Rapport d'information n° 102 (2019-2020) de MM. Claude KERN et Christian MANABLE , fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 5 novembre 2019

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N° 102

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 5 novembre 2019

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) par la mission d'information sur les nouveaux territoires du sport (2),

Par MM. Claude KERN et Christian MANABLE,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : Mme Catherine Morin-Desailly , présidente ; M. Max Brisson, Mme Catherine Dumas, MM. Jacques Grosperrin, Antoine Karam, Mme Françoise Laborde, MM. Jean-Pierre Leleux, Jacques-Bernard Magner, Mme Colette Mélot, M. Pierre Ouzoulias, Mme Sylvie Robert , vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Claude Kern, Mme Claudine Lepage, M. Michel Savin , secrétaires ; MM. Maurice Antiste, David Assouline, Mmes Annick Billon, Maryvonne Blondin, Céline Boulay-Espéronnier, Marie-Thérèse Bruguière, Céline Brulin, M. Joseph Castelli, Mmes Laure Darcos, Nicole Duranton, M. André Gattolin, Mme Samia Ghali, MM. Abdallah Hassani, Jean-Raymond Hugonet, Mmes Mireille Jouve, Claudine Kauffmann, MM. Guy-Dominique Kennel, Laurent Lafon, Michel Laugier, Mme Vivette Lopez, MM. Jean-Jacques Lozach, Claude Malhuret, Christian Manable, Jean-Marie Mizzon, Mme Marie-Pierre Monier, MM. Philippe Nachbar, Olivier Paccaud, Stéphane Piednoir, Mme Sonia de la Provôté, MM. Damien Regnard, Bruno Retailleau, Jean-Yves Roux, Alain Schmitz, Mme Dominique Vérien .

(2) Cette commission est composée de : Mme Céline Brulin, M. Alain Dufaut, Mmes Nicole Duranton et Samia Ghali, M. Abdallah Hassani, Mme Mireille Jouve, MM. Guy-Dominique Kennel, Claude Kern, rapporteur , Michel Laugier, Jean-Jacques Lozach, Claude Malhuret, Christian Manable, rapporteur , Damien Regnard, Michel Savin.

DOUZE PRÉCONISATIONS POUR MIEUX COORDONNER LES POLITIQUES TERRITORIALES DU SPORT

Préconisation n° 1 : maintenir le principe de la compétence partagée dans le domaine du sport pour les différentes collectivités territoriales (art. L. 1111-4 du CGCT) dans le cadre d'une coordination territoriale étroite.

Préconisation n° 2 : assurer la présence d'au moins un CREPS par région métropolitaine et veiller à intégrer les territoires ultramarins au maillage de la haute performance selon des modalités adaptées (modification de l'article L. 114-1 du code du sport).

Préconisation n° 3 : renforcer la représentation des départements, des métropoles et des communes dans la gouvernance des CREPS afin de développer un maillage territorial favorable au développement du haut niveau (modification de l'article L. 114-10 du code du sport).

Préconisation n° 4 : prévoir la présence de droit au conseil d'administration des CREPS du président de la conférence régionale du sport ou de son représentant (modification du décret du 11 février 2016).

Préconisation n° 5 : modifier le code du sport afin de prévoir d' associer l'ANS à la préparation et à la mise en oeuvre des conventions prévues entre les CREPS et l'État (modification de l'article R 114-1 du code du sport).

Préconisation n° 6 : préserver l'esprit de la loi du 1 er août 2019 qui ouvre la voie à une forte différenciation territoriale afin de permettre un degré d'intégration variable selon les territoires.

Préconisation n° 7 : reconnaître que l'absence de chef de filât d'une collectivité dans le sport constitue une des conditions du succès de la nouvelle politique territoriale du sport fondée sur une démarche pleinement partenariale .

Préconisation n° 8 : instaurer un guichet « commun » au sein de chaque conférence des financeurs respectueux des choix des collectivités territoriales de préférence à un guichet « unique » qui pourrait créer de fait une obligation de participation au financement.

Préconisation n° 9 : prévoir l'existence d'une conférence des financeurs permanente au niveau départemental et au niveau de chaque métropole ainsi que la possibilité de créer des conférences supra départementales pour les grands équipements et infra départementales pour les projets très localisés.

Préconisation n° 10 : prévoir que le secrétariat des conférences régionales du sport et celui des conférences des financeurs soient organisés par les collectivités territoriales par voie de convention dans le cadre de la compétence partagée.

Préconisation n° 11 : éviter un désengagement de l'État du financement des équipements locaux et réaffirmer son rôle pour résorber les déséquilibres territoriaux et développer le sport pour tous.

Préconisation n° 12 : négocier dans les meilleurs délais la convention entre l'État et l'Agence nationale du sport prévue par l'article L. 112-16 du code du sport et définir une trajectoire pluriannuelle des moyens ascendante en lien avec les besoins identifiés par le mouvement sportif et les représentants des collectivités territoriales et tenant compte des ressources disponibles croissantes issues du monde du sport (droits TV, paris sportifs).

Mesdames, Messieurs,

AVANT-PROPOS

La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République comportait plusieurs mesures relatives au sport. L'article 104 en particulier a reconnu, dans son deuxième alinéa 1 ( * ) , le caractère partagé de la compétence « sport » entre les différentes catégories de collectivités tandis que l'article 28 de la loi a transféré aux régions la gestion des Centres de ressources, d'expertise et de performance sportive (CREPS) qui jouent un rôle important dans le développement de la haute performance. Par ailleurs, l'article 90 a prévu que par convention passée avec le département 2 ( * ) , la métropole exerce à l'intérieur de son périmètre, par transfert, en lieu et place du département, ou par délégation, au nom et pour le compte du département, les compétences relatives à la construction, l'exploitation et l'entretien des équipements et des infrastructures destinés à la pratique du sport.

Ce renforcement du rôle des régions et des métropoles aux côtés des communes et des départements - impliqués de longue date dans le financement du sport dans les territoires - accroît la capacité d'action de chaque niveau de collectivité. Pour autant, faute de véritable clarification sur le rôle de chacun, l'implication des acteurs dépend autant de leurs choix propres que de l'évolution des moyens à leur disposition . À cet égard, le bilan des Conférences territoriales de l'action publique (CTAP) semble mitigé comme l'a montré un rapport de l'Inspection générale de l'administration (IGA) 3 ( * ) . Si les CTAP peuvent jouer un rôle pour favoriser le dialogue sur les objectifs, elles n'ont pas encore permis aux élus locaux de coordonner leurs actions. Une clarification demeurait donc nécessaire .

Deux « menaces » ont ainsi été identifiées. Une première tient au risque que les interventions se chevauchent au détriment de la lisibilité et que les investissements ne bénéficient pas d'une répartition harmonieuse. Cette menace est ancienne et avait été évoquée à l'occasion du débat sur la loi de 2015. La seconde menace est plus récente et constitue l'exact opposé de la première puisqu'elle revient à redouter que le sport pâtisse d'une baisse des moyens que lui consacrent les collectivités territoriales , celles-ci étant amenées à se désengager de leurs dépenses « non obligatoires » pour assumer l'augmentation de leurs dépenses obligatoires.

Quelle est la réalité de ces deux « menaces », le chevauchement de projets et le saupoudrage des moyens d'une part et le désengagement d'autre part ? Comment limiter ces risques pour autant qu'ils correspondent à une réalité ? C'est en partant de ces interrogations que le bureau de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication a décidé de créer une mission d'information consacrée aux politiques sportives territoriales.

Les travaux menés dans le cadre de la présente mission d'information ont très vite permis à vos rapporteurs d'identifier tout l'intérêt que pourrait représenter la nouvelle Agence nationale du sport (ANS) pour organiser une nouvelle gouvernance des politiques locales du sport . Ce nouvel acteur qui se substitue au Centre national pour le développement du sport (CNDS) avec des compétences et des moyens nouveaux se veut également une réponse aux difficultés rencontrées au plan local pour instituer une gouvernance efficace entre les acteurs. Cependant, les modalités de fonctionnement de l'ANS demeuraient encore très incertaines quelques semaines seulement après son installation au printemps 2019 et beaucoup d'acteurs locaux auditionnés nous ont alors indiqué leur crainte que la mise en oeuvre de la gouvernance locale soit reportée à plus tard.

Afin de ne pas perdre de temps, vos rapporteurs ont saisi l'opportunité de l'examen du projet de loi portant ratification de l'ordonnance n° 2019-207 du 20 mars 2019 relative aux voies réservées et à la police de la circulation pour les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 déposé au Sénat le 12 juin 2019 afin de préciser les missions territoriales de la nouvelle Agence nationale du sport en s'appuyant sur les travaux engagés dans le cadre de la présente mission d'information. Le texte, largement enrichi par le Sénat, a ainsi pu faire l'objet d'un accord en commission mixte paritaire le 23 juillet dernier. La loi dont l'intitulé a été modifié pour faire référence à la création de l'Agence nationale du sport et à diverses dispositions relatives à l'organisation des jeux Olympiques et paralympiques de 2024 a été promulguée le 1 er août 2019.

Les modifications apportées à l'article 3 de la loi précitée ont permis de définir les principes de la gouvernance territoriale de l'Agence nationale du sport avec la création au niveau régional d'une conférence régionale du sport et, selon les spécificités territoriales, de conférences des financeurs du sport . Des dispositions réglementaires devront être adoptées afin de permettre la mise en oeuvre de ces nouvelles dispositions 4 ( * ) . Vos rapporteurs forment le voeu qu'elles interviennent au plus vite pour mettre en oeuvre la nouvelle gouvernance des politiques territoriales du sport.

La préparation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ne doit pas avoir pour conséquence de repousser au second plan le sport pour tous et les politiques territoriales du sport. Si la préparation de cette échéance essentielle mobilise légitimement l'attention des pouvoirs publics, elle ne saurait s'effectuer au détriment du sport de proximité comme l'évolution des crédits budgétaires a pu le laisser penser lors du débat de la loi de finances pour 2019. Afin de donner toute sa place à la politique territoriale du sport, votre mission d'information a formulé une douzaine de préconisations qui doivent permettre de conforter le caractère partenarial et dynamique de la nouvelle politique du sport.

Les dispositions de la loi « NOTRe » concernant le sport

La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) comprenait plusieurs dispositions susceptibles de modifier les modalités de l'exercice de la compétence sport mais aussi l'équilibre des relations entretenues entre les différents niveaux de collectivités territoriales.

• L'article 28 du projet de loi a prévu le transfert des CREPS aux régions . L'État conserve la charge de la rémunération de ses agents et celle des missions d'encadrement et de surveillance des sportifs et des stagiaires et des dépenses de fonctionnement directement liées à la pédagogie, à la recherche et au transfert d'expériences et de pratiques dans les domaines du sport, de la jeunesse et de l'éducation populaire. Il finance également l'acquisition et la maintenance des matériels informatiques et des logiciels. La région quant à elle reçoit la charge de la construction, de la rénovation et de l'entretien des bâtiments. Elle doit également organiser l'accueil, la restauration et l'hébergement.

• L'article 90 de la loi a prévu le transfert automatique ou la délégation, par voie de convention, du département à la métropole, de compétences dans différents domaines, dont la jeunesse et les équipements sportifs . À défaut de convention au 1 er janvier 2017 prévoyant le transfert ou la délégation d'au moins trois des sept groupes de compétences visés par la loi (aides au logement, action sociale, insertion, aides aux jeunes en difficulté, actions de prévention spécialisée auprès des jeunes et des familles en difficulté ou en rupture , personnes âgées, tourisme et exploitation et entretien des équipements et infrastructures destinés à la pratique du sport ou une partie d'entre eux ), l'ensemble des compétences est transféré à la métropole. Le transfert ou la délégation des compétences entraîne le transfert ou la mise à disposition de la métropole des services départementaux correspondants. À défaut de convention sur les modalités de ces transferts, le transfert des moyens est de plein droit.

Comme l'avait rappelé notre commission de la culture, de l'éducation et de la communication lors de l'examen du projet de loi, le transfert de la compétence sur la jeunesse et les équipements sportifs du département à la métropole est déjà une réalité dans de nombreux territoires et répond à un double principe de proximité et d'efficacité.

• L'article 104 de la loi maintient le principe d'une compétence partagée entre les communes, les départements et les régions dans le domaine du sport . Dans son exposé des motifs, le projet de loi entendait prendre en compte la nécessité « au vu de la diversité des situations et du caractère transversal de ces domaines, de maintenir une possibilité d'intervention de chaque niveau de collectivité territoriale ».

• L'article 105 de la loi ouvre la faculté de mettre en place un guichet unique pour l'ensemble des aides et subventions distribuées par les collectivités territoriales, dans un souci de simplification à l'égard de l'usager. Dans ces conditions, dans un domaine de compétence partagée, l'État, une collectivité territoriale ou un EPCI à fiscalité propre peut déléguer à une autre personne publique l'instruction et l'octroi des aides et subventions qui relèvent de sa compétence. La mise en place d'une instruction unique des dossiers de demande de subvention devait permettre de mieux coordonner les interventions croisées des collectivités territoriales et de rationaliser l'octroi de financements publics en limitant leur cumul, tout en facilitant les démarches des porteurs de projets. Près de quatre ans après l'adoption de cette disposition, force est de constater qu'elle n'a été que très peu utilisée. La mise en place de l'ANS pourrait permettre de substituer un dispositif obligatoire à un cadre facultatif et un guichet commun à un guichet unique.

Par ailleurs, on peut rappeler que la loi NOTRe n'a pas prévu d'établir une commission thématique permanente dédiée au sport sur le modèle de celle créée pour la culture par l'article L 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales.

I. LA CLAUSE DE COMPÉTENCE PARTAGÉE : PRINCIPE FONDAMENTAL DES POLITIQUES TERRITORIALES DU SPORT

A. UNE COMPÉTENCE RECONNUE PUIS CONFORTÉE PAR LES LOIS DE DÉCENTRALISATION

1. Une compétence des collectivités territoriales largement sollicitée

L'intervention des communes dans les politiques sportives repose sur la clause de compétence générale définie à l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales ( « le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune ») .

Le même principe valait jusqu'à 2010 pour les conseils généraux (article L. 3211-1 du même code) issu de l'article 23 de la loi du 2 mars 1982 et pour les conseils régionaux (article L. 4221-1 du même code) issu de l'article 23 de la loi du 6 janvier 1986.

Cette liberté d'action des collectivités territoriales a permis leur très forte implication dans le financement des politiques du sport.

La dépense des collectivités locales en faveur du sport s'établit à 12,1 milliards d'euros en 2012 5 ( * ) . La contribution la plus élevée est celle du secteur communal estimée à 10,8 milliards d'euros (communes, groupements de communes, syndicats de communes, exceptés les syndicats à vocations multiples dont l'activité ne peut pas être ventilée, et les établissements publics de coopération intercommunale). Les dépenses du secteur communal sont principalement affectées au soutien à la construction et au fonctionnement d'équipements sportifs, scolaires notamment . Le secteur communal verse également des subventions aux associations sportives pour la réalisation de leurs projets, soutiennent des manifestations sportives et prennent en charge des services locaux chargés de la gestion sportive.

Les départements et les régions participent au financement d'équipements sportifs et au soutien d'associations et de manifestations sportives. Ils apportent également des aides au sport de haut niveau. En 2012, la dépense des départements est estimée à 730 millions d'euros (66 % en fonctionnement et 34 % en investissement). La dépense sportive des régions atteint 589 millions d'euros en 2012 , après 699 millions d'euros en 2011 (51 % en fonctionnement et 49 % en investissement).

