E. DIFFÉRENCIER LES MODALITÉS D'APPLICATION DES TEXTES EN FONCTION DES TERRITOIRES

Depuis plusieurs années, la délégation, comme d'autres instances du Sénat, plaide pour une certaine capacité de différenciation entre les territoires. Derrière ce terme, se présente simplement une faculté qui devrait être évidente : celle d'adapter le droit à la diversité des territoires, bien exprimée par Michel Fournier, président de l'AMRF : « En matière de différenciation, nous attendons qu'un regard spécifique soit porté sur certains territoires ruraux et certaines collectivités de petite taille, par exemple dans le domaine de l'habitat » 32 ( * ) .

Ce regard spécifique doit pouvoir être porté sur tous les territoires, de telle sorte que leurs caractéristiques puissent être prises en compte.

Caroline Cayeux, présidente de Villes de France, ainsi pu affirmer avec force : « Nous appelons à une véritable différenciation territoriale, car toutes les collectivités n'ont pas les mêmes besoins et n'avancent pas toutes à la même vitesse. Cela se constate en matière de politique de logement, où la carte des grands zonages nationaux mérite d'être revue à l'aune de chaque situation locale, comme c'est le cas dans le cadre de l'expérimentation du Pinel breton, qui commence à faire ses preuves et mériterait d'être généralisé. » 33 ( * )

Nous n'ignorons pas que la notion même de « différenciation » inquiète, dans un pays pétri d'égalitarisme et qui s'interroge sur son identité et sa cohésion. Pourtant, cette différenciation ne saurait être le droit de faire n'importe quoi n'importe où, et n'a rien à voir avec un démantèlement de l'unité de la Nation.

La délégation peut ainsi faire siens les propos de Christophe Bouillon, président de l'APVF : « Je vous rejoins pour souhaiter une différenciation encadrée, car nous sommes attachés comme à la prunelle de nos yeux à une République une et indivisible. Nous plaidons sur ce sujet pour une expérimentation renforcée, car les règles qui s'y attachent empêchent actuellement qu'elle soit bien vécue . » 34 ( * )

La délégation a souhaité vérifier l'attachement des élus à cette souplesse d'organisation et d'action. À l'occasion du sondage CSA, les deux questions suivantes ont ainsi été posées aux élus :

1) Seriez-vous favorable à ce que l'État puisse confier des compétences différentes à des collectivités territoriales de même catégorie dans le cadre d'une expérimentation ? Exemple : la loi pourrait confier à un département l'ensemble de la gestion du réseau routier, qu'il soit national ou départemental, ou à une région la gestion des lycées et collèges, ou encore la compétence de l'enseignement supérieur ;

2) Seriez-vous favorable à ce que les lois nationales puissent être adaptées aux spécificités des territoires ? Exemple 1 : les départements pourraient décider de modifier les limitations de vitesse sur l'ensemble du réseau routier de leur territoire. Exemple 2 : les régions pourraient conduire une politique universitaire, notamment en fixant les droits d'inscription à l'université sur leur territoire.

À la première question, sur l'attribution de compétences différentes pour des collectivités territoriales de même catégorie , il a été répondu très favorablement puisqu'on dénombre 74% de réponses positives . Parmi les élus municipaux, ce sont ceux des communes moyennes et grandes qui y sont le plus attachés. Par ailleurs, l'approbation des élus augmente avec leur jeunesse et leur nouveauté dans leurs fonctions.

Des compétences différentes pour des collectivités territoriales de même catégorie

Source : Sondage CSA auprès des élus locaux pour la délégation aux collectivités territoriales, novembre 2020

Des compétences différentes pour des collectivités territoriales de même catégorie

Élus municipaux

Élus départementaux

Élus régionaux

Total Élus municipaux

Élus municipaux (communes de moins
de 3 500 habitants)

Élus municipaux (communes de 3 500 à
19 999 habitants)

Élus municipaux (communes de 20 000 habitants
et plus)

Total Favorable

74%

81%

83%

74%

73%

86%

78%

Tout à fait favorable

24%

33%

43%

24%

22%

41%

31%

Plutôt favorable

50%

48%

40%

50%

51%

45%

47%

Total Pas favorable

25%

19%

17%

25%

26%

14%

19%

Pas vraiment favorable

17%

13%

5%

17%

17%

11%

14%

Pas du tout favorable

8%

6%

12%

8%

9%

3%

5%

Sans opinion

1%

-

-

1%

1%

< 1%

3%

Source : Sondage CSA auprès des élus locaux pour la délégation aux collectivités territoriales, novembre 2020

Des compétences différentes pour des collectivités territoriales de même catégorie

