Rapport d'information n° 345 (1997-1998) de M. Philippe MARINI , fait au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques publiques, déposé le 6 mars 1998

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N° 771

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 6 mars

N° 345

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Rattaché pour ordre au procès verbal de la séance du 5 mars 1998

Enregistré à la Présidence du Sénat le mars 1998

OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION

DES POLITIQUES PUBLIQUES

RAPPORT

sur

LES ACTIONS MENÉES EN FAVEUR DE LA POLITIQUE MARITIME

ET LITTORALE DE LA FRANCE,

par

M. Philippe MARINI,

Sénateur

A NNEXE 1

La construction navale

Déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale

par M. Augustin BONREPAUX,

Vice-Président de l'Office

Déposé sur le Bureau du Sénat

par M. Christian PONCELET,

Président de l'Office.

AVANT-PROPOS

Cette évaluation a été effectuée par le Commissariat général du Plan, sous l'autorité de Monsieur Henri GUAINO, Commissaire au Plan, sur la saisine de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques publiques, avec l'accord du Ministre de l'Économie et des Finances. Le groupe de travail a été présidé par Jean-Louis LEVET, Chef du Service du Développement Technologique et Industriel au Commissariat général du Plan.

Cette évaluation, réalisée dans des délais extrêmement brefs compte tenu de l'étendue du champ couvert, est faite pour être discutée et pour alimenter le débat public. Il ne s'agit pas d'une conclusion définitive mais bien au contraire du point de départ d'une réflexion stratégique autour de la question maritime.

Ont contribué à ce rapport :

Rapporteur :

Monsieur CARIOU (Pierre),

Chargé de Mission

Commissariat général du Plan

Institut du Shipping et LEN-CORRAIL

avec la collaboration de :

Monsieur MOCILNIKAR (Antoine-Tristan)

Chargé de mission auprès du Commissaire

Commissariat général du Plan

Monsieur BAUMGART (Thierry)

Chargé de mission au Service du Développement Technologique et Industriel

Commissariat général du Plan

Monsieur TRIOU (Jean)

Chargé de mission

Commissariat général du Plan

Monsieur LEVIEUX (Sylvain)

Chargé de mission

Commissariat général du Plan

Monsieur LECLERC (Georges-François)

Administrateur civil du Ministère de l'Économie et des Finances

Chargé de mission au Commissariat général du Plan

Les résultats de ces travaux tels qu'ils sont présentés dans les rapports n'engagent que les services du Commissariat général du Plan.

Auditions administratives

Monsieur BONDIL

Contrôleur général des armées

Chef du groupe de contrôle des services centraux et des soutiens

Ministère de la Défense

Monsieur ESQUIROL

Contrôleur général des armées

Ministère de la Défense

Monsieur GREIF

Directeur des constructions navales

Ministère de la Défense

Monsieur KLINGER

Délégué interministériel aux restructurations de défense

Ministère de la Défense

Monsieur LALLEMAND

Chef du service des biens de consommation

Direction générale de l'industrie

Ministère de l'Industrie

Monsieur ROYAL

Sous-directeur des constructions automobile, ferroviaire et navale

Direction Générale des Stratégies Industrielles

Ministère de l'Industrie

Audition de professionnels et experts

Monsieur d'ACREMONT

Président

Chantiers de l'Atlantique

Monsieur CACHE

Président Société Calaisienne de Réparations navales et Mécaniques (SOCARENAM)

Monsieur CHALEAT

Président

Groupe Leroux et Lotz

Monsieur CRISTAU

Président

Barry Rogliano Salles

Monsieur DAVID

Président

IFREMER

Monsieur de L'EPINOIS

Directeur commercial

GEC ALSTHOM

Monsieur FEDEROVSKY

Conseiller technique

Chambre Syndicale des Constructeurs de Navires

Monsieur FOURNIER

Président d'honneur

SHACH

Monsieur GRILL

Président

Chambre syndicale des constructeurs de navires

Monsieur GROSSI

Communauté Urbaine Brest

Monsieur HUARD

Directeur des services Ingénierie

SOFFEGAZ

Monsieur HUBNER

Chef de division

Organisation de Coopération et de Développement Économiques

Monsieur JEAN

Président

Gaz-Transport/Technigaz

Monsieur KURTH

Conseil sur la construction navale

Organisation de Coopération et de Développement Économiques

Monsieur LECLERC

Président

COFRENA

Monsieur LEGUILLOU de PENANROS

Université de Brest

Monsieur MASSAC

Ancien Président de Gazocéan

Monsieur D. MICHEL

Président-Directeur général DORIS

Monsieur PERSON

Président

COREDES

Monsieur PHILIPPE

Administrateur

SOBRENA

Monsieur PIRIOU

Président

Chantiers Piriou

Monsieur REBOULEAU

Barry Rogliano Salles

Madame ROUX

Directrice

Chantiers Benneteau/Jeanneau

Monsieur RAVIER

Président

Constructions mécaniques de Normandie

Monsieur ROUDÈRE

Secrétaire général

Constructions mécaniques de Normandie

Monsieur SILLINGER

Fédération des Industries nautiques

Monsieur THEOBALD

Directeur général

Chambre syndicale des constructeurs de navires

LISTE DES ANNEXES

Annexe 1 Aperçu du nouvel accord de l'OCDE

Annexe 2 Liste des textes européens concernant la construction navale

Annexe 3 Liste des lois et décrets français concernant la construction navale

Annexe 4 Évolution des chantiers de construction navale français

Annexe 5 Estimation de l'évolution de l'emploi, de la production, de la production et de leurs liens

Annexe 6 Initiative du ministère des travaux publics du Canada

Bibliographie

Glossaire

Chapitre premier - LES FORCES À L'OEUVRE SDR LE MARCHÉ MONDIAL DE LA CONSTRUCTION NAVALE

1. Une économie sous contrainte

1.1 Une demande différenciée et dynamique

Le marché de la construction navale marchande (navires de jauge brute supérieure à 100 tonneaux) comprend : les navires citernes (pétroliers, méthaniers, chimiquiers...), les transporteurs de marchandises sèches ou vraquiers secs, les transporteurs de marchandises diverses (cargos, porte-conteneurs, navires à passagers...), et les « autres navires », dont, notamment, les navires de pêche, les navires au service de l'industrie offshore et les remorqueurs. La flotte mondiale, en 1996, se compose de 30 % de pétroliers, 30 % de vraquiers, 17 % d'autres cargos et 8 % de porte-conteneurs.

Depuis le début des années 1990, ce sont les flottes de porte-conteneurs (+ 70 %), de gaziers (+ 48 %) et de paquebots (+ 31 %) qui ont connu la plus forte progression. Les commandes mondiales sont globalement en augmentation depuis 1985, du fait d'un besoin de renouvellement lié au vieillissement de la flotte.

t.b.c. : tonneaux de jauge brute compensée( ( * )1)

Source : World Shipbuilding Statistics - March 1997. Lloyd's Register

Au premier trimestre 1997, la demande sur le marché de la construction navale reste forte pour les porte-conteneurs, les vraquiers secs et les navires à passagers.

Le ratio carnet de commandes/flotte en 1996 indique les segments les plus porteurs pour les chantiers navals. Il s'agit des porte-conteneurs (28 %) et des navires de croisière (17 %).

Deux sources sont à l'origine des estimations retenues sur la demande future de construction neuve : celles de l'Association of West European Shipbuilders (AWES) et celles de la Shipbuilders Association of Japan (SAJ). L'AWES propose des estimations globales pour 1995-2005, la SAJ distingue deux périodes (1995-2000) et (2000-2005).

Estimations de la demande future de construction neuve

par types de navires* en millions de t.b.c et en nombre de bateaux

* Navires de plus de 100 tonneaux de jauge brute

** Estimations reposant sur l'hypothèse que les t.b.c. moyens par type de navires construits en 1995 restent constantes sur la période.

Sources : Calculs C.G.P d'après AWES et SAJ.

La demande moyenne annuelle pour la période 1995-2005, comparativement à 1995, est en augmentation (+ 8,7 %). Les estimations annuelles de la SAJ affinent l'analyse, en distinguant une période de stabilité pour 1995-2000, puis de croissance en fin de période 2000-2005 (+ 2,8 %).

D'après les évolutions du marché par catégories de navires de charge, de grandes tendances ressortent pour le marché.

La flotte des navires citerne a progressé de 16 % en volume depuis 1989. Elle connaît actuellement un faible taux annuel de renouvellement (6 %). Les taux de fret sont légèrement à la hausse en 1996. Cette amélioration de la conjoncture, liée à l'augmentation des trafics asiatiques, favorise la mise à la casse de navires globalement âgés (25 ans, en moyenne). Les estimations tablent donc sur une croissance de la demande de l'ordre de 31 % entre 1995 et 2005.

Le marché des méthaniers a connu une forte progression depuis 1989 (environ 50 % de croissance de la flotte, soit un taux de renouvellement de 15 %). Pour 1996, le carnet de commandes comprend 22 navires, la plupart de plus de 130.000 m 3 . La construction de nouveaux méthaniers est donc déjà engagée et arrivera à terme en 2001-2002. Les estimations tablent sur une croissance faible de la demande de l'ordre de 2 % pour les prochaines années, la majeure partie des commandes neuves ayant déjà été passées. La découverte de nouveaux gisements en Asie pourrait conforter la croissance du secteur.

Pour la flotte des vraquiers secs (30 % de la flotte mondiale), les taux de fret enregistrent, depuis 1995, une chute de l'ordre de 50 %. L'ouverture du marché mondial à la Chine et le renouvellement d'une flotte âgée (26 ans en moyenne), laissent présager des commandes. Les estimations tablent sur une croissance de la demande de 2,5 % entre 1995 et 2000, par rapport à 1995.

Le segment des porte-conteneurs connaît, depuis 1989, la plus forte croissance (+ 70 %) et le plus fort taux de renouvellement pour 1996 (28 %). Il s'agit aussi du secteur qui prend la plus large part dans le carnet de commandes mondial (environ 8 millions de t.j.b au 1er trimestre 1997). Les tendances au gigantisme des navires et à la concentration des opérateurs assurent une croissance forte à long terme. Mais le volume des commandes et le renouvellement de la flotte sont aujourd'hui tels que le taux de croissance future de la demande est négatif par rapport à 1995. Les estimations tablent sur un recul de la demande pour 1995-2005, de l'ordre de 41 % par rapport à la production de 1995.

Pour les cargos conventionnels, la baisse des trafics liée à la conteneurisation conduit à des perspectives pessimistes dans le long terme. Mais l'importante mise à la ferraille sur la période récente crée une pénurie de l'offre et laisse espérer une reprise des constructions neuves. La demande sur la période 1995-2005 est donc estimée en progression d'environ 4,9 %.

La catégorie « autres » des navires de charge comprend principalement les industries de l'offshore et les remorqueurs. Pour l'offshore, les perspectives sont bonnes, et ce quels que soient les segments (forage, stockage, plates-formes...). Pour le secteur des remorqueurs, la concentration des acteurs assure une assise financière qui permet une poursuite de la reprise de 1996. Les perspectives sont optimistes, avec environ 56 % de croissance de la demande pour 1995-2005.

Un secteur est mis de côté dans les estimations. Il s'agit du marché des navires de croisière. L'année 1996 confirme la bonne santé de ce secteur. La fermeté du marché de la croisière américaine (+ 7 % annuel de croissance) et les perspectives de nouveaux débouchés en Europe (estimation de 10 % de croissance du nombre de passagers pour 1995-2000) ou en Asie (+ 12 % par an), conduisent à un niveau élevé de commande en 1997 (25 navires, soit 42.500 couchettes). Dans le même temps, la taille moyenne des navires est passée de 40.000 t.j.b. au début des années 1990, à 70.000 t.j.b., aujourd'hui.

1.2 Un excédent d'offre

L'équilibre entre l'offre et la demande est rarement observé sur le marché. Les situations d'excédent d'offre sont fréquentes. Actuellement, le marché de la construction navale civile reste globalement caractérisé par des capacités de production excédentaires.

La surcapacité globale n'entraîne pas automatiquement un excès d'offre sur tous les marchés. La multiplication des niches commerciales liées aux types de navires induit une forte segmentation.

Estimations des capacités de production par pays ou bloc de pays

En millions de

t.b.c

Capacités de production estimées

(SAJ et AWES)

Taux

de Croissance

Production 1995

2000

2005

1995-2005

Europe de l'Ouest

3,70

4,8

5,3

+ 43 %

Japon

5,64

6,9

7,3

+ 29 %

Corée du Sud

2,88

5,0

6,0

+ 108 %

Chine

0,47

1,0

1,1

+ 134 %

Pays de l'Est

0,62

1,2

1,4

+ 125 %

Amérique du Nord

0,06

0,4

0,5

+ 733 %

Reste du Monde

0,85

1,7

1,9

+ 123 %

Total capacités

14,3

21

23

+ 60 %

Demande estimée

15,3

15,6

Surcapacité

+ 5,6

+ 7,4

% Surcapacité

+ 36 %

+ 47 %

Source : C.G.P d'après AWES et SAJ

L'expansion des capacités de production disponibles conduit à un excédent d'offre avoisinant 40 % autour de l'an 2000. Il provient principalement de l'expansion des capacités de production coréenne (estimée à + 108 % pour 1995-2005), qui fait suite à la levée des mesures de restriction par le gouvernement coréen, en 1993. Elle s'explique également par :

- l'entrée massive sur le marché de nouveaux concurrents, comme la Chine (+ 134 % des capacités pour 1995-2005). Cette expansion s'est faite initialement sur les navires à faible contenu technologique (vraquiers et pétroliers), et s'est appuyée sur une main d'oeuvre abondante et peu coûteuse, ainsi que sur un large soutien du gouvernement chinois. La China State Shipbuilding Corporation (CSSC) compte près de 27 chantiers susceptibles de construire des unités supérieures à 10 000 t.p.l., 65 entreprises d'équipements marins, 34 centres de recherche et instituts scientifiques, ainsi que 8 universités et grandes écoles. La Chine élargit aujourd'hui sa gamme offerte vers des navires plus technologiques (porte-conteneurs notamment) ;

- la reconversion des pays de l'ex-bloc soviétique, de la construction militaire à la construction civile (+ 125 %) ou celle des États-Unis, faisant suite à la réduction de leur budget d'armement.

1.3 La contrainte sur les prix

Les investissements massifs engagés par la plupart des pays du monde induisent à une sous-utilisation globale des infrastructures, et exacerbent la concurrence entre les pays constructeurs. Les chantiers, de ce fait, accordent des rabais aux armateurs, lors des négociations de contrats. Le recours au marché de l'occasion accentue aussi le pouvoir de négociation des armateurs. Il en résulte une baisse globale des prix des navires neufs de charge.

Évolution du prix en millions de dollars des pétroliers

selon leur taille (en t.p.l) ( ( * )2)

Évolution du prix en millions de dollars des vraquiers mixtes (Ore/Bulk/Ore), des vraquiers secs (Bulk Carriers)

et des rouliers (Roll-on-Roll-off)

Évolution du prix des navires transporteurs de Gazette de Lausanne

(Liquified Natural Gaz et Liquified Petroleum Gaz)*

La chute des prix a conduit à une dégradation de la situation financière des entreprises. Malgré des niveaux de production très élevés, les chantiers coréens voient, par exemple, leurs profits se réduire en 1996 (- 48,4 % pour Hyundai, - 42,2 % pour Daewoo) ou se transformer en pertes nettes (en 1996, elles s'élèvent à 338 millions de dollars pour Samsung).

Les prévisions sur les prix futurs à la construction sont donc difficiles à estimer. Deux séries de forces contradictoires sont à l'oeuvre : l'excès d'offre, tirant les prix vers le bas ; la détérioration financière des entreprises, qui pousse les chantiers à proposer des prix supérieurs, conjuguée avec la croissance anticipée de la demande.

Les chiffres ci-après, selon Fearnley Consultant, prévoient globalement, pour les navires de charge, une hausse des prix de vente à partir de l'an 2000.

Estimation des prix à la construction neuve, base 100 en nov. 1996

Prix*

Nov. 1996

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Capesize Bulk

41,5

100

95

100

105

110

107

105

Panamax Bulk

27,5

100

95

100

105

110

107

105

Handymax Bulk

24

100

98

100

102

105

105

102

VLCC

83

100

100

105

110

110

107

105

Aframax

41,5

100

100

105

110

110

107

105

Product tdw

32,5

100

100

110

115

110

107

105

L.P.G (35.000 m3)

37

100

100

100

105

110

110

105

L.P.G (20.000 m3)

48

100

100

100

105

110

110

105

P-Cont (1000 evp)**

22

100

100

95

100

105

110

110

P-Cont (3500 evp)

45-50

100

95

95

100

105

107

107

P-Cont (4400 evp)

57-65

100

95

95

100

100

105

105

P-Cont (5000 evp)

75-80

100

95

95

100

100

105

105

* En millions de $

** l'e.v.p est un type standard de conteneur (Équivalent Vingt Pieds)

Source : Fearnley Consultant

Les marges dégagées dans le cadre des opérations internationales resteront faibles.

2. Marché international et marché intérieur sont complémentaires

Le marché mondial de la construction navale se caractérise par l'intensité de la concurrence qui y sévit.

La répartition géographique de la production se déplace vers la zone asiatique. L'ensemble Japon - République de Corée représentait, en 1980, près de 45 % de la production mondiale. Il compte, en 1995, pour plus de 60 %. Sur la même période, l'Europe de l'Ouest passe de 31 % de la production mondiale en 1980, à 22,5 % en 1995.

Cette prédominance asiatique est renforcée par les stratégies d'investissement et de décentralisation japonaise ou coréenne en Asie, qui renforcent l'importance des liens au sein du bloc asiatique. De façon analogue, les rachats par le norvégien Kvaerner de chantiers finlandais et allemands participent également d'une logique continentale européenne, laquelle laisse la France en marge.

Un marché sur capacitaire ne devrait pas permettre à une puissance nouvelle de s'insérer. Or, depuis plus de vingt ans, qu'il s'agisse des chantiers coréens, chinois ou bien encore de la reconversion des chantiers américains ou des pays de l'Est, des entrées sur le marché ont lieu.

Sur le marché international, deux facteurs de différenciation sont déterminants :

- l'avantage coût, qui détermine l'entrée sur le marché des navires à faible technologie. Ce paramètre explique, en partie, l'apparition de pays comme la Corée du Sud au début des années quatre-vingt, ou la Chine aujourd'hui (3ème constructeur en 1997). Il comprend à la fois les coûts d'approvisionnements, salariaux et les différentiels de taux de change ;

- l'avantage technologique intervient sur les segments plus complexes, tels que les paquebots, les transporteurs de gaz, les chimiquiers, ou bien encore les navires à grande vitesse.

Les marchés nationaux, plus captifs, sont un complément au marché international. Ils assurent la cohérence d'une politique de filière et une demande intérieure aux constructeurs navals, grâce aux commandes militaires, lorsque le marché international est déprimé.

2.1 Sur le marché international, les coûts et les facteurs technologiques sont discriminants

Les coûts de production et les taux de change déterminent la compétitivité-prix des chantiers.

2.1.1 Les coûts de production

Les coûts de construction se partagent, dans le cas standard d'un pétrolier double coque, pour

- 60 % en coût d'approvisionnement (dont environ 20 % pour l'acier et 40 % en équipements navals) ;

- pour 30 % en coût du travail ;

- et pour 10 % en autres coûts (de conception, par exemple).

2.1.1.1 Les coûts d'approvisionnement : le succès de l'intégration japonaise

La construction navale est avant tout une activité d'assemblage. Sur les coûts d'approvisionnement, les différences entre pays proviennent en grande partie du volume de production national. Interviennent, ensuite, d'autres facteurs, comme la qualité des aciers et des équipements fournis, ou la capacité des chantiers à utiliser de façon optimale les plaques d'aciers ou équipements fournis. L'exemple japonais illustre les gains que peut tirer un pays de la rationalisation de son système productif.

