition : Substituer, lorsqu'il s'agit de préciser la portée d'une exigence légale directement applicable, des dispositifs indicatifs à des dispositifs contraignants.

b) Favoriser l'approche contractuelle

L'idée a été avancée par notre collègue Charles GUENÉ, dans sa contribution adressée au président de la commission des Finances : « promouvoir davantage la contractualisation en lieu et place de la normalisation à tout va ».

Cette proposition de principe repose sur de sérieux arguments, qui conduisent à la qualifier également de proposition de bon sens :

- « le recours au procédé contractuel permet une souplesse dont est dépourvue la norme et encourage l'initiative » ;

- il permet de prendre en compte l'extrême variété des situations locales, alors que la norme se caractérise par une application strictement uniforme (sauf possibilité, éventuellement, d'exceptions, mais qui sont elles-mêmes énoncées en termes uniformes pour tout le territoire national) ;

- le procédé contractuel facilite l'adaptation à des variations conjoncturelles, à l'instar de celles que peut connaître le secteur de l'immobilier. « Dans un environnement économique éminemment mouvant, les acteurs préfèrent recourir à une négociation ciblée plutôt qu'à la mise en place d'une norme unilatérale qui sera obsolète sitôt instituée » .

Cette dernière observation souligne tout l'intérêt d'une démarche contractuelle, en lieu et place de l'approche normative, dans un domaine comme celui de l'urbanisme. M. GUENÉ suggère ainsi que les élus disposent de la possibilité de signer dans ce domaine « des contrats avec des acteurs privés, sous condition d'équité et de transparence, et bien entendu avec la sanction politique lors des élections suivantes » .

Dans le droit fil de cette proposition, sans doute pourrait-on identifier d'autres domaines auxquels appliquer une démarche contractuelle. Par exemple, les structures représentatives de personnes handicapées ne pourraient-elles pas être habilitées, par conventions conclues avec des collectivités territoriales, à assouplir le dispositif normatif lorsqu'il leur apparaît que, au regard des circonstances locales, celui-ci pose plus de problèmes qu'il n'en résout ?

Ainsi, lorsqu'il apparaît qu'aucune personne à mobilité réduite n'est appelée à pénétrer dans un local communal (crèche, salle de projection d'un cinéma,...), ne peut-on donner une chance au bon sens en permettant aux différentes parties prenantes, par une convention à durée déterminée (conduisant à un réexamen des circonstances particulières à l'issue d'une certaine période), de reporter des travaux d'accessibilité si coûteux que la mairie n'aurait, à défaut, d'autre choix que la fermeture pure et simple dudit local ?

Cette logique contractuelle pourrait également se révéler d'un grand intérêt pratique pour les prescriptions dans le domaine sportif : le simple fait de réunir autour d'une table les responsables locaux des fédérations et les élus permettrait à chacun de mieux comprendre les points de vue des autres et de prendre, en commun, la juste mesure des obligations à imposer aux collectivités. La contribution de la commission de la culture se réfère d'ailleurs à des conventions entre l'AMF et des autorités du sport français telles que la Fédération française de football ; on note d'ailleurs que, dans le cadre d'un protocole d'accord, l'AMF et Comité olympique et sportif français, conviennent expressément de l'utilité de « l'élaboration de conventions d'usage favorisant une utilisation optimale des installations sportives communales au bénéfice du plus grand nombre ainsi que (de) l'élaboration de conventions d'objectifs et de moyens ».

Bien entendu, il n'est pas question qu'une convention assouplisse sponte sua une norme sans y être habilitée expressément par celle-ci. La proposition qui suit ne se conçoit donc que dans les cas où le prescripteur juge utile, voire souhaitable, la possibilité d'autoriser des modulations en fonction des circonstances locales : il doit donc l'y autoriser expressément. A défaut d'une convention (soit parce que le prescripteur ne l'aura pas formellement autorisée, soit parce que les différentes parties prenantes n'en auront pas conclue), la norme générale s'appliquera dans son intégralité.

Proposition : Dresser l'inventaire des domaines dans lesquels la normalisation pourrait prendre, dans le respect de la loi et sur la base d'un texte, la forme d'accords entre les différentes parties prenantes.

D. ÉLARGIR LE CHAMP DES MISSIONS ET, PAR CONSÉQUENT, LES MOYENS DE LA CCEN

1. Élargir le domaine d'intervention de la CCEN sur le flux de normes
a) Consulter systématiquement la CCEN sur les projets de loi et d'amendement du Gouvernement concernant les collectivités territoriales

Cette recommandation fait écho à une observation formulée par la CCEN elle-même, dans son rapport d'activité pour l'année 2009.