2. Une « compétence partagée » depuis la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010

La loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010, qui a modifié l'article L. 1111-4 du code général des collectivités territoriales, prévoyait de supprimer la clause de compétence générale, à l'exception de trois domaines dans lesquels la compétence est partagée. Le sport fait partie de ces exceptions : « les compétences attribuées par la loi aux collectivités territoriales le sont à titre exclusif. Toutefois, la loi peut, à titre exceptionnel, prévoir qu'une compétence est partagée entre plusieurs catégories de collectivités territoriales. Les compétences en matière de tourisme, de culture et de sport sont partagées entre les communes, les départements et les régions » .

L'article 104 de la loi NOTRe du 7 août 2015 s'est donc inscrit dans le prolongement de la loi de 2010 en modifiant l'article L. 1111-4 du code général des collectivités territoriales afin de prévoir que : « Les compétences en matière de culture, de sport, de tourisme, de promotion des langues régionales et d'éducation populaire sont partagées entre les communes, les départements, les régions et les collectivités à statut particulier ».

Ce même article L. 1111-4 du code général des collectivités territoriales a été modifié par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté qui a étendu l'application de la clause de compétence partagée à la promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes tout en la maintenant pour le sport 6 ( * ) .

On est donc passé au fil du temps d'une clause de compétence générale à une compétence partagée sur le sport et les subventions peuvent être accordées sans limitation de cumul . Cette situation est conforme au principe de libre administration des collectivités mais elle rend difficile la lisibilité et l'évaluation de leur action . C'est pourquoi le législateur de 2010 prévoyait la possibilité pour les départements et les régions de réaliser des schémas d'organisation des compétences et de mutualisation des services permettant de fixer les délégations de compétences réciproques, d'organiser les interventions financières et de prévoir les conditions d'organisation et de mutualisation des services.

Les conférences territoriales de l'action publique (CTAP) mises en place par les lois du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles (MATPAM) et du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République n'ont pas réussi selon un rapport de l'IGA 7 ( * ) « à faire émerger un pacte de gouvernance locale » . Leur composition est critiquée et leur fonctionnement considéré comme trop lourd. Si les élus ne demandent pas la suppression de la CTAP, le dispositif n'est pas considéré comme suffisant pour moderniser la gouvernance locale , en particulier dans le cadre d'une compétence partagée comme le sport.

B. UN ATTACHEMENT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES À LA CLAUSE DE COMPÉTENCE PARTAGÉE TOUJOURS D'ACTUALITÉ

1. L'impossibilité de « répartir » la compétence partagée dans le domaine du sport

La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République n'a pas permis de réformer les politiques territoriales du sport alors même qu'un débat existait déjà sur leurs objectifs et leurs modalités d'organisation. L'ensemble des associations d'élus ont en effet défendu, lors du débat, le maintien de cette clause, en expliquant qu'il n'était pas souhaitable de confier la compétence sport à une seule catégorie de collectivité compte tenu de l'importance de la politique du sport dans le développement territorial et de son utilité dans la mise oeuvre de politiques sociales inclusives.

Les associations d'élus ont également décliné toute évolution vers une compétence « répartie » qui aurait vu chaque niveau de collectivité se voir attribuer un aspect de la politique du sport (haute performance pour la région, sport nature pour le département, équipements pour les intercommunalités et les communes etc...) au motif qu'il n'est pas possible de tracer une frontière entre les compétences. Il est vrai que le département intervient dans le handisport et que la région est aussi compétente pour le sport scolaire à travers les lycées. Les différents niveaux de collectivités sont très attachés à pouvoir mettre en oeuvre des actions transversales dans le domaine du sport afin de répondre au mieux aux spécificités territoriales 8 ( * ) .

Le maintien de la clause de compétence partagée a eu pour conséquence de ne pas pouvoir répondre aux problèmes qu'elle engendre , qu'il s'agisse du saupoudrage des subventions, de l'absence de vision globale sur le territoire ou des difficultés que rencontrent les plus petits clubs pour financer leurs projets.

En définitive, la capacité d'action de chaque acteur a été préservée sans que de véritables progrès n'aient été opérés en termes de coopération malgré l'ouverture de la possibilité de recourir à un « guichet unique ». Le rôle du CNDS n'a pas véritablement évolué, ce qui a sans doute précipité sa disparition à l'occasion de la création de l'Agence nationale du sport.

Faute d'avoir pu rénover la politique territoriale du sport à l'occasion d'une loi portant sur l'administration territoriale, celle-ci a été profondément remaniée à l'initiative du Gouvernement et à l'issue d'une concertation menée avec le mouvement sportif et les associations d'élus dans le cadre de la préparation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, le Parlement intervenant ex post et in extremis afin de préciser dans la loi le détail de l'organisation territoriale de cette nouvelle politique.

Le CNDS appelé à se fondre dans l'ANS

Le Gouvernement a annoncé en 2018 la suppression du CNDS et son intégration dans l'Agence nationale du sport. Cette annonce a créé des interrogations sur la période transitoire en attendant que l'Agence nationale du sport devienne véritablement opérationnelle 9 ( * ) .

Selon Mathilde Gouget, alors secrétaire générale du CNDS 10 ( * ) , les engagements du CNDS qui s'élèvent à 217 M€ seront repris par l'ANS ainsi que le personnel. Le siège de l'Agence sera établi au CNDS avant un déménagement en fin d'année afin de pouvoir accueillir 60 agents au total.

Afin d'assurer une transition harmonieuse, le conseil d'administration de février 2019 du CNDS a engagé les crédits relatifs aux parts territoriale et d'équipement afin d'assurer la continuité des projets en 2019. Les commissions territoriales ont par ailleurs été maintenues en 2019 dans l'attente de la mise en place d'un « véhicule » pour 2020. Dès le printemps dernier, il était aussi apparu qu'il serait nécessaire de préciser dans la loi les modalités de fonctionnement de l'ANS au niveau territorial, un GIE ne pouvant mobiliser les services de l'État.

Sur le plan financier, il convient de rappeler que la loi de finances pour 2019 a prévu de transférer les recettes affectées du CNDS (146 M€) à l'Agence nationale du sport. La trésorerie du CNDS a, par ailleurs, basculé vers l'agence dès sa création en mai 2019. Une subvention issue des crédits du programme 2019 doit également permettre de financer les conventions d'objectifs avec les fédérations.

Une expérimentation a, par ailleurs, été engagée afin de favoriser l'autonomie des fédérations sportives à travers les projets sportifs fédéraux. Une trentaine de fédérations ont ainsi obtenu la possibilité d'instruire elles-mêmes les demandes de subvention en lieu et place des commissions territoriales. L'objectif est de permettre à l'ensemble des fédérations de gérer cette part territoriale d'ici 2020. Toutefois, 80 M€ sur les 112 M€ qui représentent la part territoriale devraient en 2019 être toujours affectés par le biais des commissions territoriales.

Selon Mathilde Gouget, secrétaire générale du CNDS : « on constate que les fédérations n'ont pas des objectifs très différents. L'augmentation de la pratique les amène également à développer la pratique féminine et à cibler les territoires carencés ».

2. Vers une gouvernance « coordonnée » de la compétence sport ?

Les difficultés rencontrées pour organiser les actions de chaque niveau de collectivité en partant du terrain ont permis à une réflexion plus globale sur la gouvernance de la politique du sport de prendre corps. Initiée par l'État, une concertation a été conduite associant tous les acteurs : ministère du sport, mouvement sportif, monde économique et représentants des collectivités territoriales. Cette réflexion a bénéficié du contexte créé par l'attribution à la ville de Paris des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Un sentiment d'urgence à réformer notre modèle sportif hérité des années 1960 a permis en quelques mois d'aboutir au projet de créer une Agence nationale du sport en charge tant de la haute performance que du sport pour tous.

Autant la haute performance constitue l'apanage de l'État, du mouvement sportif et, dans une moindre mesure, des régions depuis la décentralisation des CREPS, autant le sport pour tous est d'abord l'affaire des collectivités territoriales et au premier chef du bloc communal . Or, comme l'a rappelé le directeur général de l'ANS, Frédéric Sanaur, lors de son audition par vos rapporteurs, l'objectif recherché avec la création de l'agence tient d'abord dans l'effet de levier. Le financement public apporté par l'agence viendra le plus souvent boucler un tour de table. L'efficacité de l'agence tiendra donc moins dans le volume des crédits accordés que dans la sélectivité des projets.

Selon Frédéric Sanaur qui s'appuie sur les méthodes mises en place pour examiner les 600 dossiers relatifs à des projets d'équipement, les instances de l'agence analysent chaque dossier au regard de sa plus-value sportive et de sa solidité financière. L'objectif est d'aboutir à une décision consensuelle entre les différents partenaires pour identifier les projets les plus prometteurs et les plus fédérateurs. La même logique sera recherchée pour décider du soutien à apporter aux projets territoriaux dans le cadre des conférences des financeurs. Cette démarche d'évaluation de la qualité des projets nécessite de mettre en place une ingénierie pour permettre l'enregistrement des dossiers, leur analyse et la prise de décisions. Si le Sénat a inscrit dans la loi du 1 er août 2019 les principes fondamentaux relatifs aux conférences des financeurs du sport, les modalités pratiques de leur fonctionnement devront être précisées dans le décret d'application qui devrait être adopté début 2020 selon les responsables de l'ANS.

Les travaux préparatoires à la rédaction de ce décret visent donc à organiser la compétence partagée des collectivités territoriales afin que celles-ci puissent intervenir aux côtés du mouvement sportif, du monde économique et de l'État afin de choisir les projets les plus prometteurs.

Concernant l'organisation de cette gouvernance territoriale du sport, le président du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), Denis Masseglia, a estimé que la part de l'État dans la répartition des votes au sein des conférences des financeurs du sport pourrait baisser afin de réserver une part plus importante aux collectivités territoriales, de l'ordre de 40 %, les autres partenaires se partageant les 60 % restants.

C. DES AVANCÉES LÉGSILATIVES À CONFORTER DANS LE CADRE DES DISPOSITIONS D'APPLICATION RÉGLEMENTAIRES

1. Une gouvernance territoriale de l'ANS largement précisée au Sénat

La loi NOTRe n'ayant pas permis de faire évoluer la compétence partagée en matière de sport, ne serait-ce que pour essayer d'organiser le rôle de chacune des collectivités, c'est une autre voie qui a été suivie à travers la création d'une agence ayant le statut de groupement d'intérêt public (GIP) dont la mission principale est de mutualiser des soutiens à des projets sélectionnés en commun afin de renforcer l'effet de levier et éviter le saupoudrage des crédits.

Le projet de loi déposé en premier lieu sur le bureau du Sénat le 12 juin 2019 portant ratification de l'ordonnance n° 2019-207 du 20 mars 2019 relative aux voies réservées et à la police de la circulation pour les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 comprenait trois articles dont un consacré à l'Agence nationale du sport. Cet article a été rajouté in extremis pour répondre aux objections soulevées par le Conseil d'État quant à la nécessité de prévoir dans la loi certains aspects du statut de la nouvelle Agence nationale du sport.

L'article 3 du projet de loi prévoyait ainsi que la nouvelle agence était « chargée de favoriser le sport de haut niveau et la haute performance sportive, en particulier dans les disciplines olympiques et paralympiques, et de développer l'accès à la pratique sportive, dans le cadre de la stratégie définie par l'État dans une convention d'objectifs signée par l'Agence et l'État » . Ses modalités d'action étaient évoquées dans des termes très généraux puisque le texte précisait seulement qu'il lui revenait d'apporter « son concours aux projets et aux acteurs, notamment les fédérations sportives, contribuant au sport de haut niveau, à la haute performance sportive et au développement de l'accès à la pratique sportive » . Il n'était donc pas précisé explicitement dans le texte initial que l'agence avait pour vocation de soutenir les projets initiés par les collectivités territoriales . Seul le régime juridique du GIP, les relations avec l'État, les ressources financières et les contrôles des juridictions et des autorités administratives étaient mentionnés, le Gouvernement prévoyant de développer les autres actions de l'agence par voie réglementaire.

L'examen de ce projet de loi par le Sénat en première lecture a permis de compléter de manière importante le texte en le recentrant sur la création de l'Agence nationale du sport et en définissant précisément sa gouvernance territoriale.

La loi du 1 er août 2019 prévoit ainsi la création dans chaque région d'une conférence régionale du sport. Cette conférence comprendra des représentants de l'État, des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de sport, du ou des centres de ressources, d'expertise et de performance sportive, du mouvement sportif et des autres personnes physiques et morales intéressées par le développement du sport, en particulier les organisations professionnelles représentatives des acteurs du monde économique.

La conférence régionale du sport sera chargée d'établir un projet sportif territorial tenant compte des spécificités territoriales et ayant pour objet :

1° Le développement du sport pour toutes et tous sur l'ensemble du territoire ;

2° Le développement du sport de haut niveau ;

3° Le développement du sport professionnel ;

4° La construction et l'entretien d'équipements sportifs structurants ;

5° La réduction des inégalités d'accès aux activités physiques et sportives ;

6° Le développement des activités physiques et sportives adaptées aux personnes en situation de handicap ;

7° La prévention de et la lutte contre toutes formes de violences et de discriminations dans le cadre des activités physiques et sportives pour toutes et tous ;

8° La promotion de l'engagement et du bénévolat dans le cadre des activités physiques et sportives.

Le projet sportif territorial donnera lieu à la conclusion de contrats pluriannuels d'orientation et de financement qui devront préciser les actions que les membres des conférences des financeurs du sport s'engagent à conduire ainsi que les ressources humaines et financières et les moyens matériels qui leur seront consacrés, dans la limite des budgets annuellement votés par chacun de ces membres . À noter que, si ces engagements pris au niveau régional s'inscriront dans le cadre d'une démarche de programmation stratégique, leur mise en oeuvre restera soumise à l'élaboration d'un plan de financement au niveau local.

Afin d'assurer une certaine cohérence entre l'action respective de la conférence régionale du sport et celle des conférences territoriales de l'action publique, l'article L. 112-14 du code du sport prévoit que la conférence régionale du sport devra être consultée lors de l'élaboration du projet de convention territoriale d'exercice concerté de la compétence sport avant son adoption par la conférence territoriale de l'action publique prévue à l'article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales.

À noter, enfin, que la conférence régionale du sport élit son président en son sein. Cette précision ajoutée lors du débat parlementaire visait à prévenir toute mainmise de l'État sur la gouvernance territoriale de l'Agence au niveau territorial.

Autre apport important du Sénat, le code du sport a été enrichi d'un nouvel article L. 112-15 qui prévoit que « chaque conférence régionale du sport institue, dans le respect des spécificités territoriales, une ou plusieurs conférences des financeurs du sport » . Celles-ci sont composées de représentants de l'État, des régions 11 ( * ) , des communes, des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de sport, des métropoles 12 ( * ) , du ou des centres de ressources, d'expertise et de performance sportive, du mouvement sportif 13 ( * ) et du monde économique 14 ( * ) .

La loi prévoit que toute autre personne physique ou morale susceptible de contribuer à la mise en oeuvre du projet sportif territorial peut participer à la conférence sous réserve de l'accord de la majorité des membres de droit.

Enfin, et c'est un autre apport important du Sénat, la loi dispose que la conférence des financeurs du sport élit son président en son sein , ce qui exclut a priori une présidence exercée par un représentant de l'État.

2. Des précisions réglementaires et conventionnelles à suivre avec vigilance

L'inscription dans la loi à l'initiative du Sénat des principes essentiels de la gouvernance territoriale de l'ANS a eu pour mérite d'accélérer le déploiement de l'Agence sur le terrain. Alors qu'au printemps dernier les représentants des associations d'élus estimaient que la gouvernance territoriale ne prendrait pas forme avant au moins deux ans , le directeur général de l'ANS estime maintenant que l'agence sera opérationnelle au premier trimestre 2020. L'initiative du Sénat a donc permis d'accélérer le calendrier et de permettre au sport pour tous d'être traité avec les mêmes attentions que le sport de haut niveau .