Le Japon compense un désavantage coût en matériaux de l'ordre de 20 % en rationalisant l'utilisation des plaques d'acier, et en centralisant les achats en équipements navals.

Le chantier japonais utilise, par exemple, une plaque d'acier à 95 %, soit 5 % de perte par plaque, contre 8 % de perte en Corée. De plus, la gestion en flux tendus par les constructeurs japonais réduit les stocks en moyenne à 3 jours, contre parfois plus de 2 mois en Corée du Sud. La centralisation des sources d'approvisionnement, communes aux chantiers japonais, limite également le coût réel de l'acier au Japon.

Les équipements navals représentent plus de 30 % du coût pour un navire peu sophistiqué, plus de 50 % pour un navire à plus haute valeur ajoutée, et jusqu'à 70 % pour un navire de guerre. Compte tenu du poids des équipements dans le prix de revient d'un navire, le Japon a favorisé, depuis 1987, une croissance simultanée de sa construction navale et de son industrie d'équipementiers. Il est autosuffisant en équipements à 80 %, contre environ 40 % pour la Corée du Sud. Les efforts japonais se dirigent aujourd'hui vers une harmonisation encore plus forte entre les secteurs de la construction navale et des équipementiers. Par la standardisation des moteurs, les chantiers engendrent des effets d'apprentissage. Cette complémentarité est de plus accentuée par la mise en place de systèmes intégrés électroniques, reliant directement les chantiers et les fournisseurs.

2.1.1.2 Le coût du travail : les exemples français, japonais et coréens

Le coût du travail représente de 30 à 40 % du coût total selon le type de navire. Les estimations de la commission européenne, en 1996, font apparaître le désavantage coût auquel font face la France ou le Japon.

Source : Van Holst & Koppies (consultant hollandais) et Maritime Économie Research Centre (MERC) pour la commission des Communautés Européenne (CEE-DG I Relations Économiques Extérieurs - Nov. 1996)

Le Japon et la France connaissent un désavantage coûts salariaux dans la construction navale vis-à-vis de leurs principaux concurrents.

Une relation inverse apparaît entre l'évolution du carnet de commandes français, et l'évolution du coût du travail depuis 1984.

Source : commission Européenne et Lloyd's Register pour le carnet de commandes.

Le désavantage en termes de coûts salariaux doit cependant être relativisé. Ils prennent en effet une part décroissante dans le prix de revient des navires, à mesure que leur sophistication croît. C'est généralement sur les coûts salariaux et l'effet de construction en grandes séries que les nouveaux pays constructeurs jouent pour entrer sur un marché. Par la suite, avec la croissance d'un pays, la tendance à l'égalisation des revenus conduit les pays à se spécialiser sur des secteurs de plus en plus technologiques.

La Corée du Sud connaît encore aujourd'hui un avantage coût, même s'il s'est largement réduit depuis le début des années quatre-vingt. La hausse des coûts salariaux annuels coréens exprimés en dollars courants n'a cependant pas réduit la croissance du carnet de commandes. Des stratégies de spécialisation sur des créneaux technologiques pertinents ou bien encore des effets de séries (économies d'échelle) peuvent compenser une dégradation de la compétitivité-prix.

Source : commission Européenne et Lloyd's Register pour le carnet de commandes

2.1.2 Un taux de change durablement sous-évalue est un atout pour la construction navale ( ( * )3)

Nous nous sommes intéressés à la relation entre le taux de change effectif réel des principaux concurrents français (Finlande, Espagne, Italie), et leurs commandes respectives.

Le taux de change effectif réel synthétise l'évolution du taux de change d'un pays (corrigée des variations de prix), par rapport à l'ensemble des partenaires commerciaux. Les données proviennent du FMI (base 100 en 1990 ( ( * )4) ).

Une dépréciation relative de la monnaie considérée par rapport aux autres monnaies conduit à une amélioration de la compétitivité. Le graphique suivant exprime la variation des commandes en fonction du taux de change.

Commandes et cours de la peseta espagnol

Les commandes finlandaises, espagnoles et italiennes sont en grande partie déterminées par l'évolution du taux de change. Ce taux de change est donc un facteur déterminant de la compétitivité dans le secteur de la construction navale. Un taux de change déprécié donne un avantage relatif à la construction navale d'un pays ;

Le Japon connaît depuis le début des années quatre-vingt-dix, une appréciation de son taux de change effectif réel. Si son effet sur les commandes s'est fait ressentir de 1990 à 1992, le graphique suivant montre que le Japon à su, depuis, renouveler ses commandes.

2.1.3 Les effets technologiques : l'exemple japonais d'une recherche importante et concertée, et l'exemple américain

Les efforts japonais consentis dans la rationalisation des méthodes de construction ont compensé le désavantage en termes de niveau des salaires et de taux de change. Au-delà, la clé du succès de ce pays se trouve en partie dans l'effort en R&D, qui fait suite aux restructurations de l'industrie navale japonaise (- 50 % des capacités de production de 1976 à 1988). Deux vagues successives de restructuration/fusion ont été engagées dans la construction navale japonaise.

- la première vague de restructuration de l'industrie navale nipponne (1976-1980) fait suite à la baisse de 72 % de la demande de pétroliers consécutive à la crise pétrolière de 1974. En mars 1980, les capacités de production japonaises sont réduites de 38 % par rapport à 1978 ;

- la seconde vague de restructuration (1987-1988), correspond à une période de forte baisse de la demande de construction neuve. En mars 1988, le Japon comptait 8 constructeurs, contre 21 précédemment. Les capacités sont réduites de 23 % sur la même période.

La force de la restructuration de la construction navale japonaise réside en grande partie dans le consensus qui émerge de la concertation entre le gouvernement, les conseils scientifiques et les chantiers.

Il existe aujourd'hui 40 chantiers, détenant 41 % de la capacité de production mondiale. À titre de comparaison, il existe 86 chantiers européens représentant 25 % des capacités mondiales. Fort de cette restructuration, le Japon a pu mettre en place une politique de recherche et développement suffisamment pertinente pour contrer la concurrence internationale.

D'après les estimations de la Chambre Syndicale Américaine (SCA), un milliard de dollars courants a été dépensé annuellement de 1988 à 1993 par le gouvernement japonais en aides à la recherche et développement, soit 56 % des dépenses ( ( * )5) publiques du secteur. La part est pratiquement nulle en Corée ou en Allemagne, de 2,5 % en Italie et de 0,47 % en France.

Les tendances actuelles de la recherche et développement japonaise s'orientent vers l'environnement (pollution marine, notamment), le transport à grande vitesse et la navigabilité (corrosion des coques, aides à la navigation, moteurs...). Elle s'appuie sur une multitude d'organismes. La distinction est à faire entre recherche publique et associative.

La recherche publique comprend tout d'abord la Science and Technology Agency (STA), au sein duquel le Japan Marine Science and Technology Center (JAMSTEC) mène des recherches sur les technologies marines, pour un budget de 1,2 milliards de francs. Les Universités, dont l'effort en R&D est difficilement quantifiable, travaillent dans l'électronique et les sciences de l'information, les matériaux et l'environnement global.

Au sein du Ministère des Transports japonais, le budget ordinaire s'élève à 1,141 milliard de francs.

Les associations privées jouent également un rôle actif au Japon dans le domaine maritime. On distingue la Shipbuilding Association of Japan, la Society of Naval Architects of Japan, la Nippon Foundation, la Nippon Kaiji Kyokai...

Il apparaît que le désavantage coût, qu'il soit salarial ou de parité, est une pénalité forte mais pas insurmontable sur le marché de la construction navale. Ce dernier n'est pas exclusivement un créneau industriel de pays à bas salaires et à faible valeur ajoutée. La segmentation de plus en plus forte du secteur entre navires à faible et haute technologie, permet, en effet, de trouver des niches commerciales pour lesquelles la concurrence par le coût du travail ou les taux de change est moins forte. Enfin, la recherche et développement peut également porter sur la rationalisation de la production, et compenser, sur des segments moins technologiques, le désavantage coût (le Japon représente encore 49 % de parts de marché des vraquiers).

Aux États-Unis, la R&D, est le support de la nouvelle compétitivité et de la reconversion des chantiers.

La majeure partie de la construction neuve navale militaire aux États-Unis est confiée à des chantiers privés, tandis que les activités de refonte, d'entretien majeur et de réparation se partagent entre les chantiers privés et les arsenaux d'État (pour 70 %), qui ne construisent plus de bâtiments neufs depuis 1970. Soucieuse de préserver un seuil critique pour la défense du pays, la Marine de guerre américaine souhaite que subsistent six chantiers privés majeurs, qui connaîtront une spécialisation progressive.

La marine militaire américaine a toujours conservé, grâce à de puissants services techniques, la maîtrise de l'innovation technologique, de la conception d'ensemble des systèmes, et la responsabilité de l'intégration physique et fonctionnelle des systèmes. L'industrie navale militaire emploie près de 70.000 personnes. La fonction Recherche, Développement et Acquisition de la marine militaire américaine, équivalent américain de la Direction des Constructions Navales française (à la composante « Recherche » près), emploie environ 120.000 personnes. La fonction « supervision » des chantiers privés occupe 7000 personnes, réparties sur les différents sites de production, au sein de « SUPSHIP ». Ceux-ci contrôlent l'ensemble des phases de production des navires et supervisent l'intégration à bord des systèmes d'armes.

Les chantiers privés disposent de bureaux d'études d'industrialisation, mais non de développement, ce qui les maintient à l'état de façonniers et explique leur difficulté à se tourner seuls vers d'autres activités, même en construction navale civile. Ils sont surtout totalement absents de la conception et la réalisation de grands sous-ensembles, en particulier de la propulsion et du système de combat. Pour ce dernier, la « Navy » demeure maître d'oeuvre d'ensemble pour le prototype (le premier de série), et prend soin d'impliquer à temps l'un des grands systémiers (Lookheed Martin, Raytheon, Loral), pour pouvoir lui confier une maîtrise d'oeuvre et les moyens d'intégration associés lors des réalisations de série. Ces prestations incluent le montage et la mise en route à bord.

Le plan de revitalisation de la construction navale prévoit un certain nombre d'aides directes, technologiques et financières, destinées à améliorer la compétitivité des chantiers américains. Ce plan se décompose en trois volets.

Le premier, appelé « programme technologique aux chantiers », a pour but de les adapter à la demande du marché international en développant les moyens de répondre rapidement aux appels d'offres, en améliorant l'intégration des chantiers et des équipementiers et en développant les procédés de fabrication à haute productivité. Ce programme de soutien s'appuie sur trois initiatives du Department of Défense :

- le « Technology Reinvestment Project » est destiné à favoriser le transfert des technologies entre la Défense et le secteur commercial (la construction navale est un des onze axes d'effort du TRP) ;

- MARITECH est un programme de soutien spécifique pour aider l'industrie navale à se doter de moyens compétitifs de conception, de production et de vente ;

- le « National Shipbuilding Research Program » (NSRP) est un programme de recherche coopérative supervisé par un collège de vingt experts de l'administration et des chantiers, qui émet des recommandations pour l'orientation des aides fédérales.

Enfin, la « Navy » envisage de financer un « Institut de la construction navale » destiné à la promotion des technologies nouvelles et à l'aide au marketing des chantiers.

Le deuxième programme de recherche est le « programme de transport stratégique » : le Congrès a instauré, dans la loi de finances, un « National Défense Sealift Fund » (NDSF), destiné à financer toute recherche, construction neuve, refonte ou réparation de navires afin d'augmenter les capacités de transport stratégique des États-Unis. Tous les travaux de construction ou de modification financés par le NDSF doivent être réalisés dans des chantiers américains. La première application du NDSF a été le « Fast Sealift Program », qui prévoit la construction de vingt à trente rouliers.

Le troisième programme consiste en des aides financières indirectes : la garantie fédérale sera étendue aux clients étrangers de navires de construction américaine. La qualification pour la mobilisation n'est plus exigée pour l'attribution des prêts garantis. Un projet de loi instaurant un « Maritime Security Program » prévoit la subvention d'une flotte réquisitionnable atteignant, à terme, 52 navires. Pour bénéficier de la subvention, les navires, sous pavillon américain, doivent avoir moins de 15 ans s'ils ont été construits aux États-Unis, ou moins de 5 ans s'ils ont été construits à l'étranger. Les modifications pour les rendre réquisitionnable doivent être faites dans les chantiers américains.

Face à la baisse de charge importante depuis la fin des années 1980, les chantiers civils, avec des aides fédérales à la reconversion (programme MARITECH), ont entrepris une reconquête des marchés civils à l'export. Le succès de cette politique requiert comme condition préalable de surmonter les handicaps structurels du secteur de la construction navale : faibles capacités de R&D, notamment pour les produits civils et militaires susceptibles d'intéresser le marché commercial, pratiques de construction à faible productivité, absence de structures commerciales.

De nombreux chantiers recherchent aujourd'hui des partenaires étrangers afin d'acquérir le savoir-faire et la technologie nécessaires pour réduire les coûts. En contrepartie, ces chantiers offrent l'accès aux marchés protégés américains. Parmi les alliances conclues, peuvent être citées :

- Alabama Shipyard avec Burmeister & Wain Ship design (Danemark), pour la réalisation de deux pétroliers de 40 000 t ;

- Newport News avec IHI (Japon), SHI (Japon) et Fincantieri (Italie), pour huit méthaniers de 13.800 m3 (projet Snam pour le Qatar) ;

- accord non exclusif de coopération entre Bath Iron et DCNI (France) pour l'export ;

- accord Ingalls / HDW (Allemagne), pour la commercialisation par le chantier américain de sous-marins diesel de technologie allemande ;

- Bath Iron avec Kvaerner Masa (Finlande) et Mitsui (Japon), afin de mettre en application des nouvelles techniques de conception et de construction dans le cadre d'un contrat du Technology Reinvestment Pogram du DOD.

L'administration américaine regarde d'un oeil bienveillant ce mouvement d'associations, auquel la France ne participe que marginalement. Les chantiers reconnaissent qu'ils ne pourront atteindre un niveau de compétitivité suffisant sans aides de l'État en matière d'investissement technologique, de promotion commerciale et de garanties de financement.

2.2 Le marché intérieur, complément et condition d'une bonne insertion internationale

Deux facteurs déterminent l'importance des marchés intérieurs pour la construction navale : l'adéquation entre la spécialisation de la flotte contrôlée et la spécialisation de la construction navale au sein d'un pays, et l'importance du marché militaire. Le premier facteur renforce les effets de filière, le second assure, pour les constructeurs nationaux, un volant de charge de sécurité.

2.2.1 Les effets de filière

2.2.1.1 La relation entre armateurs et constructeurs ou l'effet d'entraînement italien.

Un pays ayant une flotte de commerce importante n'est pas ipso facto un constructeur compétitif. Une relation directe entre flotte et construction navale ne peut être clairement définie.

Dans certains cas, le développement de la flotte entraîne le développement de la construction navale. C'est par exemple le cas du Japon, à la fin de la seconde guerre mondiale, et de la Corée au cours des années 1980. L'entrée coréenne, à la fin des années 1970, a supposé, au préalable, la constitution d'une flotte domestique de commerce. Cette expansion souligne en grande partie que l'industrie de construction navale est une industrie de réseaux, ne pouvant être appréhendée que de façon globale. En Europe, l'Italie profite aussi largement d'une forte demande intérieure.

Pour qu'une relation directe s'établisse entre construction navale et flotte de commerce nationale, une forte corrélation entre la spécialisation de la flotte et la spécialisation des chantiers nationaux est nécessaire.

L'Italie possédait en 1993, la 14ème flotte mondiale (791 navires), et comptait 49 méthaniers, 197 navires à passagers et 190 pétroliers. Elle est spécialisée dans la construction de ces derniers navires.

Dans le même temps, la France était spécialisée dans la production de méthaniers et de navires a passagers, alors que la flotte de commerce française (20ème flotte), ne comprenait que 6 méthaniers et 48 navires à passagers, sur un total de 210 navires.

La France souffre donc de la faible corrélation structurelle entre la construction navale, très polarisée, et la flotte de commerce, au contraire très diversifiée. Il ressort d'une analyse rapide que la spécialisation de la flotte italienne correspond à 55 % ( ( * )6) à la spécialisation de sa construction navale. Pour la France, le ratio est de 25 %. Il en résulte que la part des commandes nationales est, du fait de cette mauvaise adéquation, plus faible en France qu'en Italie.

2.2.1.2 L'importance des sociétés de classification : l'exemple japonais

Une relation directe s'opère entre armateurs et constructeurs par l'intermédiaire des sociétés de classification. L'inscription au registre d'une société de classification n'est obligatoire que si le navire opère sous un pavillon dans les eaux internationales. Elle permet de bénéficier de primes réduites auprès des assureurs maritimes. L'armateur peut choisir sa société de classification indépendamment de sa nationalité et de celle du chantier, mais certains pays (les États-Unis) imposent leur société de classification aux navires devant fréquenter leurs eaux territoriales.

La société de classification approuve les plans du navire (structure de la coque, appareil propulsif, équipements et installations), conformément à sa propre réglementation et aux conventions internationales, contrôle les matériaux et les équipements en usine, suit la construction de la plate-forme propulsée et l'intégration des équipements et installations, supervise les essais et effectue des visites périodiques qui conditionnent le maintien de la plus haute cote au navire.

Onze sociétés de classification internationales, membres de l'Association Internationale des Sociétés de classification (AISC), ont classé 467,6 millions de tonnes en 1996.

Les plus importantes, par ordre décroissant du tonnage classé, sont :

- Lloyd's Register of Shipping (LR), à Londres : 21,7 %

- Nippon Kaiji Kyokai (ClassNK), à Tokyo : 19,6 %

- American Bureau of Shipping (ABS), à New York : 18,6 %

- Det Norske Veritas (DNV), Hvik, Norway : 15,3 %

- Bureau Veritas, Courbevoie : 6,7 %

La forte incitation financière de la société japonaise de classification NK attire les armateurs internationaux vers les chantiers japonais. Au Japon, en effet, la NK propose des services deux fois moins chers que les autres sociétés de classification. Un armateur s'y inscrivant n'a pas besoin de subir le contrôle onéreux du ministère des transports japonais, par la suite. Il en résulte que la part des navires commandés au Japon sous société de classification japonaise est de 94,5 % en 1996.

2.2.1.3 La rationalisation de la filière : le cas hollandais.

La position concurrentielle internationale de la construction navale aux Pays-Bas a commencé à attirer l'attention des pouvoirs publics à la fin des années 1960. Des fusions successives ont conduit, en 1972, à la création d'un grand groupe industriel : Rhine-Schelde-Verolme (RSV), exploitant de nombreux chantiers dans le pays et à l'étranger. Cette fusion a été conduite à la demande du gouvernement néerlandais. Mais les économies d'échelle attendues n'ont été réalisées qu'en partie. À sa création, RSV employait 9 000 personnes dans la seule construction navale. Il n'en restait plus que 4 000 en 1983.

Les changements dans la structure de la construction navale néerlandaise ont résulté du besoin d'améliorer sa position concurrentielle et l'ont orienté vers une politique de multi-spécialisation, qui s'est accompagné d'une complexité et d'une diversité croissantes des produits.

La productivité y est augmentée par la spécialisation des sous-traitants et fournisseurs, indépendamment des améliorations résultant de la modularisation et du prééquipement des sous-ensembles. La part de la valeur ajoutée des chantiers néerlandais dans la production est passée de 33 % en 1985 à 28 % en 1992. D'autres économies sont trouvées dans le partage entre plusieurs chantiers d'investissements, en amont de la production : logiciels, préfabrication...