En effet, le Gouvernement n'a jamais fait usage de la faculté qui lui est ouverte par le 5 ème alinéa de l'article L. 1211-4-2 du CGCT : « le Gouvernement peut consulter la CCEN sur tout projet de loi ou tout projet d'amendement du Gouvernement concernant les collectivités territoriales » .

Pourtant, presque un tiers des projets de texte réglementaire soumis à la CCEN en 2009 constituaient des mesures d'application d'un texte législatif. D'où la conclusion de la CCEN :

« L'État pourrait s'appuyer davantage sur les consultations de la CCEN afin d'évaluer au préalable les projets de loi intéressant les collectivités territoriales.

Un tel échange serait de nature à préparer le débat parlementaire et à favoriser l'appropriation par les élus locaux d'une réglementation qu'ils seront chargés de mettre en oeuvre ou de respecter. En outre, élargir de la sorte son champ de compétence consacrerait définitivement la CCEN comme l'une des instances majeures de régulation des relations entre l'État et les collectivités territoriales, satisfaisant ainsi aux attentes des élus locaux. ».

Votre Délégation approuve, dans son principe, cette recommandation ; elle partage tout particulièrement le souci de préparer au mieux le débat parlementaire ce qui la conduite à préconiser que les observations que pourrait faire la CCEN soient présentées et pris en compte dans les études d'impact devant accompagner les projets de loi.

Proposition : Consulter systématiquement, sauf impossibilité absolue, la CCEN sur les projets de loi et d'amendement du Gouvernement concernant les collectivités territoriales ; exiger, le cas échéant, que les études d'impact présentent et prennent en compte les observations de la CCEN dans les études d'impact des projets de loi.

b) Respecter l'obligation de consultation de la CCEN sur les projets de texte communautaire concernant les collectivités territoriales

La CCEN est légalement « chargée d'émettre un avis sur les propositions de textes communautaires ayant un impact technique et financier sur les collectivités territoriales et leurs établissements publics ». Cette consultation est obligatoire.

Pourtant, dans son rapport d'activité pour 2009, la CCEN constate : « après deux ans d'activité, ni le Gouvernement, ni le SGAE n'ont encore jamais saisi la CCEN de ce type de mesures, alors même que de nombreux textes réglementaires d'application de lois ou de transposition de directives communautaires lui sont régulièrement soumis. » .

Cet « oubli » est d'autant plus regrettable qu'elle met la CCEN devant le fait accompli lorsque, plus tard, celle-ci est appelée à se prononcer sur les textes d'application du droit communautaire.

Proposition : Consulter systématiquement la CCEN sur les projets de texte communautaire concernant les collectivités territoriales.

c) Permettre la consultation de la CCEN sur les initiatives parlementaires

Dans leur contribution, les sénateurs membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés de la commission des Finances proposent que la CCEN soit « saisie automatiquement pour avis, avant l'examen par le Parlement » de toute proposition de loi (et, semble-t-il, de tout amendement d'origine parlementaire) impactant financièrement les collectivités territoriales.

Une telle proposition peut sembler un peu trop contraignante, ne serait-ce que pour la CCEN elle-même : il n'est guère souhaitable d'alourdir une charge de travail déjà conséquente avec un examen « systématique » des propositions de loi (même limité à celles examinées par le Parlement) et, a fortiori, des amendements (puisque, statistiquement, il en est toujours, en nombre parfois important, qui ne sont pas adoptés par l'assemblée).

En revanche, il peut être opportun de prévoir, sous une forme ou sous une autre, une possibilité d'intervention de la CCEN lorsque l'initiative parlementaire acquiert une chance raisonnable de figurer dans la loi. La saisine de la CCEN pourrait donc être envisagée non pas avant l'examen par le Parlement, mais à partir du moment où une des deux assemblées aurait adopté la proposition ou l'amendement parlementaire : l'avis de la CCEN éclairerait alors l'autre assemblée (et le cas échéant la première, en cas de vote non conforme) ou la commission mixte paritaire.

Une question se poserait alors : cette saisine devrait-elle être obligatoire -comme le suggèrent les sénateurs socialistes- ou facultative ? Dans la mesure où les initiatives des parlementaires sont soumises à l'irrecevabilité financière de l'article 40 de la Constitution, le nombre de celles qui impacteraient les finances des collectivités territoriales devraient représenter une charge de travail « gérable », de nature à justifier une saisine obligatoire (une partie de ces initiatives aurait d'ailleurs un impact positif pour les collectivités, puisque la CCEN connaît aussi des normes qui réduisent les charges de celles-ci, si bien que son avis devrait alors ne pas donner lieu à de trop longs débats).

Proposition : Imposer la saisine de la CCEN sur toute proposition de loi ou amendement d'origine parlementaire adopté par une assemblée.