Pour autant, à la demande des représentants des collectivités, de nombreux aspects de la gouvernance territoriale n'ont pas été tranchés dans le cadre de la loi du 1 er août 2019 afin de préserver une nécessaire souplesse et de laisser du temps pour la concertation entre les acteurs. Il revient donc aux décrets d'application prévus par les nouveaux articles L. 112-14 et L. 112-15 du code du sport de déterminer le détail des modalités d'application de la gouvernance territoriale.

Le contenu des décrets d'application sera d'autant plus essentiel qu'il reviendra à clarifier dans les faits les modalités de l'exercice coordonné de la compétence partagée dans le sport tant à travers la définition de la stratégie territoriale que des modalités d'attribution des subventions . L'incertitude sur le contenu des décrets d'application est d'autant plus grande que les associations d'élus auditionnées ont pu donner le sentiment de ne pas avoir une position commune parfaitement établie. Le risque existe dans ces conditions que les décrets viennent limiter la dimension décentralisatrice de la réforme.

Plusieurs aspects ont en particulier retenu l'attention de vos rapporteurs. Si la loi précise que les conférences régionales des sports et les conférences de financeurs élisent leurs présidents, la loi n'a pas déterminé sur quelles structures permanentes elles pourront s'appuyer. Or, il n'est pas indifférent que le secrétariat général de ces conférences soit assuré par les services de l'État ou des moyens mobilisés par les collectivités territoriales.

De même, les contours des conférences des financeurs du sport n'ont pas été arrêtés afin de laisser de la souplesse . Pour autant, il semble difficile d'imaginer que la création de ces conférences ne réponde à aucune règle précise et que les structures se multiplient pour répondre à chaque demande locale. L'organisation de la compétence partagée justifie précisément de structurer le territoire afin en particulier, de clarifier les règles du jeu pour les petites communes et les petits clubs qui avaient du mal jusqu'à présent à se situer aux carrefours des flux de subventions.

Outre les dispositions réglementaires attendues, vos rapporteurs souhaitent demeurer vigilants sur les dispositions conventionnelles prévues par la loi pour préciser la répartition exacte des rôles et des moyens entre l'État et l'Agence nationale du sport. Le ministère des sports revendique en effet de conserver une influence sur les projets locaux à travers l'effet de levier constitué par les crédits attribués à l'ANS. Il est dans ce cas légitime pour les collectivités territoriales et le mouvement sportif d'exiger que cette influence de l'État soit proportionnelle aux moyens qu'il entend attribuer à l'agence. Or, les premières indications budgétaires présentées dans le cadre du PLF 2020 laissent entrevoir des crédits significativement inférieurs au montant des moyens identifiés comme nécessaires.

Vos rapporteurs souhaitent donc rappeler l'État à ses engagements y compris sur le plan des moyens. Ce sera le sens des douze préconisations présentées dans la dernière partie du présent rapport d'information.

II. UNE ÉVOLUTION DE LA GOUVERNANCE TERRITORIALE DU SPORT À LA FOIS ATTENDUE ET REDOUTÉE SELON LES RÉPONSES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Afin de mieux comprendre comment les collectivités territoriales exercent leurs compétences en matière de sport, vos rapporteurs ont interrogé les conseils régionaux et les conseils départementaux par voie de questionnaire au cours de l'été 2019. Une trentaine de réponses ont été reçues et permettent de dresser un tableau assez diversifié des politiques menées par ces deux niveaux de collectivités. Ces réponses étoffées complètent les échanges menés par ailleurs avec les représentants des communes et des intercommunalités.

L'attachement à la clause de compétence partagée apparaît comme une dominante parmi les réponses . Corollaire du principe de libre administration, cette liberté d'action permet d'adapter les actions aux moyens et de permettre l'implication des collectivités. Si les collectivités sont plutôt bienveillantes par rapport aux évolutions en cours concernant en particulier la création de l'Agence nationale du sport, elles seront vigilantes à ce que la gouvernance locale de l'agence ne sacrifie ni la proximité, ni leur liberté de choix .

A. DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES PARTICULIÈREMENT IMPLIQUÉES DANS LES POLITIQUES DU SPORT

1. La transversalité de la compétence sport revendiquée par les départements

Les collectivités accordent une grande importance aux politiques territoriales du sport. Le département des Hauts-de-Seine explique ainsi qu' « au-delà du simple plaisir de la pratique, le sport est un moyen d'éducation et de formation qui, outre la transmission de savoirs et de techniques, doit porter des valeurs de partage et de citoyenneté » .

Les réponses au questionnaire permettent d'établir que les collectivités territoriales envisagent leur politique sportive de manière dynamique. Le département du Bas-Rhin par exemple a adopté de nouveaux objectifs en octobre 2018 autour du sport nature, du sport pour tous, du sport comme levier d'épanouissement et de réussite des collégiens et autour de l'accompagnement de l'excellence sportive.

Le département de l'Aveyron apparaît représentatif des territoires ruraux. Il utilise sa politique sportive afin de développer des actions transversales fondées sur de grandes thématiques développées en cohérence avec des enjeux de territoire : attractivité, qualité de vie, formation des jeunes... C'est pourquoi ses élus considèrent que la compétence partagée permet de « conduire des actions multiples et bien ciblées adaptées aux besoins de publics variés et à des particularités locales ».

Le département de la Creuse, autre territoire rural, précise qu'il intervient « dans le domaine sportif en complément des financements apportés par les autres partenaires publics » . La compétence partagée apparaît donc également comme une nécessité lorsque les moyens de la collectivité sont limités.

Le département du Finistère mentionne les contrats de territoires signés avec les EPCI pour planifier la création et la rénovation des équipements sportifs comme une dimension de l'exercice de la compétence partagée. La participation à la Conférence bretonne du sport est également évoquée.

L'exercice de la compétence partagée est, par ailleurs, dépendant des circonstances propres à certains territoires. La création de la collectivité de Corse en 2018 regroupant les deux départements et la région a créé un interlocuteur unique pour les communes. Pour la nouvelle collectivité : « si le législateur n'a pas désigné de chef de file pour cette compétence, la collectivité de Corse est incontestablement le leader naturel du projet sportif territorial » .

La région Grand Est a indiqué que chaque niveau de collectivité avait « une totale liberté d'intervention » . Cependant « pour certains dossiers exceptionnels ou sensibles, comme l'accueil d'un Grand événement sportif international (GESI), un projet d'investissement sportif ou les difficultés financières d'un club, il est devenu habituel que toutes les collectivités concernées se réunissent à l'initiative de l'une d'entre elle, de manière technique ou politique, pour échanger sur leurs possibilités d'intervention et se positionner de manière conjointe face au porteur de projet ».

2. Une implication variable selon les moyens et les objectifs de la collectivité

Les collectivités territoriales développent des politiques locales qui s'inscrivent dans la durée . L'adoption de la loi NOTRe n'a donc pas constitué une rupture dans la mise en oeuvre de la compétence sport.

Le département du Lot-et-Garonne indique qu'il n'a pas modifié la nature et les modalités de son soutien en faveur du sport compte tenu du principe de la compétence partagée. Comme beaucoup d'autres départements, il est un financeur essentiel du mouvement sportif (clubs, haut niveau, emploi sportif, sport scolaire, acquisition de matériel...) et assure, par ailleurs, une mission de développement des sports et loisirs de nature compte tenu de sa compétence législative.

L'absence de compétence obligatoire permet également à certaines collectivités d'ajuster leur engagement . C'est le cas du département du Bas-Rhin qui a décidé de « revoir à partir de 2015 ses crédits à la baisse et de supprimer des aides au sport de haut niveau, aux manifestations sportives d'envergure nationales et internationales et aux déplacements des équipes de sport collectif en championnat de France » .

Le département de la Creuse « maintient son effort en direction du sport traditionnel, tout en structurant et en développant ses actions avec les partenaires dans le champ des activités de pleine nature » . Le département de l'Allier met l'accent sur les projets dans le domaine des sports de nature.

L'Aveyron développe des partenariats pour accompagner des projets qui permettent de renforcer l'attractivité des territoires. Cela se concrétise par « des aides à l'investissement proposées aux collectivités locales qui développent des projets d'équipements sportifs structurants » .

Le département de la Haute-Saône revendique une politique volontariste en matière sportive à travers notamment le soutien au financement des équipements sportifs. Pour cette collectivité « le sport fait partie des éléments qui permettent de transmettre à notre jeunesse des valeurs éducatives complémentaires à l'enseignement scolaire ou à l'éducation au sein des familles ».

La politique en faveur du sport n'est pas nécessairement immuable comme le témoigne le département du Bas-Rhin pour lequel : « la nécessaire recherche de cohérence et un besoin de repositionnement a conduit les élus départementaux à revoir leurs objectifs en adoptant une nouvelle politique sportive en octobre 2018, axée autour des sports de nature, du sport pour tous, du sport comme levier d'épanouissement et de réussite des collégiens et autour de l'accompagnement de l'excellence sportive ». Le conseil départemental a en conséquence recentré ses aides sur les publics prioritaires (collégiens, personnes handicapées, personnes en insertion, séniors) au détriment de manifestations médiatiques.

Certaines collectivités choisissent également d'investir une dimension particulière de la politique sportive. C'est le cas du département de la Sarthe qui s'est investi dans le soutien au sport amateur en lien avec le mouvement sportif : « le soutien au sport amateur se traduit essentiellement par la mise en place, depuis 2007, de contrats d'objectifs avec les comités sportifs départementaux, qui sont nos principaux interlocuteurs et qui représentent les clubs du département » . Par ailleurs, il a choisi d'intégrer le service des sports du conseil départemental au sein de la Maison départementale des sports 15 ( * ) considérant que « cette proximité du service des sports avec le mouvement sportif permet de collaborer efficacement sur des actions de développement » .

D'autres départements décident de se doter d'un équipement structurant permettant l'organisation de grands événements internationaux. C'est en particulier le cas du département de Vendée qui a décidé de « réaliser en 2012 un équipement sportif structurant de haut niveau ; le Vendespace. C'est le seul équipement de Vendée permettant d'organiser, en site couvert, l'organisation de stages et de compétitions régionales, nationales et internationales » .

À noter enfin que de nombreuses collectivités souhaitent obtenir le label « Terre de jeux 2024 » et se sont rapprochées des comités départementaux olympiques. Dans cette perspective, le département de Saône-et-Loire a, par exemple, noué un partenariat avec les 5 principales villes du département. Le département du Loir-et-Cher a choisi de mettre en place un dispositif permettant d'accompagner les sportifs de haut niveau dans leur préparation en vue des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2020, 2022 et 2024. Douze athlètes bénéficient dans ce cadre d'une aide financière.

Le département de l'Allier « accompagne la Communauté d'agglomération de Vichy pour l'obtention du label « Terre de jeux », pré-requis pour que le CREPS de Vichy puisse être retenu comme centre de préparation aux Jeux Olympiques de 2024 ».

En Ile-de-France, les collectivités sont particulièrement concernées par la préparation des Jeux Olympiques et Paralympiques. Le département des Hauts-de-Seine a ainsi « lancé un projet d'investissement consistant à réaménager le stade départemental Yves-du-Manoir afin d'accueillir la Fédération française de Hockey et son centre national d'entraînement et d'offrir aux usagers sportifs, notamment football et rugby, de nouvelles installations modernes et innovantes ».

B. LA DÉCENTRALISATION RÉUSSIE DES CREPS N'A PAS ENCORE PERMIS D'ASSOCIER TOUS LES ACTEURS LOCAUX

1. Des départements insuffisamment associés au fonctionnement des CREPS

Les régions sont les premières concernées par les CREPS depuis les transferts intervenus le 1 er janvier 2016 du foncier et des missions d'accueil, d'hébergement, de restauration et de maintenance. La région Grand Est qui dispose de 3 CREPS a ainsi mené une réflexion stratégique qui a abouti à la signature de conventions d'objectifs en novembre 2018. Mais ces réflexions n'accordent pas une place significative aux autres collectivités présentes sur le territoire national. Cette situation se retrouve au niveau national pour l'ensemble des CREPS qui semblent fonctionner dans une relation limitée à la région et à l'Etat.

Les relations entre les départements et les CREPS apparaissent en particulier réduites. Le département de Saône-et-Loire évoque par exemple « un soutien prévu aux sportifs individuels pouvant fréquenter le CREPS » .

Le département de l'Aveyron indique que ses actions de formation concernent essentiellement les éducateurs sportifs ; or, ces actions relèvent d'un partenariat avec le mouvement sportif au niveau départemental. L'Aveyron n'a donc pas d'interactions avec les CREPS y compris en matière de haute performance et d'aide à la performance .

Le département de Haute-Saône explique qu'il n'interagit pas avec le CREPS car « il n'y a pas de CREPS sur notre territoire 16 ( * ) » . Le département du Haut-Rhin déclare également qu' « il n'existe à ce jour aucune interaction entre les CREPS du Grand Est 17 ( * ) et le département du Haut-Rhin » . Il en est de même pour l'Aube, l'Aveyron, la Creuse, le Lot-et-Garonne et la Somme ainsi que pour la Sarthe laquelle « n'a pas aujourd'hui de relation avec le CREPS des Pays de la Loire (Nantes) ».

Certains départements en zone urbanisée peuvent développer leur propre structure alternative aux CREPS . C'est le cas du Val d'Oise qui est propriétaire d'un équipement structurant, le Centre départemental de Formation et d'Animation Sportives du Val d'Oise (CDFAS). Compte tenu de cet équipement propre « le département interagit modérément avec le CREPS de Chatenay-Malabry (CREPS d'Île-de-France) si ce n'est par le biais d'une convention de partenariat visant à fixer des éléments de « bonne entente » voire de « non concurrence » entre ces deux entités. Le département via le CDFAS satisfait totalement ses propres besoins (comités, sport de haut niveau...) inhérents à l'utilisation du site ».

Les réponses au questionnaire indiquent que les CREPS n'ont pas nécessairement une audience régionale, ils restent liés à leur territoire de résidence, métropolitain ou départemental .

Plus étonnant encore, les coopérations entre un CREPS et son département de rattachement peuvent être également très limitées. Le département du Bas-Rhin indique en effet qu'il « n'a que très peu de contacts avec le CREPS de Strasbourg » . Le département des Hauts-de-Seine est représenté au conseil d'administration du CREPS d'Île-de-France mais cela ne semble pas donner lieu à des actions menées en commun.

A contrario , des coopérations peuvent aussi exister comme dans les Landes où « au titre d'une convention avec le département propriétaire du site, le CREPS Nouvelle Aquitaine dispose d'une antenne (formation BPJEPS) au sein de l'Académie du surf à Soustons » .

Un autre exemple de coopération concerne le département de l'Allier qui va contribuer aux futurs travaux de rénovation des équipements du CREPS Auvergne-Rhône-Alpes/Vichy. Chaque année, le département verse une subvention de fonctionnement au CREPS dans le cadre du financement du centre de formation de la JAVCM (Jeanne d'Arc Vichy - Clermont - Métropole), club de basket-ball évoluant en Pro B.

L'absence de liens entre CREPS et départements n'est donc pas irrémédiable.

2. Des régions dépourvues de CREPS en attente d'une évolution des moyens et des missions

Trois régions - la Bretagne, la Corse et la Normandie - ne disposaient plus de CREPS au moment de la décentralisation opérée en 2015 et n'ont donc pu bénéficier du dynamisme consécutif à la régionalisation de ces structures engagée par la loi NOTRe.

