2. Les principes de la nouvelle OCM

Il s'agit dans ce secteur d'un prolongement de la réforme de la politique agricole commune décidée en 1992. Cette nouvelle réglementation européenne dans le secteur des fruits et légumes comporte cependant quelques différences avec les réformes engagées jusqu'à présent. En effet, les producteurs doivent assurer la gestion des marchés, la Communauté cofinançant leurs actions.

Autre nouveauté, la réforme a été réalisée à budget constant et les dépenses engagées par la Commission sont également plafonnées par État membre
.

Le groupe de travail tient à souligner ces différences, car elles sont révélatrices du contexte difficile dans lequel les producteurs de fruits et légumes doivent poursuivre leur activité.

Afin d'atteindre ces objectifs, la réglementation européenne propose de combiner différents types de mesures.

a) Une offre communautaire améliorée et mieux orientée vers le marché

Le renforcement des organisations de producteurs et de leur moyens techniques

Ce renforcement passe par l'introduction de nouvelles exigences quant à la composition des organisations et aux moyens techniques dont elles disposeront pour agir sur le marché.

La reconnaissance des OP

Les organisations de producteurs (OP) sont la clef de voûte de la nouvelle OCM . Ces OP 5( * ) peuvent être universelles (tous produits) ou spécialisées (fruits ou légumes). Les organisations existantes ont jusqu'à la fin 1998 pour se mettre en conformité avec les nouvelles règles. Les groupements de producteurs antérieurs reconnus avant le 21 novembre 1996 peuvent devenir des OP s'ils ne modifient pas la liste des productions pour lesquelles ils étaient reconnus.

Quant aux nouvelles OP , elles doivent déposer une demande d'agrément. Seules sept catégories de produits font l'objet d'une reconnaissance : fruits et légumes, fruits, légumes, produits destinés à la transformation, agrumes, fruits à coques et champignons.

Pour être reconnues, les organisations de producteurs devront regrouper un nombre de producteurs et une production commercialisable minimaux. Dans le cas des OP reconnues " groupement de producteurs " avant le 21 novembre 1996 et des organisations de producteurs demandant la reconnaissance pour les champignons et les fruits à coques, le nombre minimal de producteurs est d'au moins cinq, la valeur minimale de la production commercialisable étant de cinq millions de francs (MF).

Pour les organisations de producteurs non reconnues " groupement de producteurs " avant le 21 novembre 1996 et demandant la reconnaissance en tant qu'OP pour les catégories de produits fruits et légumes, fruits, légumes, produits destinés à la transformation, le nombre de producteurs ne peut être inférieur à cinq . La valeur minimale de la production commercialisable est ensuite fonction du nombre de producteurs : entre 5 et 14 producteurs, elle doit être de 20 millions de francs ; 17 millions de francs au moins entre 15 et 39 producteurs ; 10 millions de francs au-delà de 39 producteurs. Le cas des agrumes est particulier puisque ces OP doivent recueillir au moins 20 producteurs regroupant au minimum 2.000 tonnes de produit.

Deux types d'organisations de producteurs peuvent être reconnus (Règlement 11/97 du 3 mars 1997). D'une part , les organisations de producteurs de commercialisation (OPC) qui assurent elles-mêmes la commercialisation effective des produits de leurs adhérents. D'autre part , les organisations de producteurs de mise en marché (OPM) qui, pour être reconnues, doivent centraliser l'émission des factures, les paiements et prévoir un cadre conventionnel entre ses adhérents et l'aval.

Les OP doivent, en premier lieu, mettre à la disposition de leurs membres les moyens nécessaires à l'appui technique pour la mise en oeuvre de pratiques culturales respectueuses de l'environnement, le stockage et le conditionnement. En second lieu , des contraintes ayant trait à la connaissance de la production ou encore des obligations sur le plan des statuts doivent être prévues par les OP.