Il conviendrait d'articuler cette règle avec le recours à la procédure accélérée, dont elle pourrait limiter l'efficacité en cas d'urgence. La solution la plus simple serait, comme le proposent les sénateurs socialistes de la commission des Finances, de limiter le recours à la procédure accélérée à des circonstances vraiment exceptionnelles.

d) Associer la CCEN à l'élaboration de certaines normes techniques

La grande majorité des normes techniques et professionnelles de type AFNOR ou ISO demeure d'application volontaire (selon la CCEN, sur environ 30.000 normes françaises homologuées, moins de 400 sont obligatoires).

Or, comme on l'a vu (cf. I), ces normes officiellement facultatives sont de fait obligatoires pour les collectivités territoriales, tout particulièrement dans les domaines de la construction et de la sécurité.

C'est pourquoi il a notamment été suggéré de modifier l'article 6 du décret du 16 juin 2009 relatif à la Normalisation : celui-ci disposant que « l'Association française de normalisation assure la programmation des travaux de normalisation laquelle vise [...] à réaliser des études d'impact économique », il pourrait y être ajoutée l'obligation d'évaluation préalable de l'impact financier de la norme projetée sur les destinataires (État, collectivités, entreprises, particuliers). En cas d'impact financier sur les collectivités territoriales, la consultation de la CCEN deviendrait obligatoire, tout au moins pour les normes de construction et de sécurité.

Une telle suggestion a été réitérée par les sénateurs du groupe socialiste, apparentés et rattachés dans leur contribution adressée à la commission des Finances.

Proposition : Modifier le décret relatif à la normalisation afin que l'AFNOR soit tenue de faire procéder à une évaluation préalable de l'impact financier des normes envisagées ; imposer la consultation de la CCEN sur les mesures de normalisation ayant un impact sur les collectivités territoriales et, au minimum, sur celles envisagées en matière de construction et de sécurité.

2. Sur le stock de normes : engager, via la CCEN, une démarche pragmatique de toilettage des normes existantes
a) Soumettre sans délai à la CCEN les normes adoptées avant sa création et non encore entrées en vigueur

La CCEN vient seulement de souffler ses deux bougies. Compte tenu du rôle précieux qui est le sien dans l'examen des projets de norme, il serait souhaitable :

- de dresser sans tarder l'inventaire des normes adoptées avant sa mise en place mais qui, du fait d'une entrée en vigueur reportée, ne sont pas encore applicables ;

- de soumettre ces normes à l'examen de la CCEN pour lui permettre de se prononcer sur leur impact pour les collectivités.

Proposition : Soumettre sans délai à la CCEN les normes adoptées avant sa création et non encore entrées en vigueur.

b) Élargir la démarche de simplification au stock des normes

En novembre 2010, le Premier ministre a opportunément désigné un commissaire chargé de la simplification (M. Rémi BOUCHEZ, conseiller d'État), rattaché au Secrétariat général du Gouvernement. Sa mission, si elle concerne aussi bien les normes applicables aux collectivités que celles destinées aux entreprises, ne porte cependant « que » sur le flux : l'intéressé est en effet chargé de veiller à ce que l'impact des nouvelles normes soit correctement anticipé et évalué.

Les commissions permanentes du Sénat, en particulier celles des Lois et de l'Économie, ont mis l'accent sur la nécessité de simplifier le droit applicable dans plusieurs domaines, pour le rendre à la fois plus cohérent et plus lisible.

Cette démarche pourrait être conduite en s'inspirant de travaux de codification menés, avec succès, au cours des années 1990 par une commission présidée par le regretté Guy BRAIBANT, membre éminent du Conseil d'État. Cette codification, aujourd'hui achevée, a été effectuée « à droit constant ». Elle pourrait servir de modèle à une nouvelle étape dans la recherche de la simplification : après la simplification par rassemblement des normes au sein d'un même code, viendrait le temps de l'examen au fond de leur pertinence et de leur cohérence d'ensemble.

Une « commission de simplification » pourrait, comme feue la commission de codification, constituer des groupes de réflexion spécialisés, animés par un ou des rapporteurs (en pratique, du Conseil d'État). Cette commission de simplification pourrait être une structure ad hoc, mais le plus simple, pour éviter la création d'une instance nouvelle, serait d'habiliter la CCEN à effectuer ce travail.

Suivant les suggestions des commissions permanentes du Sénat, ses premiers chantiers seraient appelés à porter sur :

- le droit des sols (avec le droit de l'urbanisme comme « noyau dur ») ;

- le droit applicable outre-mer ;

- le droit de la construction ;

- le droit de l'environnement.