La collectivité de Corse indique que : « le CREPS de Corse, situé à Ajaccio, a fermé ses portes en janvier 2010 à la grande incompréhension des acteurs. Il semblait en effet à l'époque tout à fait étonnant de priver le territoire insulaire d'un service public reconnu par tous les acteurs comme indispensable » . Les collectivités de l'île ont de ce fait créé une régie autonome, le Centre du Sport et de la Jeunesse de Corse. Le CSJC « assume toutes les missions d'un CREPS du réseau national en y apportant une perspective plus large » indique la collectivité de Corse qui souhaite par ailleurs que la structure puisse à nouveau « piloter le haut niveau comme les CREPS le feront ailleurs » .

La région Bretagne rappelle pour sa part que le CREPS a disparu en 2010 pour laisser la place à un Campus organisé sous forme de GIP 18 ( * ) . Le Campus est opérateur dans 4 secteurs : le sport de haut niveau, la formation, la recherche fondamentale et appliquée ainsi qu'un centre de ressources sport-santé, et l'accueil des stages.

Le CREPS d'Houlgate a fermé en 2009 avant de rouvrir en 2010 sous format associatif en tant que Centre sportif de Normandie (CSN) avec la région comme chef de file. La région préside le CSN, est propriétaire du site d'Houlgate, met des personnels à disposition et verse une subvention d'équilibre. La gouvernance a évolué cette année avec la transformation en GIP associant le CROS et l'État. La région souhaite maintenant « faire du CSN un levier opérationnel de sa politique sportive, avec deux objectifs complémentaires : positionner le CSN comme la structure ressource du sport et des territoires normands et renforcer et moderniser le CSN pour en faire un lieu d'excellence du sport en France » .

L'intérêt des départements pour les CREPS dans les régions qui en sont dépourvues est aussi perceptible. Le département de la Manche estime ainsi qu' « il n'y a pas de CREPS dans le département. Le CREPS le plus proche, jusqu'à sa fermeture en 2009, était celui d'Houlgate, devenu aujourd'hui Centre sportif de Normandie. La structure ayant une vocation et un rayonnement régional, le département pourrait intégrer un schéma de gouvernance » . La participation à la gouvernance ne suffit néanmoins pas à garantir les coopérations, le département de la Meurthe-et-Moselle étant représenté au conseil d'administration du CREPS sans qu'il existe de relation particulière avec le département.

L'absence de maillage territorial autour des CREPS comme les lacunes dans la couverture territoriale en métropole comme dans les Outre-mer rendent nécessaire une réflexion stratégique sur le rôle territorial des CREPS et leur partenariat avec l'ensemble des collectivités .

C. UNE ÉVOLUTION DES POLITIQUES TERRITORIALES DU SPORT CONDITIONNÉE PAR UNE NOUVELLE ORGANISATION

1. L'impossible remise en cause de la compétence partagée

Rares sont les collectivités à appeler de leurs voeux une évolution de la clause de compétence partagée même si certaines reconnaissent les difficultés rencontrées. Pour le département de la Manche par exemple : « un certain manque de lisibilité (« qui finance quoi ? ») peut être constaté. L'intervention des différents échelons se fait, parfois, sans réelle concertation (exemple : subvention de fonctionnement des associations sportives, soutien aux manifestations sportives). Une clarification entre collectivités permettrait une meilleure allocation des ressources, d'apporter de la cohérence et de la complémentarité » . Pour le département du Val d'Oise « une répartition plus claire des rôles éviterait très certainement certains « doublons » voire certains « enchevêtrements » de financements » .

La région Normandie considère difficile d'engager des discussions sur la structuration et la répartition des actions de chacun. Elle estime que « seule une loi de décentralisation avec répartition de compétences permettrait d'avancer significativement dans la structuration des politiques publiques du sport » . Pour l'avenir, elle demande à ce que la région soit positionnée comme « l'animatrice des politiques sportives sur les territoires » .

La région Bretagne demande également « de mettre la région comme chef de file à l'instar de ce qui a été mis en place au niveau de la jeunesse » .

Cette « clarification » ne constitue cependant pas une demande majoritaire en particulier du côté des départements. Ces collectivités sont soit partagées soit franchement hostiles à une telle évolution .

Le département du Finistère par exemple ne soutient pas les revendications de la région Bretagne. Il considère que « l'action publique en matière de sport présente un caractère très transversal. Préciser davantage la répartition des rôles peut amener à cloisonner encore davantage les pratiques, alors que les politiques publiques départementales sont pensées de manière globale et inclusive » .

Le département du Lot-et-Garonne se montre plutôt ouvert sur une évolution de la clause de compétence partagée afin de « financer le sport de manière plus efficace, en définissant des domaines d'intervention propres à chaque échelon territorial » mais il rappelle aussi qu'il y a lieu de « rester prudent sur une définition ».

Le président du département de la Haute-Saône, notre ancien collègue Yves Krattinger, est davantage opposé à une évolution : « une répartition des rôles ne me paraît pas adaptée, surtout si elle est rigide entre les différents financeurs, celle-ci bloquerait les capacités à financer certains projets » . Le département du Haut-Rhin met en valeur également que « la clause de compétence partagée est de nature à favoriser l'implication de toutes les strates de collectivités ». Le département de l'Aube indique de la même façon qu' « il est souhaitable de maintenir une possibilité d'intervention et d'initiative au même niveau pour chaque catégorie de collectivités, ce afin de pouvoir s'adapter à des réalités locales et aux spécificités de chacune des disciplines ». De même, le département de Meurthe-et-Moselle met en garde sur une répartition plus précise des rôles : « attention à ne pas trop figer les attributions de chaque collectivité. Les clubs sont heureux de bénéficier de différentes aides. Leur budget est plus facile à gérer surtout en cas de défaillance de l'une des collectivités ». Le département de la Somme est plus définitif encore dans son appréciation lorsqu'il indique que « l'exemple des travaux CTAP/CTEC démontre que cette répartition est assez peu souhaitée, et quoi qu'il en soit difficile à définir tant les disparités éloignent les objectifs des uns et des autres ».

Pour le département du Vaucluse : « il semble très compliqué de désigner des collectivités compétentes sur les domaines porteurs et obliger les autres à prendre en charge des actions moins valorisantes ». Dans le même registre, le département de Vendée considère qu' « une répartition des rôles très « administrative » reviendrait à cloisonner l'intervention des collectivités à tout niveau. D'ailleurs la nomination d'un chef de file s'imposerait pour coordonner le dispositif et entrainerait sûrement une démotivation chez les autres partenaires plus « passifs », ce qui à moyen terme serait négatif pour les objectifs attendus en terme d'animation et de développement des territoires ».

Pour le département de Saône-et-Loire : « trop de précision risquerait de laisser des domaines sans aucune aide. Attention à ne pas trop figer les règles d'un monde sportif qui est en constante évolution ».

De la même façon, le département des Hauts-de-Seine considère qu' « une répartition plus précise, si elle était mise en oeuvre, induirait une forme d'obligation pour avoir un sens et une certaine efficacité, alors même que les dépenses obligatoires pèsent déjà fortement sur les dépenses des collectivités ».

Le département du Bas-Rhin s'interroge aussi sur la possibilité de répartir les compétences en prenant l'exemple des sports de nature qui constituent une compétence des départements selon la loi 19 ( * ) . Il remarque en effet que « d'autres collectivités se saisissent de cette thématique par des entrées aussi variées que le sport de haut niveau, le tourisme, l'économie et finissent ainsi par brouiller la lisibilité et le statut de chef de file accordé aux départements » .

Cette difficulté à répartir la compétence partagée est également évoquée par le département de la Creuse qui mentionne que « les spécificités territoriales, les politiques menées et les moyens mobilisables peuvent rendre difficilement réalistes les hypothèses de répartition et spécialisation de chaque échelon territorial au niveau national ».

2. Les limites des mécanismes habituels de coopération

La coopération avec le bloc communal apparaît développée dans certains départements. Le département de l'Aveyron a ainsi créé « une agence départementale d'ingénierie dont l'objet est d'accompagner communes et groupements de communes dans l'exercice de leurs compétences et la réalisation de leurs projets » . Le département du Bas-Rhin propose également une ingénierie aux associations sportives et favorise la contractualisation avec les comités départementaux sportifs et des clubs autour de projets d'actions en lien avec les axes de sa politique sportive. L'ingénierie auprès des communes et des EPCI est aussi proposée par le département de la Creuse pour « mettre en oeuvre techniquement des projets d'équipements sportifs, de création de circuits de randonnée, VTT ou vélo-route ». De la même façon, le département de l'Hérault intervient « en expertise auprès des porteurs de projets. Cette fonction tend à se développer avec l'outil Hérault Ingénierie, dans le cadre de la mise en oeuvre de la compétence solidarité territoriale dont les départements ont la charge ».

Le département du Haut-Rhin évoque quant à lui des coopérations avec les communautés d'agglomération et les villes sur des sujets ponctuels ainsi que sur des projets de construction ou de réhabilitation d'équipements sportifs.

Le département de la Manche développe des coopérations avec l'ensemble des autres collectivités. Au niveau supra départemental, il conduit « un travail collaboratif avec la région Normandie et les autres départements normands sur plusieurs dispositifs d'aide à l'investissement (acquisition de matériel et de véhicules collectifs) afin de permettre un véritable effet de levier pour les clubs » . Au niveau infra départemental, « au titre de la politique contractuelle, le département accompagne financièrement les projets des communes et des intercommunalités (fonds d'investissement rural, contrat de territoire et contrat de pôle de services) permettant la rénovation et/ou la construction d'équipements sportifs et donc un maillage optimal/optimisé » .

Depuis 2017, le département de Vendée « a mis en place des contrats de territoires avec les 19 communautés de communes et la commune de l'Ile d'Yeu pour la période 2017-2020 ». À noter également que « parallèlement un travail partenarial a été mené avec la région des Pays-de-Loire pour mettre en place une plateforme mutualisée de dépôt des dossiers de demande de subvention au titre des contrats de territoire. Cet outil partenarial, offrant la possibilité de solliciter deux financeurs dans le cadre d'une demande unique, est une première en France ».

Les coopérations peuvent également être difficiles à mettre en oeuvre. Le Loir-et-Cher par exemple participe depuis octobre 2017 à une Conférence régionale du sport. Mais celle-ci ne s'est réunie qu'une fois en décembre 2018.

Toutefois, la coopération n'est pas généralisée puisque le département du Lot-et-Garonne déclare qu' « il n'y a pas de coopération ou de mutualisation spécifique entre les collectivités lot-et-garonnaises en matière de sport » . Il en est de même pour le département du Puy-de-Dôme pour qui « il n'y a pas de coopération ni de mutualisation avec les autres collectivités » .

Certaines collectivités évoquent des recherches de mutualisations qui n'ont pu aboutir. Le département de la Somme par exemple indique que « des travaux ont été entrepris en 2017-2018 avec la région Hauts-de-France et les 4 autres départements dans le cadre de la préparation d'éventuelles Conventions territoriales d'exercice concerté (CTEC). Ils n'ont pas abouti, et ont plutôt démontré les grandes disparités entre les différentes orientations des politiques sportives menées par les acteurs » .

Même lorsque les coopérations sont nombreuses, elles ne s'inscrivent pas nécessairement dans des démarches de contractualisation. En Corse, par exemple, « s'il n'existe pas de contractualisation formelle systématique, la clé de répartition des financements entre la collectivité de Corse, les EPCI et/ou les communes font l'objet de discussions bilatérales » .

La loi NOTRe proposait de développer l'outil des CTAP pour favoriser la concertation. Alors que la loi a été adoptée en 2015, le département de Haute-Saône indique qu' « un travail est lancé dans le cadre de la CTAP dédiée au sport au niveau de la région Bourgogne-France-Comté » . Quatre années après le vote de la loi, on peut donc estimer que l'outil de la CTAP n'est pas encore opérationnel.

La région Bretagne indique qu'elle a mis en place en 2005 une instance de dialogue avec le mouvement sportif et les autres collectivités exerçant cette compétence facultative. Cette instance joue le rôle de CTAP. Dans ces conditions : « la loi du 7 août 2015 n'a pas apporté de changements majeurs à l'application de la compétence sport pour la région Bretagne » . Ce retour de la région Bretagne indique l'absence de changement suite à l'adoption de la loi NOTRe. Les collectivités qui avaient institué des mécanismes de concertation ont poursuivi leur démarche tandis que les autres n'ont pas nécessairement avancé.

On peut également mentionner l'expérience de la région Pays-de-la-Loire rapportée par le département de la Sarthe : « La région Pays de la Loire a mis en place depuis quelques années une Commission consultative régionale du sport dans laquelle tous les niveaux de collectivités sont conviés. Cette commission régionale se réunit une fois par an mais différents groupes de travail ont été constitués en fonction de thématiques permettant de réfléchir sur les orientations des politiques sportives à l'échelle du territoire régional » . Cette commission consultative présente quelques similitudes avec la future conférence régionale du sport sachant que cette dernière aura une composition plus large puisqu'elle accueillera également des représentants de l'État, du mouvement sportif et du monde économique.

D. DES ATTENTES FORTES VIS-À-VIS DE LA NOUVELLE AGENCE NATIONALE DU SPORT

1. Une coordination régionale nécessaire pour établir les grandes orientations stratégiques

Les attentes vis-à-vis de la nouvelle Agence nationale du sport sont importantes même si la nouvelle structure est aussi perçue comme un risque .

Concernant les attentes, le département du Val d'Oise résume assez bien la situation lorsqu'il indique que : «  chacun doit attendre beaucoup de la nouvelle organisation puisqu'elle sera le socle de la nouvelle organisation du sport en France. Le monde du sport Valdoisien est aujourd'hui dans l'expectative, en demande, en attente, voire dans le doute. Il est nécessaire, voire indispensable que ce dernier obtienne certaines garanties (financières) ».

Au niveau régional, le département de la Somme indique que : « la conférence régionale du sport devrait permettre de renforcer la collaboration entre les collectivités et avec la représentation locale de l'État, pour justement tenter de rapprocher les ambitions de chacun, coordonner les actions, et tenter de bâtir un projet local de développement du sport sous ses différents aspects : performance, démocratisation, santé publique, équipements et aménagement rationnel du territoire ».

Pour la région Grand Est : « la Conférence régionale du sport permettra de conforter les dialogues engagés pour les projets structurants et le Schéma régional de développement du sport. Elle renforcera la visibilité de l'engagement des collectivités en faveur du sport tout en permettant d'associer de nouveaux acteurs autour de la table tels que le secteur privé ou les usagers ».

La région Bretagne souhaite que la Conférence régionale du sport soit « pilotée par la région », les conférences des financeurs faisant l'objet d'un « copilotage avec les directions régionales et les départements ».

Le département de la Manche illustre ainsi bien les attentes : « cette nouvelle organisation doit permettre d'avoir un regard croisé et une réelle concertation des acteurs sportifs afin de définir, conjointement, des orientations générales pour le territoire concerné, d'où la nécessité d'une représentation équitable de chaque niveau de collectivité, notamment du niveau départemental qui reste un des échelons les plus pertinents en matière de gouvernance du sport (liens privilégiés avec les têtes de réseau que constituent les comités départementaux sportifs, garantit la dynamisation et l'attractivité du territoire) » .