Les Pays-Bas ont augmenté leur productivité de 111 % entre 1976 et 1991, alors que, dans le même temps, la France ne connaissait qu'une progression de 13,4%.

À l'heure actuelle, la construction navale aux Pays-Bas se compose uniquement de petits et moyens chantiers. On compte environ 250 entreprises, employant 19.000 personnes.

En raison de leur position concurrentielle relativement forte, les chantiers néerlandais ont pu maintenir leur place en Europe de l'Ouest. Entre 1984 et 1992, les Pays-Bas ont eu une part de marché comprise entre 8 et 9 % de la production de l'AWES, avec une part croissante à l'exportation. Les chantiers néerlandais produisent des bateaux relativement complexes et diversifiés : cargos (21 %), porte-conteneurs (20 %), navires réfrigérés (7 %), chimiquiers (8 %), pêche (11 %), autres non-cargo (30 %).

On peut tirer les conclusions suivantes de la politique industrielle du gouvernement néerlandais :

- les fusions ont été réalisées en un temps très court (3 à 4 ans) ;

- les changements de technologie, de conception et d'ingénierie des nouveaux systèmes de production et d'applications ont été mis en place sans aucun problème dès le début du processus ;

- la création d'un grand groupe industriel n'a pas créé d'avantages compétitifs. Des entreprises de plus petite taille en réseau semblent avoir mieux réussi.

Les leçons suivantes peuvent être tirées des exemples italiens, japonais et néerlandais.

- la croissance de la construction navale dans un pays va souvent de pair avec la croissance de sa flotte de commerce. Le cas récent de la Chine le prouve ;

- une flotte de commerce nationale (ou contrôlée) n'est pas toujours le signe d'une filière maritime. Il faut, de surcroît, que la spécialisation de la flotte corresponde à la spécialisation de la construction navale. Or, la flotte de commerce française actuelle, autant par sa taille que par sa structure, ne donne à la France qu'un très faible potentiel de filière maritime ;

- la création de filière peut passer par une rationalisation, au sein du pays, des relations entre les acteurs du secteur de la construction navale en amont (fournisseurs - constructeurs), ou bien encore, en aval (constructeurs - sociétés de classification).

2.2.2 La demande militaire mondiale

La rigidité de l'appareil de production entraîne fréquemment, à la suite des variations de la demande, des situations sur ou sous-capacitaires. Le recours à des marchés captifs militaires permet aux chantiers d'atténuer les effets conjoncturels de baisse des commandes. Les constructeurs ont l'habitude de dire que « l'activité civile permet de remplir les plans de charge, et l'activité militaire, les marges ».

Lorsque l'on analyse l'ensemble des programmes militaires dans le monde, on observe que la demande globale décroît dans les dix prochaines années.

Les commandes passent de 16 Milliards de dollars en 1998 à 10 en 2006 ( ( * )7) . Le niveau des commandes des grands pays est en forte baisse mais, en même temps, certains petit pays, améliorent significativement leur système de défense marin. C'est le cas essentiellement en Extrême-Orient, en Océanie, au Moyen-Orient, en Afrique et en Amérique latine. Par contre, le nombre de bateaux devrait rester identique, soit de 120 par an sur la période. Les frégates, les corvettes, les patrouilleurs, les chasseurs de mines remplacent partiellement les croiseurs et destroyers. La restructuration des différentes marines de guerre passe donc par le lancement de navires plus petits, plus rapides et équipés de matériel moins coûteux. L'importance de la défense côtière s'accroît nettement.

CHAPITRE 2 - LA VULNÉRABILITÉ DE LA CONSTRUCTION NAVALE FRANÇAISE

1. Une spécialisation de plus en plus marquée, sans logique de filière affirmée

1.1 Une réduction des effectifs très importante

La politique française a en grande partie suivi les mêmes orientations que celles des grands pays d'Europe occidentale. Tout au long des années 1980, il est possible d'identifier deux axes : réduction d'effectifs et restructuration vers la spécialisation.

Évolution de l'emploi dans le secteur de la construction de navires civiles et de bâtiments de guerre entre 1976 et 1994

Pays

Évolution en %

Effectifs en 1994

Allemagne

- 68,4

22600

Danemark

- 44,0

7500

Espagne

- 68,0

14155

France

- 60,9 %

17410

Italie

- 63,0

8273

Pays-Bas

- 79,9

4200

Royaume-Uni

- 90,1

4675

Finlande

- 59,5

7284

Suède

- 97,7

540

Japon

- 69,7

53000

Corée

- 23,7

30909

Europe de l'Ouest

- 75 %

Total

- 69 %

Source : O.C.D.E

Sur longue période, et quels que soient les pays concernés, le niveau de l'emploi direct décline de 1976 à 1996 En France, l'emploi direct civil passe de 32 500 en 1976 à 5 910 en 1994, soit une réduction d'effectif de 82 %.

Évolution de la production française et de l'Union européenne

Évolution de l'emploi et de la production en France

et dans l'Union européenne

Effectifs

Production

France

Union européenne

France

Union européenne

Variation 1980/1990

- 70 %

- 45 %

- 57 %

- 10 %

dont 1980-1985

- 32 %

- 12 %

- 39 %

- 1,0 %

1985-1990

- 56 %

- 37 %

- 31 %

- 9,0 %

Variation 1990/1994

- 10 %

- 3 %

- 10 %

- 4 %

Variation 1980-1994

- 73 %

- 46 %

- 62 %

- 14 %

Source : OCDE

La France, par rapport à l'Union européenne, a connu une réduction plus forte de ses effectifs (- 73 %) et de sa production (- 62 %) depuis 1980.

1.2 Une spécialisation poussée

La production européenne se déplace vers les marchés des navires à haute technologie tels que les navires à passagers ou les méthaniers, pour lesquels la concurrence internationale est moins forte. La spécialisation des pays d'Europe de l'Ouest se fonde sur un avantage technologique qui leur procure une véritable hégémonie sur certains marchés, comme celui des paquebots.

Au premier trimestre 1997, le carnet de commandes français est constitué de 73 % de paquebots, 26 % de transporteurs de gaz et 12 % de transporteurs de produits chimiques. En 1985, ces deux catégories de navires représentaient 45 % du carnet de commandes.

Le mouvement de spécialisation ne semble cependant pas avoir été suivi par l'ensemble de la filière.

1.3 L'exemple de la Filière du gaz

1.3.1 La France fut longtemps dominante sur le marché de la construction de méthaniers.

De 1965 à 1995, deux phases se distinguent :

- de 1965 à 1975, la France connaît un « âge d'or » En dix ans, 68 méthaniers sont construits dans le monde, dont 35 en France, 14 au Japon et en Corée du Sud, 7 dans le reste de l'Europe et 12 dans le reste du monde. Sur les 35 navires commandés en France, 15 le sont aux Chantiers de l'Atlantique ;

- de 1975 à 1995,1e Japon s'impose comme constructeur et transporteur en s'appuyant sur de grands groupes industriels (Mitsubishi par exemple) regroupant transporteurs, constructeurs et banquiers. Au 1 er janvier 1994, le Japon possède 123 méthaniers sur les 661 existants. On trouve ensuite la Norvège (93), le Royaume-Uni (31)... et la France au 15ème rang mondial, avec 13 navires transporteurs de gaz.

La tendance du marché est à la commande en séries, en général de quatre navires. La décision d'achat fait généralement suite à l'obtention d'un contrat d'affrètement de long terme. Elle s'effectue pour assurer la fonction transport de gaz dans le cadre de contrats de vente portant sur une durée minimum de 20 ans.

Un pays dont les armateurs sont actifs sur le marché du transport de gaz aura, par effet de filière, davantage de chance d'être présent sur le marché de la construction navale. Deux exemples illustrent cette idée. Le Japon, premier importateur de GNL du monde (65 % des achats de GNL), est aussi le premier constructeur de méthaniers (58 % du carnet de commandes pour 1991-1999). En août 1996, le contrat d'affrètement de Korea Gas Corporation (KGC) implique la construction de six méthaniers de 136 000 m 3 , livrables en 1999 par quatre chantiers coréens (Hyundai, Daewoo, Samsung et Hanjin). La Corée du Sud, deuxième acheteur de GNL dans le monde, compte associer les armateurs et les constructeurs nationaux (projet de 5 autres méthaniers pour 1997).

Au-delà de cette relation directe entre pays transporteurs et producteurs, la tendance est à l'apparition d'une nouvelle concurrence Elle se matérialise, en partie, par l'opposition de plus en plus forte entre techniques de fabrication.

Concernant les pays concurrentiels depuis le milieu des années 1990, on trouve : la France qui, avec la commande de cinq navires par Pétronas (Malaisie) aux Chantiers de l'Atlantique, redevient compétitive après dix ans d'absence ; la Finlande qui, s'appuyant sur la dévaluation du Mark Finlandais, mène une politique de forte pénétration du marché par les chantiers Masa Yard du groupe Kvaerner ; la Corée du Sud (Hanjin, Daewoo, Samsung), dont les chantiers ont assimilé la technique française de fabrication (type membrane) et disposent d'un savoir faire technologique leur permettant de répondre aux appels d'offres récents.

Les prix tendent dès lors à baisser. Pour un méthanier standard (130 000 -137 500 m 3 ), ils sont passés de 280 millions de $ en 1991 à 220 millions de $ en 1996. Ces navires généralement présentés comme des navires à haute technologie et à forte valeur ajoutée, tendent de plus en plus à devenir uniquement des navires à haute technologie. La construction d'un méthanier de taille standard demande 36 mois, alors qu'un pétrolier de taille équivalente requiert 18 mois pour sa construction.

La France dispose en la matière d'un avantage technologique important (maîtrise des types « membrane » Erreur ! Source du renvoi introuvable .).

Si la technologie norvégienne concurrente est dominante sur le marché, la technologie française est appelée à se développer encore.

1.3.2 Les effets indirects de filière

La maîtrise d'une technique de production, telle que la technique membrane, brevetée dans 29 pays, n'induit pas une production nationale. Mais elle assure des retombées indirectes sur l'ensemble de l'économie nationale, et maintient un pôle de compétence.

Grâce à la maîtrise de la technique membrane, la France renforce sa position. Ainsi, la construction d'un méthanier de 130 000 m 3 par les chantiers Hanjin Heavy Industries, livré en septembre 1995, a rapporté aux entreprises françaises près de 230 millions de francs, soit 20 % du prix du navire.

Répartition par grands postes des retombées financières françaises du choix

d'Hanjin d'un système de construction type membrane *

Opérations

KF

Support technique


• Ingénierie


• Matériaux primaires


• Pré-fabrication et installation

125.599

30.284

28.815

66.500

Montage du système (pompes, tuyauterie...)

38.075

Marchés dérivés Ingénierie

63.000

Total

226.674

* Navire livré en septembre 1995 pour un prix de 1,15 milliard de francs (1US$ =

5,10 F)

Source : Gaztransport & Technigaz.

1.4 Les navires à grande vitesse (NGV)

La mise au point des NGV de grande taille (plus de 80 mètres), capables d'atteindre des vitesses de 40 noeuds (75 km/heure environ), nécessite la résolution de nombreuses difficultés concernant notamment la conception, la tenue de la structure ou la mise en oeuvre de matériaux (passage de l'acier à l'alliage d'aluminium). La compétition technique est ouverte dans le monde entier.

En 1995, la répartition par type de navire de la flotte mondiale des NGV était la suivante : monocoques (13,7 %), catamarans (41,9 %), hydroglisseurs (33,4 %), navires à effet de surface (6,6 %), navires à coussin d'air (4,3 %). Entre 1990 et 1995, ce sont les catamarans qui ont connu la plus forte progression (60,3 %), suivis par les monocoques (39,8 %) et les NES (28,6 %). En 1996, les 152 livraisons et commandes de transports rapides de passagers se répartissaient comme suit : 98 catamarans (65 %), 46 monocoques (30 %), 6 catamarans perce-vagues (4 %), un hydroglisseur, un Swath.

Les Français sont à la fois présents dans la production des laminés d'alliage d'aluminium (Pechiney Rhenalu) destinés aux NGV, et dans la construction de ces navires (Chantiers de l'Atlantique associés à Leroux & Lotz, Ateliers et Chantiers du Havre, Constructions Mécaniques de Normandie, Iris Catamarans). Ils bénéficient, de plus, d'un marché intérieur de transports maritimes rapides, avec les lignes Corse-continent ( ( * )8) . On note aussi un marché potentiel pour le cabotage marchandises en Méditerranée et en Manche.

Malgré le degré élevé de concurrence sur le marché international des NGV, la France y dispose d'une place non négligeable.

1.4.1 Un producteur français important

Le groupe Pechiney Rhenalu, qui revendique 35 à 40 % du marché mondial de la tôle d'aluminium destinée aux NGV, a investi 100 MF dans son usine d'Issoire (Puy-de-Dôme), spécialiste des produits laminés spéciaux.

1 4.2 Des chantiers français actifs

En France, les Constructions Mécaniques de Normandie occupent depuis vingt ans une position dominante sur le marché des navires rapides (patrouilleurs armés). Le chantier Leroux & Lotz, qui figure parmi les quinze principaux chantiers constructeurs de NGV, a livré en 1996 à la SNCM deux monocoques à grande vitesse, les Corsaires 1 100 « l'Asco » et « l'Aliso » (500 passagers, 150 véhicules), pour la liaison Corse-Continent, et construit un NGV de 112 mètres de long pour l'armateur suédois Rederi AB Gotland. Un accord de coopération dans le domaine des navires rapides de plus de 100 mètres a été passé en novembre 1996 entre les Chantiers de l'Atlantique et Leroux & Lotz, détenteur du savoir-faire dans ce domaine, avec pour objectif la construction de deux gros NGV par an au cours des cinq prochaines années. Le chantier Rochelais « Iris Catamarans », une filiale de « Fountaine-Pajot », producteur de catamarans de plaisance, a construit un prototype de catamaran rapide en matériaux composites baptisé « Iris », pouvant transporter 240 passagers à 30 noeuds sur des lacs ou des bras de mer protégés.

1.5 Le dispositif industriel civil français est très vulnérable

Dans la relation qui s'établit avec les équipementiers, la spécialisation des chantiers français n'a pas conduit à une gestion globale et intégrée, permettant d'assurer des gains sur l'ensemble des chaînons de la filière. La recherche de compétitivité pour les chantiers est d'autant plus importante qu'elle se fait avec les acteurs qui contribuent pour plus de 60 % au prix d'un navire. La relation entre équipementiers et chantiers étant faible en France, les constructeurs ne peuvent pas espérer beaucoup d'une spécialisation de leur activité d'assembleur.

La situation française se caractérise par l'absence de certaines compétences (appareil de passerelle, traitement des eaux usées ...), mais aussi par une absence presque totale de complémentarité entre constructeurs et fournisseurs. Les fournisseurs cherchent, dès lors, à promouvoir leur industrie à l'extérieur plutôt que vers le marché national. Ils travaillent en particulier avec les chantiers italiens de Fincantieri, les chantiers coréens de Hanjin, Daewoo, Hyundai, ou les chantiers danois d'Odense... Ils fondent plus d'espoir dans une stratégie européenne de filière.

La relation entre fournisseurs et constructeurs français est donc faible. Qu'elle soit issue d'une mauvaise stratégie des fournisseurs, n'ayant pas su se rendre indispensables, ou bien encore de la sous-estimation des effets de filière par les constructeurs français, le résultat est le même.

Compte tenu des analyses précédentes, la vulnérabilité de la construction navale française est totale. Faute d'une réelle synergie entre construction navale et marine marchande, entre constructeurs et fournisseurs, faute d'une politique de change appropriée, faute d'un marché militaire permettant d'absorber les à-coups ou faute d'une meilleure collaboration entre chantiers civils et militaires, la spécialisation sur quelques créneaux porteurs est insuffisante pour asseoir la construction navale civile française sur des bases solides.

2. Les principaux acteurs

La construction navale française se divise en construction civile et militaire.

En 1994, la construction de navires civils représente un chiffre d'affaires de 6 milliards de francs, la construction de bateaux de plaisance environ 2 milliards, contre 14 milliards pour la construction militaire. La construction de navires compte, en France, pour 0,3 % du PIB. Si la construction civile comprend une soixantaine de chantiers, la construction militaire se fait principalement au sein de la direction des constructions navales (DCN). Le secteur privé (construction, réparation, plaisance) regroupe environ 100 entreprises de plus de 20 salariés, pour un chiffre d'affaires hors taxe d'environ 12,5 milliards de francs (1 450 entreprises de moins de 20 salariés pour un CAHT d'environ 2,8 milliards de francs).

2.1 Les principaux acteurs civils

En 1995, la France produit l'équivalent de 242 000 t.j.b. (0,8 % de la production mondiale), et compte un carnet de commandes de 563 000 t.j.b. (soit 2,3 % du carnet de commandes mondial).

I

Poids des premières entreprises du secteur

Nbre d'entreprises

Effectifs

Chiffre d'affaires

4

35,1 %

37,0 %

10

48,5 %

50,9 %

50

70,4 %

71,6 %

Source : INSEE Image Économique des Entreprises aux 1/1/1995

Commerce extérieur français (en millions de francs)

Années

Exportations

Importations

Solde

1992

6227

3082

3145

1993

314

1911

1230

1994

2369

12369

1761

Source : Xerfi, Douanes, SESSI

Répartition des exportations et des importations en 1994

En millions de francs

1994

exportations

importations

Navires à passagers

43

18

Navires citernes

1513

36

Cargos vraquiers et porte-conteneurs

237

372

Bateaux de pêche

166

66

Remorqueurs

195

30

Bateaux diverses

121

45

Plates formes

1

1

Structures flottantes

78

36

Démolitions

13

3

Total

2369

608

Source : Xerfi, Douanes, SESSI

Les effectifs des chantiers civils sont passés de 32 500 à 6 631 emplois de 1975 à 1995 (- 80 %), suivant ainsi l'évolution de la production (de 672 000 t.b.c. en 1976 à 242 000 t.b.c. en 1995, soit - 65 %). Les effectifs directs et indirects, en comptant les fournisseurs et sous-traitants, sont de plus du triple des emplois directs, soit environ 20 000 emplois.

Le quart Nord-Ouest de la France regroupe près de 95 % des effectifs de la construction et de la réparation navale marchande civile (hors plaisance).

La répartition géographique des effectifs est : 61 % en région Pays-de-la Loire, 12 % pour la Basse-Normandie, 7,8 % pour la Bretagne, 10,3 % pour la Haute-Normandie et 10 % entre le Nord - Pas-de-Calais et la Provence -Alpes - Côte-d'Azur. Pour la construction d'un grand paquebot de croisière, les Chantiers de l'Atlantique font appel à des entreprises situées dans environ 70 départements français.

La réduction des effectifs dans la construction navale s'est accompagnée d'une restructuration des sites durant les années 1980. Sous l'impulsion de l'État, la construction navale nationale a été marquée par la reprise des chantiers Dubigeon par Alsthom-Atlantique en 1983, par la constitution de la Normed en 1982, née de la fusion des chantiers de la Seyne-sur-Mer, de La Ciotat et de Dunkerque, puis de sa disparition en 1991.

2.1.1 Les constructeurs civils de navires marchands

La production française de construction navale marchande (hors pêche et plaisance) se concentre aujourd'hui principalement sur quatre groupes qui travaillent aujourd'hui pour 70 % à l'exportation. Il s'agit des Chantiers de l'Atlantique, des Ateliers et Chantiers du Havre, des Constructions Mécaniques de Normandie, et du groupe Leroux & Lotz.