Âge

Ancienneté dans
la fonction exercée

25 à 34 ans*

35 à 49 ans

Moins de 50 ans

50 ans et plus

50 à
64 ans

65 ans et plus

Moins d'un an

Entre 1 et 6 ans

Entre 7 et 12 ans

Plus de 12 ans

Total Favorable

99%

86%

87%

72%

71%

73%

78%

73%

68%

71%

Tout à fait favorable

14%

34%

32%

23%

20%

26%

22%

22%

30%

28%

Plutôt favorable

85%

51%

55%

49%

51%

47%

56%

51%

37%

44%

Total Pas favorable

1%

12%

11%

27%

29%

26%

22%

26%

32%

26%

Pas vraiment favorable

1%

8%

7%

18%

20%

16%

13%

20%

22%

19%

Pas du tout favorable

1%

4%

3%

9%

9%

9%

9%

7%

10%

7%

Sans opinion

-

3%

2%

1%

< 1%

1%

1%

< 1%

-

3%

Source : Sondage CSA auprès des élus locaux pour la délégation aux collectivités territoriales, novembre 2020

S'agissant de la seconde question, sur l'adaptation des lois nationales aux spécificités des territoires, l'approbation est là aussi largement majoritaire, avec 77% de réponses positives . Les élus départementaux y sont particulièrement favorables, à 88%, et, parmi les élus municipaux, ceux des communes petites et moyennes (77 et 79%). On observe que les plus nombreux à approuver la proposition sont les plus de 35 ans ainsi que les élus nouveaux (moins d'un an d'exercice : 80%) ou anciens (plus de 12 ans d'exercice : 80%).

Adapter les lois nationales aux spécificités des territoires

Source : Sondage CSA auprès des élus locaux pour la délégation aux collectivités territoriales, novembre 2020

Source : Sondage CSA auprès des élus locaux pour la délégation aux collectivités territoriales, novembre 2020

Adapter les lois nationales aux spécificités des territoires

Élus municipaux

Élus départementaux

Élus régionaux

Élus municipaux (communes de moins de 3 500 habitants)

Élus municipaux (communes de 3 500
à 19 999 habitants)

Élus municipaux (communes de 20 000 habitants
et plus)

Total Favorable

77%

88%

69%

77%

79%

66%

Tout à fait favorable

42%

44%

36%

43%

42%

37%

Plutôt favorable

34%

44%

33%

34%

38%

30%

Total Pas favorable

23%

12%

29%

23%

20%

34%

Pas vraiment favorable

12%

8%

10%

12%

11%

22%

Pas du tout favorable

11%

4%

19%

12%

9%

11%

Sans opinion

< 1%

-

2%

-

< 1%

-

Source : Sondage CSA auprès des élus locaux pour la délégation aux collectivités territoriales, novembre 2020

Adapter les lois nationales aux spécificités des territoires

Âge

Ancienneté dans
la fonction exercée

25 à 34 ans

35 à 49 ans

Moins de 50 ans

50 ans et plus

50 à
64 ans

65 ans et plus

Moins d'un an

Entre 1 et
6 ans

Entre 7 et
12 ans

Plus de 12 ans

Total Favorable

57%

79%

76%

77%

77%

77%

80%

71%

70%

80%

Tout à fait favorable

25%

41%

39%

43%

42%

45%

45%

43%

35%

43%

Plutôt favorable

33%

38%

37%

34%

35%

33%

35%

29%

35%

37%

Total Pas favorable

43%

21%

24%

23%

23%

23%

20%

29%

29%

20%

Pas vraiment favorable

5%

10%

9%

12%

13%

11%

8%

13%

16%

17%

Pas du tout favorable

38%

12%

14%

11%

11%

11%

12%

16%

13%

3%

Sans opinion

-

-

-

< 1%

< 1%

< 1%

-

< 1%

< 1%

-

Source : Sondage CSA auprès des élus locaux pour la délégation aux collectivités territoriales, novembre 2020

Les mêmes questions ont été posées dans le cadre de la consultation nationale des élus locaux de mars 2021. Les réponses convergent puisque l'attribution de compétences différentes pour des collectivités territoriales de même catégorie recueille 70% d'avis favorables et l'adaptation des lois nationales aux spécificités des territoires 72%.

Attribution de compétences différentes pour des collectivités de même catégorie

Source : Consultation nationale des élus via la plateforme internet du Sénat, mars 2021

Adaptation des lois nationales aux spécificités des territoires

Source : Consultation nationale des élus via la plateforme internet du Sénat, mars 2021


* 32 Audition du 28 janvier 2021.

* 33 Ibid.

* 34 Ibid.

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