C. ENRACINER L'ÉCOLE DANS LES TERRITOIRES, PRIVILÉGIER L'INTELLIGENCE TERRITORIALE

1. Reconnaître l'indispensable contribution des collectivités territoriales
a) L'inévitable extension du champ d'intervention des collectivités territoriales en matière éducative
(1) Un investissement dans le champ éducatif permis par la clause de compétence générale

Aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'éducation, « l'éducation est un service public national, dont l'organisation et le fonctionnement sont assurés par l'État, sous réserve des compétences attribuées par le présent code aux collectivités territoriales pour les associer au développement de ce service public . »

Les lois de décentralisation ont ainsi conféré à chaque échelon de collectivité un pan obligatoire d'action en termes d'éducation. Lors de l'acte I de la décentralisation en 1983, la construction l'entretien et le fonctionnement des locaux ont été totalement transféré aux collectivités territoriales, en particulier aux départements (le collège) et aux régions (le lycée), les communes ayant déjà la responsabilité matérielle des écoles. A cet aspect désormais bien connu, se sont ajoutés les transferts réalisés par l'acte II de la décentralisation en 2004 : décentralisation de la gestion des personnels techniciens ouvriers et de service (TOS) aux conseils généraux et régionaux, sectorisation des collèges (départements) et élaboration de la carte des formations professionnelles (région et État).

Toutefois, les compétences éducatives des collectivités territoriales ne se résument pas à leur seul champ de compétences obligatoires. Depuis fort longtemps, les collectivités territoriales ont investi le terrain des actions éducatives facultatives, jugées essentielles : prêts d'ordinateurs, double jeu de livres pour alléger le poids des cartables, financement d'actions sportives ou culturelles de vacances, et, plus récemment, mise en place de dispositifs en faveur des décrocheurs scolaires ou renforcement du lien entre école et parents...

Cet aspect a été souligné à maintes reprises par les personnes rencontrées par votre mission.

Lors de la table ronde du 5 avril 2011 consacrée aux élus, M. Yves Fournel, adjoint au maire de Lyon et vice-président de la commission éducation de l'Association des maires des grandes villes de France (AMGVF) a présenté ce phénomène : « Les grandes villes de France développent des projets éducatifs locaux depuis plus de quinze ans et leur intervention sur l'ensemble des temps éducatifs de l'enfant, y compris le temps scolaire, se renforce. Leur intervention a pris, lorsqu'elle a commencé, la forme d'un aménagement des temps de l'enfant : classes à projet artistique et culturel, conservatoires d'éducation musicale, éducation physique et sportive, apprentissage de la natation, classes découverte. Il faut également noter que quinze villes exercent pour l'État la compétence de santé scolaire (...) En conséquence, la plupart de nos villes sont engagées au-delà de leurs compétences, parfois pour des budgets importants . Elles ne sont pas seulement des guichets de financement ; elles constituent également des points de convergence de l'ensemble des acteurs. »

M. Mathieu Hanotin, vice-président du conseil général de Seine-Saint-Denis, en charge des collèges et des questions de l'Éducation nationale, vice-président de la commission Éducation et Jeunesse de l'Assemblée des départements de France (ADF), donne un exemple concret de l'implication des collectivités territoriales : « La nouvelle politique d'accueil des élèves exclus que nous menons devrait incarner ce partenariat. Cette politique ne relève pas de nos compétences, mais nous la mettons en oeuvre car l'exclusion des élèves est un problème important en Seine-Saint-Denis - entre 800 et 1 000 élèves sont exclus de leur établissement chaque année, et entre 500 à 600 mesures d'exclusion temporaire sont prononcées chaque jour. »

De même, lors de son déplacement à Scionzier, la mission a pu constater l'importance des interventions éducatives pouvant être engagées par une collectivité, notamment en lien avec la politique de la ville. Elle a également pu vérifier l'implication du conseil général de la Haute-Savoie, qui a développé une politique éducative départementale volontariste allant au-delà de ses compétences réglementaires. La procédure du « dossier SIEL » (soutien aux initiatives éducatives locales des collèges) permet ainsi de financer de nombreux projets ayant trait à l'éducation au développement durable, au travail de la mémoire, à la santé, à la citoyenneté, etc. Pour l'année scolaire 2008-2009, plus d'un million d'euros a été engagé, soit près de 36 euros par collégien. A titre de comparaison, les crédits pédagogiques versés par l'État à l'ensemble des collèges s'élèvent à 52 millions d'euros en 2011, soit 17 euros par élève, deux fois moins que ce que consacre le conseil général de la Haute-Savoie.

Ce souci de structurer une politique éducative départementale efficace avait également marqué la mission lors de son déplacement dans la Somme, où le conseil général s'investit actuellement dans une structuration ambitieuse de sa politique éducative avec une forte dimension transversale et qualitative.

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