II. UNE POLITIQUE QUI NÉCESSITE DES ÉVOLUTIONS TANT DU COTÉ VIETNAMIEN QUE DU COTÉ FRANÇAIS

A. CRÉER UN CADRE JURIDIQUE PROPICE AU DÉVELOPPEMENT DES PARTENARIATS PUBLIC / PRIVÉ

La part du secteur privé vietnamien dans le PIB a considérablement augmenté ces dernières années : en dix ans, elle est passée de 40 % à 60 %. Pour accompagner ce développement, il est nécessaire aujourd'hui que l'aide publique au développement dont il bénéficie soit réorientée, au moins partiellement, vers le secteur privé. Ce choix est d'ailleurs défendu tant par les différents bailleurs internationaux que par les autorités vietnamiennes, qui ont mis l'accent, dans leur stratégie de développement 2011-2020, sur la participation du secteur privé.

Dans ce contexte, votre rapporteur spécial a souhaité s'intéresser particulièrement aux partenariats public-privé (PPP) soutenus par de l'aide publique au développement, outil extrêmement récent au Vietnam, qui présente l'avantage d'un financement et d'une gestion privés. En d'autres termes, il permet de ne pas augmenter l'endettement public mais aussi d'assurer une gestion efficace de l'infrastructure concernée. Il impose en revanche de mettre en place un cadre juridique précis sur les obligations de chaque cocontractant et sur les modalités de rémunération.

Votre rapporteur spécial a ainsi visité la centrale électrique à cycle combiné au gaz naturel de Phu My 2.2, d'une puissance de 715 MW, qui a été financée par PPP, avec un soutien de bailleurs internationaux.

Plus précisément, la centrale a été construite et financée et est aujourd'hui exploitée par Mekong Energy Company (MECO), un consortium constitué par Électricité de France (EDF) International (56,25 %), Sumitomo Corporation (Japon, 28,125 %) et Tepco (Japon, 15,625 %). À la fin de la période d'exploitation de vingt ans, la centrale sera rétrocédée au secteur public.

L'approvisionnement en gaz a fait l'objet d'un contrat assurant un prix de fourniture garanti et l'électricité produite est rachetée par Électricité du Vietnam (EVN), qui est chargée de la production, du transport et de la distribution d'électricité au Vietnam, à un prix garanti, sur une durée de vingt ans.

Le coût total du projet s'est élevé à 480 millions de dollars, financé à hauteur de 140 millions de dollars par fonds propres et de 340 millions de dollars par des prêts, parmi lesquels un prêt de 40 millions de dollars de Proparco, la filiale de l'AFD dédiée au secteur privé, 100 millions de dollars de la Japan bank for international coopération (JBIC) et 50 millions de dollars de la Banque asiatique de développement (BAsD).

Ce projet a particulièrement retenu l'attention de votre rapporteur spécial car il fut le premier grand PPP au Vietnam et il était attendu que son exemple permette de développer de façon importante ce type de financement dans le pays.

Le PPP de Phu My 2.2 est un succès incontestable. Ce point a été confirmé à votre rapporteur spécial à la fois par les autorités vietnamiennes, en l'occurrence par le vice-président d'EVN, et par le directeur général de MECO, Philippe Triquigneaux.

Pourtant, malgré son succès, ce premier exemple n'a pas été imité .

Ce constat peut sembler paradoxal, dans le mesure où plusieurs interlocuteurs vietnamiens, parmi lesquels le vice-directeur d'EVN, ont assuré à votre rapporteur spécial leur grand intérêt pour cette forme de financement.

Le diagnostic des différents bailleurs internationaux est concordant : il manque un véritable cadre légal, qui rassure les investisseurs , notamment occidentaux. Un autre PPP a ainsi connu un échec retentissant : malgré son succès technique, le pont de Phu My a été un échec commercial, le trafic n'atteignant que 25 % de la prévision. Cette mauvaise performance s'explique par la non construction de la route d'accès au pont, pourtant prévue par les autorités locales. Au final, les conséquences financières de cet échec ont dû être assumées par l'exploitant comme par les autorités locales.

Il existe également une certaine frilosité d'une partie des autorités vietnamiennes, pour qui le financement et la gestion privée d'une infrastructure publique ne va pas de soi.

On peut espérer que cette situation s'améliorera bientôt : un décret est en cours de préparation sur le sujet des PPP et quelques projets intéressants sont envisagés.

La mise en place d'un cadre juridique propice au développement des PPP est nécessaire et pourrait utilement faire l'objet d'un soutien français, sous forme d'assistance technique , étant donné le savoir-faire de l'administration française sur ce sujet.

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