Proposition : Charger la CCEN, siégeant en commission de simplification, de l'« audit » de grands secteurs du droit au regard de la nécessité des normes, de leur cohérence et de leur lisibilité.

3. Renforcer les moyens de la CCEN

Le renforcement des moyens de la CCEN est le corollaire des propositions tendant à développer ses missions.

A côté d'un renfort en personnels, qui semble inévitable, les sénateurs du groupe socialiste, apparentés et rattachés membres de la commission ont opportunément soulevé la question de la possibilité, qu'ils souhaitent automatique, de produire un contre-rapport au sein de la CCEN. Lorsque cette possibilité serait mise en oeuvre, le contre-rapporteur pourrait « solliciter l'appui d'experts issus de l'encadrement des collectivités territoriales ou des associations représentatives des collectivités » .

Proposition : Renforcer les moyens en personnels de la CCEN ; généraliser la possibilité, pour la CCEN, de confier à un de ses membres un contre-rapport sur un projet de texte qui lui est soumis.

ANNEXES

ANNEXE 1 : PROPOSITIONS DU RAPPORT

1. Exiger, sous peine d'irrégularité, une compensation équivalente par l'État des conséquences pour les finances locales des normes qu'il édicte dans les domaines transférés aux collectivités territoriales.

2. Instaurer un fonds de compensation des conséquences financières des normes de l'État.

3. Soumettre les prescriptions des fédérations sportives, et de tout autre organisme normatif, à un avis de la CCEN.

4. Soumettre, préalablement à leur transmission à la CCEN, les prescriptions des fédérations sportives, et de tout autre organisme normatif à un avis favorable du pouvoir exécutif.

5. Créer, pour les collectivités territoriales, un « correspondant normes » au sein de chaque préfecture garant du « bon sens » dans leur interprétation.

6. Fixer une ou deux dates « traditionnelles » de principe pour l'entrée en vigueur de toute nouvelle norme, sauf urgence avérée.

7. Examiner, tout particulièrement parmi les normes qui ne sont pas encore entrées en vigueur, la nécessité de les imposer à toutes les collectivités territoriales, quelle que soit l'importance de leur population.

8. Dresser l'inventaire des métiers territoriaux soumis à des conditions d'aptitude particulières ; ne pas décompter les personnels concernés dans les effectifs servant de référence à l'obligation d'emploi.

9. Permettre à des instances placées sous la responsabilité des préfets d'adapter, au niveau local, des orientations définies par l'État au niveau national.

10. Substituer, lorsqu'il s'agit de préciser la portée d'une exigence légale directement applicable, des dispositifs indicatifs à des dispositifs contraignants.

11. Dresser l'inventaire des domaines dans lesquels la normalisation pourrait prendre, dans le respect de la loi et sur la base d'un texte, la forme d'accords entre les différentes parties prenantes.

12. Consulter systématiquement, sauf impossibilité absolue, la CCEN sur les projets de loi et d'amendement du Gouvernement concernant les collectivités territoriales ; exiger, le cas échéant, que les études d'impact présentent et prennent en compte les observations de la CCEN.

13. Consulter systématiquement la CCEN sur les projets de texte communautaire concernant les collectivités territoriales.

14. Imposer la saisine de la CCEN sur toute proposition de loi ou amendement d'origine parlementaire adopté par une assemblée.

15. Modifier le décret relatif à la normalisation afin que l'AFNOR soit tenue de faire procéder à une évaluation préalable de l'impact financier des normes envisagées ; imposer la consultation de la CCEN sur les mesures de normalisation ayant un impact sur les collectivités territoriales et, au minimum, sur celles envisagées en matière de construction et de sécurité.

16. Soumettre sans délai à la CCEN les normes adoptées avant sa création et non encore entrées en vigueur.

17. Charger la CCEN, siégeant en commission de simplification, de l'« audit » de grands secteurs du droit au regard de la nécessité des normes, de leur cohérence et de leur lisibilité.

18. Renforcer les moyens en personnels de la CCEN ; généraliser la possibilité, pour la CCEN, de confier à un de ses membres un contre-rapport sur un projet de texte qui lui est soumis.

ANNEXE 2 : EXAMEN DU RAPPORT PAR LA DÉLÉGATION, LE 8 FÉVRIER 2011

Claude Belot, rapporteur. - Comme vous le savez, le Président de la République a lancé, à la fin de l'année dernière, le chantier de l'allègement des normes qui pèsent sur les collectivités territoriales.

Il était tout à fait logique que le Sénat y participe. Le Président Larcher a souhaité que notre délégation soit en quelque sorte la cheville ouvrière de cette réflexion, en étroite concertation avec les commissions permanentes (hors, bien sûr, la commission des Affaires étrangères) ; nous en avons rencontré les présidents et chacune m'a adressé sa contribution dont, vous le verrez, j'ai toujours tenu grand compte.

