b) La recherche, gage de crédibilité et de transparence

La recherche en matière d'énergie nucléaire offre une dynamique importante, lui permettant de toujours se situer en pointe des technologies pour la production d'électricité, et lui apportant une ouverture différente sur la société civile, par les questions qu'elle oblige à se poser, tant d'un point de vue économique que sociétal.

Ø Un exemple : la dimension temporelle des déchets nucléaires

La question de la gestion des déchets nucléaires, notamment ceux à vie longue, étudiée à l'Office dès 1989, a été à l'origine de la loi du 30 décembre 1991. Elle pose des questions de société tout à fondamentales, notamment au regard de la durée.

Le choix d'un site de stockage suivra le vote, en 2015, d'une nouvelle loi sur la réversibilité du stockage. La question du stockage en couche géologique profonde, incluant la notion de réversibilité 44 ( * ) , écarte les affirmations par trop définitives de certains milieux scientifiques ou économiques et laisse ouverte la porte de l'évolution de la recherche et des avancées scientifiques qui est le propre de notre culture humaniste. Cette approche ouvre le champ des possibles et ne préjuge en rien des progrès de la science à un, voire plusieurs siècles devant nous.

La question des déchets radioactifs ayant été très peu abordée dans la première partie de notre mission, elle sera approfondie dans la deuxième.

Ø L'énergie nucléaire : une technologie de pointe

L'énergie nucléaire s'appuie sur un ensemble technologique complexe et exigeant.

• Complexe par la diversité des corps de métiers, la transversalité des recherches sur lesquelles elle s'appuie

Ces efforts de recherche concernent les matériaux des équipements sous pression, les logiciels de commande, les bétons, mais aussi les moyens de surveillance et de mesure, l'opérateur japonais Tepco s'étant trouvé, après le séisme et le tsunami, presque aussi aveugle sur la situation à l'intérieur de ses installations que l'exploitant américain de la centrale de Three Mile Island en 1979.

Ainsi, une question fondamentale des années à venir et sur laquelle les recherches doivent aller plus vite réside dans les moyens que nous pouvons mettre en oeuvre pour pouvoir piloter, obtenir des informations, et garder la maîtrise d'une installation, depuis un poste distant, à tout moment, en cas d'accident nucléaire grave.

Par exemple, l'utilisation de fibre optique pour la surveillance, la sécurité et la sûreté des matériaux et des structures, comme il l'a été présenté à vos rapporteurs lors de l'audition publique du 24 mai sur la protection des réacteurs nucléaires, est une piste à approfondir car elle présente de nombreux avantages évidents par rapports aux capteurs traditionnels : diamètre non intrusif, immunité électromagnétique, coût faible.

En situation normale, la fibre optique peut assurer la surveillance de l'enceinte de confinement, des piscines ou des conduites de vapeur. En situation accidentelle ou post-accidentelle, elle peut permettre la détection du percement de la cuve du réacteur, le suivi de l'avancée du corium , la surveillance des conduites de vapeur et autres circuits primaires, la détection d'incendie dans le bâtiment ou la surveillance radiologique de l'enceinte par dosimétrie. Autant d'informations essentielles en situation post-accidentelle.

La recherche se base également sur la modélisation, les simulations numériques, mais également les expérimentations en laboratoire. Ainsi, de nombreuses études sont menées par le CEA en recherche et développement en collaboration avec EDF, Areva ou l'IRSN, soit via des partenariats internationaux, comme le projet SERENA de l'OCDE. La R&D mobilise, à l'IRSN, l'équivalent de 280 personnes à plein-temps, pour un budget annuel de l'ordre de 90 millions d'euros, sur les questions les plus poussées : consolider les connaissances sur le déroulement des accidents de fusion de coeur et de dénoyage de piscines ; acquérir des connaissances sur les mécanismes et dispositions qui permettraient d'arrêter la progression de l'accident et de limiter les rejets dans l'environnement ; compléter nos connaissances du comportement du combustible en situation accidentelle.

• Exigeant par la rigueur et l'excellence qu'elle impose à tous les niveaux de la chaîne de valeur

- à la conception pour intégrer les meilleures options de sûreté ;

- à la construction, sur le chantier, par la réalisation technique d'ensembles nécessitant un savoir-faire important ;

- à la formation, par des cursus théoriques adéquats, y compris à destination de cadres expérimentés pour un effort permanent de mise à niveau;

- à l'exploitation, en fonctionnement, qui impose rigueur, sang-froid, et maîtrise de l'outil pour l'exploitant, vigilance et exigence pour l'autorité de contrôle ;

- au démantèlement des installations, qui nécessite également un savoir-faire transversal de bonne gestion d'un chantier, tout en mettant en oeuvre des opérations spécifiques pour traiter la dimension proprement nucléaire.

La bonne maîtrise d'une technologie aussi avancée pousse notre pays à rester dans le peloton tête des pays industriels. Elle exige sans détour que nous ayons les meilleurs laboratoires, les meilleurs ingénieurs, les meilleurs techniciens.

Cette excellence ne peut pas s'acquérir en un jour : elle résulte d'une expérience que nous garantit l'ancienneté de notre engagement dans la filière, mais exige également un transfert de connaissance et de savoir-faire qu'il faut encourager, comme nous le verrons pour le cas particulier du chantier de l'EPR.


* 44 On pourra se référer au compte-rendu de la conférence internationale de Reims organisée par l'Agence de l'Energie Nucléaire en décembre dernier sur les questions de réversibilité et de récupérabilité, et tout particulièrement aux interventions du président Claude Birraux.

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