VI. CONCLUSION

La problématique, économique au premier abord, de la valorisation des informations, diffère de celle, plus socioculturelle et éthique, des valeurs de la société de l'information.

D'un côté, il s'agit tout d'abord de donner du sens au signal, puis une valeur ajoutée à ce minerai de base qu'est l'information, en le transformant successivement en connaissance, en expertise, en sagesse et en culture. Pour cela, il faut utiliser les réseaux afin d'y faire circuler et d'y exploiter notre savoir, mais aussi d'y valoriser notre patrimoine culturel. Dans cette triple optique, ce qui compte le plus, ce sont nos capacités d' interpréter les informations (plus importantes que leur simple collecte) et d' organiser la diffusion du savoir.

Mais l'accès au savoir pose également des problèmes au pouvoir, eux-mêmes liés aux valeurs de la société de l'information. Bref, les deux questions de la valorisation des informations et des valeurs de la société de l'information doivent être articulées.

Mais, on le regrettera avec Toffler : " une éthique de l'information, adaptée aux économies avancées, fait encore défaut ". De sorte qu'il convient d'accréditer l'idée selon laquelle " tolérer la diversité est le premier commandement de la société démassifiée (grâce aux nouvelles techniques) ".

Cette vertu de tolérance , assez proche de celle d' ouverture mise au premier plan par Bougnoux , permet de démarquer l' information (qui suppose une distance critique pour appréhender l'autre) de la communication (qui nous enferme dans le cercle de nos habitudes subjectives).

D'autre part, l'entrée dans la société de l'information, si elle ne s'accompagne pas, comme pour l'avènement de l'imprimerie, de nouveaux courants intellectuels ou religieux, n'en exige pas moins, elle aussi, l'adhésion à des valeurs positives : tolérance et ouverture, on l'a dit, mais aussi curiosité intellectuelle, inventivité et désir d'échanger et de partager.

Par voie de conséquence, n'ayons pas peur de le dire : chaque acteur a des efforts à accomplir. Le secteur des télécommunications, pour sortir de sa culture de monopole, adapter ses tarifs prohibitifs et offrir de nouveaux services. Les fournisseurs de contenus, pour privilégier la qualité, respecter des règles déontologiques librement consenties et profiter de l'interactivité pour mieux satisfaire leurs clients. Les fabricants de terminaux, pour non seulement améliorer les performances de leurs machines, mais aussi les rendre plus conviviales et plus compatibles entre elles. Les pouvoirs publics, enfin, pour crée un cadre législatif adapté, pour préférer la régulation à la réglementation et pour favoriser l'innovation et l'utilisation, dans l'enseignement, des nouvelles techniques.

Sur tous ces points, comment le nier, la France accuse un très net retard. Mais elle possède de réels atouts et elle a su prouver par le passé, en particulier avec le Minitel, qu'elle pouvait jouer un rôle de tout premier plan. Cependant, on ne le soulignera jamais assez : il est nécessaire de nous départir de cette défiance, en partie héritée de notre passé, et qui trop souvent continue de nous inhiber. Tout comme il est nécessaire de devenir une société plus ouverte, moins centralisée, moins cloisonnée, moins hiérarchique. En un mot, résolument tournée vers l'avenir.