N° 517

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2016-2017

Rapport remis à M. le Président du Sénat le 25 avril 2017

Enregistré à la Présidence du Sénat le 25 avril 2017

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission d'enquête (1) sur la réalité des mesures de compensation des atteintes à la biodiversité engagées sur des grands projets d' infrastructures , intégrant les mesures d' anticipation , les études préalables , les conditions de réalisation et leur suivi ,

Président

M. Jean-François LONGEOT,

Rapporteur

M. Ronan DANTEC,

Sénateurs

Tome I : Rapport

(1) Cette commission d'enquête est composée de : M. Jean-François Longeot, président ; M. Ronan Dantec, rapporteur ; MM.  Roland Courteau, Michel Delebarre, Mme Évelyne Didier, M. Rémy Pointereau, Mme Sophie Primas, M. Raymond Vall, vice-présidents ; MM. Gérard Bailly, Jérôme Bignon, Gérard César, Daniel Gremillet, Jean-François Husson, Mme Chantal Jouanno, MM. Hervé Poher, André Trillard, Alain Vasselle.

LISTE DES PROPOSITIONS

__________

I. UNE MEILLEURE CONNAISSANCE DE LA BIODIVERSITÉ ET UNE PRÉCISION DES PHÉNOMÈNES DE FRAGMENTATION DES MILIEUX

• Établir les bases d'une stratégie nationale de lutte contre la fragmentation des espaces naturels en lien avec la Stratégie nationale pour la biodiversité.

• Valoriser les enseignements de la compensation des atteintes à la biodiversité dans une stratégie globale de reconquête de la biodiversité.

II. UNE PLUS GRANDE ANTICIPATION ET UNE MEILLEURE APPLICATION DE LA SÉQUENCE EVITER-REDUIRE-COMPENSER

• Définir dans le code de l'environnement, comme cela est déjà prévu pour la compensation, les grands principes applicables à la mise en oeuvre de l'évitement et de la réduction.

• Exiger des maîtres d'ouvrage la définition d'une stratégie ERC intégratrice dans l'étude d'impact, comprenant des informations précises sur les problématiques foncières du volet compensatoire.

• Veiller à ce que l'étude d'impact intègre les analyses prévues au titre de la compensation collective agricole.

• S'appuyer sur l'autorisation environnementale unique afin de consolider les procédures d'autorisation et d'unifier la définition des mesures d'évitement, de réduction et de compensation.

III. DES MÉTHODOLOGIES À AMÉLIORER POUR UNE MISE EN OEUVRE SOUPLE ET EFFICACE DE LA COMPENSATION

• Développer au niveau national les éléments de méthodologie permettant de disposer d'une approche plus fine du fonctionnement des écosystèmes et pouvant être déclinés dans les territoires en tenant compte des spécificités de ces derniers.

• Systématiser une approche fonctionnelle de la proximité pour améliorer l'efficacité, la pérennité et l'insertion de la compensation dans le territoire, dans le respect de l'équivalence écologique.

• Généraliser la prise en compte des atteintes à la biodiversité ordinaire dans les processus d'autorisation.

• Assurer une intégration pleine et entière des travaux dans la séquence ERC, par une anticipation de leurs impacts et un contrôle effectif, par les pouvoirs publics, lors de leur réalisation.

• Diversifier les ressources des opérations de restauration de milieux naturels à enjeux patrimoniaux jusqu'alors financées par la compensation par l'offre.

IV. S'APPUYER SUR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES POUR UNE VÉRITABLE PLANIFICATION DE LA COMPENSATION

• Localiser en priorité les mesures compensatoires sur des territoires cohérents avec la trame verte et bleue.

• Associer pleinement les collectivités territoriales à la réalisation de l'inventaire national des espaces naturels à fort potentiel de gain écologique confié à l'Agence française pour la biodiversité (AFB) par la loi « Biodiversité ».

• Encourager l'identification dans les schémas régionaux de zones à fort potentiel de restauration écologique, en cohérence avec la trame verte et bleue.