Vous savez aussi que, parallèlement, le Président de la République a nommé notre collègue Eric Doligé, parlementaire en mission sur ce sujet ; ses conclusions sont attendues pour la fin du mois de mars. J'ai bien entendu travaillé en relation avec lui.

Les associations d'élus ont aussi été sollicitées sur un sujet que chacun s'accorde à reconnaître comme fondamental.

On évalue à 400 000 le nombre de normes applicables aux collectivités territoriales. Le seul code général des collectivités territoriales fait 3 500 pages. Il ne représente pourtant qu'une toute petite partie des textes que sont censés connaître et faire appliquer les élus locaux (code électoral, code de l'urbanisme, code de la construction et de l'habitation, code de l'environnement, code de la fonction publique...).

Le hasard faisant mal les choses, il se trouve que j'ai reçu, hier, deux courriers symptomatiques de la situation à laquelle nous sommes parvenus. Le premier pour m'informer que, à la suite de nouvelles normes de la fédération de basket, les installations de la région Poitou-Charentes sont à refaire et que les maires sont priés de faire appliquer ces exigences. L'autre courrier, relatif à la continuité écologique des cours d'eau, me demandant de créer des rivières de contournement pour assurer le passage des poissons et allant jusqu'à préconiser l'arasement des ouvrages existants ; en clair, on me demande de supprimer les aménagements de rivières, des moulins multiséculaires... pour faciliter le passage des poissons ! Quand on lit des choses comme ça, on se dit que les élus sont parfois confrontés à des interlocuteurs bien loin des réalités.

Pour vous donner une idée du coût qui pèse sur les collectivités, sachez que les seules normes du pouvoir exécutif adoptées en 2009 et 2010 ont représenté respectivement 580 et 577 millions d'euros...près de 1,2 milliard en deux ans, pour les seules normes de l'Etat.

Il faut y ajouter les coûts de toutes les autres normes : lois, textes communautaires, règlements des fédérations sportives, normes AFNOR (facultatives en droit, mais quasi obligatoires en fait)... et parfois des normes venant des collectivités territoriales elles-mêmes, puisque certaines administrations locales ont tendance à subordonner l'octroi de subventions au respect de prescriptions qui, au final, finissent par représenter des dépenses absorbant peu ou prou l'enveloppe accordée.

A côté de leurs coûts purement financiers, l'inflation des normes porte gravement atteinte à la sécurité juridique : les règles changent, se superposent, deviennent incompréhensibles, mais les élus sont censés toutes les connaître sous peine d'être poursuivis pénalement, ce qui, on le sait, arrive.

Le Gouvernement a conscience du problème puisqu'il a décidé, en juillet dernier, un moratoire sur les normes. Mais ce moratoire n'est que partiel : il ne concerne notamment ni la mise en oeuvre du droit communautaire ni l'application des lois, sans parler des cas où, par exception, l'administration juge nécessaire de contourner ce moratoire. En outre, celui-ci ne répond pas à la question du stock de normes.

Endiguer le flux de normes, et a fortiori réduire le stock, se heurte à au moins trois séries d'obstacles.

La première résulte de l'atomisation des prescripteurs.

La deuxième est liée à la multiplicité des secteurs concernés par les normes. Dans les contributions des commissions, certains reviennent cependant régulièrement, ce qui nous permet d'établir une sorte de « hit-parade » : les normes relatives à l'accessibilité, aux SDIS, à l'urbanisme.

L'exercice est complexe, car s'attaquer au stock suppose un réexamen complet de l'existant, mais il est indispensable d'agir, et d'agir vite.

Depuis un peu plus de deux ans, une commission consultative d'évaluation des normes, la CCEN, présidée par Alain Lambert, examine les conséquences pour les collectivités territoriales des projets de normes. Mais elle n'a qu'un pouvoir consultatif et ses avis ne sont pas forcément suivis par le Gouvernement. De plus, là aussi, le stock n'est pas concerné.

Les premières propositions que je vous fais consistent à responsabiliser financièrement l'Etat. Comme l'Etat n'assume pas les conséquences financières de ses prescriptions, il a tendance à être extrêmement exigeant, dans le contenu des mesures qu'il édicte et dans leur application. Beaucoup de fonctionnaires n'ont d'ailleurs plus que ça comme travail. D'où mes deux propositions :

- exiger, sous peine d'irrégularité, une compensation équivalente par l'Etat des conséquences pour les finances locales des normes qu'il édicte dans les domaines transférés aux collectivités territoriales ;

- instaurer un fonds de compensation des conséquences financières des normes de l'Etat.