Les Chantiers de l'Atlantique sont filiale à 100 % du groupe GEC-Alsthom. Ils sont issus du regroupement, en 1955, des Chantiers de Penhoët et des Chantiers de la Loire. À la suite de la reprise des chantiers Dubigeon par Alsthom-Atlantique, en 1983, ils comptent environ 4 000 personnes en 1996, et sont spécialisés dans la construction de paquebots de croisière et de méthaniers. Les chantiers ont pris en commande cinq méthaniers malais en 1991, et quatorze paquebots depuis 1985 soit, à la fin de 1998, 16 % des commandes passées par les armateurs croisiéristes mondiaux. Les Chantiers de l'Atlantique se sont lancés dans un vaste plan de modernisation de l'outil de construction de coque métallique « TOLERIE 2000 » (robotisation, automatisation, choix des machines à souder...). Ils ont passé en novembre 1996, un accord de coopération avec Leroux & Lotz, détenteur du savoir-faire, visant à construire deux gros navires à grande vitesse au cours des cinq prochaines années.

Les Ateliers et Chantiers du Havre (ACH), comptent 750 personnes en 1996. Ce chantier est réputé pour la construction de paquebots à voile et de navires spécialisés (rouliers, car-ferries, navires de recherche, câbliers.) de moins de 220 mètres. Il a déposé un brevet concernant un projet de long monocoque à ailerons latéraux pouvant naviguer à 40 noeuds. Ce chantier a investi pour modifier une des cales, afin de disposer de deux cales principales aptes à la construction de navires allant jusqu'à 215 mètres x 33 mètres. D'autre part, ce chantier a créé un atelier automatisé de production de panneaux plans dans lequel, une nouvelle machine à découper au plasma, et de nouveaux logiciels de CAO-FAO (conception et fabrication assistées par ordinateur) sont installés.

Les Constructions Mécaniques de Normandie (CMN) sont implantées à Cherbourg (500-550 personnes en 1996). Avec plus de 100 patrouilleurs rapides armés en service dans une quinzaine de marines, les CMN font partie des trois plus grands constructeurs sur ce créneau. Les CMN ont construit le navire à effet de surface expérimental « Agnes 200 », en coopération avec la DCN. Elles appartiennent, depuis 1992, au groupe SOFFIA et se positionnent en qualité d'assembleurs sur la construction de navires rapides de combat (type « Combattante ») et de navires de surveillance (type « Vigilante »). Après un dépôt de bilan en 1987, elles sont bénéficiaires depuis 1995. Depuis 1994, les CMN ont également divisé leurs services selon deux filiales : CMN Defence Systems (Intégration des systèmes de défense) et CMN Support Services (Formation des équipages et du soutien logistique). Enfin, devant la réduction des budgets militaires, ce chantier diversifie sa production vers le civil, avec des navires océanographiques, halieutiques ou hydrographiques, et les navires à passagers ou mixtes.

Le groupe Leroux & Lotz est présent sur quatre sites (Dieppe, Saint-Malo, Lorient et Nantes). Il comprend 350 personnes en 1996, et produit tous types de navires d'une taille inférieure à 120 mètres. Il est à l'origine de la filière des navires rapides monocoques, et figure parmi les quinze principaux chantiers constructeurs de navires à grandes vitesses (NGV). Il propose des navires de pêche industrielle, des remorqueurs, des patrouilleurs de haute mer, des grands ouvrages métalliques... Un accord de coopération industrielle et commerciale a été conclu avec les Chantiers de l'Atlantique pour la filière des navires rapides monocoques d'une taille supérieure à 100 mètres.

2.1.2 Les constructeurs de petits navires

La distinction entre ce type de constructeurs et les chantiers précédents réside avant tout dans la taille des navires construits (inférieure à 100 mètres). Parmi ces derniers, la polyvalence est souvent présente.

Les chantiers Piriou, entreprise familiale implantée à Concarneau depuis 1965, ont livré depuis 1972 plus de 200 navires. Ils emploient 173 personnes pour un chiffre d'affaires d'environ 120 millions de francs (200 millions prévus en 1997). D'abord spécialisés dans la construction de navires de pêche et dans la réparation navale, la crise de ce secteur dans les années 1980 les a conduits à orienter leur action commerciale vers l'exportation et à se diversifier dans la production de barges (un supply vessel de 70 m), de vedettes à passagers ou de remorqueurs. L'évolution de la flotte de pêche apporte aujourd'hui de nouvelles commandes : un thonier, un chalutier, deux crevettiers et quatre palangriers. Le succès de ce chantier s'appuie notamment sur l'existence d'un marché connexe (la réparation navale), comme régulateur des effets conjoncturels.

La Société Calaise de Réparation et de Mécanique (SOCARENAM) a été fondée en 1961. Elle emploie aujourd'hui 160 personnes, réparties sur Boulogne-sur-Mer (90 personnes), Calais (45) et Dunkerque (25). Son chiffre d'affaires, de 100 millions de francs pour 1997, se partage en 40 % de réparation navale, 40 % de construction neuve et de 20 % de chaudronnerie industrielle et mécanique (offshore, passerelles...). La gamme des produits offerts comprend des navires inférieurs à 55 mètres, tels que des bateaux de pêche, des navires de servitude (remorqueurs, vedettes) et des bateaux d'instruction ou des remorqueurs pour le compte de la Marine nationale. La réparation navale porte sur la flottille de pêche artisanale et industrielle et sur les car-ferries et cargos en escale.

La concurrence à laquelle font face ces chantiers est avant tout régionale pour la construction de navires de pêche artisanale. Sur le marché de la pêche industrielle, les constructeurs souffrent des différences de coûts salariaux et ont souffert de la surévaluation du franc contre les devises espagnole et italienne entre 1992 et 1996. C'est grâce à leur multi-spécialisation construction-réparation (- chaudronnerie pour la SOCARENAM) qu'ils atténuent les effets cycliques.

2.1.3 Les chantiers de réparation navale

L'industrie de la réparation navale connaît, depuis 1992, une baisse sensible de son activité. Ce secteur de main-d'oeuvre souffre de la concurrence des pays à bas salaires présents sur les routes de navigation Est-Ouest (Corée du Sud, Malaisie, Chine) et surtout, pour ce qui concerne la France, Nord-Sud (Pays du Golfe Persique). En Europe, la concurrence s'est accrue du fait de la surévaluation du franc contre les devises du Portugal, de l'Espagne et du Royaume-Uni.

Quatre chantiers de réparation subsistent en France. Ils travaillent principalement à l'exportation : il s'agit de la Compagnie Marseillaise de Réparation, de la SOBRENA à Brest, de SIREN au Havre et de ARNO à Dunkerque.

La SOBRENA présente un cas d'adaptation à la concurrence Filiale à 100 % de la branche mécanique du Groupe Meunier depuis 1987, située sur le port de Brest, elle comprend environ 200 salariés. Selon le niveau de charge, elle influe sur environ 500 emplois directs. Elle engendre un chiffre d'affaires de 200 millions de francs en 1996 et environ 400 000 heures productives par an. À la suite d'un dépôt de bilan en 1986, la reprise a été en partie favorisée par le Comité Interministériel de Restructuration Industrielle (CIRI). En jouant sur la réduction des effectifs (1/3 de licenciements), sur l'autonomie de gestion, sur l'annualisation des rémunérations et la mise en place d'un système d'intéressement, la SOBRENA a pu éviter la liquidation judiciaire.

La Compagnie Marseillaise de Réparation (CMR) est la dernière entreprise de réparation à Marseille. Son concurrent, Sud Marine, a fermé en 1994, entraînant la perte de 605 emplois. Suite à cette liquidation, CMR a repris Sud Moteurs, une filiale de Sud Marine, spécialisée dans la réparation de moteurs. CMR demeure un spécialiste de réputation mondiale de la réparation de méthaniers. Ce chantier souffre de sa localisation géographique, le port de Marseille est très excentré par rapport aux lignes atlantiques et même par rapport à de nombreuses lignes méditerranéennes.

L'incidence immédiate des dévaluations de la lire et de la peseta sur les prix pratiqués par les chantiers de réparation navale italiens et espagnols a contribué à réduire la capacité de prise de commandes du chantier français méditerranéen. Le contexte concurrentiel ainsi créé, en renforçant le caractère déjà aléatoire de cette activité (dépendance étroite de celle-ci vis-à-vis de la volonté ou de la capacité réelle des armements à budgétiser des campagnes de réparation de leur flotte), a placé cette entreprise dans une position de grande vulnérabilité.

Après des périodes de chômage technique, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte par le Tribunal de Commerce de Marseille en mai 1996 à rencontre de CMR. L'entreprise a été reprise par l'armateur italo-suisse Marinvest (filiale de Mediterranean Shipping Company, 8ème armateur mondial, propriété de Gianluigi Aponte, qui possède une flotte de plus de 93 bateaux).

Après un conflit social important, Marinvest s'en est tenu à son plan initial, proposé en début 1997 et accepté par le Tribunal de Commerce de Marseille. Le repreneur ne garde que 110 salariés sur les 305. Il s'engage en outre à réembaucher 40 salariés supplémentaires les deux prochaines années, en fonction du niveau de commandes. Marinvest prévoit de rendre la CMR rentable en deux ans. Marseille conservera donc un pôle de réparation navale lourde.

Le plan de reprise prévoit l'application d'un plan proposé par le Gouvernement français. Ce plan permettrait de sauver des emplois et de réserver un règlement social aux autres. Il garantit une série de contrats d'ici la fin 1998 (travaux sur les bateaux de la flotte CMA-CGM). Par ailleurs, l'Union départementale des industries métallurgiques, qui regroupe des grosses entreprises régionales comme Eurocopter, Sollac et Gemplus, s'est engagée à reprendre 50 salariés. Les pouvoirs publics reclasseront 16 autres personnes par des congés de conversion ou l'obtention de primes. Le reste du personnel sera concerné soit par des mesures d'âge, soit par un dispositif d'invalidité.

Le secteur de la réparation navale connaît en France deux problèmes :

- il a uniquement accès aux aides dans le cadre d'opérations de transformation (plafonnées à 4,5 %), dont l'agrément par le Ministère de l'Industrie n'est généralement connu qu'après signature du contrat. Le chantier de réparation supporte un risque de trésorerie ;

- la particularité de ce secteur repose en grande partie sur l'imprévisibilité de la charge. Un client exige qu'un chantier de réparation soit accessible 24 heures par jour et ce, quel que soit le jour de la semaine. La disponibilité de la main-d'oeuvre doit donc être forte. La France souffre de ce point de vue, vis-à-vis de ses concurrents (Grande-Bretagne, Espagne, Portugal...), d'un handicap.

2.1.4 La construction navale de plaisance

La filière nautique française (production, location, distribution, services) représente près de 3 000 entreprises, réalise un chiffre d'affaires d'environ 10 milliards de francs et emploie 15 000 personnes en 1995. Le chiffre d'affaires de la production est d'environ 2,1 milliards de francs en 1996, dont 49 % à l'exportation (y compris les DOM TOM ; 10 %).

La location maritime compte près de 130 entreprises, 1 200 personnes et un chiffre d'affaires de 850 millions de francs. Ce marché a connu au cours des années quatre-vingt, dix ans d'expansion, liée à la démocratisation de ce sport par la médiatisation (grandes courses nautiques), et à l'émulation entre les architectes français. Le marché de la plaisance semble aujourd'hui marquer le pas.

La production de navires de plaisance en 1996 concerne 4 000 personnes, pour un chiffre d'affaires d'environ 2,5 milliards de francs.

Évolution du chiffre d'affaires de la production

(base 100 en 1985)

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

100

110

118

125

155

171

148

124

112

115

112

107

Source : Fédération des Industries Nautiques

La flotte française comptait, au 31 août 1995, 850 000 navires, dont 70 % de bateaux à moteur et 28 % de voiliers. La spécialisation de la France sur les navires à voiles (à 52 %) ne correspond pas pleinement à la répartition du parc national.

* Entretien comprend réparation et gardiennage ** Autres comprend Voiles légère, Bateaux fluviaux... Source : Fédération des Industries Nautiques

L'ouverture à l'export permet cependant à l'industrie nautique d'engendrer un excèdent de la balance commerciale de 620 millions de francs, grâce à la position sur le marché des voiliers (32 % de la production mondiale) et des pneumatiques (38 % de la production mondiale).

Pour les navires à moteur, la France est dominée par le Royaume-Uni, l'Italie ou les États-Unis. L'absence de motoriste français explique en partie ce phénomène.

La mise en place de la Loi Pons en 1986 a permis d'atténuer la chute de la demande métropolitaine en 1990 ( ( * )9) . Près de 30 % du chiffre d'affaires des sociétés de location se réalisent aux Antilles, soit 228 millions de francs en 1995.

L'industrie nautique française fait face à la faiblesse du marché intérieur et à une concurrence accrue à l'export. Pour les facteurs internes défavorables à la reprise du secteur, on trouve :

- l'étroitesse du marché intérieur, reflétée par le taux d'équipement en plaisance. En 1995, il est de 1 bateau pour 66 habitants en France, contre 1 pour 66 habitants aux États-Unis et environ 1 pour 7 dans les pays nordiques (Norvège, Finlande, Suède) ;

- la mise en place de permis pour les bateaux à moteurs. Il est cependant apparu au groupe de travail qu'un tel permis était indispensable à la sécurité des personnes ;

- la remise en cause des avantages fiscaux aux métiers de location qui permettent pourtant de contourner l'insuffisance d'anneaux dans les ports. Cette branche, pour être rentable, aurait besoin de 22 semaines d'activité par an. Or, le taux français (12 à 15 semaines) est insuffisant.

Le contexte international s'est modifié depuis le début des années 90 :

- les dévaluations dont ont profité nos principaux concurrents (Royaume-Uni, Italie) ont contribué à écarter la France du marché du motonautisme, sur lequel elle était déjà peu présente ;

- les grands salons nautiques à l'étranger (Dusseldorf) contribuent à rapprocher les acheteurs et les constructeurs étrangers. Les aides à la représentation du CFCE sont, de ce point de vue, insuffisantes pour mener une véritable politique de prospection hors du marché national. C'est par l'implantation directe (chantiers Bennéteau aux États-Unis dans les années 80) que celle-ci peut dès lors s'opérer.

2.2 La construction navale militaire

Les navires de combat sont, en France, en très grande majorité construits par la Direction des Constructions Navales (DCN). Au sein du Ministère de la Défense, la DCN fait partie de la Délégation Générale pour l'Armement.

2.2.1 Le marché de la construction navale militaire française Aux constructions neuves et à l'entretien pour la Marine nationale, s'ajoutent des activités analogues pour l'exportation, ainsi que des travaux en coopération et de diversification. Ils permettent de compenser partiellement la baisse des commandes nationales et d'amortir les investissements consentis au titre du développement et de l'industrialisation des navires de la Marine nationale.

Le plan de charge résultant de la loi de programmation 1997-2002 prévoit une diminution importante des études et constructions neuves pour la Marine Nationale, qui ne représenteraient plus, en 1999, que 47 % de la charge de 1996.

2.2.2 La Direction des Constructions Navales (DCN)

La composante industrielle, désormais appelée Direction des Constructions Navales (DCN), est une direction opérationnelle à statut d'administration centrale de la Délégation Générale pour l'Armement (DGA), chargée de la conception, de la réalisation puis du maintien en état de matériels navals pour le compte de la Marine Nationale, ainsi que pour l'exportation.

Les tâches étatiques comprennent la préparation de l'avenir, la conduite des programmes d'armement et d'entretien, l'exercice d'une expertise technique, la contribution aux actions d'aide aux exportations et au contrôle de celle-ci, et la participation à la politique de l'État dans le domaine des systèmes navals. Elles sont effectuées au sein de la DGA par des directions fonctionnelles : Direction des Systèmes et Armes (DSA - maîtrise d'ouvrage des anciennes constructions navales), Direction de la Coopération et des Affaires Industrielles (DCI), Direction des Relations Internationales (DRI).

Les moyens d'essai sont, depuis janvier 1997, regroupés au sein de la Direction des Centres d'Expertise et d'Essais (DCE), direction opérationnelle de la DGA.

L'effectif total entreprise de la DCN au 31 décembre 1997 est de 19 278 ouvriers et cadres, soit une diminution de 7,6 % par rapport à l'effectif au 31 décembre 1996 (20 860). À cet effectif s'ajoute la sous-traitance interne, qui représente environ 3 600 personnes en 1996.

Effectifs des principaux établissements de la DCN au 31 décembre 1995

En 1996, les études et constructions neuves hors la Force Océanique Stratégique (FOST), pour la Marine Nationale ainsi que les divers, dont l'export, ont été réalisées majoritairement à la DCN Brest et à la DCN Lorient (environ 5 000 personnes et 6 850 milliers d'heures de charge). En l'absence de nouveaux marchés de diversification, les études, les constructions neuves hors FOST pour la Marine Nationale et les divers seront en forte diminution entre 1998 et 2000 (3 000 à 3 400 milliers d'heures), et ne demanderont plus que moins de la moitié de l'ensemble de l'effectif de ces deux établissements affecté à cette charge en 1996 (en 2000 à la DCN Brest, la charge de constructions neuves réduite à 700 milliers d'heures ne concernerait plus que 500 personnes).

En 15 ans ( de 1981 à 1995), la réduction des effectifs du personnel à statut ouvrier (- 31 % ) a été supérieure à celle de l'ensemble de la DCN (- 23 % ). L'âge moyen des ouvriers est de 41 ans, celui des chefs d'équipe est de 47 ans, celui des techniciens à statut ouvrier (TSO) est de 40 ans environ.

2.2.3 Les métiers, activités et lignes de produit de la DCN

La DCN maîtrise toutes les activités d'ensemblier de navires armés de premier rang : conception et réalisation de plates-formes propulsées, intégration d'équipements ou armes du système de combat, essais, logistique, entretien programmé ou accidentel, garantissant à la Marine sa capacité d'intervention pendant la durée d'utilisation escomptée du navire. Cette situation, unique en Europe, ainsi que la qualité des relations avec la Marine Nationale, confère à la DCN une très forte culture technique. La DCN regroupe plusieurs métiers, notamment :

- l'assistance à la maîtrise d'ouvrage ;

- la maîtrise d'oeuvre. La gestion des projets navals cumule les caractéristiques des grands projets industriels (très faibles séries, absence de prototype) et celles des projets d'armement (longues durées de vie, fort taux d'innovation technologique, évolution constante des besoins) ;

- l'architecture navale militaire ;

- la conception et la réalisation de la plate-forme propulsée ;

- l'intégration d'équipements ou d'armes du système de combat (installation interconnexions, mise en service, essais.) ;

- les essais ;

- les opérations d'entretien programmé ou accidentel et l'approvisionnement des pièces de rechange pour le compte de la Marine nationale ;

- la logistique pour les marines clientes.

Les activités de la DCN se répartissent comme suit en pourcentage de la charge (heures de production réalisées en 1996) :

- constructions neuves et fabrications : 43 %

- entretien : 36,5 %

- diversification (dont export) : 19,2 % -divers : 1,3 %

L'activité de recherche et développement représente environ 5 % de la charge totale.

La gamme des produits de la DCN est très large et couvre l'essentiel des besoins des clients potentiels en matière de navires de combat : les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins, les sous-marins nucléaires d'attaque, les sous-marins à propulsion classique, les grands bâtiments (porte-avions, frégates de premier rang, bâtiments d'intervention et de projection des forces), les bâtiments de taille moyenne et/ou de complexité intermédiaire (frégates de deuxième rang, corvettes, patrouilleurs armés, chasseurs de mines), les navires de surveillance ou de servitude, les systèmes de combat, les sous-systèmes et équipements, les services (dont l'entretien et la maintenance des navires).

2.2.4 Une partie significative de la charge de la DCN est liée aux exportations

L'activité exportation consiste en la réalisation du programme Bravo (livrable de 1996 à 1998), de la construction de trois sous-marins pour le Pakistan livrables de 1999 à 2002 et du programme Sawari II (construction de deux frégates antiaériennes de 3 550 tonnes pour l'Arabie Saoudite, à livrer en 2001 et 2002). Ce dernier programme est complété par la commande notifiée, à la mi-1997, d'une troisième frégate équipée d'un nouveau système d'armes. Des programmes d'entretien liés sont aussi prévus. On note aussi le programme Mouette des grands carénages des quatre frégates et de deux pétroliers livrés à l'Arabie Saoudite au titre du contrat Sawari I de 1996 à 1999, ainsi que deux contrats de modernisation de système de combat, respectivement de patrouilleurs norvégiens et de frégates brésiliennes.