2. Le niveau départemental pertinent pour respecter les spécificités locales dans le montage des projets

Pour ce qui est de la méthode, le département du Vaucluse propose de « partir des besoins et des capacités des territoires pour remonter vers le niveau stratégique et non pas déterminer une stratégie régionale unique qui risquerait de ne pas être pleinement adaptée pour chaque territoire ». Le département de l'Allier recommande une organisation resserrée pour un champ d'action élargi : « les conférences des financeurs devront avoir une composition restreinte par souci d'efficacité. Le périmètre d'intervention de cette conférence gagnerait à être le plus large possible pour mobiliser le maximum de financements pour les sujets qui auront été priorisés par la conférence régionale des sports ».

Le département de l'Aveyron souhaite en particulier que l'agence puisse « prendre en compte les spécificités de chacun des départements, dont les départements ruraux et leurs territoires ». Le département de la Haute-Saône préconise « un maintien du niveau d'aide de l'État » . Le département des Landes considère que « le risque est une forme de re-concentration au niveau régional, sans relais véritables avec les territoires et ses acteurs, notamment associatifs et/ou bénévoles » . Pour prévenir ce risque, le département estime « déterminant que (les conférences des financeurs) soient réellement assises sur les périmètres départementaux, et prennent en compte des spécificités des territoires » .

À noter que la région Grand Est partage l'idée d'un périmètre départemental pour les conférences des financeurs : « les conférences des financeurs doivent être organisées à l'échelon départemental afin de ne pas démultiplier les structures sur un territoire aussi vaste que le Grand Est, tout en restant en proximité avec les projets étudiés » .

Des craintes sur la nouvelle organisation des financements locaux sont également exprimées par le département de l'Aube : « cette conférence doit demeurer un outil simple de partage et de facilitation des coopérations ; toute volonté plus aboutie de régulation risque de se heurter rapidement à des obstacles et des freins liés au contexte local, aux politiques déjà anciennes et ancrées ».

Concernant le périmètre de la conférence des financeurs, le département de l'Aveyron propose de retenir « le département afin de répondre au mieux aux besoins de ses acteurs sportifs ». C'est aussi le cas du département du Lot-et-Garonne qui estime que « cet échelon permettra de mieux cerner les aspirations et problématiques du monde sportif et de créer des partenariats locaux efficients » . Le département de la Haute-Saône souhaite également que « la conférence des financeurs soit de niveau départemental compte tenu de l'importance de la proximité dans l'appréciation des projets » . Selon ce dernier département « le maintien de ce niveau départemental permettrait de mieux intégrer à la fois les disparités territoriales et les besoins du milieu rural ».

Le département des Hauts-de-Seine considère « pertinent que les conférences des financeurs soient organisées au niveau départemental puisqu'une conférence régionale est d'ores et déjà prévue, le niveau intercommunal paraissant quant à lui trop restreint ».

Le sujet de la proximité revient souvent dans les réponses au questionnaire . Le département du Puy-de-Dôme indique en particulier que « depuis la fusion des régions, les associations sportives départementales interrogées pensent que le Conseil départemental joue un rôle essentiel de proximité et de soutien financier ».

Le département du Finistère estime qu' « on ne peut pas penser le sport uniquement au niveau de la région car il existe trop de disparités. L'action sportive c'est la proximité. Il faut déterminer une échelle qui permette d'appréhender les besoins, et de disposer d'un niveau de connaissance assez fin ».

Le département de la Meurthe-et-Moselle est sur la même ligne : « le périmètre départemental des conférences des financeurs avec participation de la région paraît être un bon format. Il permet une plus grande proximité que l'échelon régional tout en prenant en compte ce que fait la région et les autres collectivités et acteurs ».

Pour Éric Koeberlé, vice-président du département du Territoire de Belfort : « le périmètre des conférences des financeurs pourrait correspondre à celui des bassins de vie qui rejoint généralement le niveau de la métropole ou du pôle métropolitain en zone urbaine ». Ce point de vue vient rappeler qu'une pluralité de conférences des financeurs est possible.

Les attentes vis-à-vis de l'Agence nationale du sport peuvent aussi varier en fonction des spécificités locales . La création de la collectivité européenne d'Alsace par exemple a amené les deux départements du Haut-Rhin et du Bas-Rhin à souhaiter une organisation à l'échelle de l'Alsace avec « une déclinaison alsacienne de la Conférence régionale du sport et de la Conférence des financeurs, et ce dans un souci de proximité et d'efficacité » 20 ( * ) .

III. DOUZE PRÉCONISATIONS POUR ASSURER LA RÉUSSITE DE LA NOUVELLE GOUVERNANCE TERRITORIALE DU SPORT

Alors que la mise en place de l'Agence nationale du sport reste encore suspendue à l'adoption des décrets d'application de la loi du 1 er août 2019, les auditions conduites par vos rapporteurs comme les réponses au questionnaire envoyé aux départements et aux régions permettent d'identifier clairement les attentes des élus locaux en matière de politique territoriale du sport.

Afin de répondre à ces attentes, les douze préconisations proposées par vos rapporteurs permettent à la fois :

- de préserver la capacité d'action de toutes les collectivités territoriales en matière de sport ;

- de mieux les associer au fonctionnement des CREPS ;

- d'envisager des modalités de fonctionnement véritablement partenariales de l'Agence nationale du sport au niveau territorial ;

- et de demander à l'État d'assumer dans la durée ses responsabilités en matière de développement de la pratique sportive dans les territoires carencés .

A. PERMETTRE À TOUTES LES COLLECTIVITÉS DE S'INVESTIR DANS LE DÉVELOPPEMENT DU SPORT

1. Maintenir la clause de compétence partagée pour le sport

La présente mission d'information a été créée afin d'examiner l'application des dispositions consacrées au sport dans la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (la loi « NOTRe ») et tout particulièrement la mise en oeuvre de la clause de compétence partagée.

Les auditions menées comme les réponses au questionnaire envoyé à certaines collectivités territoriales ont permis de conclure à un très fort attachement à la clause de compétence partagée.

Vos rapporteurs se sont interrogés lors de leurs premières auditions sur les conséquences que pouvait avoir la mise en place d'une nouvelle gouvernance des politiques sportives territoriales sur le rôle de chaque niveau de collectivité. N'était-il pas temps de préserver la compétence de chaque niveau de collectivité dans le sport mais de mieux spécialiser son champ d'intervention pour plus de lisibilité et d'efficacité ?

Les échanges approfondis menés avec les différentes associations d'élus ont permis d'établir que non seulement les élus étaient très attachés à ce principe de liberté mais que la diversité des situations et des actions menées rendrait très incertaine toute tentative de répartition de la compétence sport entre niveaux de collectivités.

Pour France Urbaine par exemple, il faut rappeler que « le bloc local -au premier chef les grandes communautés, métropoles et grandes villes - finance plus de 80 % des équipements sportifs » , ce qui lui permet de « concevoir le sport en transversalité, en cohérence avec les politiques publiques mises en oeuvre dans les territoires : santé, mobilité et accès aux équipements, vivre-ensemble et cohésion sociale, développement durable » .

Les départements 21 ( * ) ne souhaitent pas davantage voir leur marge de manoeuvre contrainte et insistent sur le caractère transversal de leur approche du sport qui fait obstacle à une quelconque spécialisation.

Les régions ne demandent pas non plus de revenir sur la clause de compétence partagée. Pour Jean-Paul Omeyer, « il faut développer des politiques d'équilibre dans les territoires à côté des pôles d'excellence sportive » .

Pour Frédéric Sanaur, le directeur général de l'ANS, la mise en place de l'agence avec sa gouvernance territoriale revient à instaurer une « compétence partagée coordonnée » .

Dans ces conditions, et c'est sans doute une des principales conclusions des travaux de la mission d'information, vos rapporteurs préconisent de maintenir la clause de compétence partagée pour le sport telle qu'elle figure aujourd'hui à l'article L. 1111-4 du code général des collectivités territoriales.

Préconisation n° 1 : maintenir le principe de la compétence partagée dans le domaine du sport pour les différentes collectivités territoriales (art. L. 1111-4 du CGCT) dans le cadre d'une coordination territoriale étroite.

2. Mettre en oeuvre le principe d'un minimum d'un CREPS par région

La décentralisation des CREPS engagée par la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (la loi « NOTRe ») a constitué une réussite. Les moyens ont été garantis et transférés aux régions et celles-ci ont, pour la plupart, joué le jeu en développant des projets de haut niveau en lien souvent avec la préparation des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Pour le président du CNOSF : « sans cette réforme les CREPS seraient aujourd'hui en difficulté » .

Cette dynamique initiée par la décentralisation des CREPS met en évidence l'inégalité qui perdure dans la répartition de ces structures sur le territoire. Alors que certaines régions possèdent plusieurs CREPS suite à la réforme de la carte de régions, trois régions en sont dépourvues, il s'agit de la Bretagne, de la Corse et de la Normandie.

Le réseau incomplet des CREPS

(extrait de l'avis de la CCEC sur le projet de loi NOTRe)

« Il existe aujourd'hui dix-sept CREPS, dont quinze métropolitains et deux en outre-mer, celui d'Antilles-Guyane et celui de la Réunion. Or, la carte des quinze CREPS métropolitains ne correspond pas à celle des treize nouvelles régions. La grande région Est devrait ainsi comporter trois CREPS (Lorraine, Reims et Strasbourg) tandis que la grande Aquitaine en comprendrait deux (Bordeaux-Aquitaine et Poitou-Charentes) tout comme la grande région rassemblant Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon (Toulouse et Montpellier) et la grande région composée de Rhône-Alpes et de l'Auvergne (Rhône-Alpes et Vichy-Auvergne). A contrario ni la Bretagne, ni la Normandie, ni la Corse ne comporteraient de CREPS.

Si cette répartition est d'abord le fruit d'une histoire, elle tient aussi à des choix opérés ces dernières années qui ont vu, à partir de 2008, par exemple la fermeture du CREPS d'Houlgate en Basse-Normandie, celui de Dinard-Bretagne et celui de Corse. »

Source : avis n° 150 (2014-2015) de Mme Morin-Desailly

On peut rappeler que l'article 28 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République avait été enrichi lors de son examen au Sénat afin de préciser dans l'article L. 114-1 du code du sport que les CREPS sont créés ou fermés par arrêté du ministre chargé des sports sur proposition de la région, « chaque région ayant vocation à accueillir au moins un de ces établissements sur son territoire » .

Or, depuis 2015 aucun progrès n'a véritablement été réalisé afin de rétablir les trois CREPS « manquants » dans leurs prérogatives et leur statut alors même que les collectivités concernées regrettent aujourd'hui d'être tenues à l'écart du développement de la haute performance en régions.

Interrogés par vos rapporteurs, les représentants du ministère des sports et de l'ANS ont indiqué vouloir mettre en place un maillage territorial afin de pouvoir mieux identifier les athlètes mais ils n'ont pas indiqué avoir à ce jour prévu de compléter la carte des CREPS en métropole comme en Outre-Mer.

L'ANS a toutefois adopté le 8 octobre 2019 une délibération relative à un appel à projets de financement de structures de haut niveau. Une enveloppe de 500 K€ a ainsi été mobilisée à destination des territoires ultramarins, de la Corse, de la Bretagne et de la Normandie pour compenser les charges supplémentaires générées par l'absence de CREPS.

Si vos rapporteurs ne peuvent que saluer cet effort, ils observent que cette compensation partielle et temporaire ne saurait remplacer la création de CREPS afin de rétablir une véritable équité territoriale.

Préconisation n° 2 : assurer la présence d'au moins un CREPS par région métropolitaine et veiller à intégrer les territoires ultramarins au maillage de la haute performance selon des modalités adaptées (modification de l'article L. 114-1 du code du sport).

3. Représenter davantage les départements et les communes dans la gouvernance des CREPS

L'implication du bloc communal et des départements dans les CREPS semble assez faible et relever avant tout de circonstances locales . Le département de la Vienne a ainsi tissé des liens avec le CREPS de Poitiers sur la base d'« envies communes » selon sa vice-présidente Pascale Guittet, auditionné par vos rapporteurs, mais les coopérations seraient moindres avec celui de Talence 22 ( * ) . L'AMF souligne que les CREPS sont souvent situés au sein d'une métropole ou d'une agglomération et que des relations se développent afin de faciliter leur fonctionnement. L'association reconnaît toutefois que le sport de haut niveau demeure un champ d'action privilégié de l'État et des régions même si les départements sont le principal partenaire du handisport par exemple.

Sur le plan juridique, l'article L. 114-10 du code du sport prévoit déjà la présence au conseil d'administration de « six ou sept représentants de la région et d'autres collectivités territoriales, désignés par les organes délibérants des collectivités concernées » . Le décret n° 2016-152 du 11 février 2016 précise que cette répartition comprend le président du conseil départemental du siège du CREPS (ou son représentant) ainsi que le président de l'intercommunalité ou le maire de la commune d'implantation (ou son représentant). Par ailleurs, le décret ouvre la possibilité qu'une partie des postes réservés à des conseillers régionaux puisse échoir à des représentants d'autres collectivités territoriales que celles où se situe le siège du centre.

L'« ouverture » du conseil d'administration des CREPS sur les autres niveaux de collectivités ne semble toutefois pas être la règle si l'on en croit les compositions de certains conseils d'administration . Le CREPS d'Aquitaine 23 ( * ) comprend par exemple 6 élus locaux dont 4 sont issus de la région et le maire de Talence et le président du conseil départemental. Le CREPS d'Ile-de-France 24 ( * ) a pour sa part une composition plus équilibrée puisqu'il comprend 2 représentants de la région, 2 représentants des départements et 2 représentants des communes. Cette représentation plus équitable gagnerait à être généralisée par exemple en prévoyant que 50 % des membres du conseil d'administration représentant les collectivités territoriales sont composés d'élus régionaux et que 50 % sont choisis parmi les autres collectivités.

Préconisation n° 3 : renforcer la représentation des départements, des métropoles et des communes dans la gouvernance des CREPS afin de développer un maillage territorial favorable au développement du haut niveau (modification de l'article L. 114-10 du code du sport).

4. Instaurer une relation étroite entre les CREPS et les émanations territoriales de l'Agence nationale du sport

L'Agence nationale du sport a, du fait de son objet même, vocation à entretenir des relations étroites avec les CREPS qui sont eux-mêmes en charge de la haute performance. Selon les responsables de l'ANS, les CREPS ont vocation à prendre toute leur place dans le maillage territorial à mettre en place afin d'identifier et accompagner les athlètes d'avenir. Les CREPS sont ainsi appelés à devenir des « vigies territoriales ».

Le succès de la régionalisation des CREPS exclue a priori de faire évoluer le statut des CREPS pour les rattacher directement à l'ANS. Toutefois, une articulation doit être trouvée afin d'assurer une relation permanente et fluide. Vos rapporteurs proposent ainsi de modifier le décret n° 2016-152 du 11 février 2016 afin de prévoir la présence de droit du président de la conférence régionale du sport au conseil d'administration des CREPS établis sur le territoire régional.

Préconisation n° 4 : prévoir la présence de droit au conseil d'administration des CREPS du président de la conférence régionale du sport ou de son représentant (modification du décret du 11 février 2016).

Par ailleurs, il apparaît également indispensable que l'ANS soit associée à la définition des relations qui existent entre l'État et les CREPS et qui sont définies dans des conventions. L'article R. 114-1 du code du sport prévoit ainsi que « les centres peuvent passer avec les services déconcentrés de l'État compétents dans les domaines du sport, de la jeunesse et de l'éducation populaire des conventions destinées à mobiliser des moyens propres à ces services sous l'appellation de structures associées de formation ».

Le même article prévoit également que des conventions signées avec le ministère des sports déterminent les modalités de fonctionnement et de financement des pôles nationaux de ressources et d'expertise portant sur des thématiques particulières dans les domaines du sport, de la jeunesse et de l'éducation populaire dont les CREPS assurent le fonctionnement.

