AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat va organiser dans quelques jours un débat de contrôle sur l'application des lois, en présence du Gouvernement représenté par le secrétaire d'État aux relations avec le Parlement, M. Jean-Marie Le Guen.

Si l'organisation en séance plénière d'un débat annuel sur ce thème est relativement récente, en revanche le Sénat est en pointe depuis longtemps sur le suivi de l'application des lois .

En effet, les décisions du Parlement, telles qu'elles sont traduites dans les lois, ne sont bien souvent pas applicables d'elles-mêmes et nécessitent, en aval de la procédure législative, la parution de textes réglementaires d'application, qui relève de la responsabilité des ministères.

En principe, ces textes d'application doivent être publiés dans les six mois qui suivent la promulgation de la loi, mais la réalité se révèle assez éloignée de la théorie, avec des délais de parution souvent beaucoup plus longs que prévu ; parfois, certains décrets ne sont même finalement jamais pris, paralysant la mise en oeuvre effective de la loi.

Cette question de l'application des lois est donc un enjeu très important, car à quoi bon faire des lois, si elles doivent rester lettre morte en tout ou partie ?

C'est pourquoi, dès les années 1970, notre assemblée a mis en place des procédures et des outils permettant à ses commissions permanentes de suivre en temps réel, pour chaque article de loi, la publication des décrets et des arrêtés attendus.

Ces procédures ont été informatisées depuis une trentaine d'années, avec une application dédiée -la base APLEG- qui permet de comparer les données réunies par les commissions permanentes du Sénat et les décomptes effectués de son côté par le Secrétariat général du Gouvernement.

Tous les ans, une synthèse des observations des commissions est effectuée, de manière à fournir au Sénat, à partir de quelques indicateurs-clés, un aperçu d'ensemble sur la manière dont le Gouvernement s'acquitte des obligations qui lui incombent dans ce domaine.

Au fil des années, plusieurs formules ont été expérimentées pour l'établissement de cette synthèse, toujours en étroite coordination avec les commissions permanentes. Entre 2011 et 2014, cette tâche avait été confiée à un organe ad hoc présidé par notre collègue David Assouline, qui s'en est acquitté de manière excellente, comme le Président Gérard Larcher a eu plusieurs fois l'occasion de le souligner - et dont je souhaite moi-même saluer ici le travail de qualité.

Mais cette expérience n'a pas été reconduite lors du renouvellement triennal d'octobre 2014, dans le souci de restituer aux commissions permanentes la plénitude de leurs prérogatives de contrôle sur un domaine où elles sont indiscutablement les mieux placées, puisqu'elles ont eu à connaître dès le départ les lois dont il faut vérifier la mise en application en aval.

Cette année, le Bureau du Sénat m'a confié le travail de synthèse en ma qualité de Vice-Président de la délégation du Bureau au travail parlementaire et au contrôle, qui a travaillé en liaison avec la Conférence des Présidents, preuve de l'intérêt que toutes les instances du Sénat portent à cette question.

Pour préparer son bilan récapitulatif, votre rapporteur a entendu au Sénat le 19 mai 2015 le nouveau Secrétaire général du Gouvernement, M. Marc Guillaume, au cours d'une intéressante audition à laquelle il avait d'ailleurs convié les présidentes et présidents des sept commissions permanentes ou leur représentant (le compte rendu de cette audition figure en annexe du présent rapport). Sur le plan technique, la direction de la législation et du contrôle a -comme les années précédentes- recoupé ses chiffres avec ceux du Secrétariat général du Gouvernement, aboutissant à des résultats concordants.

Le bilan récapitulatif qui en résulte a été communiqué à la Conférence des Présidents du mercredi 27 mai 2015 ( cf. infra ). Les données complémentaires figurant dans le présent rapport ont pour but de jeter un éclairage plus précis sur certains indicateurs-clés de l'année et, pour certains, de les resituer dans une perspective pluriannuelle.

Globalement, ce bilan récapitulatif montre que le taux d'application des lois de la XIV ème législature tourne aujourd'hui aux alentours de 60 % à 65% , même s'il ne faut pas faire abstraction d'écarts parfois notables relevés par plusieurs commissions permanentes. Ce taux, s'il peut sembler insuffisant -on reste dans la fourchette moyenne des cinq dernières années- est cependant largement meilleur que les pourcentages très médiocres d'avant 2010, entre seulement 15 et 30 %.

Par ailleurs, les délais moyens de publication constatés l'an dernier se rapprochent de l'objectif des six mois : 86 % sont sortis en moins d'un an, dont 30 % dans les 6 mois. Au total, le délai moyen de parution des décrets d'application tourne autour de 8 mois et 5 jours , avec évidemment des écarts importants selon la complexité des textes à prendre et le plan de charge des différents ministères, comme l'a bien montré l'audition du Secrétaire général du Gouvernement.

Lors de cette audition, plusieurs présidents de commission permanente ont aussi posé le problème, non pas de l'existence mais du contenu des textes d'application, car la manière dont une loi s'applique réellement peut dépendre des choix et des solutions retenus par les rédacteurs de ces textes. Comme l'a souligné le Président Jean-Claude Lenoir, président de la commission des Affaires économiques, cette question se pose en particulier pour les circulaires d'application, dont « il arrive que des circulaires n'interprètent pas la loi dans l'esprit de ce que le législateur a voulu faire ».

Dans le bilan de cette année, le vrai « point noir » est le taux de présentation des rapports demandés par le Parlement , puisque sur la moyenne des dix dernières sessions, seulement 60 % des lois demandant un rapport ont été suivies d'effet. Cette situation est dénoncée par presque toutes les commissions permanentes.

Peut-être les parlementaires demandent-ils trop de rapports ? C'est aussi, bien souvent, la concession accordée par le Gouvernement en échange du retrait d'un amendement... Mais le constat est là : quelles qu'en soient les raisons -bonnes ou mauvaises- le défaut de remise des rapports demandés par le Parlement est un manquement regrettable auquel il conviendrait de remédier.

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Telles sont les principales tendances mises en lumière dans le présent bilan annuel, qui récapitule dans une première partie les chiffres de mise en application des lois promulguées au cours de la période de référence, c'est-à-dire l'année parlementaire du 1er octobre 2013 au 30 septembre 2014.

En seconde partie, le rapport présente in extenso les bilans particuliers d'application des lois établis par chacune des sept commissions permanentes du Sénat sur les textes de son ressort.

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