M. Pierre-Yves Collombat . - N'est-ce pas un voeu pieu ?

M. Claude Belot , rapporteur. - Peut-être est-ce beaucoup demander, mais je suis convaincu qu'il le faut pour avoir une petite chance d'être entendu. C'est tout de même 1,2 milliard € en deux ans ! On peut mettre 50 %, on peut ne pas le mettre. La proposition n° 2 est dans la même logique.

La proposition n° 3 consiste à soumettre les prescriptions des fédérations sportives, et de tout autre organisme normatif, à la commission consultative d'évaluation des normes. La proposition n° 4 exige que ces prescriptions recueillent un avis favorable de l'exécutif qui ne doit pas être dessaisi du pouvoir réglementaire. Ce sont des propositions qui concernent par conséquent les nouvelles normes, et non le stock.

Mme Marie-Thérèse Bruguière . - Il peut y avoir un effet double avec la commission d'accessibilité.

M. Claude Belot , rapporteur. - La commission d'accessibilité est une commission locale qui applique la loi localement dans le cadre d'un débat, alors que la CCEN est au niveau national.

Mme Marie-Thérèse Bruguière . - Dans le cadre de la communauté de communes, nous avons cette commission et nous avons même créé un poste en recrutant une jeune femme qui passe dans toutes les communes en indiquant ce qu'il est nécessaire de modifier en fonction des normes. Le bilan est d'un coût financier de 150 000 €. Ainsi par exemple, dans ma commune, le tambour de l'église a dû être enlevé. Conséquence, il fait froid dans l'église. On doit donc mettre le chauffage un peu plus fort et cela nous coûte plus cher.

M. Claude Belot , rapporteur. - C'est vous-même qui avez procédé à ce recrutement.

Mme Marie-Thérèse Bruguière . - Mais c'est pour répondre à la loi que nous avons créé ce poste dans notre intercommunalité, car nos petites communes ne peuvent seules disposer d'un agent allant vérifier partout ce qu'il en est du respect de l'application des normes.

M. Claude Belot , rapporteur. - La proposition n° 5 consiste à créer, pour les collectivités territoriales, un « correspondant normes », qui serait en quelque sorte leur conseiller, dans chaque préfecture.

M. Pierre Jarlier . - Sur le correspondant « normes », l'idée serait d'avoir un interlocuteur qui pourrait conseiller les collectivités pour éviter d'aller au-delà de ce qu'exigent les textes. Or c'est exactement l'inverse qui se produit : non seulement on applique les normes, bien sûr, mais en plus certains fonctionnaires font montre d'un zèle qui conduit à les appliquer au-delà même de ce qu'elles exigent. Par exemple, en matière de réhabilitation de logements, si vous mettez un ascenseur pour faciliter l'accès à un logement, du coup on vous impose la mise aux normes « handicapés » pour tous les logements à l'intérieur du bâtiment. La situation devient impossible et les investisseurs reculent. Il est donc nécessaire qu'une personne au sein d'une préfecture puisse avoir à un moment donné un rôle de pondérateur plutôt que d'accélérateur de normes.

M. Claude Belot , rapporteur. - Je propose donc de préciser que le correspondant « normes » doit en quelque sorte être le garant du bon sens...

M. Pierre Jarlier . - ...et surtout éviter les interprétations abusives afin de trouver les solutions optimisées au regard des contraintes financières qui existent.

M. Claude Belot , rapporteur. - Il faut définir le correspond normes en précisant bien qu'il est là pour éviter le n'importe quoi.

Mme Marie-Thérèse Bruguière . - Il faut du bon sens.

M. Claude Belot , rapporteur. - C'est avec prudence que je vous soumets la proposition n° 6, consistant à établir des fiches thématiques à l'égard des collectivités. Qu'est-ce que vous en pensez ?

M. Antoine Lefèvre . - Toutes les collectivités concernées seront dûment informées des normes. Néanmoins, il ne faudrait pas que les fiches thématiques aboutissent à renforcer la portée des normes.

M. Claude Belot , rapporteur. - Finalement, je ne suis pas convaincu de la nécessité de ces fiches thématiques.

Je crois aussi que nous devons faire preuve de la même prudence à l'égard de la proposition n° 7, qui vise à consacrer expressément en droit administratif une sorte d'appréciation de l'opportunité des poursuites, à l'image de ce qui existe dans d'autres domaines du droit.

J'en viens donc à ma proposition n° 8 : fixer une ou deux dates « traditionnelles » de principe pour l'entrée en vigueur de toute nouvelle norme, sauf urgence avérée.