Votre groupe de travail note, toutefois, qu'une certaine souplesse a prévalu en ce qui concerne les ventes directes puisque les producteurs membres de l'OP " universelles " et spécialisées peuvent vendre respectivement jusqu'à 25 % et 20 % de leur production en dehors de ces structures, le principe étant toutefois celui de l'apport total de la production.

Cette réglementation devrait conduire à la création de nouvelles OP, mais aussi à la fusion de nombreuses OP existantes.

Les programmes d'action des OP

Une OP doit notamment avoir pour but
:

- de développer la concentration de l'offre et la mise en marché de la production de ses membres ;

- de réduire les coûts de production ;

- de régulariser les prix à la production ;

- de promouvoir des pratiques culturales et des techniques de production et de gestion des déchets respectueuses de l'environnement ;

- d'améliorer la mise en valeur commerciale des productions pour lesquelles elle a été reconnue ;

- d'assurer la programmation de la production et son adaptation à la demande ;

- d'orienter les choix de ses adhérents vers une démarche de qualité ;

- la mise en place de programmes opérationnels ou de plans d'action.

Ces différentes actions doivent viser à mieux adapter les produits des OP au marché.

Ainsi, l'objectif d'inscrire la production dans un processus d'adaptation permanente aux attentes des consommateurs se concrétise par la mise en place de programmes opérationnels .

Ces programmes ont pour but :

- d'assurer la programmation de la production et son adaptation à la demande, notamment en quantité et en qualité ;

- de développer la concentration de l'offre et la mise en marché de la production des membres ;

- de promouvoir les produits auprès des consommateurs .

- de réduire les retraits.

Le programme opérationnel comprend obligatoirement :

- des dispositions visant à assurer le contrôle du respect des normes, des dispositions phytosanitaires et des teneurs maximales autorisées de résidus, assorties de moyens financiers, techniques et humains nécessaires ;

- des mesures destinées à développer l'utilisation des techniques respectueuses de l'environnement par les producteurs associés.

La durée du programme opérationnel est pluriannuelle , avec une limite minimum de trois années et maximum de cinq années. Dès cette année, les organisations de producteurs peuvent présenter un programme opérationnel (avant le 30 juin 1997) à partir du moment où elles ont déposé une demande de reconnaissance qui a été jugée recevable.

La liste des actions éligibles au programme opérationnel est assez importante. Un premier volet concerne la participation au programme national ou à celui du bassin de production (promotion collective, recherche, expérimentation...). Un deuxième volet vise les actions liées à l'optimisation des conditions de production et celles ayant trait à la qualité des produits et les actions relatives à l'environnement (volet obligatoire). Les actions de commercialisation ne concernent que les OPC. D'une manière générale, les actions doivent être " autorisées par la réglementation communautaire ", " techniquement valides " et " cohérentes avec les orientations économiques du secteur et de chacun de ses produits ". Les actions ne sont pas autorisées par la réglementation communautaire si elles portent :

- sur des dépenses administratives et des dépenses de gestion, à l'exception de celles liées à la réalisation du programme opérationnel ;

- sur des quantités produites par les membres de l'organisation hors Communauté ;

- sur des niveaux de revenus ou de prix ;

- sur des campagnes publicitaires de marques commerciales individuelles ;

- sur des actions pouvant créer des conditions de distorsion de concurrence dans les autres activités économiques de l'OP qui ne concerneraient pas uniquement la valorisation de la production de ses membres.

Les groupements de producteurs qui ne sont pas reconnus comme organisations de producteurs au titre de la nouvelle OCM, mais qui ont été reconnues avant le 21 novembre 1996 et remplissent toujours les critères de reconnaissance, peuvent présenter un plan d'action. Un tel plan d'action doit avoir pour objectif de permettre au groupement de producteurs concerné, d'obtenir sa reconnaissance comme organisation de producteurs au titre de la nouvelle OCM. Les actions devront être limitées :

- à l'acquisition des équipements ou au recrutement du personnel permettant d'accéder à la reconnaissance d'organisation de producteurs ;

- aux actions liées à l'environnement et au contrôle du respect des normes et des dispositions sanitaires ;

- à la participation aux actions collectives des programmes nationaux ou de bassin de production.

