C. FAIRE FIGURER LA PRÉSERVATION DE LA BIODIVERSITÉ EN TÊTE DES AGENDAS POLITIQUES, UNE PRIORITÉ AFFIRMÉE PAR LE MANIFESTE DE MARSEILLE

Publié le 10 septembre 2021, le « manifeste de Marseille » constitue en quelque sorte la déclaration finale qui clôture les travaux du congrès.

Ce texte récapitule les constats qui font l'objet d'un consensus chez les congressistes, tout en appelant les États à des « changements radicaux [...] si nous voulons construire des sociétés qui valorisent la nature, la protègent et investissent en elle. »

Son préambule affirme que « les urgences du climat et de la biodiversité ne sont pas distinctes l'une de l'autre, mais bien plutôt deux aspects d'une même crise. » La commission partage d'autant plus ce constat que cette ligne directrice a inspiré ses positions et les amendements défendus pendant l'examen du projet de loi « Climat et résilience » en juin dernier, à l'instar de l'article 1 er , introduit à l'initiative du Sénat, qui dispose que « l'État rappelle son engagement à respecter les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre » ou de l'article 227 sur la stratégie nationale des aires protégées dont la commission a renforcé l'ambition et l'efficacité en associant les collectivités territoriales et en prévoyant l'établissement de « la liste des moyens humains et financiers nécessaires à la réalisation des [...] objectifs ».

Le manifeste affirme le rôle central des populations autochtones et des communautés locales dans la conservation , « en tant qu'autorités et gardiens de la biodiversité ». En effet, le rôle stratégique de ces acteurs a été mis en avant et notamment leur capacité à proposer des solutions innovantes pour faire face aux urgences du climat et de la nature. La promotion de la défense des travailleurs et des lanceurs d'alerte environnementaux 9 ( * ) est en effet essentielle pour favoriser l'implication du plus grand nombre en faveur de la préservation de la nature. L'UICN s'est d'ailleurs engagée à les protéger. Il s'agit en effet d'une nécessité pressante : l'ONG Global Witness a recensé l'assassinat, en 2020, d'au moins 227 défenseurs de la nature dans le monde, principalement en Amérique latine.

Parmi les points saillants du manifeste, on peut également mettre en avant la nécessité :

- d'assurer la promotion des investissements en faveur de la nature ;

- d'oeuvrer pour une transition vers une économie respectueuse de la nature , de mettre fin à la perte de biodiversité en s'engageant en faveur d'un cadre mondial de la biodiversité transformateur, efficace et ambitieux ;

- de réduire d'urgence les émissions de gaz à effet de serre , afin de limiter l'augmentation de la température à moins de 1,5° C et de parvenir à la neutralité carbone d'ici 2050.

La commission partage pleinement ces constats, étayés par un grand nombre d'études scientifiques internationales et de rapports d'experts : ces travaux confortent les positions qui ont été défendues lors de l'examen des derniers grands textes législatifs traitant de l'environnement et du climat. Elle salue également l' opportunité du moment où ce manifeste a été rendu public , pour éclairer la réflexion quelques semaines avant la tenue de la COP26 de Glasgow et la COP15 de Kunming. La conviction partagée de l' urgence à agir laisse en effet plus de temps utile aux négociations et à la prise de décisions structurantes et transformatrices.

Plusieurs engagements à agir ont également été pris renforçant ainsi la portée du manifeste, afin de « contribuer de manière substantielle et significative au rétablissement post-pandémique et à la réponse aux urgences en matière de biodiversité et de climat » :

- la création et mise en oeuvre de l'initiative Grand mur bleu , visant à développer une économie bleue régénératrice ;

- la mise en oeuvre du premier plan d'action mondial autochtone pour la gouvernance des terres, territoires, eaux, mers côtières et ressources naturelles autochtones ;

- l'amplification et l'accélération des initiatives Net-Zero mondiales et régionales qui intègrent systématiquement la nature et les solutions fondées sur la nature ;

- l'élargissement de l' accès universel à des espaces verts de haute qualité et le développement de la biodiversité urbaine dans une centaine de villes.

Par ailleurs, plusieurs États et acteurs non étatiques ont pris des engagements en faveur de la conservation de la nature et de la biodiversité :

- la Grèce s'est engagée à réduire la surpêche en définissant des zones de non-prélèvement dans 10 % de ses eaux territoriales d'ici 2030 et à réduire la pollution marine aux matières plastiques de 60 % ;

- le Salvador, le Bélize, le Pakistan, le Chili et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur se sont engagés à restaurer au total 5,5 millions d'hectares et les autorités fédérales allemandes ont alloué 20 millions d'euros à l'UICN pour créer un hub d'expertise technique sur la restauration des paysages sylvestres ;

- l'Association International Hydropower Association s'est engagée, au nom de tous ses membres, à ne pas lancer d'exploitation sur des sites inscrits sur la liste du Patrimoine mondial ;

- cinq multinationales françaises (Kering, Holcim, L'Occitane, LVMH et Pernod-Ricard) se sont engagées à restaurer et développer la biodiversité grâce à des stratégies d'entreprise axées sur la nature.

La commission se félicite de l' effet d'entraînement du congrès sur différents acteurs étatiques ou économiques en faveur de la nature et de la biodiversité. L'importante couverture médiatique du congrès mondial de la nature explique en partie ce phénomène ; il n'en demeure pas moins que de réelles avancées peuvent être obtenues au bénéfice de la biodiversité de la part des acteurs, si l'on considère les bienfaits cumulés de l'ensemble des engagements annoncés.


* 9 Voir à cet égard la motion 39 « Protéger les défenseurs des droits de l'homme et des peuples et les lanceurs d'alerte dans le contexte de l'environnement » adoptée le 8 septembre 2021.

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