c) La sécurité n'a pas de prix, mais son coût manque de transparence

Vos rapporteurs ont pour habitude de rappeler que la sécurité n'a pas de prix, qu'elle a uniquement un coût, c'est-à-dire qu'elle n'est pas en option : son coût fait ainsi partie des dépenses absolument incompressibles.

La catastrophe de Fukushima nous rappelle sans détour que l'on ne négocie pas avec la sécurité d'une centrale. C'est d'ailleurs une position constante de l'Office parlementaire, sur laquelle nous ne saurions transiger. Déjà, en janvier dernier, un rapport de l'Office sur l'évaluation du Plan National de Gestion des Matières et Déchets Radioactifs fustigeait toute idée de réacteur low-cost (bon marché) ou de vente à des pays n'étant pas « en mesure d'effectuer un investissement matériel et humain considérable (...) d'en maîtriser suffisamment les conditions de sûreté pour la déployer . » 46 ( * )

Toutefois, il arrive un moment où il devient nécessaire de chiffrer ce coût. Or, il nous a été impossible d'obtenir une évaluation crédible du coût de la sécurité dans l'EPR. Vos rapporteurs en ont notamment fait la demande directe lors de sa visite du chantier de Flamanville, sans qu'une réponse satisfaisante leur soit apportée.

Le prix du réacteur EPR de Flamanville 3, annoncé à 3 milliards d'euros (base 2003), puis 4 milliards d'euros (base 2008), est aujourd'hui évalué à 5 milliards d'euros (base 2008), si ce n'est plus, soit de l'ordre de 50% d'augmentation. Néanmoins, il faut prendre en considération que le surcoût d'une tête de série est évalué à 30% (Etude DGEMP - DIDEM, 2003).

Dans le cadre de son audit de la filière nucléaire, la Cour des Comptes pourra se saisir de la question de l'évolution du prix de l'EPR au kW et du prix du MWh à la production en sortie de l'EPR de Flamanville 3. Ces deux informations permettent d'une part de comparer le prix de l'EPR aux autres réacteurs de même génération, et d'autre part d'obtenir une indication de la disponibilité effective de l'EPR.

A titre indicatif, nous avons regroupé sous la forme d'un tableau les prix au kW que nous avons pu trouver pour certains réacteurs de troisième génération. Ce tableau ne peut évidemment pas être considéré comme étant totalement exhaustif, puisque les prix sont constamment réévalués, selon la phase et l'avancement du projet.

Réacteur

Origine

€/kW

EPR

Areva, France

2500 à 3125

AP 1000

Westinghouse, USA

2500 à 3300

APR - 1400

KHNP, Corée du Sud

1800 à 2600

ACR-1000

Energie atomique du Canada limitée (EACL), Canada

> 2000 (prix d'annonce)

Source : world-nuclear.org/

Le problème du coût de la sûreté doit être posé. L'énergie nucléaire permet en effet aujourd'hui de produire de l'électricité moins chère que les énergies concurrentes, à l'exception de l'énergie hydroélectrique. Mais une sûreté renforcée a une incidence sur les coûts. Ce problème renvoie à la question de l'avenir de la filière nucléaire, qui sera au coeur de la deuxième partie de la mission.


* 46 « Déchets nucléaires : se méfier du paradoxe de la tranquillité », rapport sur l'évaluation du PNGMDR n°3108 pour l'Assemblée nationale et n°248 pour le Sénat du 19 Janvier 2011, http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rap-off/i3108.pdf

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