Il apparaît nécessaire que l'ANS soit associée à la préparation et à la mise en oeuvre de ces conventions.

Préconisation n° 5 : modifier le code du sport afin de prévoir d' associer l'ANS à la préparation et à la mise en oeuvre des conventions prévues entre les CREPS et l'État (modification de l'article R 114-1 du code du sport).

B. VEILLER À CE QUE LE FONCTIONNEMENT TERRITORIAL DE L'ANS RESPECTE LES RÉALITÉS LOCALES

Les dispositions prévues par la loi du 1er août 2019 n'ont pas permis de répondre pleinement aux interrogations des acteurs sur le fonctionnement de l'Agence nationale du sport au niveau local. Une majorité d'acteurs ayant souhaité que la loi se limite à fixer un cadre souple, le détail de l'organisation a été renvoyé aux décrets d'application qui sont en cours de rédaction.

Vos rapporteurs ont souhaité formulé plusieurs recommandations afin que ces décrets d'application ne contreviennent pas à l'esprit de la loi telle qu'elle a été enrichie lors de son examen au Sénat .

1. Des inquiétudes sur le rôle de la région

Si les acteurs locaux sont satisfaits des avancées initiées par le Sénat concernant la conférence régionale du sport et les conférences des financeurs, des craintes subsistent concernant le caractère partenarial de la nouvelle gouvernance . L'AMF, par exemple, remarque que l'échelon de référence de la politique du sport a été régionalisé mais que l'implication des conseils régionaux varie beaucoup comme les moyens humains consacrés aux politiques sportives. Il y a donc, selon David Lazarus, le vice-président du groupe de travail sport de l'AMF « des risques d'inégalités territoriales » . Par ailleurs, il constate aussi que l'implication des régions dépend beaucoup d'engagements individuels or, selon lui : « un système ne peut reposer sur des enthousiasmes individuels » .

Les inquiétudes exprimées par l'AMF comme par l'Assemblée des départements de France (ADF) concernant le rôle de la région font implicitement référence à l'expérience menée dans la région Grand Est sous l'impulsion de Jean-Paul Omeyer sur le modèle de la convention interrégionale du massif des Vosges. Transposée au sport, l'architecture retenue revient à distinguer trois niveaux distincts :

- une assemblée plénière chargée de développer la stratégie, de définir le projet sportif territorial (PST) et de préciser les mesures à mettre en place et d'examiner les projets fédéraux ;

- des commissions thématiques chargées d'examiner les dossiers, de faire le lien avec le PST, de recueillir les avis techniques des services et d'émettre des recommandations ;

- les collèges des financeurs chargés de valider l'attribution des aides et d'identifier les bonnes pratiques.

Dans le schéma envisagé par Jean-Paul Omeyer, le collège des collectivités au sein de la conférence régionale du sport serait composé de 48 élus (5 pour la région, 1 par département, 2 pour chaque assemblée départementale des maires, 1 par métropole ou communauté urbaine et 7 pour les communes de plus de 30 000 habitants).

Le schéma prévoit par ailleurs 5 commissions thématiques :

- Haut niveau, haute performance et sport professionnel ;

- Attractivité des territoires et sports de nature ;

- Développement des pratiques et pratiques émergentes ;

- Investissements et équipements sportifs ;

- Grands événements sportifs internationaux et JO de Paris 2024.

Le projet d'organisation porté par la région Grand Est n'aurait pas vocation à être transposé dans les autres régions selon Jean-Paul Omeyer puisque la loi permet à chaque territoire de développer son propre projet. L'ADF estime également que ce projet très intégré n'est pas transposable en dehors de la région Grand Est.

Cette absence de « modèle unique » doit être réaffirmée à l'heure où, en l'absence de décrets d'application, une expérimentation très spécifique se dessine qui ne fait pas l'unanimité compte tenu de ses conditions de réalisations sous l'impulsion de la région Grand-Est.

Préconisation n° 6 : préserver l'esprit de la loi du 1 er août 2019 qui ouvre la voie à une forte différenciation territoriale afin de permettre un degré d'intégration variable selon les territoires.

Au-delà du cas de la région Grand-Est, c'est aussi une éventuelle prééminence de la région qui ne fait pas consensus . Si un binôme État-région semble s'être constitué pour animer la haute performance, c'est le binôme département-bloc communal qui conserve la main pour la pratique sportive et le sport pour tous .

Dans ces conditions, il convient de rappeler que le législateur n'a pas retenu l'idée d'instaurer un quelconque chef de filât dans le domaine de la politique territoriale du sport et l'attribution d'une telle responsabilité au conseil régional constituerait en réalité une remise en cause de la démarche partenariale qui est au coeur de la réforme de la gouvernance territoriale du sport qui a été initiée. Vos rapporteurs tiennent à souligner que le représentant de l'Association des régions de France (ARF) auditionné n'a pas revendiqué de chef de filât et qu'il a insisté sur la nécessité d'adapter la gouvernance au cas par cas.

Préconisation n° 7 : reconnaître que l'absence de chef de filât d'une collectivité dans le sport constitue une des conditions du succès de la nouvelle politique territoriale du sport fondée sur une démarche pleinement partenariale .

2. Une préférence pour un guichet « commun » plutôt qu'« unique »

Une autre inquiétude concerne l'organisation des cofinancements dans le cadre des conférences des financeurs. Est-ce qu'une collectivité pourrait être obligée de participer à un projet qui n'entrerait pas dans ses priorités ? Vos rapporteurs estiment que ce risque n'existe pas puisque la loi n'a aucunement prévu de porter atteinte au principe de libre administration des collectivités dans leurs choix d'investissements. Pour autant, on peut comprendre les élus qui craignent de se retrouver, de fait, obligés d'apporter leur contribution dans le cadre de structures trop rigides.

L'ADF a ainsi rappelé qu'on ne pourra pas contraindre un département à financer un projet alors même qu'on constate une baisse du montant des investissements.

C'est la raison pour laquelle il conviendrait de préférer l'appellation guichet « commun » à celle de guichet « unique » . L'idée est moins de solliciter toutes les collectivités sur tous les projets que de permettre à celles qui sont intéressées d'unir leurs moyens en réduisant le nombre des formalités et en permettant d'avoir une vision globale de l'investissement considéré.

L'AMF insiste également sur l'inquiétude suscitée par les modalités futures d'organisation des cofinancements. Pour David Lazarus, « il faudrait un système commun pour réduire les contraintes mais la conférence des financeurs doit être un lieu de consensus ».

Préconisation n° 8 : instaurer un guichet « commun » au sein de chaque conférence des financeurs respectueux des choix des collectivités territoriales de préférence à un guichet « unique » qui pourrait créer de fait une obligation de participation au financement.

3. Le périmètre des conférences des financeurs continue à faire débat

La loi du 1 er août 2019 a prévu au premier alinéa de l'article L. 112-15 du code du sport que « Chaque conférence régionale du sport institue, dans le respect des spécificités territoriales, une ou plusieurs conférences des financeurs du sport comprenant des représentants » de l'État, des collectivités territoriales, du mouvement sportif ainsi que des personnalités qualifiées. Cette rédaction qui a été introduite lors du débat au Sénat ne fixe pas le périmètre de la conférence des financeurs . Tout au plus précise-t-elle qu'il peut y avoir une ou plusieurs conférences sur le territoire régional sans exclure que ces périmètres se chevauchent.

Si le législateur a souhaité expressément préserver une telle souplesse c'est d'abord pour tenir compte du souhait des collectivités territoriales de ne pas opter pour une structure uniforme qui aurait pour effet de fragiliser la démarche partenariale. Par ailleurs, la grande diversité des situations exclut d'imaginer un cadre unique qui pourrait ne pas correspondre à certains projets.

Pour l'ADF, il faut organiser les conférences des financeurs autour des bassins de vie et le projet sportif territorial doit avoir des déclinaisons territoriales. L'association des départements rappelle par ailleurs qu'avec la réforme de la carte des régions, ces dernières ont souvent perdu leur proximité alors que le département demeure le cadre de la transversalité. Les conseils départementaux sont, en effet, compétents pour le haut niveau (à travers le handisport), le sport pour tous (sport nature) et les jeunes (collèges) 25 ( * ) . La contribution des départements à la politique du sport s'élevait ainsi à 600 M€ en 2015 avec un prisme fort en terme de sociabilisation.

Interrogée par vos rapporteurs sur le périmètre des conférences des financeurs, l'ADF a indiqué qu'elle « ne demande pas des conférences des financeurs départementales et que sa préférence aurait été de choisir un niveau inter départemental » . Les réponses des départements au questionnaire de vos rapporteurs traduisent pourtant une nette préférence pour le choix du périmètre départemental pour la conférence des financeurs.

Le décret en Conseil d'État prévu par l'article 3 de la loi du 1 er août 2019 aura pour mission de clarifier le fonctionnement de ces conférences des financeurs du sport. L'alternative consiste soit à retenir une organisation « à la carte » en fonction des besoins soit à privilégier un cadre de référence avec des exceptions en fonction des projets.

L'organisation « à la carte » permettrait de préserver le besoin de souplesse mais elle pourrait présenter le risque de créer une réelle incertitude, notamment pour les plus petites collectivités, du fait de l'absence de cadre de référence pour envisager les investissements au niveau local en cohérence avec un projet de développement territorial.

L'adoption d'un cadre de référence, par exemple à travers la création d'une conférence permanente des financeurs au niveau départemental ainsi qu'au niveau de chaque métropole , auquel pourraient s'adjoindre des conférences supra départementales pour les très grands projets et des conférences infra départementales pour les projets métropolitains ou certains projets locaux, permettrait de conjuguer le besoin d'un cadre de référence avec une nécessaire souplesse.

Le représentant de l'AMF auditionné par vos rapporteurs ne disait pas autre chose en indiquant qu'il faudrait « des échelons adaptés aux projets au niveau départemental mais aussi infra départemental et supra départemental » . David Lazarus n'excluait pas la possibilité que des intercommunalités se retrouvent dans certaines conférences des financeurs, par exemple en zones de montagne, pour tenir compte des spécificités de certains territoires.

Les représentants de l'ANS auditionnés par vos rapporteurs partagent l'analyse selon laquelle il faut trouver « le bon niveau territorial » et que le département et la métropole constituent probablement les échelons de référence.

Préconisation n° 9 : prévoir l'existence d'une conférence des financeurs permanente au niveau départemental et au niveau de chaque métropole ainsi que la possibilité de créer des conférences supra départementales pour les grands équipements et infra départementales pour les projets très localisés.

4. Un fonctionnement des conférences nécessairement partenarial

La loi du 1 er août n'a pas précisé comment serait organisé le fonctionnement administratif des conférences régionales du sport et des conférences des financeurs . Le nouvel article L. 112-12 du code du sport prévoit que « le représentant de l'État est le délégué territorial de l'agence dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. Dans le cadre de ses missions, il veille au développement du sport pour toutes et tous dans les territoires les moins favorisés. Il peut ordonner les dépenses et mettre en oeuvre les concours financiers territoriaux de l'agence » . Mais à côté du préfet, la loi a également prévu que la conférence régionale du sport élise son président en son sein, tout comme la conférence des financeurs du sport . Dans les faits, cela signifie que dans la quasi-totalité des cas c'est un élu local qui sera chargé d'animer les travaux de ces instances.

La question des moyens humains et administratifs sur lesquels pourra s'appuyer la gouvernance territoriale est encore à préciser et, peut-être, à inventer. Les associations d'élus ne sont pas enthousiastes à ce que l'État assume cette responsabilité comme c'était le cas pour le CNDS. Mais l'attribution de cette responsabilité à la région pourrait ne pas faire non plus l'unanimité, compte tenu du refus exprimé de tout « chef de filât ». L'AMF, à travers David Lazarus, ne souhaite pas, en particulier passer « du tout État au tout région » . L'ADF rappelle pour sa part que le département est le premier partenaire des communes, notamment à travers les équipements scolaires.

Dans ces conditions, vos rapporteurs proposent que les décrets d'application de la loi du 1 er août 2019 prévoient que le pilotage des conférences régionales du sport et des conférences des financeurs soit organisé à l'initiative des collectivités territoriales dans le cadre de leur compétence partagée. Une convention pourrait déterminer les modalités de fonctionnement de ces secrétariats ainsi que les moyens qui y seraient consacrés.

Préconisation n° 10 : prévoir que le secrétariat des conférences régionales du sport et celui des conférences des financeurs soient organisés par les collectivités territoriales par voie de convention dans le cadre de la compétence partagée.

C. PRÉVOIR DES MOYENS SUFFISANTS DE L'ETAT POUR RÉSORBER LES DÉSÉQUILBRES TERRITORIAUX ET DÉVELOPPER LA PRATIQUE SPORTIVE

1. Une mission de l'État pour résorber les déséquilibres territoriaux à réaffirmer

La réforme de la gouvernance des politiques du sport a pour effet de transférer à l'Agence nationale du sport des compétences qui relevaient jusqu'à présent du ministère des sports.

Dans son rapport 26 ( * ) sur le projet de loi qui a acté la création de l'Agence nationale du sport, votre rapporteur avait insisté sur l'avenir incertain du ministère. La ministre des sports a elle-même indiqué lors de son audition que le maintien du ministère à l'issue des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 n'était pas acquis.

À court terme, une évolution majeure devrait concerner la direction des sports appelée à se recentrer sur quatre missions principales :

- définir la stratégie nationale de l'État, les enjeux régaliens et l'action interministérielle afin de coordonner des problématiques transversales liées au sport (sport santé, handicap, rayonnement international, attractivité économique...) ;

- exercer la tutelle sur les établissements publics (INSEP, écoles spécialisées, CREPS) et le pilotage des services déconcentrés ;

- contrôler les pratiques et le respect de l'éthique (lutte contre le dopage, prévention de la violence et de la radicalisation...) ;

- assurer la tutelle de l'Agence nationale du sport et le suivi de la convention d'objectifs.

Votre rapporteur observait par ailleurs que « le rétrécissement du champ d'intervention du ministère des sports au niveau central s'accompagnera d'une profonde réorganisation de ses services déconcentrés qui sont appelés à rejoindre au niveau départemental l'orbite de ceux du ministère de l'éducation nationale comme l'indique la circulaire du 12 juin 2019 relative à la mise en oeuvre de la réforme de l'organisation territoriale de l'État ».

Il n'est donc pas aisé dans ces conditions de définir de manière exhaustive le rôle que pourra jouer l'État à l'avenir dans les politiques territoriales du sport.

On peut toutefois rappeler que le nouvel article L. 112-12 du code du sport prévoit que « le représentant de l'État est le délégué territorial de l'agence dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. Dans le cadre de ses missions, il veille au développement du sport pour toutes et tous dans les territoires les moins favorisés. » . Cette mission de rééquilibrage des équipements au bénéfice des territoires carencés doit être une priorité , au même titre que le soutien au haut niveau.

Préconisation n° 11 : éviter un désengagement de l'État du financement des équipements locaux et réaffirmer son rôle pour résorber les déséquilibres territoriaux et développer le sport pour tous.

2. Des moyens de l'État consacrés au sport à sanctuariser

Au-delà de la répartition des crédits publics entre la haute performance et le sport pour tous, des interrogations demeurent sur le niveau même des moyens dont pourra disposer l'Agence nationale du sport. Alors que les besoins ont été évalués entre 350 et 400 millions d'euros par an, les crédits affectés à l'agence ne devraient pas dépasser 284 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2020 selon les chiffres présentés par le ministère des sports.