Par ailleurs, la DCN déploie des efforts importants afin d'obtenir des contrats dans le domaine de l'Offshore.

3. La différence entre construction civile française et arsenaux porte en partie sur les effectifs et leurs statuts

En dehors des métiers, deux facteurs contribuent aujourd'hui à différencier les instructeurs civils et militaires : le nombre d'employés et leur statut.

La DCN, dont le plan de charge a faiblement diminué entre 1990 et 1996, doit aujourd'hui adapter ses effectifs pour faire face à la baisse franche et probablement durable des commandes pour la Marine nationale.

Évolution des effectifs français dans la construction navale

militaire et civile

1980

1985

1990

1995

DCN constructions neuves

12.000

12.000

12.000

11.300

Construction de navires marchands

23.500

20.000

6.800

6.200

Source : CSCN ( ( * )10)

Cette mutation a été engagée par nos principaux pays concurrents en Europe depuis 1985. Elle ne s'opère en France que depuis 1990.

Évolution des effectifs des chantiers navals dans le domaine militaire

Construction neuve

Réparations

Le personnel ouvrier de la DCN n'est pas doté d'un statut spécifique tel que celui des militaires ou des fonctionnaires de l'État, mais il bénéficie d'un quasi-statut, dans la mesure où il est soumis à des dispositions réglementaires fixées par décret, n existe des écarts entre le dispositif légal, réglementaire ou convention, et son application.

En matière de primes de rendement, on constate au cours des ans un rétrécissement de la dispersion des primes autour du taux moyen de 16 %, alors que cette prime devrait rémunérer l'efficacité. Concernant les travaux insalubres, il y a de moins en moins de correspondance entre l'exposition aux nuisances et le montant des primes versées.

Il semble que les écarts observés résultent de l'application du statut qui a été faite par les établissements employeurs. Ainsi, des ambiguïtés caractérisent le recrutement, le licenciement et la mobilité géographique.

Le recrutement et les mutations du personnel à statut ouvrier du ministère de la Défense ne peuvent se faire que sur la base du volontariat, même lors de la réorganisation, la fermeture ou le transfert d'un établissement. Le versement des indemnités de conversion ou d'indemnités particulières est, de ce fait, lui aussi, lié au volontariat. Seules les mutations à l'intérieur d'un établissement peuvent être imposées par le directeur ou le chef de service.

Depuis des décennies, le souci des Gouvernements successifs de ne procéder à aucun licenciement collectif d'ouvriers de la défense a conduit à rechercher une mesure de substitution : la cessation anticipée d'activité, mise en place à la DCN depuis la mi-1993. L'application de cette mesure repose largement aussi sur le volontariat. À la DGA, le taux de rendement de cette mesure, de l'ordre de 45 à 65 % de la tranche d'âge considérée, a été jusqu'à maintenant considéré comme suffisant pour satisfaire les déflations d'effectifs inscrites dans les lois de finances.

Ce mode de sortie est malgré tout pénalisant dans la mesure où il n'est pas accompagné des autorisations de recrutement nécessaires pour combler les besoins les plus essentiels de la DCN. D'une manière générale, le Ministère de la Défense est confronté au problème du caractère « aveugle » d'un processus de compression d'effectifs : les mesures peuvent parfois affecter des services dynamiques.

À l'initiative de la DGA, le ministère tente d'instaurer un régime de mobilité géographique visant à une meilleure adéquation entre la ressource et le plan de charge.

La DCN doit faire face à de fortes contraintes, notamment :

- l'absence de souplesse dans la gestion des effectifs : faible mobilité entre les établissements, rigidité du mode de recrutement qui oblige à appeler les candidats d'une discipline donnée dans l'ordre du registre d'embauché, c'est- à-dire à partir d'une liste commune des organismes syndicaux, et à les recruter sans période d'essai, ce qui ne permet pas de satisfaire les besoins en termes de niveaux de qualification adaptés à l'évolution des techniques et technologies ;

- la recherche de moyens financiers nécessaires au développement d'une véritable stratégie à l'exportation.

La DCN doit relever un double défi : faire face à la baisse significative et durable des commandes de la Marine nationale et participer à l'effort de réduction des coûts des programmes d'armement engagé par la DGA.

La DCN se réforme. Les décrets de janvier 1997 constituent une étape : ils précisent ses nouvelles missions et son organisation en tant que « direction exerçant une activité industrielle au sein de la DGA », la maîtrise d'ouvrage de l'ancienne DCN étant confiée à la Direction des Systèmes d' Armes « DGA/DSA ».

Le projet de refonte du système de gestion de la DCN est un projet de grande ampleur, qui concerne directement 6 000 personnes, dont le travail et/ou la culture économique devront fortement évoluer. Il concerne l'organisation et la répartition des responsabilités, la structure, les règles et le contrôle de gestion, ainsi que les systèmes comptables et de gestion financière. Il a été lancé en décembre 1996 et est entré dans la phase de mise en oeuvre qui doit durer de deux à trois ans. Ce projet a pour objectif de doter la DCN d'un système de gestion comparable à celui d'une entreprise industrielle équivalente. La construction du système de gestion s'appuie sur les principes ci-après :

- parvenir à la transparence des coûts, à la responsabilité effective des acteurs ;

- obtenir un résultat d'exploitation et une capacité d'autofinancement ;

- effectuer un suivi des projets ;

- traduire clairement dans la gestion les conséquences des liens contractuels entre la DCN et la DGA ;

- faire une distinction très nette entre les coûts de l'exploitation industrielle, qui sont du domaine de gestion de la DCN, et les coûts exceptionnels ou transitoires résultant des opérations de restructuration en cours ; - enfin, affecter des objectifs de gestion à des responsables identifiés.

Devant passer d'un système de gestion d'administration à un système de gestion d'entreprise, la DCN a engagé un processus d'adaptation des effectifs au plan de charge prévisionnel (reclassement dans les armées, départs, sur la base du volontariat). Pour l'année 1997, la réduction visée est de 1 500 personnes environ.

CHAPITRE 3 - Évaluation de la politique publique dans la construction navale française

1. Un secteur moins aidé en France que dans le monde

1.1 Un secteur industriel très aidé

Une étude de l'OCDE sur quatre secteurs révèle que la construction navale est le secteur le plus aidé dans l'ensemble des pays de l'OCDE lorsque l'on considère les montants budgétaires des aides distribuées ( ( * )11) .

Le secteur est actuellement subventionné environ quatre fois plus que l'aéronautique. Ce niveau d'aide a baissé de près de moitié entre 1989 et 1993. Cette baisse est plus forte que celle concernant le secteur aéronautique, mais moindre que dans les secteurs du textile et de l'acier.

Le tableau suivant permet de comparer précisément les intensités d'aides directes au secteur pour les principaux pays de l'Union européenne. Il rapporte le montant des aides à la valeur ajoutée dans le secteur de la construction navale. Il mérite au préalable, d'être relativisé. Le recours à la sous-traitance limite la portée des comparaisons de valeur ajoutée.

Aides à la construction navale

Pourcentage de la valeur ajoutée dans ce secteur, 1990-1992 et 1988-1990*

1988-1990

1990-1992

Différence entre les deux périodes

Royaume-Uni

16

4

-12

Pays-Bas

23

10

-13

Belgique

16

11

-5

France

52

11

-41

Italie

72

17

-55

Allemagne

26

18

-8

Espagne

35

19

-16

Danemark

33

31

-2

Portugal

98

69

-29

Europe des 12

34

15

-19

* Les chiffres relatifs à la valeur ajoutée n'étant pas toujours disponibles pour les dernières années, il a fallu procéder à des estimations. Les chiffres indiqués doivent par conséquent être considérés comme les meilleures approximations possibles. Pour la période 1993-94, la commission ne donne que les niveaux d'aides, en fonction des législations. Source : commission des communautés européennes

Sur la période 1988-1990, le niveau d'aide à la construction navale française représente environ 52 % de la valeur ajoutée. Ce niveau est supérieur à la moyenne communautaire, et correspond à la troisième plus forte subvention. À partir de 1990, la situation s'inverse : l'Espagne, l'Allemagne et l'Italie sont au-dessus de la moyenne, tandis que la Belgique, la France, les Pays-Bas et le Royaume-Uni peuvent être considérés comme étant les plus faibles donneurs d'aides en pourcentage de la valeur ajoutée dans ce secteur.

- Évaluation de la politique publique dans la construction navale française -

Dans cinq pays, le secteur est aidé de plus de 50 % de plus qu'en France (Danemark, Allemagne, Espagne, Italie et Portugal). Le Portugal a le niveau d'aide le plus élevé : il atteint plus de quatre fois la moyenne communautaire et six fois le niveau français.

Encadré méthodologique

Les données concernant les aides à la construction navale sont établies à partir de champs différents, pour ce qui est du secteur industriel et de l'ensemble des mesures d'aides considérées. Les périodes sont aussi variables d'une étude à l'autre. Les données étant rares nous avons pris le parti d'exploiter le plus de données possibles et d'expliquer autant que faire se peut les différences, que l'on constate d'un tableau à l'autre pour un même indicateur.

Pour caractériser le niveau d'aide on peut soit examiner les montants budgétaires s'affairant au soutien à ce secteur ou construire des indicateurs d'intensité. Ces indicateurs se divisent eux-mêmes en deux catégories.

On peut apporter les montants budgétaires des aides distribuées, à des données comme les valeurs ajoutées ou les chiffres d'affaires du secteur. Pour cet indicateur, la variabilité du degré de sous-traitance et tes différences de spécialisation des entreprises du secteur bien d'équipement font qu'ils ne sont pas complètement comparables. Ce type d'indicateur a donc pour objet de comparer seulement les ordres de grandeur.

Un autre indicateur d'intensité est le niveau d'aide par contrat, Comme la plupart des données budgétaires ne sont pas affectées à des entreprises ou des bâtiments, on ne peut pas évaluer un niveau réel. Par contre, en examinant les législations et les pratiques, on peut évaluer un niveau d'aide théorique. C'est la méthode suivie par le rapport Theisen (1995). Il avait pour objet de proposer au Gouvernement britannique des modifications de sou système de bonification des prêts afin de mettre les arsenaux de ce pays au niveau de ses concurrents. Les niveaux figurant dans le rapport britannique ne correspondent donc pas strictement aux intensités d'aide exprimées en part de l'aide dans la valeur ajoutée du secteur ou dans le chiffre d'affaires.

Les données concernant les aides à la construction navale sont établies à partir de champs différents, pour ce qui est du secteur industriel et de l'ensemble des mesures d'aides considérées. Les périodes sont aussi variables d'une étude à l'autre. Les données étant rares nous avons pris le parti d'exploiter le plus de données possibles et d'expliquer autant que faire se peut les différences que l'on constate d'un tableau à l'autre pour un même indicateur.

Pour caractériser le niveau d'aide, on peut soit examiner les montants budgétaires au soutien de ce secteur ou construire des indicateurs d'intensité. Ces indicateurs se divisent eux-mêmes en deux catégories.

On peut rapporter les montants budgétaires des aides distribuées à des données comme les valeurs ajoutées ou les chiffres d'affaires du secteur. Pour cet indicateur, la variabilité du degré de sous-traitance et les différences de spécialisation des entreprises du secteur bien d'équipement font qu'ils ne sont pas complètement comparables. Ce type d'indicateur a donc pour objet de comparer seulement les ordres de grandeur.

Un autre indicateur d'intensité est le niveau d'aide par contrat. Comme la plupart des données budgétaires ne sont pas affectées à des entreprises ou des bâtiments, on ne peut pas évaluer un niveau réel. Par contre, en examinant les législations et les pratiques, on peut évaluer un niveau d'aide potentiel. C'est la méthode suivie par le rapport Thiesen (1995). Il avait pour objet de proposer au Gouvernement britannique des modifications de son système de bonification des prêts afin de mettre les arsenaux de ce pays au niveau de ses concurrents. Les niveaux figurant dans le rapport britannique ne correspondent donc pas strictement aux intensités d'aide exprimées en part de l'aide dans la valeur ajoutée du secteur ou dans le chiffre d'affaires.

Le niveau moyen des aides à la construction navale dans la l'Union européenne a diminué fortement, tombant de 33,8 % de la valeur ajoutée pour la période 1988-1990, à 14,6 % pour la période 1990-1992. L'intensité d'aide a diminué dans tous les États membres sans exception. C'est en France, en Italie, au Royaume-Uni et au Portugal que les réductions les plus fortes ont eu lieu. La France a vu l'intensité de son niveau d'aide divisée par quatre.

Depuis 1992, le niveau d'aides a augmenté en Europe. Il atteint 24 % de la valeur ajoutée du secteur qui a bénéficié d'aides à la restructuration très importantes. 800 millions d'ÉCU ont été accordés à la Belgique et à l'Espagne. Dans les nouveaux Länder allemands, les aides à la privatisation se sont élevées à environ 1 380 millions d'ÉCU en 1992 et 1994. La commission, pour la période 1992-1994, ne donne pas le détail au niveau national.

1.2 Des mécanismes d'aide très différents d'un pays à l'autre

Une étude de la Chambre syndicale des constructeurs américains révèle -sans, bien entendu, évoquer le cas américain - que la politique d'aide au secteur est très contrastée suivant les pays ( ( * )12) . La Corée a la particularité de ne pas recourir aux aides directes à la commande, mais plutôt aux aides au financement. Elle est aussi le seul pays à pratiquer les abandons de créances à grande échelle, dont le coût est assumé par l'État. Les chantiers navals coréens sont en effet régulièrement en dépôt de bilan. Par exemple, les chantiers Daewoo ont été renfloués de 750 millions de dollars en 1990. Le Japon a la particularité d'aider majoritairement ses chantiers par des aides à la recherche et au développement. À l'opposé, les pays européens aident leurs chantiers presque uniquement par les aides directes aux constructeurs ou par l'octroi de prêts bonifiés.

Dispositif d'aides à la construction navale

Moyenne annuelle de 1988 à 1993, en millions de dollars courants

Aides directes

à la construction

navale

Encours total des

contrats bonifiés par

l'administration du

pays

Abandons de créances

dont le coût est

assumé par l'État

Aides à la R&D

Corée du Sud

0

1 800

595

0

Allemagne

816

1 500

0

0

Japon

85

818

0

1 000

Italie

359

557

0

24

Espagne

592

306

0

0

France

232

399

0

3

Source : Shipbuilders Council of America

Le rapport Thiesen (1995) donne des indications sur le niveau des aides par contrats. Il s'est attaché à déterminer les niveaux d'aides maximaux à la construction navale dans les principaux pays européens, en distinguant les aides directes liées à l'exploitation des constructeurs et les aides indirectes liées au financement de l'achat des navires exportés ou non ( ( * )13) .

Niveaux d'aide directe et d'aide financière exprimés en pourcentage du coût des

navires suivant les législations des pays en 1994

Pourcentage du coût du navire

Allemagne

Danemark

Espagne

France

Royaume -Uni

États-Unis

Aides directes

8 %

8,1 %

7,4 %

9 %

9 %

0

Aides financières dont

6,5 %

20,6 %

22,3 %

4,4 %

6,9 %

21,6 %


Structure - Primes de risque

5,7 %

9,2 %

11,7 %

2,3 %

1,7 %

15,8 %


• Intérêt - Monnaie

0,8 %

11,4 %

10,6 %

2,1 %

5,2 %

15,8 %

Aide totale

14,5 %

28,7 %

29,7 %

13,4 %

15,9 %

21,6 %

Source : Rapport Theisen Securities

Les subventions directes sont les aides relatives aux coûts de production. Elles sont similaires d'un pays européen à l'autre. Elles représentent entre 7,4 % et 9 % du coût des navires en France, au Royaume-Uni, au Danemark, en Allemagne ou en Espagne. Les États-Unis n'utilisent pas cet instrument.

Les aides de nature financière sont peu importantes pour la France : 4,4 %, contre 6,5 % pour l'Allemagne, 22,3 % pour l'Espagne et 20,6 % pour le Danemark ( ( * )14) . Le système d'aide américain repose essentiellement sur les aides financières, à un haut niveau de 21,6 %, dans le cadre du dispositif connu sous l'appellation de Titre XI.

Les aides financières se divisent en deux composantes :

- composante « structure/prime de risque » : il s'agit pour le bénéficiaire d'un financement d'État plus avantageux que ce qui peut être obtenu sur des bases purement commerciales. On entend par structure le montage financier utilisé ( ( * )15) (durée d'amortissement, rendement, conditions de paiements etc.). La prime de risque est le surcoût lié à l'incertitude ;

- composante « taux d'intérêt/monnaie » : il s'agit du bénéfice pour l'utilisateur d'un financement d'État, réalisé grâce au différentiel entre le taux d'intérêt proposé sur une monnaie déterminée et les taux de marché.

Le Danemark et l'Espagne connaissent des risques de change élevés. La composante « taux d'intérêt/monnaie » est importante pour leurs constructeurs. Certains pays proposent des structures de financement très avantageuses : c'est le cas des États-Unis et de l'Espagne.

La construction navale française se trouve donc être, en 1994, une des moins aidées au monde. En outre, comme le montre le tableau suivant, elle possède un système d'aide qui repose essentiellement sur les aides directes visibles, qui vont être remises en cause par l'éventuelle ratification de l'accord de l'OCDE ( ( * )16) . Elle se situe donc au coeur de la cible de cet accord.

Répartition de l'aide entre aide directe et aide financière

suivant les législations des pays en 1994

Allemagne

Danemark

Espagne

France

Royaume-Uni

États-Unis

Aides directes

55

28

25

67

57

0

Aides financières

45

72

75

33

43

100

Source : Rapport Theisen Securities - calculs G.G.P

La France a donc un des dispositifs d'aide les moins généreux et parmi les plus vulnérables. Par ailleurs, nos concurrents européens et américains ont développé des systèmes complexes d'aides au financement, qui leur ont permis de s'affranchir du passage par les aides directes à la construction navale (fortement encadrées par la septième directive européennes, depuis 1989).

2. Le système français d'aides à la construction navale civile

2.1 Le dispositif français

Le Gouvernement français poursuit sa politique dans six directions :

- l'aide à la prise de nouvelles commandes de construction de navires neufs ou de transformations importantes de navires (sur la base de la VIIème Directive Communautaire) ;

- l'apport d'aides de restructuration pour les chantiers qui doivent réduire leurs effectifs ;

- des aides à la recherche en faveur d'une part des technologies nouvelles porteuses de produits nouveaux (navires rapides par exemple) ou de gains de productivité, et d'autre part du développement de navires à haute valeur ajoutée (méthaniers par exemple) ou de concepts d'avenir permettant d'échapper à la concurrence des pays émergents ;

- les aides à l'exportation ;

- les commandes publiques de bâtiments de guerre ;

- les baisses de charges générales sur les bas salaires.

2.1.1 Le cadre légal

Le coeur du cadre légal est la loi du 24 mai 1951. Elle concerne les bâtiments de mer d'une jauge brute supérieure à 100 tonneaux autres que les bâtiments commandés pour le compte de l'État français et les navires de plaisance. Leur construction ou transformation en France, peut donner lieu à l'attribution d'allocations forfaitaires déterminées en fonction des caractéristiques principales des bâtiments à construire. Elles ont pour but général de permettre l'abaissement du prix de revient des navires français, en vue d'aboutir au rapprochement des prix offerts en France avec les prix offerts par la même industrie à l'étranger ( ( * )17) . L'objectif implicite est d'assurer la pérennité du secteur.