V. UN RENFORCEMENT DES EXPERTISES PUBLIQUE ET PRIVÉE

• Assurer la diffusion la plus large possible d'un guide pratique sur l'évitement et la réduction, établi à partir de retours d'expériences sur des projets de toute taille, et permettant d'apprécier les points forts et les points faibles des mesures mises en oeuvre ainsi que les coûts qui leur sont associés.

• Assurer progressivement, en concertation avec les acteurs, la montée en qualification des bureaux d'études, sur la base de méthodes partagées de réalisation des inventaires initiaux et de définition des mesures de compensation.

• Renforcer, sous la responsabilité de l'AFB, la formation des administrations chargées d'instruire et de suivre la mise en oeuvre de la séquence ERC.


• Améliorer la qualité des inventaires initiaux par une harmonisation des méthodes applicables.

VI. UNE MEILLEURE INTÉGRATION DU MONDE AGRICOLE À LA COMPENSATION

• Assurer une participation du monde agricole à toutes les étapes de définition et de mise en oeuvre des mesures d'évitement, de réduction et de compensation, notamment par un dialogue renforcé avec les chambres d'agriculture et les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural.

• Réduire l'empreinte de la compensation écologique sur le foncier agricole par l'évitement et la réduction, par une approche fonctionnelle de la compensation et par une localisation des mesures plus favorable à l'économie agricole (friches, délaissés, terres peu productives).

• Harmoniser les barèmes de rémunération des agriculteurs engagés dans la mise en oeuvre de mesures compensatoires.

• Proposer des solutions conventionnelles pérennes et attractives, respectant les spécificités de l'activité agricole, en particulier le statut du fermage.

VII. LA CRÉATION DU CONSENSUS AUTOUR DE L'EXPERTISE SCIENTIFIQUE

• Encourager une prise de contact, facultative, avec le Conseil national de la protection de la nature (CNPN) à l'initiative du maître d'ouvrage en amont de l'étude d'impact.

• Évaluer l'opportunité de généraliser un avis du CNPN sur l'étude d'impact et de contraindre les maîtres d'ouvrage à faire porter leurs observations en réponse dans leur dossier d'enquête publique.

• Inclure obligatoirement, dans les dossiers d'enquête publique, les observations en réponse, de la part du maître d'ouvrage, sur les griefs éventuellement soulevés par l'avis de l'Autorité environnementale.

• Expliciter systématiquement, au sein des arrêtés prescrivant des mesures de compensation, les raisons qui, le cas échéant, conduisent le détenteur du pouvoir réglementaire à ne pas suivre les orientations ou prescriptions des avis scientifiques préalables obligatoires ou des avis scientifiques complémentaires.

VIII. UNE TRANSPARENCE DES COÛTS DE LA SÉQUENCE ERC

• Élaborer une base de données indicative et nationale sur les coûts de mise en oeuvre de la compensation.

• Prolonger et développer les études existantes sur les budgets alloués par les maîtres d'ouvrage à la séquence ERC.

• Identifier les postes budgétaires relatifs à la compensation.

• Établir la transparence systématique de ces budgets par le biais d'une publication annuelle et d'un suivi par l'autorité en charge du contrôle des mesures de compensation.

IX. UNE AMÉLIORATION DU SUIVI DANS LE TEMPS DES MESURES DE COMPENSATION

• Prévoir au sein des arrêtés prescrivant la compensation le détail dans le temps des objectifs de résultat à atteindre et non pas les seuls moyens à mettre en oeuvre.

• Harmoniser les méthodes de suivi.

• Tendre à développer les moyens humains et la formation des agents en charge du suivi afin de rendre effectifs la nouvelle obligation de résultat, le pouvoir de définir des prescriptions complémentaires si les mesures de compensation sont inopérantes et, le cas échéant, les sanctions prévues si les mesures ne sont pas mises en oeuvre.

• Développer l'organisation du suivi à une échelle territoriale cohérente autour de l'AFB au travers, le cas échéant, des agences régionales de la biodiversité.

• Indiquer précisément la localisation des zones accueillant des mesures de compensation dans les différents documents d'urbanisme afin de garantir une bonne information au niveau local.

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