La mise en place de l'Agence nationale du sport a ouvert une phase de transition qui a pu limiter le nombre des projets ayant besoin d'être financés. Par ailleurs, l'organisation des élections municipales en mars 2020 devrait mécaniquement enclencher un cycle d'investissements qui montera progressivement en puissance en 2021. L'ensemble de ces considérations amène à souhaiter que le Gouvernement clarifie dans les meilleurs délais les moyens qu'il entend consacrer au développement du sport dans les territoires dans les années à venir.

À cet égard, il convient de rappeler qu'à l'initiative du Sénat, la loi du 1 er août 2019 a inséré dans le code du sport un nouvel article L. 112-16 qui prévoit qu' « une convention d'objectifs est conclue entre l'État et l'Agence nationale du sport dont la durée est comprise entre trois et cinq années civiles. Elle détermine les actions de la politique publique du sport confiées à l'agence, fixe des objectifs et précise les moyens publics mis à sa disposition dans un cadre pluriannuel ».

Interrogés par vos rapporteurs, le directeur général de l'ANS a indiqué que le budget de l'agence était « confortable » et qu'il fallait utiliser les moyens de manière optimale. Il a évoqué un « pacte de stabilité » concernant les moyens qui semble contredire les attentes des collectivités en faveur d'un grand plan d'investissement pour résorber la vétusté des équipements actuels.

Vos rapporteurs ne peuvent que regretter que l'État ne semble pas décidé à donner une impulsion forte pour développer le sport pour tous, ceci en contradiction avec les déclarations ministérielles en faveur de l'augmentation du nombre de pratiquants. Or, les politiques publiques du sport demeurent fondamentales pour permettre de lutter contre les inégalités dans la pratique sportive et il n'est pas souhaitable de s'en remettre aux seules pratiques privées dans des salles pour atteindre cet objectif.

Dans ces conditions, vos rapporteurs appellent de leurs voeux la définition d'une trajectoire budgétaire pluriannuelle ambitieuse des moyens dévolus à l'Agence nationale du sport dans le cadre de la convention devant être conclue entre l'État et l'Agence. Ils rappellent en particulier que le dynamisme des droits de retransmission des matchs de football devrait mécaniquement entraîner l'augmentation du produit de la « taxe Buffet » et qu'il serait dommage que ces ressources supplémentaires ne bénéficient pas au développement du sport.

Préconisation n° 12 : négocier dans les meilleurs délais la convention entre l'État et l'Agence nationale du sport prévue par l'article L. 112-16 du code du sport et définir une trajectoire pluriannuelle des moyens ascendante en lien avec les besoins identifiés par le mouvement sportif et les représentants des collectivités territoriales et tenant compte des ressources disponibles croissantes issues du monde du sport (droits TV, paris sportifs).

EXAMEN EN COMMISSION

MERCREDI 30 OCTOBRE 2019

___________

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite NOTRe, a confirmé le principe de la compétence partagée dans les domaines du sport et de la culture. Comme rapporteur pour avis, j'avais, à l'époque, soutenu le transfert des centres de ressources, d'expertise et de performance sportives (Creps) aux régions. Alors que le Gouvernement tente d'afficher une politique du sport, il est apparu utile de réaliser un bilan de la nouvelle organisation territoriale en la matière. Le Sénat peut s'enorgueillir de son implication en faveur du sport ; la présente mission d'information s'inscrit dans ce cadre.

M. Christian Manable, co-rapporteur . - Notre mission a été créée en février dernier pour réaliser un bilan des dispositions relatives au sport dans la loi NOTRe. Son article 28 a prévu la régionalisation des Creps, réforme que chacun s'entend à considérer comme réussie : les régions ont apporté un nouveau dynamisme au réseau. Son article 90 a organisé le transfert, souvent déjà effectif, des équipements des départements aux métropoles. Son article 104 a confirmé le principe de la compétence partagée dans le domaine du sport. Enfin, son article 105 a ouvert la possibilité de mettre en place un guichet unique pour l'ensemble des aides et subventions dans le sport.

Les auditions menées au printemps ont visé à répondre à diverses interrogations. Compte tenu de la grande difficulté à mettre en place des guichets uniques, était-il envisageable de revenir sur certaines dispositions de la loi NOTRe ? Était-il, en particulier, possible de faire évoluer la clause de compétence partagée vers une clause de compétence répartie qui reconnaîtrait à chaque niveau de collectivité un champ d'action déterminé pour éviter les chevauchements et le saupoudrage des crédits ? Nous nous sommes également interrogés sur l'utilisation des conférences territoriales de l'action publique (CTAP) dans le sport, mais aucun interlocuteur ne les a évoquées. Comme le souligne un rapport de l'Inspection générale de l'administration (IGA) de 2017, les CTAP ne sont encore guère utilisées par les élus.

Les auditions ont apporté deux éclaircissements précieux. D'abord, l'ensemble des associations d'élus locaux souhaite maintenir la clause de compétence partagée entre les collectivités, qui permet de conduire des politiques transversales utiles pour l'attractivité du territoire et les actions en faveur de la jeunesse. Pour beaucoup, sans cette compétence facultative, les initiatives - et donc des investissements dans le sport - seraient moindres. Ensuite, la création de l'Agence nationale du sport suscite de grandes inquiétudes. Installée en mars dernier par voie réglementaire, elle a succédé au Centre national pour le développement du sport (CNDS) sans que sa gouvernance territoriale ait été précisée. Les élus craignaient que l'agence ne soit pas opérationnelle avant longtemps, un délai de deux ans étant même évoqué par certains interlocuteurs.

M. Claude Kern, co-rapporteur. - Pour répondre à leurs inquiétudes, nous avons saisi l'opportunité d'un texte principalement consacré aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 déposé en juin sur le bureau du Sénat, qui comportait un article concernant l'Agence nationale du sport afin de préciser sa gouvernance territoriale. La loi du 1 er août 2019 relative à la création de l'Agence nationale du sport et à diverses dispositions relatives à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 comprend ainsi des précisions essentielles concernant la création des conférences régionales du sport et des conférences des financeurs du sport. Leurs compositions respectives ont été précisées, ainsi que le principe de l'élection de leurs présidents. Le rôle du préfet a été circonscrit et le contenu de la convention qui lie l'agence à l'État clarifié.

L'apport de notre commission à ce texte n'aurait pas été possible sans le travail de la mission d'information. Forts de ce succès, nous avons souhaité entendre à nouveau l'ensemble des acteurs pour connaître leur sentiment sur cette nouvelle architecture. Si les apports du Sénat ont été salués, des craintes se sont exprimées sur les modalités d'application de la loi. En effet, le texte a volontairement conservé quelque souplesse s'agissant du fonctionnement des conférences régionales du sport et des conférences des financeurs, car les associations ne souhaitaient pas figer un schéma qui aurait pu se révéler inadapté à certaines situations territoriales.

Cette souplesse était justifiée et nécessaire, mais elle conduit à des libertés d'interprétation dans le cadre des décrets d'application. En séance publique, hier soir, nous avons interpellé la ministre à ce sujet. Or, comme l'a rappelé son directeur général, la création de l'Agence nationale du sport, qui aura la charge de construire le financement des projets locaux, revient à coordonner et à structurer l'exercice de la compétence partagée. Nous avons donc estimé indispensable de préciser les contours des dispositions d'application, afin de préserver l'esprit de la loi voulue par le Parlement. Aussi, notre rapport d'information relève-t-il pour partie du suivi attentif de l'application d'une loi ; ce n'est pas le moindre de ses intérêts. Il en ressort une douzaine de préconisations, mises en regard avec les réponses reçues au questionnaire envoyé aux départements et aux régions. Souhaitons qu'elles soient entendues par le Gouvernement au moment où il s'attelle à la rédaction des décrets d'application qui devraient être publiés en janvier 2020.

Nos préconisations s'articulent autour de trois objectifs : permettre à toutes les collectivités territoriales de s'investir dans le développement du sport, veiller à ce que la nouvelle gouvernance territoriale du sport respecte les spécificités locales et prévoir des moyens suffisants de l'État pour résorber les déséquilibres territoriaux et développer la pratique sportive.

Notre première préconisation vise à maintenir le principe de la compétence partagée dans le domaine du sport pour les différentes collectivités dans le cadre d'une coordination territoriale étroite.

M. Christian Manable, co-rapporteur . - Nous proposons, au travers de la deuxième préconisation, d'assurer la présence d'au moins un Creps par région métropolitaine - la Bretagne, la Normandie et la Corse en sont dépourvues - et de veiller à intégrer les territoires ultramarins au maillage de la haute performance selon des modalités adaptées.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - La loi NOTRe n'a pas créé les Creps, mais les a transférés aux régions.

M. Claude Kern, co-rapporteur . - Dans les trois régions mentionnées par notre collègue Christian Manable, des structures existent, mais ne bénéficient pas de l'appellation ni du statut de Creps. Notre troisième préconisation consiste à renforcer la représentation des départements, des métropoles et des communes dans la gouvernance des Creps, afin de développer un maillage territorial favorable au développement du haut niveau. Cette possibilité existe, mais demeure peu appliquée.

M. Christian Manable, co-rapporteur . - Nous prévoyons, avec la préconisation n° 4, la présence de droit du président de la conférence régionale du sport ou de son représentant au sein du conseil d'administration des Creps.

M. Claude Kern, co-rapporteur . - Notre préconisation n° 5 propose d'associer l'Agence nationale du sport à la préparation et à la mise en oeuvre des conventions prévues entre les Creps et l'État.

M. Christian Manable, co-rapporteur . - La France est plurielle : il convient de tenir compte des particularismes locaux. En conséquence, notre sixième préconisation vise à préserver l'esprit de la loi du 1 er août 2019 précitée, ouvrant la voie à une importante différentiation territoriale, afin de permettre un degré d'intégration variable selon les territoires.

M. Claude Kern, co-rapporteur . - Nous proposons, avec notre septième préconisation, de reconnaître que l'absence de chef de filât d'une collectivité dans le sport représente une condition du succès de la nouvelle politique territoriale fondée sur une démarche pleinement partenariale. Cette opinion est partagée par l'ensemble des associations d'élus locaux.

M. Christian Manable, co-rapporteur . - « Il faudrait un système commun pour réduire les contraintes, mais la conférence des financeurs doit être un lieu de consensus », nous indiquait David Lazarus, maire de Chambly et coprésident du groupe de travail Sports de l'Association des maires de France (AMF). Notre préconisation n° 8 consiste donc à instaurer un guichet commun au sein de chaque conférence des financeurs, respectueux des choix des collectivités territoriales, de préférence à un guichet unique risquant de créer une obligation de participation au financement. La nuance entre guichet unique et guichet commun peut sembler subtile, mais, en l'absence de consensus au sein d'un guichet unique, un projet peut se trouver bloqué.

M. Claude Kern, co-rapporteur . - Notre neuvième préconisation prévoit l'existence d'une conférence des financeurs permanente au niveau départemental et de chaque métropole.

M. Christian Manable, co-rapporteur . - Nous prévoyons, avec notre préconisation n° 10, que le secrétariat des conférences régionales du sport et celui des conférences des financeurs soient organisés par les collectivités territoriales par voie de convention dans le cadre de la compétence partagée.

M. Claude Kern, co-rapporteur . - Notre préconisation n° 11 vise à éviter un désengagement de l'État du financement des équipements sportifs locaux et à réaffirmer son rôle pour résorber les déséquilibres territoriaux et développer le sport pour tous.

M. Christian Manable, co-rapporteur . - Enfin, notre proposition n° 12 invite à négocier, dans les meilleurs délais, la convention entre l'État et l'Agence nationale du sport et à définir une trajectoire pluriannuelle ascendante des moyens en lien avec les besoins identifiés par le mouvement sportif et les représentants des collectivités territoriales et tenant compte des ressources disponibles croissantes issues du monde du sport - droits télévisés, paris sportifs, etc. L'État doit s'engager dans la durée, principe que le ministère de l'économie et des finances n'apprécie guère...

M. Claude Kern, co-rapporteur . - Dans la durée et de manière croissante !

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Je remercie nos rapporteurs pour leur travail qui aboutit à des propositions fortes et concrètes.

M. Jean-Jacques Lozach . - Je salue également le travail de nos collègues sur la déclinaison territoriale de l'Agence nationale du sport. La ministre l'a rappelé hier soir en séance publique : l'année 2020 verra la mise en place des conférences régionales du sport au premier semestre et celle des conférences des financeurs au second semestre. Pour autant, de nombreux éléments demeurent confus. Si le rôle, déterminant, des collectivités territoriales semble clair, qu'en est-il des relations entre les différentes instances de l'Agence sur le terrain ? Comment, par exemple, motiver le monde économique en faveur du sport pour tous ?

L'Agence nationale du sport doit se mettre en place rapidement et efficacement, car, depuis deux ans, l'écart se creuse entre le sommet - les fédérations nationales et le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) - et la base - les clubs et les associations - laquelle n'a guère le loisir de se préoccuper de sujets administratifs. De fait, pour la première fois, le nombre de salariés associatifs diminue, ce qui cause de multiples difficultés. L'année 2020 sera effectivement cruciale.

Par ailleurs, les questions relatives aux conseillers techniques sportifs (CTS) et à la suppression des contrats aidés demeurent. Vie des clubs, jeux Olympiques : tout est lié. Or, les jeux Olympiques de 2020 ne se présentent pas sous les meilleurs auspices : à l'issue des derniers championnats du monde d'athlétisme, matière majeure des Jeux, la France se classe vingt-quatrième au rang des nations. Hélas, vos propositions ne devraient pas être retenues dans le cadre du projet de loi à venir dit sport et société, qui portera principalement sur les fédérations.

M. Michel Savin . - Je félicite à mon tour nos deux collègues. Les inquiétudes dont ils se sont fait l'écho s'agissant de l'Agence nationale du sport s'expliquent par l'absence de lisibilité de son organisation territoriale. Certaines régions sont davantage investies ; tout dépend du dynamisme des élus qui portent le projet. Veillons toutefois, comme notre collègue Nicole Duranton s'en inquiétait hier auprès de la ministre, à ne pas créer une politique territoriale du sport à deux vitesses. Faisons confiance aux acteurs ! L'Agence nationale du sport a été créée pour que les fédérations, l'État, les acteurs économiques et les collectivités territoriales dialoguent. L'objectif est d'importance : précédemment, les collectivités n'étaient pas consultées, alors qu'elles financent le sport à 80 %.

Vous proposez la création d'un guichet commun. Or, le guichet unique a été pensé pour éviter le financement d'équipements sportifs au détriment de la poursuite de certains objectifs. Les conférences régionales du sport et les conférences des financeurs visent à établir un consensus entre le développement des politiques sportives du ressort des fédérations et le financement des équipements par les collectivités. Il convient, si le guichet commun était retenu, d'éviter tout retour en arrière du travail collectif.

Je partage votre préoccupation s'agissant du risque de désengagement de l'État. Nous devons rester vigilants. Les préfets, représentants de l'État au sein des commissions d'attribution de la dotation d'équipement aux territoires ruraux (DETR), peuvent décider du financement d'équipements sportifs. Il ne faudrait pas qu'ils renvoient désormais les demandes des collectivités territoriales en la matière à l'Agence nationale du sport qui ne pourrait toutes les assumer.

Le Gouvernement a annoncé le dépôt d'un projet de loi dit sport et société au premier semestre de l'année 2020. Son périmètre s'annonce réduit, mais nous pourrions l'étendre à certaines propositions du rapport, ainsi qu'aux sujets afférents au sport et à la santé et au sport à l'école. Ne passons pas à côté d'une occasion unique d'en débattre.

