c) Une contrainte exogène dont le caractère vertueux s'épuise

A maints égards, la mission « Enseignement scolaire » a pu apparaître comme l'instrument central d'une politique nullement corrélée à une stratégie éducative mais à un objectif d'assainissement des finances publiques . Les différentes déclarations des plus hauts responsables politiques, que ce soit le Président de la République, les différents ministres du budget et des comptes publics ou les ministres de l'éducation nationale, soulignent le caractère exogène à l'Éducation nationale de la politique de non remplacement.

Mais pour reprendre l'expression de M. Claude Thélot, il existe « une certaine fécondité de la contrainte ». A ce titre, la politique du non remplacement a certainement permis, dans ses premières années d'application, de procéder à un certain nombre d'ajustements nécessaires dans l'Éducation nationale , et d' amener cette institution à être davantage transparente et soucieuse de l'emploi de ses ressources humaines. Le rapport précité de la mission d'enquête du Sénat sur la gestion des personnels en 1999, puis le rapport de la Cour des comptes en 2005 sur les personnels enseignants ont souligné les défaillances du ministère, notamment en matière de décompte des personnels.

Par ailleurs, cette politique a certainement fait prendre conscience que l'augmentation continue des moyens de l'Éducation nationale au cours des deux dernières décennies n'avait pas empêché la dégradation des résultats scolaires et qu'il était nécessaire d'envisager une politique plus qualitative. Le diagnostic posé par le conseil de modernisation des politiques publiques dans son rapport de juin 2008 indiquait : « alors même que le budget de l'éducation nationale a fortement progressé depuis quinze ans, des études récentes, nationales ou internationales, ont mis en lumière la dégradation des performances du système éducatif français » ; « continue depuis 20 ans, l'augmentation des moyens et des horaires n'a pas été une réponse adaptée ».

Néanmoins, le caractère vertueux de cette politique de non remplacement tend aujourd'hui à disparaître car, selon votre mission, les décisions de suppression de postes qui la traduisent ne sont pas suffisamment corrélées aux politiques éducatives. L'examen de la ventilation des suppressions de postes donne à penser qu'une certaine prime à la facilité existe : votre mission forme ici notamment l'hypothèse que les fermetures de classes dans l'enseignement primaire, aujourd'hui fortement contestées, permettent de répondre plus rapidement à la contrainte que la mise en place de l'annualisation du temps de travail des enseignants ou une remise en cause de la carte des options au lycée.

D'une manière générale, la mission regrette que la politique de non remplacement n'ait pas conduit, jusqu'ici, à engager des réformes structurelles. L'exogénéité de la contrainte, en ne rendant pas obligatoire ces dernières, a facilité l'apparition des points de tension et le sentiment « d'être à l'os » selon l'expression d'un acteur du terrain.

Il serait donc pertinent que l'application future de la règle du non remplacement prenne davantage en compte les nécessaires efforts structurels afin d'engager une politique éclairée de différenciation des moyens au service de l'égalité des chances.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page