Pour cette année, les plans d'action doivent être déposés avant le 30 juin 1997.

b) La réorganisation du dispositif de soutien aux Organisations de Producteurs (OP)

L'agrément du programme opérationnel donne droit à l'aide communautaire et permet également de bénéficier du soutien apporté à des actions de retrait.

La mise en place des fonds opérationnels

Le fonds opérationnel est destiné à financer les actions prévues dans le cadre du programme opérationnel et du plan d'action de retrait pour l'année civile suivant sa demande. La demande de fonds doit être déposée avant le 15 septembre de l'année qui précède la mise en oeuvre du plan. Pour 1997, elle doit être remise avant le 30 juin. D'une manière générale, la part de l'aide publique (Union européenne et État membre) dans le fonds opérationnel est de 50 % , la contribution professionnelle (apportée par les producteurs) représentant l'autre moitié . Cette participation publique aux fonds opérationnels est limitée à 4 % de la valeur de la production commercialisée (4,5 % à partir de 1999), à condition que le montant global de ces aides représente moins de 2 % du chiffre d'affaires de l'ensemble des OP (2,5 % à partir de 1999).

Renouvelé chaque année pendant toute la durée du programme opérationnel, le montant prévisionnel de l'aide communautaire est indiqué aux OP avant le 15 décembre, soit en même temps que la décision d'appréciation pour les programmes opérationnels. Cette aide est versée sous forme de trois avances, aux mois de janvier, avril, juillet ou octobre.

Ce fonds financera les opérations de retrait communautaire, les compléments aux indemnités communautaires de retrait et les actions d'amélioration de la qualité et de mise en valeur commerciale.

Il est à noter qu'il est proposé un régime plus favorable pour les OP opérant dans plusieurs États membres : la part des subventions publiques dans les opérations financées par leur fonds opérationnel passerait de 50 à 60 % des dépenses pour les opérations autres que celles relatives au retrait.

Les OP de mise en marché et les OP de commercialisation peuvent bénéficier des fonds opérationnels.

Ces fonds devraient pouvoir représenter pour la France une enveloppe de 800 millions de francs.

La nouvelle OCM considère, par ailleurs, que, si le maintien du système de retrait se révèle nécessaire, ce dernier doit cependant constituer un filet de sécurité et non un débouché en lui-même.

Les modalités prévues pour le mécanisme du retrait, tant en ce qui concerne les limitations en volume que les réductions de prix pour les compléments apportés par le fonds opérationnels, ont été assouplies durant les négociations sur l'OCM.

Les produits pouvant bénéficier de l'indemnité compensatrice de retrait sont les choux-fleurs, les tomates, les aubergines, les abricots, les pêches, les nectarines, les citrons, les poires, les raisins de table, les pommes, les melons, les pastèques, les ananas, les mandarines, les clémentines et les oranges.

Si la commission prévoyait, initialement, des prix de retrait communautaires très fortement diminués pour certains produits (jusqu'à 66 % pour les pommes), ces réductions ont été atténuées dans le règlement de l'OCM.

La part des fonds opérationnels consacrée au financement des retraits est de 60 % des FO la première année, 55 % la deuxième, 50 % la troisième, 45 % la quatrième, 40 % la cinquième et 30 % à partir de la sixième.

Ainsi, par rapport au prix moyen estimé des retraits en 1995/1996, la diminution de l'ICR est de 20 % la première année, le niveau final de réduction à l'issue de la période transitoire étant de 40 %. Pour les pommes et les poires, la diminution est de 15 % la première année, jusqu'à 30 % la dernière, les retraits devant être limités à 8,5 % de la production commercialisée.