Seuls les dispositifs du Ministère de l'Industrie ont pour but direct de soutenir la construction navale. Les objectifs intermédiaires sont : aider à la recherche et développement, la restructuration et permettre l'abaissement du prix de revient des navires français en vue d'aboutir au rapprochement des prix offerts par les chantiers français et ceux offerts par la même industrie à l'étranger.

La politique d'acquisition de la DGA a pour objet de doter la Nation d'un système marin d'armes permettant un haut degré de sécurité. Dans ce cadre, le coût est considéré comme une des performances du système d'armes.

Les politiques de baisse de charge et d'aide à l'exportation ont pour objet soit de promouvoir les exportations soit d'intensifier le contenu en bas salaires de l'embauche.

Sommairement, comme l'indique le schéma suivant, le Ministère chargé de l'Industrie est responsable du volet sectoriel de ces politiques publiques, le Ministère chargé des Finances du volet aide à l'exportation, le Ministère chargé de la Défense, du volet sécurité nationale et le Ministère chargé du Travail, du volet emploi. Le Ministère du Budget suit aussi l'ensemble de ces dispositifs.

Au niveau du Premier Ministre et du Comité Interministériel des Restructurations Industrielles, les arbitrages peuvent être effectués entre les Ministères chargés du Budget, des Finances, de l'Industrie et du Travail pour tout ce qui concerne les aides directes. Au niveau de la commission des Garanties et du Crédit au Commerce Extérieur, les attributions d'aide à l'exportation sont' décidées par les Ministères chargés des Finances et de l'Industrie.

Le nombre d'acteurs publics est donc très important. Il n'existe toutefois pas de lieu commun dans lequel une stratégie d'ensemble serait définie.

Relations entre le secteur de la construction de navire civile et de bâtiments de guerre

et l'administration

2.1.2 Un encadrement par les règles européennes

Les règles européennes encadrent le dispositif français. Elles fixent le niveau d'aide (9 % pour les navires de grande taille et 4,5 % pour les petits). Elles précisent les limites à suivre pour les aides à la recherche et développement. Elles encadrent sévèrement l'aide à l'investissement, la limitant à des restructurations qui permettent de diminuer les effectifs. Elles excluent la réparation du champ des aides, ce qui était initialement prévu dans la loi française.

Plus généralement, la politique d'aide à la construction navale repose sur la VIIème Directive Communautaire (90/684/CEE) ( ( * )18) . Le secteur de la construction navale est le dernier à pouvoir recevoir une aide spécifique ( ( * )19) .

Les principes suivants doivent encadrer la politique d'aide française :

- encourager la tendance actuelle à produire des navires d'une technologie plus avancée et assurer des conditions de concurrence loyales et uniformes à l'intérieur de l'Union européenne ;

- le montant total de l'aide octroyée pour un contrat ne peut dépasser 9 % ( ( * )20) de la valeur contractuelle avant aide, des navires ;

- la révision annuelle du plafond des aides à la production ( ( * )21) devrait constamment avoir pour objectif sa réduction progressive ;

- le plafond est fixé par la commission sur la base de la différence entre les coûts des chantiers les plus compétitifs de l'Union européenne et les prix pratiqués par leurs principaux concurrents internationaux en ce qui concerne, en particulier, les segments de marché dans lesquels les chantiers de la restent relativement les plus compétitifs ;

- les aides aux investissements sont limitées ( ( * )22) ;

- aucune aide au secteur de la réparation n'est autorisée, sauf pour aider les fermetures, les restructurations aboutissant à une réduction de capacité et la recherche et le développement ;

- les fermetures de sites doivent être irréversibles ;

- les aides à la recherche et au développement sont autorisées.

Sous réserve d'une ratification de l'accord OCDE, deux règlements remplaceraient l'actuelle septième directive. Il s'agit du Règlement (CE) N° 3094/95 du Conseil du 22 décembre 1995, relatif aux aides à la construction navale qui donne effet à l'accord de l'OCDE, et du Règlement (CE) N° 385/96 du Conseil du 29 janvier 1996, relatif à la défense contre les pratiques préjudiciables en matière de prix. Il transpose en droit communautaire le volet de l'accord de l'OCDE de défense contre les pratiques déloyales.

2.2 Montants budgétaires

Les dépenses budgétaires concernant les six instruments d'intervention publique étudiés sont données dans le tableau suivant.

Dépenses publiques concernant le secteur de la construction de navires

civils et de bâtiments de guerre

Aides directs (hors aides à la restructuration)

Aides à la restructuration

R/D

civil

Dépenses liées aux exportations

Dépenses militaires

Total

Prêts bonifiés

Protocoles

R/D

Constructions neuves

1990 (en Francs 1994)

1353

135

23

66

22

1703

4879

8023

1996

705

0

20

3,8

25

1294

3258

5306

Évolution

%

-48

n.s.

-12

-94

15

-24

-33

-34

n.s. : non significatif - Calculs CGP

En 1996, la dépense publique globale concernant le secteur de la construction de navires civils et de bâtiments de guerre est d'environ 5,3 milliards de Francs. 86 % de cette dépense sont inscrits dans le budget du Ministère de la Défense. 13 % correspondent au mécanisme d'aide directe piloté par le Ministère de l'Industrie. Les dépenses restantes, bien que structurantes (aide à la R&D et aux exportations), représentent un enjeu budgétaire moindre (d'environ 1 %).

La baisse du niveau global de dépenses publiques a été d'environ 34 % en Francs constants. La baisse la plus importante concernent les crédits export (- 94 %). Les aides directes (- 48 %) et la construction neuve militaire (- 33 %), c'est-à-dire le coeur du dispositif, ont nettement baissé.

Les Ministères chargés de la Défense et de l'Industrie sont donc deux acteurs publics clés. Ils gèrent plus de 90 % de la dépense publique dans ce secteur. Ces dépenses sont peu coordonnées. Il n'existe pas d'élément de gestion globale. Il est vrai qu'actuellement leurs interlocuteurs industriels sont relativement différents.

Décomposition de la dépense publique sur le secteur de la construction

navale en 1996

2.2.1 Les aides directes

L'accord de l'OCDE ( ( * )23) n'étant pas ratifié à ce jour, la loi de Finances pour 1997 prévoit, dans le cadre de la situation actuelle, une ouverture de 850 MF d'autorisations de programmes et 750 MF de crédits de paiement en loi de Finances 1997 pour concourir aux besoins des entreprises du secteur civil.

Les tableaux suivants rappellent les crédits ouverts sur le chapitre 64-93 « Équipement naval - Interventions » du Budget Industrie depuis 1989 et les opérations prévues sur les autorisations de programme.

En MF

Autorisations de programme

Crédits de paiements

1989

530,0

1408,0

1990

955,0

1184,0

1991

917,0

1167,0

1992

865,0

1105,0

1993

711,0

1016,0

1994

1134,0

950,0

1995

826,0

750,0

1996

691,6

705,6

1997

850,0

750,0

Source : Lois de Finances initiales et Ministère de l'Industrie

Le graphique ci-après, donne le détail des dotations initiales en loi de Finances.

Dans le cadre des négociations sur l'accord OCDE visant à limiter les aides à la construction navale, la France a obtenu la possibilité de mettre en oeuvre un plan d'adaptation de ses chantiers à hauteur de 2,6 milliards de francs, applicable sur les trois années suivant la mise en vigueur de cet accord. De prime abord la France considérait que cette enveloppe devait couvrir les autorisations de programme à mettre en place en 1996-97-98 pour solde de tout compte. Dans la mesure où l'accord OCDE n'est pas ratifié à ce jour, les autorisations de programme 1996 et 1997 peuvent être considérées comme ne faisant pas partie des 2,6 milliards de francs.

2.2.2 Les aides à la restructuration

La construction navale privée s'est restructurée avec l'aide des Pouvoirs Publics. Le détail du montant des aides à la restructuration engagées sur les crédits du Ministère de l'Industrie est donné dans le tableau suivant.

Aides à la restructuration

Dépenses en Francs courants

1983

0

1984

0

1985

45

1986

662

1987

439,2

1988

548,2

1989

339,7

1990

118,1

1991

49,3

1992

5,51

1993

0

1994

0

1995

0

1996

0

Source : Ministère de l'Industrie

2.2.3 Les aides à la R&D

L'aide de publique annuelle à la recherche en construction navale s'élève à près de 20 millions de francs dont la majeure partie provient du Ministère de l'Industrie.

2.2.4 Les aides à l'exportation

L'aide publique au financement consiste en une garantie de versement à la banque prêteuse des écarts de taux d'intérêt. Le tableau suivant donne la dépense publique estimée.

Dépense estimée pour l'État correspondant au financement des navires civils par des crédits export bénéficiant de l'aide publique au financement

Dépense estimée pour l'État correspondant au financement des navires civils par des crédits export bénéficiant de l'aide publique au financement

Années

Coût net relatif à la construction navale à la charge du

Trésor (milliers de francs)

1990

57,7

1991

48,8

1992

5,2

1993

-22,7 (*)

1994

21,1

1995

13,8

1996

3,8

* Les chiffres précédés du signe (-) représentent des gains au profit du Trésor Sources : Banque Natexis, Direction du Trésor

Lorsqu'un constructeur peut inscrire son contrat dans un protocole, une partie de l'encours est financé à un prêt avantageux.

Dépense publique de l'inscription dans les protocoles entre la France et des pays tiers de contrats concernant la construction de navires civils

Dépense publique de l'inscription dans les protocoles entre la France et des pays tiers

de contrats concernant la construction de navires civils

Années

Coût pour les finances publiques

de la bonification des prêts dans le cadre des protocoles

(en MF)

1981

44,0

1982

94,4

1983

93,0

1984

95,1

1985

314,3

1991

17,4*

1992

69,4

1993**

52,6*

*Estimation CGP

** Depuis 1993, aucun nouveau contrat n'a été inscrit dans un protocole. Sources : Banque Natexis, Direction du Trésor, Calculs CGP

Il existe un troisième instrument : la garantie COFACE. Suivant les périodes considérées, le dispositif est déficitaire ou excédentaire

2.2.5 Dépenses militaires

Dans les budgets votés dont les montants figurent dans les tableaux joints, la recherche et le développement concernent les études en amont, les développements exploratoires et les développements décidés. Les constructions neuves sont celles des navires de surface et des sous-marins nucléaires d'attaque (SNA). S'y ajoute la réparation de ces derniers. La Force Océanique Stratégique concerne la construction, les refontes, la modernisation et l'entretien des se us-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE).

Autorisations de programmes en MF courants

Autorisations de programmes

1990

1995

1996

1997

Recherches et développement

1476

1866

1737

1280

Constructions neuves (1)

4910

2211

2283

2231

Force océanique Stratégique

9500

5438

5547

4697

Grosses refontes et modernisation

980

521

211

765

Entretien et réparation de bâtiment (renouvellement des rechanges)

3184

2086

2373

2722

Opérations sur munitions et engins

1253

246

798

928

Total

21303

12368

12949

12623

(1) Constructions neuves de bâtiments de surface et des sous-marins nucléaires d'attaque ainsi que la réparation de ces derniers

(2) Construction et entretien des SNLE

(3) À l'exclusion des matériels aériens.

Source : Loi de Finances.

Crédits de paiements votés en MF courants

Crédit de paiements

1990

1995

1996

1997

Recherches et développement

1491

1318

1294

1120

Constructions neuves

4271

3351

3258

3006

Force océanique Stratégique

9027

5768

5429

5692

Grosses refontes et modernisation

1028

873

788

860

Entretien et réparation de bâtiment (renouvellement des rechanges)

2752

2074

2059

2481

Opérations sur munitions et engins

1054

497

421

396

Total

19623

13881

13249

13555

Sources : Crédits votés.

2.2.6 Baisse des charges sur les bas salaires

La politique de baisse générale des charges sur les bas salaires s'est engagée en 1993, à travers plusieurs dispositifs successifs.

La loi du 27 juillet 1993 a instauré une exonération des cotisations patronales d'allocations familiales (soit 5,4 points de cotisations) pour les salaires jusqu'à 1,1 SMIC et une réduction de moitié pour ceux compris entre 1,1 SMIC et 1,2 SMIC. La loi quinquennale sur l'emploi et la formation professionnelle du 20 décembre 1993 a repris ces dispositions en les insérant dans une programmation sur cinq ans qui porte progressivement le seuil à 1,5 SMIC pour l'exonération complète et 1,6 SMIC pour l'exonération de moitié.

La loi du 4 août 1995 ajoute à ce dispositif une réduction dégressive des cotisations sociales entre le SMIC et 1,2 fois le SMIC. Le montant maximum de cette réduction de cotisations pour 1 SMIC correspond à

12,8 points. La loi de finances pour 1996 fusionne ces deux dispositifs au 1 er octobre 1996. La réduction dégressive sera alors comprise entre le SMIC et 1,33 SMIC (soit au maximum une baisse de 18,2 points de cotisations).

Le projet de loi de finances pour 1998 aménage à nouveau la réduction dégressive des cotisations patronales. Le dispositif de réduction ne concerne plus que les salaires inférieurs à 1,3 SMIC. Le montant maximum est gelé à son niveau actuel.

Les dépenses budgétaires données dans le tableau suivant ne concernent que la construction de navires civils.

Dépenses budgétaires

au titre de la baisse des charges sur les bas salaires

dans le secteur de la construction de navires civils

(millions de francs)

1993

0,3

1994

0,9

1995

1,7

1996

2,9

1997

3,2

Source : calculs CGP, d'après l'enquête emploi de l'ISSEE.

2.3 Les restructurations ont permis le développement d'une industrie spécialisée dans des navires de haute valeur ajoutée

La construction navale privée s'est restructurée et spécialisée avec l'aide de la puissance publique : plans Le Pensec (1982), Lengagne (1984), Madelin (1986). Ils n'ont pu empêcher, entre 1984 et 1989, la fermeture de grands chantiers de Dunkerque, Nantes, La Ciotat, La Seyne, et La Rochelle-Palice.

Il ne reste plus aujourd'hui en France que deux sites civils de grande construction navale : un grand chantier à Saint-Nazaire, et un chantier de taille moyenne au Havre.

2.3.1 Les étapes de la restructuration

La période 1976-1985 est caractérisée par des réductions d'effectifs de 32 500 à 13 700 personnes, sans fermeture de sites jusqu'en 1982. Des regroupements se sont opérés en 1982, à la demande de l'État, au sein des chantiers de grande construction navale : le chantier Dubigeon (Nantes), repris par Alsthom Atlantique, est intégré à sa division « Construction Navale » aux côtés des Chantiers de l'Atlantique ; les sites de Dunkerque, La Ciotat et La Seyne-sur-Mer sont regroupés pour constituer la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (NORMED).

La seconde étape se situe entre 1986-1995. Les effectifs sont réduits de 13 700 à 5 800 personnes. Cette période caractérisée par la fermeture définitive de cinq sites de grande construction navale ;

- mise en liquidation judiciaire de NORMED et fermeture de ses trois sites (Dunkerque, La Ciotat et La Seyne) entre 1986-1989 ;

- cessation d'activité de Dubigeon (Nantes) et transfert de ses capacités aux Chantiers de l'Atlantique (Saint-Nazaire) en 1987 ;

- mise en liquidation judiciaire du site de La Rochelle-Palice en 1987 ;

- trois sites de petite construction navale doivent également cesser leur activité : celui de Bordeaux en 1986, celui de Grand Quevilly en 1987, celui de Villeneuve-la-Garenne en 1991.

Cette restructuration n'aurait pas été possible sans l'aide de l'État. L'ensemble des dépenses engagées est d'environ 2,7 milliards de Francs (en Francs 1997). Le détail du montant des aides à la restructuration est donné dans le graphique suivant.

L'aide financière publique à la restructuration s'est concentrée depuis le début des années quatre-vingts sur trois chantiers : la NORMED, les Chantiers de l'Atlantique et les Ateliers et Chantiers du Havre, qui consomment au total plus de 90 % des crédits dédiés à la restructuration, ce qui correspond respectivement pour chacun d'eux à 84,4 %, 6,4 % et 3,3 %.

2.3.2 Le cas de la NORMED

En 1983, à la demande de l'État, les sites de Dunkerque, La Ciotat et La Seyne-sur-Mer ont été regroupés pour constituer la Société des Chantiers du Nord et de la Méditerranée (NORMED).

Dès la première année, l'État l'a soutenue financièrement. Celle-ci employait à l'époque un effectif total de 10 700 personnes réparties sur les sites de Dunkerque, de La Seyne et de La Ciotat et au sein de son siège social parisien.

L'accompagnement financier de l'État s'est fait en deux périodes :

- de 1983 à la mi-1986, période durant laquelle la NORMED s'est trouvée en situation de quasi commandite publique. La politique du Gouvernement a consisté à accompagner la réduction de ses effectifs, puisque la fermeture des chantiers n'était alors pas envisagée. Entre ces deux dates, les effectifs ont été réduits, progressivement, de 6 500 personnes ;

- mise en liquidation judiciaire de NORMED et fermeture de ses trois sites (Dunkerque, La Ciotat et la Seyne). De mi-1986, date du dépôt de bilan de NORMED, à 1993, date à laquelle les derniers salariés sont sortis du plan social, les Pouvoirs publics ont soutenu financièrement la mise en oeuvre d'un plan social et l'achèvement des navires en cours de construction.

2.4 Les aides à la recherche développement : un effort très modeste.

Sur le plan institutionnel, la construction navale n'est pas identifiée au sein du Budget Civil de Recherche et Développement (BCRD) comme un secteur de recherche disposant d'une ligne budgétaire propre. Elle est, en effet, regroupée avec l'ensemble des matériels de transport terrestre (hors industrie automobile). Cet amalgame est susceptible de conduire à une appréciation erronée de l'effort de recherche propre à cette industrie.

En effet, le secteur combiné « construction navale et autres matériels de transport terrestre », représente près de 1 % du total de la Dépense Intérieure française de Recherche et Développement (DIRD, combinant financement public et financement propre aux entreprises), soit 1,8 milliards de francs. Il est dans sa globalité perçu comme bénéficiant d'une aide publique importante au travers du BCRD.

En réalité, l'accent est mis ces dernières années sur les programmes publics dans le domaine des transports terrestres (tout particulièrement le programme PREDIT, avec un budget annuel d'environ 1,5 milliards de francs). L'aide publique spécifique à la recherche en construction navale s'élève seulement à 15 millions de francs, soit 100 fois moins, pour un effort total de recherche que l'on peut estimer à 20 millions de francs.

Seul le Ministère chargé de l'Industrie manifeste de l'intérêt pour la recherche en construction navale, à laquelle n'est toujours pas attribuée de ligne budgétaire propre. Ce soutien repose sur un petit nombre de responsables concernés et soumis à leur bonne volonté comme à leur effort de persuasion et leur influence au sein de leur ministère : il ne saurait être considéré comme un acquis reconductible d'année en année. Les programmes soutenus sont destinés en priorité à améliorer la compétitivité du secteur (méthodes de fabrication, en particulier).

Cette tendance à n'accorder que parcimonieusement son soutien en faveur de la recherche à une industrie perçue comme traditionnelle, jugée en plus très largement aidée par ailleurs, risque encore de se durcir en période de restriction budgétaire. Le ministère chargé de la Recherche ne manifeste ouvertement aucun intérêt pour la construction navale, ce qui a d'ailleurs conduit IFREMER à renoncer aux recherches qu'il avait entreprises dans ce domaine.

2.4.1 Des résultats, malgré des montants faibles et des moyens dispersés

Si l'aide de l'État n'est pas constante, elle a été parfois décisive. Dans le cadre de la filière du gaz, elle le fut par exemple en deux occasions :

- une aide financière en Recherche et Développement sur 10 ans lors de l'élaboration du procédé membrane a été octroyée par le Ministère de l'Industrie. Elle a permis de mener à terme le projet de développement ;

- le Ministère de l'Industrie en favorisant, à la fin des années 1980, l'investissement de Gaz de France dans le financement du brevet, a relancé l'exploitation de cette innovation.