Mme Annick Billon . - Je félicite nos rapporteurs. Pourquoi, dans les trois régions identifiées, les Creps n'en sont-ils pas véritablement ? Est-ce en raison d'un besoin de liberté et d'agilité ou par crainte d'une nouvelle organisation ?

L'investissement des régions, des départements et des métropoles dans le sport est variable. Le Gouvernement a érigé le sport pour tous et les liens entre le sport et la santé comme objectifs majeurs de sa politique. La DETR, déjà, est surchargée de demandes de financement : elle ne peut répondre positivement à toutes, ce qui handicape notamment les petites communes. Elle ne doit pas constituer, pour l'État, un moyen de se désengager.

M. Jean-Marie Mizzon . - J'adresse mes félicitations à nos collègues. Votre troisième préconisation évoque le renforcement de la représentation des départements, des métropoles et des communes dans la gouvernance des Creps. Pourquoi ne pas avoir fait référence aux autres établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ?

Mme Maryvonne Blondin . - Je vous remercie pour ce travail de grande qualité. Vous êtes-vous intéressés à la vie des clubs, au rôle des bénévoles en leur sein et à la mission essentielle des centres de ressources et d'information des bénévoles (CRIB) ? Sans bénévole, le sport se trouvera en difficulté dans les territoires. Par ailleurs, les comités départementaux olympiques et sportifs s'inquiètent de leurs financements, ponctionnés par l'Agence nationale du sport et par le budget des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

M. Antoine Karam . - Avez-vous réfléchi à l'apport des Outre-mer au sport national ? Je pense notamment au volley, au basket et à l'aïkido. Nous aurons également un représentant en équipe de France de bobsleigh aux prochains jeux Olympiques.

M. Jacques-Bernard Magner . - Je félicite également nos deux rapporteurs. Dans le rapport commis avec Alain Dufaut sur les emplois aidés, j'évoquais les conséquences probables de leur suppression dans le sport. Cela s'est, hélas !, vérifié et je crois utile d'évaluer plus finement l'impact de la pénurie de bénévoles et d'actifs sur l'encadrement des pratiques sportives.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Je souhaite compléter la question de Jean-Marie Mizzon. Dans les régions dépourvues de Creps, avez-vous étudié la structure qui s'y substitue ? Est-ce efficient ? Lors des débats sur la loi NOTRe, j'avais souligné que les régions souhaitant un Creps devaient être aidées financièrement par l'État. Qu'en est-il effectivement ? Enfin, selon quelles modalités une collectivité territoriale qui ne le finance pas peut-elle être associée à la gouvernance d'un Creps ?

M. Claude Kern, co-rapporteur . - Hier, la ministre indiquait que le monde économique pouvait localement être représenté par la société civile.

M. Jean-Jacques Lozach . - Et par les usagers du sport !

M. Claude Kern, co-rapporteur . - J'avoue ne pas avoir parfaitement saisi son propos... Nous lui remettrons, quoi qu'il en soit, notre rapport en mains propres.

Monsieur Savin, l'organisation choisie par une région peut difficilement être dupliquée ; elle dépend des personnes en charge du dossier - je pense notamment à Jean-Paul Omeyer, vice-président de la région Grand-Est chargé des sports - et de leur engagement. L'objectif de l'Agence nationale du sport est de faire travailler ensemble les différents acteurs, entre lesquels il est parfois difficile de trouver un compromis. Nous proposons un guichet commun en raison de l'échec du guichet unique, qui fonctionne mal : si un partenaire s'oppose à un projet, il reste bloqué, comme celui de l'Arena du club de basket Strasbourg Illkirch-Graffenstaden (SIG) du fait des atermoiements de l'Eurométropole propriétaire de la salle. En outre, la loi NOTRe n'a pas intégré les fédérations au guichet unique. Dès lors, un guichet commun nous apparaît plus opérationnel.

M. Christian Manable, co-rapporteur . - Madame Billon, les trois régions privées de Creps en étaient dotées avant 2010, mais elles se sont trouvées privées de leur label. Pour autant, des structures comparables aux Creps existent sous forme de groupement d'intérêt public (GIP) en Bretagne et en Normandie.

M. Claude Kern, co-rapporteur . - L'Agence nationale du sport a inscrit 500 000 euros pour les trois régions concernées et les territoires ultramarins. Se posera ensuite la question de l'investissement de l'État, notamment sur le sport de haut niveau.

M. Christian Manable, co-rapporteur . - Madame Blondin et Monsieur Magner, n'y voyez aucune inconvenance, mais vos questions n'entrent pas dans le champ de la mission d'information. Pour autant, nous reconnaissons évidemment le rôle majeur joué par les bénévoles dans les associations sportives et regrettons la suppression des emplois aidés, notamment dans les communes rurales.

M. Claude Kern, co-rapporteur . - Madame Billon et Monsieur Savin, je vous renvoie, s'agissant de la DETR, à notre préconisation n° 11 relative au désengagement de l'État.

Monsieur Mizzon, vous avez évoqué la conférence des financeurs et le rôle respectif des métropoles et des autres EPCI. La loi NOTRe a transféré la compétence sport aux métropoles, mais il demeure possible de mettre en place des conférences ponctuelles sur certains projets ; le dispositif est évolutif.

Monsieur Karam, nous avons envoyé un questionnaire à tous les départements et les collectivités d'Outre-mer, sans recevoir, hélas, la moindre réponse.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Vous n'avez pas répondu à ma question relative aux modalités d'intégration des différentes collectivités territoriales à la gouvernance des Creps.

M. Christian Manable, co-rapporteur . - Notre préconisation n° 3 en fait mention.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Pourquoi les métropoles sont-elles traitées différemment des autres EPCI ? Pourquoi intégrer à la gouvernance des Creps des collectivités territoriales qui ne participent pas à son financement ? Ne confondons pas les Creps et les conférences.

M. Claude Kern, co-rapporteur . - Notre rapport développe plus précisément que les collectivités compétentes, dont les EPCI, doivent être représentées au sein des instances de gouvernance des Creps.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Je vous remercie. Votre travail nous fournit d'intéressantes perspectives pour les échéances législatives à venir.

La commission autorise la publication du rapport d'information.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Mardi 12 mars 2019

- Comité national olympique et sportif français : M. Denis MASSEGLIA , Président, Mme Julie LAVET , Directrice des relations institutionnelles.

- Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales - Direction générale des collectivités locales : M. David MYARD , Adjoint au sous-directeur des compétences et des institutions locales, M. Benjamin ORSAT , Responsable du secteur sport au sein du bureau des services publics locaux.

Mercredi 20 mars 2019

Table ronde avec les associations d'élus :

- Association des Maires de France (AMF) : M. David LAZARUS , Maire de Chambly et président du groupe de travail Sport de l'AMF, Mme Nelly JACQUEMOT , Responsable du département Action sociale, culture, éducation, sport, Mme Charlotte DE FONTAINES , chargée des relations avec le Parlement ;

- Assemblée des départements de France (ADF) : Mme Marie-Évelyne CHRISTIN , vice-présidente du Conseil départemental du Val d'Oise, déléguée au Sport, à la Jeunesse et aux Associations, M. Clément GUILLEMOT , collaborateur du département du Val d'Oise, Mme Alyssia ANDRIEUX , conseillère Culture/Sports de l'AD, Mme Marylène JOUVIEN , chargée des relations avec le Parlement ;

- Régions de France (ARF) & France Urbaine : Mme Roselyne BIENVENU , Adjointe au maire d'Angers en charge des sports, première vice-présidente d'Angers Loire Métropole, M. Emmanuel HEYRAUD , Directeur cohésion sociale et développement urbain, M. Sébastien TISON , Chargé de mission.

Mardi 26 mars 2019

- Centre national pour le développement du sport : Mme Mathilde GOUGET , Secrétaire générale.

Mercredi 27 mars 2019

- Régions de France : M. Jean-Paul OMEYER , Président de la commission des sports.

Mercredi 3 avril 2019

- Direction des sports : M. Gilles QUÉNÉHERVÉ , Directeur.

Mardi 24 septembre 2019

- Association des maires de France : M. David LAZARUS , M. Christian BOULEAU , Vice-Président, Mme Valérie BRASSART , conseillère Logement social, Mme Nelly JACQUEMOT , Responsable du département action sociale culture éducation, Mme Charlotte DE FONTAINES , chargée des relations avec le Parlement.

- Assemblée des départements de France : Mme Pascale GUITTET , Vice-présidente du département de la Vienne, Mme Alyssia ANDRIEUX , conseillère culture/sport, M. Bruno GRIGNARD , Directeur sport du département de la Vienne, Mme Marylène JOUVIEN , chargée des relations avec le Parlement.

Mercredi 25 septembre 2019

- Régions de France : Mme Claire BERNARD , conseillère chargée de la culture et du sport, M. Frédéric ÉON , conseiller parlementaire et juridique, M. Jean-Paul OMEYER , Président de la commission des sports.

- France urbaine : Mme Éloïse FOUCAULT , Responsable des relations Institutionnelles , M. Emmanuel HEYRAUD , Directeur de la cohésion sociale et du développement urbain, Mme Roselyne BIENVENU , Adjointe aux sports à la ville d'Angers, première vice-présidente d'Angers Loire Métropole, M. Sébastien TISON , chargé de mission politiques publiques.

Jeudi 10 octobre 2019

- Comité national olympique et sportif français : M. Denis MASSEGLIA , Président, Mme Julie LAVET , Directrice des relations institutionnelles.

- Ministère des sports : M. Karim HÉRIDA , Directeur de cabinet, M. Skander KARAA , Conseiller spécial (relations avec le Parlement),

- Agence nationale du sport (ANS) : M. Frédéric SANAUR , Directeur général.

ANNEXE

ÉVOLUTION CRÉDITS DÉPARTEMENTAUX CONSACRÉS AU SPORT

2010-2019

Départements

Moyennes
(2010 à 2014)
en €

Moyennes
(2015 à 2019)
en €

Taux évolution

CD ALLIER

2 717 757

2 793 602

2,8

CD AVEYRON

1 250 335

1 094 198

-12,5

CD BAS-RHIN

9 457 283

12 176 741

28,8

CD CREUSE

798 335

936 970

17,4

CD FINISTERE

5 267 251

3 904 077

-25,9

CD HAUTE-SAÔNE

1 139 040

1 544 295

35,6

CD HAUTS DE SEINE

25 898 302

30 222 026

16,7

CD HERAULT

13 550 960

11 013 608

-18,7

CD MANCHE

2 693 755

2 529 172

-6,1

CD PUY-DE-DÔME

2 385 900

784 400

-67,1

CD PYRENEES ATLANTIQUE

5 608 834

6 957 972

24,1

CD SARTHE

6 640 000

4 420 000

-33,4

CD SOMME

3 591 440

2 055 548

-42,8

CD VAUCLUSE

1 859 902

1 574 589

-15,3

CD VENDEE

9 890 723

8 285 491

-16,2

Sources : réponses au questionnaire des rapporteurs

Sur la trentaine de réponses au questionnaire reçues, une quinzaine comportaient des données chiffrées exploitables concernant les dépenses des conseils départementaux en faveur des politiques du sport. Afin d'établir une tendance, le tableau ci-dessus établit la moyenne des dépenses sur deux périodes distinctes, 2010 à 2014 d'une part et 2015 à 2019 d'autre part.

La comparaison de ces deux moyennes permet de constater que les dépenses en faveur du sport, au cours des 10 années étudiées, ont baissé pour 60 % des départements étudiés et augmenté pour 40 % d'entre eux.


* 1 « Les compétences en matière de culture, de sport, de tourisme, de promotion des langues régionales et d'éducation populaire sont partagées entre les communes, les départements, les régions et les collectivités à statut particulier. »

* 2 Le même article 90 a prévu qu'à défaut de convention concernant au moins trois des compétences visées le transfert deviendrait obligatoire pour la plupart d'entre elles à compter du 1 er janvier 2017.

* 3 « Délégation de compétences, conférence territoriale d'action publique, de nouveaux outils au service de la coopération territoriale », rapport de l'IGA N°16119-R de mai 2017.

* 4 Le Gouvernement annonce la publication des décrets d'application pour le début 2020.

* 5 Données chiffrées extraites de l'avis n° 150 (2014-2015) de Mme Catherine Morin-Desailly, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 3 décembre 2014 sur le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 6 Article L 1111-4 du CGCT (deuxième alinéa) : « Les compétences en matière de promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes, de culture, de sport, de tourisme, de promotion des langues régionales et d'éducation populaire sont partagées entre les communes, les départements, les régions et les collectivités à statut particulier ».

* 7 https://www.interieur.gouv.fr/Publications/Rapports-de-l-IGA/Rapports-recents/Delegation-de-competences-et-conference-territoriale-d-action-publique-de-nouveaux-outils-au-service-de-la-cooperation-territoriale.

* 8 Les réponses au questionnaire adressé aux régions et aux départements présentés dans le II confirment cet attachement à la clause de compétence partagée.

* 9 L'organisation territoriale de l'ANS ne devrait pas être effective avant début 2020.

* 10 Mme Mathilde Gouget a été auditionnée par vos rapporteurs le 26 mars 2019.

* 11 Selon le cas, de la région et des départements, de la collectivité de Corse, des collectivités territoriales régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ou de la collectivité de Nouvelle-Calédonie.

* 12 Selon le cas, des métropoles, de leurs éventuels établissements publics territoriaux et de la métropole de Lyon.

* 13 Des instances locales ou, à défaut, nationales du Comité national olympique et sportif français, du Comité paralympique et sportif français, des fédérations sportives agréées et des ligues professionnelles.

* 14 Des représentants locaux ou, à défaut, nationaux des organisations professionnelles représentatives des acteurs du monde économique.

* 15 D'autres conseils départementaux comme la Somme et le Vaucluse ont également créé des maisons départementales des sports.

* 16 Le Vaucluse indique également qu'il n'a pas de CREPS sur son territoire et qu'il n'interagit pas avec le CREPS régional. La Vendée n'a pas pour sa part d'interaction avec le CREPS Pays-de-Loire. Le Loir-et-Cher n'a pas non plus de relations avec le CREPS Centre-Val-de-Loire.

* 17 La région Grand Est comprend des CREPS à Strasbourg, Nancy et Reims.

* 18 Le département du Finistère indique pour sa part qu'il n'a pas d'interaction avec le Campus Sport Bretagne.

* 19 Par exception au principe de compétence partagée et facultative, l'article L. 311-3 du code du sport prévoit que : « Le département favorise le développement maîtrisé des sports de nature. À cette fin, il élabore un plan départemental des espaces, sites et itinéraires relatifs aux sports de nature. Ce plan inclut le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée prévu à l'article L. 361-1. du code de l'environnement. Il est mis en oeuvre dans les conditions prévues aux articles L. 113-6 et L. 113-7 du code de l'urbanisme. »

* 20 Réponse du département du Haut-Rhin au questionnaire envoyé par vos rapporteurs.

* 21 Voir en particulier le II du présent rapport.

* 22 L'exploitation des réponses au questionnaire dans le II a montré l'absence de relations entre les départements et les CREPS.

* 23 http://www.creps-aquitaine.fr/IMG/pdf/composition_ca.pdf

* 24 https://www.creps-idf.fr/creps.equipe

* 25 Le handicap, le sport nature et les collèges ont été reconnus par la loi comme des compétences obligatoires des départements. La compétence facultative sport interagit alors avec la dimension transversale de ces compétences obligatoires.

* 26 Voir le rapport n° 597 (2018-2019) de M. Claude KERN, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 26 juin 2019, sur le projet de loi portant ratification de l'ordonnance n° 2019-207 du 20 mars 2019 relative aux voies réservées et à la police de la circulation pour les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

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