2. Les énergies renouvelables : à la conquête de l'autonomie énergétique

M. Frédéric Chino, Directeur du développement Énergie thermique des mers, DCNS

DCNS est une entreprise privée dont un tiers de l'activité est aujourd'hui réalisé à l'export. Nous disposons d'un carnet de commandes relativement confortable qui nous permet de préparer l'avenir et notamment d'investir dans le domaine des énergies. Les énergies marines renouvelables, en particulier, constituent un vecteur important de développement de notre activité. DCNS se positionne principalement dans quatre types de technologies :

- les énergies thermiques des mers ;

- les éoliennes flottantes ;

- les hydroliennes ;

- l'énergie des vagues.

DCNS offre à ses clients des solutions technologiques clés en main assorties d'engagements de disponibilité de ces installations, de maintenabilité, de performance et de compétitivité au regard du coût de l'énergie associé à des moyens plus traditionnels de production.

L'énergie thermique des mers est assez méconnue, par comparaison avec d'autres moyens de production. Il s'agit pourtant d'une histoire française, évoquée par Jules Verne dans un de ses romans, où il imaginait la possibilité d'utiliser le différentiel thermique entre les eaux de surface (chaudes) et les eaux de profondeur. Plus tard, Georges Claude a eu la possibilité de créer un premier prototype pour une petite production, démontrant la faisabilité d'un tel projet.

Le principe de l'énergie thermique des mers est assez simple. Il s'agit d'un cycle fermé. Un fluide de travail s'évapore avec la température des eaux de surface, dites chaudes (25 à 28 degrés). Cette évaporation entraîne une turbine pour produire de l'électricité et le fluide de travail est recondensé grâce aux eaux de profondeur, qui ont une température proche de 4 degrés, afin d'assurer le passage de l'état de vapeur à l'état liquide. Si le schéma est simple sur le papier, sa mise en oeuvre est beaucoup plus complexe sur le plan technologique. Elle peut également s'avérer coûteuse si l'on ne dispose pas de moyens efficaces de production.

Les principaux avantages d'une telle technologie résident dans la réponse aux besoins d'indépendance énergétique de sites isolés. Il s'agit à nos yeux de la solution pour une production autonome et permanente d'électricité (24 heures sur 24). Le marché, pour cette technique de production, se situe principalement autour de la zone intertropicale, qui peut offrir, pour les eaux de surface des océans, une température de 27 ou 28 degrés, voire davantage. Les sites visés sont ceux qui ne sont pas interconnectés, avec une forte dépendance aux énergies fossiles, une pression foncière importante et des coûts de l'énergie assez variables mais souvent très élevés compte tenu des fluctuations des prix des énergies fossiles.

Selon une de nos estimations, ce marché insulaire pourrait représenter 6 à 9 GW en termes de capacités installées d'ici 2030. Je n'évoque même pas le potentiel du marché continental qui peut également être visé dans cette zone.

Au-delà de l'objectif d'indépendance énergétique, cette technologie offre l'opportunité de création d'une nouvelle filière industrielle, qui pourra générer de l'emploi dans les usines de réalisation de ces installations mais aussi sur les sites qui auront à concourir à l'installation de ces centrales et à leur maintien durant toute leur durée de vie. Elle représente également une opportunité pour positionner l'industrie française dans un segment en pleine ouverture et tirer parti des implantations outre-mer, qui nous permettent de constituer des bases arrière pour le déploiement de ces technologies vers des marchés d'exportation.

De telles solutions peuvent être déployées en mer, via des plates-formes offshore , avec des puissances allant de 10 à 30 MW. Nous pourrons certainement aller au-delà dans le futur mais nous sommes, pour l'instant, limités par la technologie. La difficulté porte sur le pompage d'eau de mer froide en profondeur, puisque nous avons besoin de débits très importants pour recondenser le système de production d'énergie. Nous avons aussi la possibilité de déployer des installations à terre, pour des puissances plus faibles, allant jusqu'à 4 à 5 MW. De telles solutions peuvent s'avérer tout à fait pertinentes pour certains clients, par exemple des hôteliers qui souhaitent être autonomes sur le plan énergétique. Nous pouvons coupler des installations terrestres d'énergie thermique des mers à des installations SWAC pour profiter de l'eau froide tirée des profondeurs et ainsi disposer d'une double solution de climatisation et de production d'électricité.

Pour parvenir à ces résultats, nous avons besoin d'une impulsion. La technologie est prête. Nous avons réalisé un prototype à terre à La Réunion, afin de démontrer la faisabilité du système de production d'énergie. Ce programme nous fournit aussi l'occasion de tester de nouvelles générations d'échangeurs qui vont permettre d'améliorer le rendement et l'efficacité de ces systèmes. Nous avons besoin de déployer une première solution offshore et nous comptons sur l'aide gouvernementale pour y parvenir. Cet appui pourrait par exemple prendre la forme de tarifs de rachat ou d'un soutien à l'investissement au travers de fonds européens. Si l'AFD recherche des projets innovants à soutenir, nous aurons de nombreuses propositions à lui présenter.

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