D. L'IMAGE, UN ENJEU MAJEUR POUR LES CAMPAGNES

L'attirance pour un territoire dépend de facteurs qui ne sont pas toujours rationnels ou, du moins, pas toujours réfléchis. Le désir d'ensoleillement et l'attirance pour la mer et l'océan déterminent assez largement un certain tropisme vers le Sud et vers l'Ouest, qui font la fortune de certains territoires, tandis qu'elle peut contribuer à expliquer ailleurs une situation démographique périlleuse, en particulier sur la « demi diagonale du vide » qui court du centre au Nord-Est de la France.

Qu'elles inspirent des destinations touristiques ou d'installation pour la retraite ou pour la vie active, ces orientations reposent sur des représentations - accumulées tout au long de l'existence par transmission orale, par les publicités ou le cinéma - convergeant vers le cliché plus ou moins universel d'un soleil radieux sur une mer scintillante, et sur une forme de snobisme élémentaire 49 ( * ) consistant à imiter les classes « supérieures » qui, les premières, ont pris leur distances vis-à-vis de certaines zones urbaines ainsi que de la campagne profonde ou productive.

Bien entendu, il y a toujours loin du rêve à la réalité, et la confrontation avec le coût du foncier, avec une concentration humaine grandissante et un accès parfois difficile et souvent épisodique aux aménités promises, peut conduire à un certain désenchantement pour qui cède aux tropismes dominants.

Pour leur part, les campagnes, et particulièrement celles qui ne peuvent être valorisées par la proximité d'une métropole, de la mer ou de montagnes sportivement connotées et qui ne présentent pas davantage une pluviométrie insignifiante, souffrent d'un ensemble de préjugés plus ou moins défavorables.

Pourtant, le goût pour la nature, l'aspiration au « vert », à une certaine forme d'authenticité et de convivialité, à tout un patrimoine culturel, gastronomique ou artisanal, peut être partagé par de très nombreux concitoyens. Mais cette sensibilité doit être sinon révélée, du moins entretenue et renforcée. Il convient, en définitive, de travailler l'image de la campagne avec méthode et constance si l'on veut y attirer durablement, et à armes égales, les touristes, les retraités, les actifs et les activités.

Or, les efforts des territoires ruraux pour améliorer leur image, en dépit de nombreuses initiatives de labellisation et de promotion, toujours méritoires et quelquefois porteuses, manquent encore d'unité. Par exemple, la valorisation de l'initiative économique ou du tourisme débouche sur la mise en avant de slogans dont l'interception, souvent erratique au gré de navigations sur Internet ou de la consultation de périodiques, est probablement moins productive qu'il serait souhaitable pour une cause qu'on voudrait transversale : la valorisation des territoires ruraux.

L'aménagement du territoire est un enjeu global et il serait donc parfaitement normal que la plupart des initiatives locales puissent s'inscrire dans un référentiel général, dont elles constitueraient la déclinaison (en recourant au besoin à des financements croisés). Les certifications de typicité comme l'AOC participent déjà indirectement, suivant un référentiel unifié et clairement identifiable, à la valorisation des territoires d'où sont issus les produits qui en bénéficient. Dans cette perspective, l'initiative « France-Vélo-Tourisme » est à saluer.

Une amélioration de l'image a des effets cumulatifs qui ne se limitent pas à la sphère résidentielle et touristique. La sphère productive locale en profite, les entreprises n'hésitant plus à mettre en valeur l'origine de leur production, notamment alimentaire et artisanale, mais aussi industrielle, pour s'accorder une chance supplémentaire, du point du vue des consommateurs, de faire pencher la balance de leur côté.


* 49 C'est ainsi que certains sports, certains lieux de villégiature se démocratisent successivement, tandis que l'« élite » investit d'autres activités et d'autres lieux.

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