Mme Marie-Thérèse Bruguière . - Je voudrais appeler votre attention sur un point. Vous avez des restaurants à Paris où vous devez descendre des escaliers. Ce sont des trous à rats. S'il y avait un jour un incendie, ce serait dramatique. Chez nous, on a des établissements avec des grandes portes aérées anti-panique et, malgré tout, on a des commissions de sécurité qui passent et font des difficultés. Dans les communes rurales, les contraintes sont donc plus fortes.

M. Pierre Jarlier . - Sur ce sujet, il y a en effet un vrai problème. En réalité on constate qu'en milieu rural il y a des règles extrêmement strictes à respecter, avec des contraintes énormes pour les propriétaires et les locataires. Or, en milieu urbain, en particulier à Paris, peut-être y-a-t-il un pourcentage de contrôleurs inférieur au regard de la population mais la loi n'est pas appliquée de la même façon. Cela pose un certain nombre de problèmes. En effet, quand nos restaurateurs viennent à Paris et voient dans quel état sont les cuisines, les accès et les normes « sécurité », « handicapé », alors qu'ils sont harcelés par les différents inspecteurs en tous genres qui viennent chez eux régulièrement en province, entre nous, ils s'interrogent vraiment. Il y a donc un vrai sujet. Il faudrait que tout cela soit réparti judicieusement sur tout le territoire. Finalement, ce ne sont pas toujours ceux qui ont le plus de moyens pour mettre aux normes à qui on demande le plus.

M. Claude Belot , rapporteur. - Oui, les zones moins densément peuplées sont traitées avec beaucoup de zèle pour l'application des normes.

La proposition suivante, justement, envisage une certaine modulation en fonction de la population : examiner, tout particulièrement parmi les normes qui ne sont pas encore entrées en vigueur, la nécessité de les imposer à toutes les collectivités territoriales, quelle que soit l'importance de leur population. Faut-il aller jusque là ? Est-ce juridiquement orthodoxe ?

M. Antoine Lefèvre . - La loi sur l'accessibilité, par exemple, devra s'appliquer en 2015 dans toutes les communes. Si on avait voulu faire une distinction, c'est au moment de l'adoption de la loi qu'il aurait fallu le faire et placer le curseur de population. Mais aujourd'hui, cette recommandation est, à mon sens, illégale.

M. Pierre-Yves Collombat . - On est en pleine contradiction car une norme par définition a vocation à s'appliquer universellement pour éviter justement de trop grandes disparités. Or, la seule alternative à cela serait la création d'une commission au niveau préfectoral qui permettrait de procéder à des adaptations en fonction des circonstances locales. Prenons l'exemple d'une mairie qui est à un étage supérieur : le but est d'assurer que tout le monde puisse accéder au service ; si une personne ne peut pas monter, mais que les employés descendent pour qu'elle ait finalement entièrement accès au service, l'objectif est atteint.

Donc, soit l'on reste sur l'idée de norme à application égale et universelle, soit on admet qu'il y ait une instance qui puisse moduler. Peut-être est-il possible de distinguer les obligations de sécurité et celles qui peuvent être adaptées, comme les facilités d'intégration etc. Dans un premier temps, une classification des normes pourrait être utile entre, d'une part, les normes impératives et, d'autre part, les normes soumises à une expertise et à des modalités d'adaptation par une instance à définir.

Pourrait-on envisager la création d'une commission représentative des élus qui pourrait examiner ces types de recours ?

M. Pierre Jarlier . - Peut-on appliquer les mêmes contraintes à des situations très différentes ? Ainsi, en ce qui concerne les monuments historiques, des contraintes de sécurité, parfois en dehors de tout lien avec la réalité du risque, vont défigurer des monuments. Par exemple, un musée devrait être fermé car les planchers ne sont pas coupe-feu ! On est donc dans une absurdité totale. En matière d'accessibilité, il en est de même. Tout cela doit aussi être mesuré en fonction de l'intérêt historique à conserver. A force de trop lui demander, le maître d'ouvrage ne fait rien. Donc l'idée qu'à un moment une instance proche du terrain puisse examiner des modalités d'applicabilité réalistes serait une initiative intéressante.

M. Claude Belot , rapporteur. - Tout le monde a le sentiment qu'il faut appliquer en mettant les choses frappées au coin du bon sens. On a cependant des possibilités de recours : moi-même, j'ai eu un problème avec un jeune capitaine de sécurité et un sous-préfet un peu trop zélés qui, au nom de leur interprétation des normes, menaçaient de me faire fermer une maison de retraite. J'en ai parlé en plus haut lieu, au niveau de l'officier supérieur, et nous avons trouvé une solution en procédant à des aménagements dans la maison de retraite, mais sans aller jusqu'à la fermeture.