Au-delà des aspects déjà abordés du financement public de la R&D, la recherche en construction navale souffre en France d'un sérieux déficit d'image, au contraire de la plupart des pays industrialisés. L'enseignement de l'architecture navale et du génie océanique, indissociablement lié à la recherche, figure par exemple, au programme des plus prestigieuses universités aux États-Unis (MIT, Université de Californie, Michigan), au Japon (Université de Tokyo, d'Osaka), en Allemagne (Université Techniques de Hambourg, Hanovre ou Berlin), ou au Royaume-Uni (University College London, University de Glasgow). Ce domaine n'est en France représenté qu'au sein de deux écoles d'ingénieurs : l'ENSTA, ou sa place se fait de plus en plus réduite, et l'École Centrale de Nantes (ECN).

Les recherches intéressant l'hydrodynamique navale sont pratiquement absentes des programmes du CNRS, à l'exception de celles menées au sein de l'ECN et de l'Institut National Polytechnique de Grenoble. Elles sont marginales à l'IFREMER. À l'exception du bassin d'essais des carènes, les moyens d'essais sont inadaptés ou inadéquats. Les structures de navires ne font de leur côté l'objet d'aucune recherche publique.

L'essentiel de la recherche civile française dans ce secteur se fait dans le cadre de l'Institut de Recherches de la Construction Navale (IRCN -Nantes). Association de loi 1901, elle réunit les chantiers privés, les chantiers militaires, le Bureau Veritas, Gaz Transport Technigaz et la Chambre Syndicale des Constructeurs de Navires (CSCN). Elle emploie une vingtaine de chercheurs et s'appuie sur de puissants moyens informatiques pour élaborer et mettre au point les méthodes et les outils de calcul satisfaisant à court et à long terme les besoins de ses membres.

La mission principale de l'IRCN est d'aider les chantiers dans leur phase de conception, par voie de calcul et par voie de mesures, dans les domaines de la diminution des coûts (gain matière, réduction des délais), du comportement mécanique de la structure travaillante à la mer, de l'innovation technologique (navires rapides, composites métalliques). Il réalise des actions de recherche et développement en amont de celles des chantiers navals. L'IRCN met en place et maintient au plus haut niveau des moyens et des spécialités dans de nombreux domaines de compétences (mécanique des structures marines, hydrodynamique appliquée, essais et mesures, CAO-productique, évolutions technologiques, conseil, descripteur de structures mécanosoudées, générateur de surfaces gauches et de modélisations fluides associées). L'IRCN est aussi spécialiste d'optimisation des cuves des méthaniers de « nouvelle génération. L'IRCN participe à des programmes européens dans les cadres ESPRIT.

Avec un budget d'environ 20 MF / an, dont 90 % proviennent de prestations de services et de recherches sous contrat, les vingt ingénieurs et cadres de l'IRCN s'appuient sur le capital de connaissances de cet organisme et sur de puissants moyens informatiques pour élaborer et mettre au point les méthodes et les outils de calcul et de mesure leur permettant de satisfaire les besoins des chantiers français. L'IRCN et ses membres forment ainsi un pôle de compétence et d'expérience qui est une composante majeure du savoir-faire français dans le domaine de la construction navale.

En architecture navale et génie océanique, seules l'ENSTA et surtout l'École Centrale de Nantes (ECN) poursuivent des recherches.

Dans le cadre universitaire, les moyens consentis à la recherche sont faibles en France contrairement à ce qui se passe à l'étranger. Ils sont d'environ 20 millions de francs en moyenne par an pour la construction navale, à comparer aux 1,2 milliards de francs engagés par le ministère des transports japonais. Pour la chaîne du transport maritime, l'Italie investit environ 50 millions de francs par an, le Danemark 40 millions de francs et la Norvège 30 millions de franc, contre 30 à 40 millions de francs pour la France.

On dénombre six bassins de carènes en France : le bassin d'essai des carènes de la DGA à Paris, travaillant à la fois pour le privé et pour le public, le bassin de Vaudreuil, destiné à la DGA, pour les essais de sous-marins et d'hélices, le bassin d'essai en eau profonde d'IFREMER à Brest, très peu utilisé en construction navale, le bassin FIRST à La Seyne-sur-Mer, non utilisé à l'heure actuelle, le bassin de l'École Centrale de Nantes, dont l'extension est à l'étude.

On note que les Chantiers de l'Atlantique, pour leurs essais concernant les paquebots, s'adressent à des centres d'essai étrangers, notamment hollandais.

Compte tenu de la faiblesse du montant de la R&D française, on peut donc regretter que ces moyens soient dispersés, même si des efforts sont effectués afin de les associer (convention « Promehyd »), et si leurs spécialisations respectives les rendent plus complémentaires que concurrents. On retrouve ces redondances pour les études portant sur le calcul de structure et de vibration.

La faiblesse des efforts de R&D menés, réduit l'influence de la France dans les grandes organisations internationales en matière de recherche en construction navale (l'International Towing Tank Committe - ITTC - et l'International Ship and Offshore Structures Congress - ISSC). Dans la course engagée volontairement dans une production de plus en plus technologique, on peut craindre que cette absence ne se traduise par un retard difficilement rattrapable.

2.4.2 Des collaborations européennes en matière de R&D insuffisantes

La comparaison entre la France et le Japon souligne que la recherche et développement français doivent être améliorés autant en montant qu'en organisation. Mais cet effort ne doit pas être mené seul. Les américains, ont, comme nous l'avons w, su favoriser la collaboration technologique entre chantiers américains et les chantiers les plus performants dans chaque domaine. La France doit donc permettre aux chantiers français d'entamer des collaborations au plan international. Des projets européens et français existent déjà.

Les efforts français et européens doivent se concentrer sur une meilleure utilisation des ressources humaines, comme sur l'exploitation des technologies de l'information, afin de conserver l'avantage technologique des pays européens.

Du point de vue européen, on peut déplorer la non-inscription de la construction navale par la commission européenne dans les technologies de pointe du budget des Programmes Cadres de Recherche & Développement (PCRD).

Des moyens existent cependant pour :

- développer les technologies de l'information liant l'ensemble des acteurs de la filière construction navale. Le projet européen MARVEL reprend cet objectif ;

- coordonner les activités de R&D et la formation professionnelle.

La France intervient dans le cadre européen au sein du « Committee for Research and Development in European Shipbuilding » (COREDES), représentant l'ensemble des professions maritimes. Ce comité ne définit malheureusement que des orientations générales de la recherche en construction, sans proposer des projets réels de collaborations, laissés à l'initiative des pays participants.

Dans ce cadre, les Chantiers de l'Atlantique participent à des ateliers de travail visant à améliorer la productivité et à moderniser les chantiers européens. Ils font également partie de programmes de R&D avec des chantiers étrangers, dans le choix par exemple de nouveaux systèmes CAO (projet E3), ou dans le choix d'une programmation efficace (projet « R&D Rococo »). Enfin, au sein du programme « Euroyards » un programme commun d'approvisionnement permet également de réduire les coûts des Chantiers de l'Atlantique.

2.5 Les aides aux financements à l'exportation

Dans le cadre de la construction navale, les aides à l'exportation, suivies par le Ministère de l'Économie et des Finances, prennent trois formes :

- aide publique au financement gérée par la Banque NATEXIS ;

- garantie COFACE ;

- prêts bonifies dans le cadre des protocoles gérés par la Banque NATEXIS.

2.5.1 Aide publique au financement des exportations

L'aide publique au financement consiste en une garantie de versement à la banque prêteuse des écarts de taux d'intérêt. Les banques prêtent l'argent à l'armateur pour construire le bateau. Dans la plupart des cas, cet armateur paie 20 % pendant la construction et 80 % à la livraison. L'armateur rembourse ensuite la banque, suivant des règles qui sont fixées par l'OCDE, c'est-à-dire 8 % sur 8 ans. Ainsi, si le taux d'intérêt du marché est différent du taux de 8 %, l'écart sera remboursé par le gouvernement à la Banque ou en sens inverse la banque remboursera à l'État l'écart constaté, si c'est à son profit.

Les demandes de garantie sont adressées au Ministère de l'Économie et des Finances. Il est fait appel, pour l'instruction des dossiers, au concours de la Banque Natexis, de la Caisse centrale de coopération économique et de la COFACE. Puis, les demandes sont soumises à l'avis de la commission des garanties et du crédit au commerce extérieur. La commission donne un avis sur les demandes de garantie présentées.

L'évolution de la masse de crédits couverts est donnée dans le tableau suivant :

Part des encours concernant la construction navale en millions de francs

Années

Encours moyen

Encours moyen totaux financés par la BFCE

Part dans le total

1990

931

46207

2,0 %

1991

1030

44837

2,3 %

1992

1273

42707

3,0 %

1993

1040

40027

2,6 %

1094

964

33574

2,9 %

1995

680

28106

2,4 %

1996

592

23441

2,5 %

Sources : Banque Natexis, Direction du Trésor

La part des encours dédiés à la construction navale dans le total des encours est relativement stable (entre 2 et 3 %). Par contre, depuis 1990, les encours totaux ainsi que ceux dédiés à la construction navale sont en forte baisse. Le tableau page 72 donne le montant de la dépense publique à ce titre.

On observe que le mécanisme devient moins généreux au cours du temps.

En 1993, le Trésor Public a même réalisé un bénéfice de 22.7 MF. Cette baisse est duc en partie à celle des encours. Mais elle s'explique aussi par la baisse générale des taux. Les différences de taux se sont donc réduites. En 1993, les taux commerciaux sont même devenus plus faibles que le taux garanti.

2.5.2 La garantie de la COFACE

Le deuxième instrument est la garantie de la COFACE. Moyennant paiement d'une prime, la COFACE garantit le prêteur, c'est-à-dire la banque, au cas où les constructeurs ne finiraient pas leurs constructions ou dans celui où un événement politique' notamment ferait que l'armateur ne rembourse pas son crédit. Cela correspond respectivement aux primes à la fabrication et au crédit.

En cas de réalisation de l'un des risques couverts par la police, l'indemnité correspondante est, dans la mesure où le sinistre subsiste, versée à l'assuré six mois après que la COFACE a été informée du sinistre ( ( * )24) .

Le détail des flux financiers entre les assurés et la COFACE est décrit dans le tableau suivant. Il donne à la fois les montants des primes distribuées en cas de sinistre et celui des récupérations. Les éléments sont décomposés par pays acheteur, ce qui permet d'étudier les risques pays pour le secteur de la construction navale.

Garanties COFACE, sinistre et fonds recouvrés (millions de francs)

Sources : COFACE, Direction du Trésor, Calculs CGP

Dans ce tableau, toutes les polices COFACE concernant l'exportation de navires depuis 1981 sont comprises. On constate qu'en apparence ce mécanisme rapporte plus (1 012,1 MF) qu'il ne coûte (709,7 MF).

Les exportations qui ont le plus pesé sur les finances publiques sont celles réalisées vers le Brésil, le Cameroun, la Grèce, la Jamaïque, le Pérou et le Panama. Pour ces contrats, le poids pour les finances publiques a représenté de 2,5 à 20 fois le niveau des primes. D'autres contrats se sont avérés particulièrement rentables, comme ceux correspondant à des exportations vers cinq pays proposant des pavillons de complaisance : Liberia, Bermudes, Antilles néerlandaises et Bahamas. Le Panama est une exception, du fait de deux gros sinistres qui ont eu lieu dans les années 1980. La Malaisie présente aussi un bilan très positif mais les contrats de garantie sont encore très récents. Finalement, le Mexique, la Norvège, l'Indonésie et le Maroc sont dans une situation intermédiaire : beaucoup de sinistres pour un montant élevé de prime.

Des polices courent toujours. Aussi, on ne peut affirmer aujourd'hui que ce mécanisme rapporte plus qu'il ne coûte. D'ailleurs lorsque l'on ne considère que les contrats échus, le dispositif représente une dépense de 692 MF alors que les primes ont été de 648 MF.

En analysant les différentes périodes, ont constate que la COFACE a perdu beaucoup avant 1983 sur des pays comme le Brésil, le Pérou, le Panama, le Maroc et le Cameroun. Depuis, sur les périodes 1984-1986 et 1987-1989, pour lesquelles l'ensemble des contrats conclus est échu, le montant des primes est nettement supérieur au coût des sinistres. Depuis 1990, très peu de sinistres ont concerné les contrats signés dont la majorité n'est pas arrivée à échéance.

Garanties COFACE, sinistre et fonds recouvrés

(millions de francs)

Décomposition par date de conclusion du contrat

Ensemble des contrats signés pour les années

de référence

Primes

(1) -(2) +

(3)

Dont prime

de fabrication

(2)

Dont prime

crédit

(3)

Indemnité

suivant un

sinistre

(4)

Récupération ns après sinistre

(5)

Pertes dues

à un sinistre

(6) - (4) -

(5)

Coût pour les finances publiques

(7) = (6)-(1)

Pertes/ primes

(%) (8) = (6)/

(1)

Avant 1983*

1984-1986*

1987-1989*

Depuis 1990

Ensemble des

contrats échus

213,2 299,2 135,6 364,1

648,0

35,6 108,2 25,9 75,9

169,7

177,6

191,0 109,7 288,2

478,3

1510,4

382,6

244,6

17,0

2137,6

1048,5

270,3

139,0

0,0

1457,8

461,9

124,9 105,9 17,0

692,7

248,7 -174,3 -29,7 -347,1

44,7

217

42

78

5

107

Ensemble

1012,1

245,6

766,5

2154,6

1457,8

709,7

-302,4

Pour ces dates, les contrats concernés sont échus.

Sources : COFACE, Ministère de l'Économie et des Finances, Calculs CGP

Dorénavant, en régime permanent, la COFACE réalise des bénéfices quand elle assure des contrats concernant la construction navale. Il devient alors légitime de se poser la question de la pertinence du niveau de prime.

2.5.3 Les prêts bonifiés dans le cadre des protocoles

Le dernier instrument est la bonification des prêts accordée aux navires rentrant dans le cadre de protocoles. Des protocoles sont signés par la France avec divers pays, afin de leur permettre d'acheter des biens produits en France Ces protocoles sont suivis par le Ministère de l'Économie et des Finances, ne sont pas répartis a priori l'enveloppe par secteur. Certains constructeurs de navires signalent que ce fait pourrait être, dans certains cas, défavorable à leur secteur, car ils négocient leurs contrats de manière beaucoup moins régulière que ce qu'il peut se passer par exemple dans le bâtiment.

Lorsqu'un constructeur peut inscrire son contrat dans un protocole, une partie de l'encours est financé à un prêt très avantageux. Les taux d'intérêts vont de 0,5 % à 6,~ %. Les durées de prêts peuvent atteindre 40 années. Finalement, dans certains cas (rares pour la construction navale), des dons sont effectués. Dans tous les cas, les montants correspondants sont avancés par l'État qui récupère ensuite les intérêts. La Banque NATEXIS est la structure qui gère, pour le compte de l'État ces dossiers. Ces opérations apparaissent en loi de Finances dans un compte spécial du Trésor.

Les prêts ont concerné essentiellement le Brésil, l'Indonésie, le Maroc et le Mexique. Les dons ne concernent que le Malawi : ils ont représenté une dépense inférieure à 2 MF au total. Les montants en jeu sont importants, environ 780 MF sur la période 1981 à 1996, soit de 52 MF par an. La vente de navires marchands correspondante est d'environ 5 170 MF. Le niveau d'aide est donc de 15 %. Sans ces protocoles, les pays concernés n'auraient probablement pas acheté ces navires.

La somme actualisée, depuis 1981, de la dépense publique concernant les protocoles est de 1,1 MdF (1997), soit une moyenne de 70 (1997) par an. Depuis 1991, la moyenne annuelle est tombée à 25 MF (1997) par an.

Dépense publique liée à l'inscription dans les protocoles entre la France et des pays tiers de contrats concernant la construction de navire

Années

Encours total

des contrats

concernant la

construction de

navire « protocolés » (en MF)

Part de l'encours

inscrit dans le

protocole

(%)

Dépenses publiques

liés à la bonification

des prêts dans le

cadre des protocoles

(en MF)

Ratio

Dépenses

publiques/Encours

total (en %)

1981

426,1

20

44,0

10,3

1982

920,0

20

94,4

10,3

1983 1984

303,4

42

93,0

30,6

1088,8

36

95,1

8,7

1985

1911,6

36

314,3

16,4

1991

126,8

60

17,4*

13,7

1992

191,0

45

69,4

36,3

1993***

200,0

80

52,6*

26,3

*Estimation CGP

** Depuis 1993, aucun nouveau contrat n'a été inscrit dans un protocole. Sources : Banque NATEXIS, Ministère de l'Économie et des Finances, Calculs CGP

2.6 La politique d'acquisition des bâtiments de guerre

La France est le seul pays dans le monde pour lequel les constructeurs civils et militaires sont presque complètement distincts. Mis à part le contrat de six frégates construites par les Chantiers de l'Atlantique en 1986, la construction de navires militaires de plus de 1 800 tonnes ne concerne que les arsenaux publics (Direction des Constructions Navales - DCN). La CMN construit des bâtiments de guerre pour l'exportation.

L'étude des plans de charge des principaux chantiers dans d'autres pays souligne les gains que retirent les constructeurs, d'une synergie entre construction civile et militaire. Pour les constructeurs civils étrangers, la commande publique de navires de guerre peut constituer, en cas de dépression sur le marché civil, un marché de substitution. Les grandes puissances navales et militaires savent judicieusement jouer de cette complémentarité pour lisser les carnets de commande de leurs chantiers privés.

En Allemagne, au 31/12/1995, la répartition des commandes à des chantiers civils entre commandes militaires et civiles était la suivante :

Chantiers

Nbre total de navires

dont commandes militaires

Abeking & Rasmusen

3


• 1 chasseur de mine (33.2590 t) faisant suite à 2 autres livrées en 1993 et 1994

Blohm et Voss

3


• 1 frégate type MEKO (3.100 t) pour la Turquie

Bremer Vulkan

5


• 1 frégate FFG de la classe Brandburg (3.600 t)

Thysen Nordseewerke

7


• 1 frégate FFG de la classe Brandburg (3.600 t)


• 2 sous-marins du type 212

Howaldswerke Deuts.

13


• 2 sous-marins du type 212

Source : C.S.C.N

En Italie, Fincantieri, le premier chantier mondial pour la construction de navires de croisière (9 paquebots en commande en 1995), a livré à la marine italienne deux frégates lance-missiles de 4 000 tonnes en 1993 et a construit six frégates pour l'exportation.

En Espagne, Bazan a construit en 1988 un porte-aéronefs pour la marine royale et répond à une commande thaïlandaise d'un porte-hélicoptères. Au Royaume-Uni, les arsenaux ont été également tous privatisés et produisent actuellement des sous-marins (VSEL, repris par GEC en 1996), des porte-aéronefs (VSEL et Govan conjointement) et tous types de navires de surface (Yarrow).

Au Japon, géant de la construction civile, les commandes militaires sont également dévolues aux chantiers civils. Le tableau suivant présente les navires de plus de 1 000 tonnes en commande ou mis en service depuis 1994.

Chantiers

Navires en commande ou livrés depuis 1994

Mitsui


• 1 porte-hélicoptères d'assaut LPD (8.900 t)

Mitsubishi


• 2 sous-marins (2.400 t)


• 2 destroyers lance-missiles type Kongo (7.200 t)


2 destroyers lance-missiles type Murasame (4.400 t)

Kawasaki


• 3 sous-marins (2.700 t)


• 1 sous-marin (2.400 t)


• 1 navire-école (4.200 t)

Ishikawjima Harima


• 1 destroyer lance-missiles type Kongo (7.200 t)


• 1 destroyer lance-missiles type Murasame (4.400 t)

Nippon Kokan


• 2 dragueurs de mines (500 t)

Source : C.S.C.N

Enfin, la Corée du Sud se lance dans un programme naval important. Il comprend la livraison de huit sous-marins de type HDW pour 1994-2000 à Daewoo, de quatre sous-marins de poche (150 t) à Hyundaï et une commande commune de douze destroyers lance-missiles (3 500 t) pour 1996-2000.