Il est ainsi possible de retirer du marché jusqu'à 50 % de la production commercialisée (moyenne triennale) la première campagne, 45 % la deuxième, 40 % la troisième, 30 % la quatrième, 20 % la cinquième et 10 % la sixième, avec une marge annuelle de dépassement de 3 % (pour les agrumes, respectivement 35, 30, 25, 20, 15 et 10 %).

Le retrait reste ainsi un réel instrument de gestion du marché garantissant aux organisations de producteurs la marge de manoeuvre nécessaire pour une gestion efficace.

La réduction des dépenses liées au retrait et à la réorientation des crédits communautaires vers l'amélioration des conditions de production et de commercialisation devrait, selon la Commission, permettre de stabiliser durablement le coût de l'OCM autour de 1,6 milliard d'écus par an.

c) Une fonction de classification des produits maintenue au sein de la Communauté

La nouvelle réglementation réaffirme, en mettant en avant un objectif de simplification, la compétence de la Commission dans l'élaboration des normes de qualité. Certaines mesures ayant un impact direct sur la qualité des produits, prises en compte par la Commission, étaient préconisées par le rapport de M. Jean-Michel Ferrand, Député du Vaucluse 6( * ) : il s'agit du respect des mesures de commercialisation, du développement de l'information des consommateurs...

Ainsi, les normes CEE/ONU ne serviront qu'à titre indicatif pour définir des normes communautaires, en comité de gestion. Là aussi, le souhait exprimé dans la résolution du Sénat a été satisfait .

d) La reconnaissance des interprofessions

L'OCM reconnaît officiellement les organisations interprofessionnelles dans leur rôle d'équilibre du marché, d'amélioration de la qualité, et d'actualisation des informations concernant le marché pour les producteurs. En outre, une incitation financière à leur mise en place est instituée.

Le principe de l'extension des règles qui peuvent désormais être rendues obligatoires pour l'ensemble des professionnels est définitivement légalisé . Cette extension peut être demandée pour des actions portant sur la connaissance de la production et du marché, l'application de règles de production plus strictes, de discipline en matière de commercialisation et de protection de l'environnement, des mesures de protection de l'agriculture biologique et des appellations d'origine, labels de qualité et indications géographiques.

Le nouveau règlement précise qu'un État membre peut décider que " les opérateurs individuels ou les groupements non membres de l'organisation qui bénéficient de ces actions sont redevables auprès de l'organisation de tout ou partie des contributions financières versées par les membres (...) ". Selon les professionnels, cet acquis sur l'interprofession, obtenu après de longues négociations, doit permettre d'éviter des interprétations trop restrictives de la réglementation telles que celles exprimées par la Commission sur le régime d'aide à la promotion et à l'amélioration de la qualité des fruits et légumes frais mis en place en France dans le secteur des fruits et légumes, en 1994, par l'interprofession.

e) L'harmonisation et le renforcement des contrôles nationaux et communautaires

Le renforcement et l'harmonisation des contrôles sont des exigences maintes fois exprimées. Une mise en oeuvre efficace des accords du GATT et des orientations proposées n'est possible que s'il existe des dispositifs de contrôle adéquats au niveau tant national qu'européen .

Plus généralement, les orientations proposées vont dans le sens d'une simplification de la réglementation communautaire et d'une responsabilité accrue des producteurs et de leurs organisations. Leur mise en oeuvre nécessiterait donc, de la part des différentes administrations, des efforts de contrôle plus importants qu'aujourd'hui.

Ce renforcement des contrôles toucherait plus particulièrement la gestion des fonds de roulement par les organisations de producteurs, le respect des normes de qualité commerciales et sanitaires et le fonctionnement correct du régime des prix d'entrée. L'existence d'un noyau, réduit mais opérationnel, d'inspecteurs communautaires , contribuerait à garantir aux producteurs communautaires et des pays tiers, aux consommateurs et aux opérateurs de la filière, l'application uniforme et non discriminatoire des contrôles .

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