Proposition n° 10 : dresser l'inventaire des métiers territoriaux soumis à des conditions d'aptitude particulières ; ne pas décompter les personnels concernés dans les effectifs servant de référence à l'obligation d'emploi. Là encore, c'est une mesure de bon sens : il s'agit, par exemple, de ne pas obliger un SDIS à recruter des pompiers qui, du fait d'un handicap, ne sont pas physiquement capables d'aller au feu.

Proposition suivante : substituer, lorsqu'il s'agit de préciser la portée d'une exigence légale directement applicable, des dispositifs indicatifs à des dispositifs contraignants.

M. Pierre Jarlier . - Dans le cadre du débat d'orientation sur la loi de modernisation agricole, la question des cantines scolaires a été évoquée. Relayant une demande de l'Association des maires de France, les sénateurs ont souhaité faire disparaître une proposition tendant à normer les profils des repas servis dans les cantines scolaires, en fonction d'un décret à paraître. Cependant, il a été impossible de supprimer ce dispositif. Lorsque le contenu du projet de décret a été connu, il s'est avéré que celui-ci visait à peser, au gramme près, les portions servies aux enfants déjeunant dans les cantines scolaires. Autrement dit, selon les dispositions de ce texte, seule l'entreprise Sodexho pourrait continuer à proposer des repas aux cantines scolaires françaises, alors que d'autres entreprises familiales fonctionnent très bien.

M. Claude Belot , rapporteur. - La proposition suivante consiste à dresser l'inventaire des domaines dans lesquels la normalisation pourrait prendre, dans le respect de la loi et sur la base d'un texte, la forme d'accords entre les différentes parties prenantes.

J'en viens maintenant à un ensemble de propositions relatives à la CCEN.

La première tend à la consulter systématiquement, sauf impossibilité absolue, sur les projets de loi et d'amendement du Gouvernement concernant les collectivités territoriales .

M. Pierre Jarlier . - C'est une proposition qu'il faut lier à l'obligation d'accompagner un projet d'une étude d'impact avant sa présentation au Parlement.

M. Claude Belot , rapporteur. - Absolument. J'insiste sur l'utilité de la CCEN et de l'élargissement de ses pouvoirs car le simple fait, pour des administrations, de savoir qu'elles vont devoir s'expliquer devant elle sur les normes qu'elles envisagent de prendre les conduit à tourner davantage leur plume dans l'encrier.

Les propositions suivantes s'inscrivent, elles aussi, dans cette idée d'élargir le champ des interventions de la CCEN :

- consulter systématiquement la CCEN sur les projets de texte communautaire concernant les collectivités territoriales,

- imposer la saisine de la CCEN sur toute proposition de loi ou amendement d'origine parlementaire adopté par une assemblée ;

- modifier le décret relatif à la normalisation afin que l'AFNOR soit tenue de faire procéder à une évaluation préalable de l'impact financier des normes envisagées ; imposer la consultation de la CCEN sur les mesures de normalisation ayant un impact sur les collectivités territoriales et, au minimum, sur celles envisagées en matière de construction et de sécurité ;

- soumettre sans délai à la CCEN les normes adoptées avant sa création et non encore entrées en vigueur ;

- charger la CCEN, siégeant en commission de simplification, de l'« audit » de grands secteurs du droit au regard de la nécessité des normes, de leur cohérence et de leur lisibilité. La CCEN, avec cette proposition, deviendrait compétente pour étudier le stock de normes.

La dernière proposition tire les conséquences de celles qui précèdent en appelant à un renforcement des moyens de la CCEN.

M. Pierre Jarlier . - Je voudrais revenir sur l'utilité de mettre en place une instance, au plus près des territoires, soit au niveau régional, soit au niveau départemental, qui puisse analyser les possibilités d'adaptation des textes réglementaires en liaison avec les personnes concernées. Ce que déciderait cette commission serait opposable, notamment devant des organismes comme les assurances.

Bien sûr, il serait important de bien définir le rôle ainsi que la portée des décisions d'une telle commission. Ainsi délimitée dans son action, cette instance permettrait de régler des problèmes particuliers dans chaque département, liés à des configurations spéciales, par exemple dans le domaine des monuments historiques.

M. Claude Belot , rapporteur. - C'est une piste intéressante.

M. Pierre Jarlier . - En effet, il est nécessaire d'ouvrir la voie à la dérogation dans des cas bien précis, par l'intermédiaire d'un organisme qui soit irréprochable. D'ailleurs, ces commissions pourraient être pilotées par l'Etat.

M. Claude Belot , rapporteur. - Je retiens l'idée et vous propose d'en faire une recommandation supplémentaire qui, en substance, permettrait à une instance locale, régionale ou départementale, d'adapter au niveau local des orientations définies par l'Etat au niveau national.

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