La distinction entre civil et militaire restreint donc le marché des constructeurs français. Cette séparation est un désavantage lorsque le plan de charge civil baisse, ce qui est fréquent dans un secteur cyclique. C'est l'une des causes de la vulnérabilité de la construction navale civile française.

3. La pertinence et l'efficacité de l'aide directe à la construction de navires marchands

3.1 Dépense publique par emploi sauvé et part de l'aide dans la valeur ajoutée du secteur

Pour la période 1991-1994, on détermine le niveau d'aide par emploi. On considère à la fois l'emploi dans la construction de navires civils ( ( * )25) et l'emploi induit par ce secteur, c'est-à-dire tenant compte des fournisseurs.

Montant des aides, emploi, et niveau des aides

par emploi en moyenne de 1991 à 1994

(en francs 1991)

Aides

dispensées*

(MF/an)

Emploi dans la

construction

civile

Emploi

induit hors

secteur

Emploi total

français lié au

secteur

Aides/emploi (Francs/ans)

Aides/emploi total français (Francs/an)

815

7.057

10.500

17.557

115.000

48.000

* On prend en compte les aides directes à la construction navale, à la restructuration du secteur et à la R&D. Ne sont pas pris en compte les montants budgétaires alloués au titre de la bonification des crédits exports. Ces aides ne concernent que le sous-secteur construction de navires civils (351B).

Source : INSEE, Sessi

Le niveau de subvention est de l'ordre de 115 000 F/an par emploi lorsque l'on ne considère que l'emploi dans le secteur de la construction de navires civils. Le niveau est prés de trois fois moins important lorsque l'on considère, en plus, les emplois induits on atteint une dépense de l'ordre de 48.000 F/an.

Lorsque l'on compare ce coût au niveau de subvention par emploi dans d'autres secteurs, on constate que le montant est nettement plus élevé que ce soit pour l'indicateur aides/emploi ou aides/emploi total, comme le montre le tableau suivant.

Niveau des aides par emploi pour plusieurs secteurs

pour l'année 1992* (en francs 1992)

Aide/effectif du secteur

Aide/effectif total**

Aérospatiale

93.600

31.400

Électronique

39.600

14.800

Pharmacie

500

130

Biens d'équipement

1 600

660

Matériel de transport terrestre

300

76

Chimie de base

5.400

870

Construction de navires civils***

110.000

45.000

* Les derniers chiffres connus concernant la répartition sectorielle des aides a la R & D sont ceux de 1992.

** La prise en compte des emplois étrangers permet de tenir compte du contenu en importation.

*** Pour la construction navale, on garde la moyenne sur la période 1991-1992.

Sources : INSEE, Sessi, Ministère de la Recherche, Observatoire des Sciences et des Techniques, Calculs CGP.

La construction de navires civils est donc soutenue d'environ 20 % de plus que l'Aérospatiale en termes d'aide par emploi du secteur. Ce secteur est aidé de l'ordre de trois fois plus que l'électronique, le troisième secteur le plus aidé. Le niveau d'aide sectoriel est sans commune mesure avec ceux ces autres secteurs, comme la pharmacie, la chimie de base, les biens d'équipements et la construction de matériel de transport terrestre.

Niveau des aides rapporté aux chiffres d'affaires et à la

valeur ajoutée pour plusieurs secteurs en 1992

Aide/Chiffre d'affaires consolidé

Aide/Valeur ajoutée

Aérospatiale

9.,26

27,58

Électronique

4,48

12,59 ,

Pharmacie

0,03

0,12

Biens d'équipement

0,20

0,54

Matériel de transport terrestre

0,02

0,10

Chimie de base

0,24

1,03

Construction de navires civils*

13**

44***

* Pour la construction navale, on garde la moyenne sur la période 1991-1994.

** Le niveau de subvention dépasse les 9 % car il n'y a pas une parfaite concordance dans le temps entre le champ des subventions et celui des bateaux aidés. Cela rappelle que ces éléments ne sont qu'indicatifs.

*** Le niveau d'aide, dans le secteur de la construction de navires civils atteint 44 %.

Ce chiffre est différent de celui donné par la commission européenne car elle considère, non pas le seul secteur de la construction de navires civils, mais l'ensemble du secteur construction navale ( ( * )26) .

Sources : INSEE, Sessi, Ministère de la Recherche, Observatoire des Sciences et des Techniques, Calculs CGP.

Comme le montre le tableau précédent, près de la moitié de la valeur ajoutée de construction de navires civils provient des aides, ce qui illustre le volontarisme de l'État.

La politique d'aide à la construction de navires marchands permet bien de maintenir un outil industriel, mais à un coût élevé.

Le secteur le plus aidé après la construction de navires civils et l'aérospatiale qui l'est de près de 40 % moins. Ce niveau d'aides est très élevé, mais il faut souligner que sans elles, le secteur ne pourrait subsister. Aussi, chaque franc dépensé permet de créer 2,3 F de richesse, soit 1,3 Francs net. Le bilan de l'opération et donc positif.

3.2 Une cogestion du système d'aides à la commande par les constructeurs et les pouvoirs publics

3.2.1 La procédure d'attribution pour le constructeur

Les armateurs attendent que le chantier demande des aides. Celles-ci sont aléatoires, aussi bien sur leur délai que sur leur montant. Ils consultent constamment les chantiers susceptibles de construire le ou les navires qu'ils ont en projet. Ces consultations peuvent durer plusieurs mois, voire plusieurs années, toutes ne se concrétisant pas.

Dans un premier temps, les armateurs demandent des études de prix sommaires. Ensuite, les projets devenant un peu plus précis, ils demandent le prix de bateaux avec des spécifications précises. La réponse du chantier a un coût : de l'ordre de 10 MF.

Dans ces deux cas, les chantiers sont conduits à répondre à ces consultations en donnant le plus souvent des indications de niveau de prix qui prennent en compte l'aide susceptible d'être attribuée, sans que la puissance publique ne soit engagée. En France, les chantiers informent régulièrement les services du Ministère de l'Industrie de ces offres. Ce dialogue permanent et très en amont permet aux chantiers d'estimer approximativement le niveau d'aide qu'ils recevront.

Puis l'armateur demande une offre de prix dans une consultation formelle. Le constructeur doit alors négocier avec l'État l'aide et le financement.

La plupart du temps, le contrat est signé entre l'armateur et le chantier après fixation de l'aide. Dans une minorité de cas, les constructeurs passent des contrats optionnels avec les armateurs. Les contrats comportent une clause d'annulation liée à l'obtention de l'aide.

Par ailleurs, le nombre de contrats est très faible. Un très gros chantier comme celui de l'Atlantique produit une vingtaine d'étude de prix par an, une dizaine de réponses à la demande de prix d'un bateau avec des spécifications précises, et deux à trois consultations formelles. Le nombre de contrats effectivement signés est encore plus réduit. Par exemple, pour les Chantiers de l'Atlantique le nombre de contrats de paquebot décrochés de 1985 à nos jours est de huit. Toutes catégories confondues, le nombre est de cinq, depuis fin 1994.

3.2.2 La procédure d'attribution vue des pouvoirs publics

Lorsque le chantier reçoit une consultation qui présente de fortes probabilités d'aboutir à un contrat ferme et à une date favorable, il adresse au Ministère de l'Industrie une demande formelle d'aide.

Après analyse du coût de revient prévisionnel fourni par le chantier, le Ministère de l'Industrie détermine le montant de l'aide. Cette attribution permet aux chantiers français de vendre au prix du marché un navire construit au coût français dans la limite des 9 %. Le Ministère de l'Industrie consulte alors le Ministère en charge du Budget.

Depuis 1985, pour les grands chantiers, chaque opération fait l'objet systématiquement d'un arbitrage du Premier ministre. À chaque fois, l'alternative est présentée comme radicale ou dramatique : va-t-on ou non fermer le chantier ? Le Ministère du Budget est systématiquement contre les aides. Le montant du ministère de l'Industrie est la plupart du temps retenu, mais est parfois diminué. L'importance de l'enjeu étant bien comprise, les délais dans la prise de décision sont faibles (inférieurs à la quinzaine de jours).

Le Ministère de l'Industrie connaît à la fois les prix de marché des navires et les coûts de construction en France. Ils peuvent ainsi déterminer le niveau d'aide. Ensuite, le nombre de décisions est très limité. Par ailleurs la quasi-totalité de l'attribution de l'aide se concentre sur 5 chantiers, 80 % sur les chantiers de l'Atlantique 15 % sur Le Havre et 5 % principalement sur Leroux et Lotz, CMN et Piriou. Le dispositif ne correspond donc pas à une gestion de procédure mise en oeuvre par un service d'allocation (comme c'est le cas pour les aides aux PMI).

3.2.3 Un système proche de la cogestion

Le système est en fait proche d'une cogestion : peu d'acteurs, peu d'aides, des montants très importants. Il reste que, lors de la fixation de l'aide, le Ministère de l'Industrie s'assure de l'amélioration de la productivité du chantier. Ainsi, dans le cas des Chantiers de l'Atlantique, principal bénéficiaire de l'aide, l'amélioration de productivité a fait l'objet d'un engagement informel de la direction du chantier. Le ministère de l'Industrie reçoit des éléments de gestion et des indicateurs de productivité. Ainsi les gains de productivité étaient de 3 % aux chantiers de l'Atlantique de 1987 à 1994. Ils sont depuis effectivement de 6 %.

D'un côté, le système d'octroi de l'aide est particulièrement souple. Il a le mérite de laisser l'initiative de la démarche commerciale aux chantiers. C'est lors de la négociation des termes du contrat que le Ministère de l'Industrie intervient pour fixer, dans la limite des 9 %, le niveau de l'aide. L'aide publique permet d'assurer une part significative de la valeur ajoutée de ce secteur, mais elle ne permet pas de codéfinir très significativement les options stratégiques. Aucune relation contractuelle ne lie l'État et les entreprises au-delà de la construction des navires. Les accords en termes de gains de productivité ne sont qu'informels.

Comme le montre la description de la procédure et comme le rappellent plusieurs acteurs, les pouvoirs publics ne définissent le niveau de l'aide que très tardivement dans la négociation du contrat. Toutefois, il ne semble pas que des contrats aient été perdus de ce fait. Lorsque la décision arrive après la fin de l'option, dans les faits, le contrat ou l'option a toujours été prolongé du délai nécessaire.

Il ne semble pas évident que l'accélération de la prise de décision changerait radicalement les données du problème.

3.3 Bilan général du système d'aides directes

La construction navale française, à l'instar de ce qui se pratique dans le monde est substantiellement aidée, un peu moins que nos concurrents toutefois. En cela, le volontarisme de l'État est très important. Les masses budgétaires engagées sur ce secteur sont indispensables à sa survie dans les prochaines années.

La construction navale privée s'est restructurée et spécialisée avec l'aide des pouvoirs publics. Depuis 1976, les effectifs sont passés de 32 500 à 5 800 personnes. Cette restructuration n'aurait pas été possible sans l'aide de l'État. L'ensemble des dépenses engagées pour les restructurations est de l'ordre de 2,7 MdF (en Francs 1997).

La création puis la fermeture de la NORMED a sans doute coûté plus que ce qui était nécessaire. La fermeture de ce site et de quelques autres plus petits ne laisse en France que deux sites civils de grande construction navale : un grand chantier à Saint-Nazaire, et un chantier au Havre, qui construit des navires de moyen tonnage.

Les restructurations, en privilégiant les chantiers de l'Atlantique au détriment de la NORMED, ont permis le développement d'une industrie navale spécialisée dans des navires de haute valeur ajoutée. Pour les finances publiques, elles ont aussi permis de baisser significativement l'intensité des aidés à ce secteur.

Les mesures de restructuration ont permis d'améliorer la productivité du secteur de 13,4 % entre 1976 et 1991. Cependant, lorsque l'on effectue une comparaison internationale, on observe que la politique d'aide publique à la construction navale ne permet pas de disposer d'entreprises suffisamment productives, alors que, la productivité est un des éléments clés de la survie du secteur.

Finalement, en cas de ratification de l'accord de l'OCDE, le construction navale française disparaîtra probablement à très court terme. La situation serait encore plus grave si les pays ne respectaient pas l'esprit de l'accord. Les pays ayant des systèmes de soutien public concentrés sur les aides au financement comme les États-Unis ou des politiques d'aides à la R&D très ambitieuses, comme le Japon seront probablement très avantagés. Les pays possédant un fort marché intérieur (cas des États-Unis pour le cabotage), peuvent fausser l'accord et inciter à des comportements non coopératifs.

CHAPITRE 4 - DES PERSPECTIVES TRÈS SOMBRES POUR LA CONSTRUCTION NAVALE FRANÇAISE

1. Une décroissance des plans de charge civils et militaires

1.1 La chute du carnet de commandes civiles

Le plan de charge des quatre grands chantiers à la mi-1997 et pour les deux prochains semestres est évalué comme indiqué ci-après.

Plan de charge des chantiers de grande construction navale civile

Situation au 09-97

Navires

t.b.c (1)

mi-97

fin 97

mi-98

C. de l'Atlantique

Paquebot F 31 "Vision"

95188

32100

7000

0

Paquebot G 31 "Paul Gauguin"

31200

4400

0

0

Paquebot H31 "R-One"

48320

35700

13900

0

Paquebot I 31 "R-Two"

48320

48000

32500

9000

Paquebot J31 "Festival Cruise"

67000

67000

67000

46500

Navire sismique M31

18750

18750

18750

11850

A.C.H

Chimiquier n° 294

19200

7000

3200

0

Chimiquier n° 295

19200

15400

13300

7200

Chimiquier n° 296

19200

16000

16000

16000

Leroux et Lotz

NGV "Goteland"

11000

9900

7000

3500

Paquebot "Le Levant"

8800

5400

3400

1300 0

C.M.N

Ferry "Belle Isle"

2250

1800

600

Totaux

388428

261450

1826501

95530

nombre de mois (2)

17

12

6

Source : C.G.P d'après chantiers et C.S.C.N

(1) carnet de commandes en cours

(2) sur la base d'une production annuelle de 180 kh

À la fin de 1997, il ne restera que 12 mois de charge (47 % du carnet de commandes en cours). D'ores et déjà, les Chantiers de l'Atlantique ont pris des mesures de chômage technique.

À la fin du premier semestre 1998, en l'absence de nouvelles commandes, il ne resterait que 6 mois de charge (25 % du carnet de commandes en cours). Dans l'éventualité de la réalisation de la commande en cours de négociation de deux paquebots « Renaissance » aux Chantiers de l'Atlantique, il resterait 12 mois de charge mi-98.

La situation à court terme est donc particulièrement préoccupante pour les chantiers civils. La situation des arsenaux l'est également.

1.2 La baisse des plans de charges des arsenaux

La décroissance sensible (20 GF en 1990, 14 GF en 1996) des crédits de paiement alloués à la Marine nationale a rendu nécessaire un meilleur contrôle des programmes d'armement. Dès 1992, la réorganisation des constructions navales militaires a été entreprise, en distinguant les tâches étatiques de maîtrise d'ouvrage et les fonctions industrielles. Une nouvelle impulsion a été donnée depuis 1995-1996.

La loi de programmation 1997-2002 permet de prévoir les plans de charge des sept établissements de la DCN qui réalisent les constructions neuves, la modernisation et l'entretien de la Marine Nationale. Ils traduisent la tendance recherchée à la spécialisation des implantations industrielles. Les activités de la DCN sont précisées ci-après, avec l'indication des effectifs et de la charge (nombre d'heures ouvrées) en 1996.

- Brest : construction des grands bâtiments, refonte, soutien de la force océanique stratégique (FOST), entretien de la flotte de surface : 31,4 % de la charge totale et 26,8 % de l'effectif total de la DCN. En 1996, la charge de DCN Brest (7500 milliers d'heures) s'est répartie à parts égales entre l'entretien (FOST et flotte de surface), les constructions neuves et divers dont l'exportation. En 2000, l'entretien devrait constituer 80 % de la charge, laquelle n'atteindrait que 46 % de celle réalisée en 1996 (à cause d'une diminution de 82 % de la charge constructions neuves et divers par rapport à 1996). Une reprise de l'activité est possible à partir de 2000 pour atteindre près de 5800 milliers d'heures en 2002, en raison, d'une part, des inspections périodiques (IPER) des SNLE, qui permettraient d'atteindre la charge entretien des années 1993 à 1997 (4000 milliers d'heures environ), et d'autre part si un transport de chalands de débarquement (TCD) était construit. Dans le domaine de l'exportation, la charge en 1998 sera augmentée de 150 milliers d'heure pour le carénage de cinq chasseurs de mines d'occasion vendus à la Turquie. Par ailleurs, les efforts déployés par Brest en vue d'une diversification dans le domaine de l'Offshore se sont concrétisés par un contrat avec la société Sedco Forex, pour la construction de deux plates-formes semi-submersibles.

- Toulon : soutien et modernisation de la flotte de surface et des sous-marins nucléaires d'attaque (SNA), soutien logistique, entretien et stockage des munitions : 18,6 % de la charge totale et 19,4 % de l'effectif total de la DCN. La charge de DCN Toulon consiste essentiellement en l'entretien (flotte de surface, SNA, munitions) et reste voisine de 3000 heures sur les 10 dernières années et celles de la loi de programmation 1997-2002. Par rapport à la charge totale, l'entretien représentait 72 % en 1996, et devrait atteindre 91 % en 2000.

- Cherbourg : études, construction, refonte de sous-marins : 16,3 % de la charge totale et 18,9 % de l'effectif total de la DCN. Les études et les constructions neuves constituent la quasi-totalité de la charge de DCN Cherbourg. Cette charge décroît très sensiblement depuis 1991 jusqu'en 2002 pour tomber à 28 % du niveau de 1991. L'exportation (construction de trois sous-marins pour le Pakistan, livraisons de 1999 à 2002) permet à la charge de se maintenir à un niveau quasi-constant voisin de 3750 heures entre 1994 et 1998. Par ailleurs, la marine chilienne a notifié à la DCN le contrat pour la fourniture de deux sous-marins diesel électrique de type Scorpène. Les deux sous-marins seront construits à Cherbourg et Carthagène dans le cadre d'un accord de coopération entre la DCN et l'espagnol Bazan.

- Lorient : construction de bâtiments de taille moyenne, entretien et refonte, matériaux composites : 16,4 % de la charge totale et 13,4 % de l'effectif total de la DCN. Depuis 1993, la charge des activités diverses dont l'exportation, égale puis dépasse celle des études et constructions neuves pour la Marine Nationale (jusqu'à représenter plus du double en 1995 et 996). Cette activité d'exportation consiste en la réalisation du programme « Bravo » (livraisons de 1996 à 1998), de la construction de trois chasseurs de mines ou de leurs tronçons pour le Pakistan, (livraisons en 1995, 1996 et 1997). La charge totale devrait toutefois diminuer de plus de moitié entre 996 et 1998. Une reprise de l'activité exportation est prévue à partir de 1998, en raison de l'exécution du programme « Sawari 11 » (construction de deux frégates antiaériennes de 3550 tonnes pour l'Arabie Saoudite, à livrer en 2001 et 2002) avec la commande d'une troisième frégate (notifiée à la mi-1997). L'activité études et constructions neuves reprendrait à partir de 1999 si la construction des frégates « Horizon » se faisait, conformément à la loi de programmation 1997-2002 : commandes d'une en 1998, une en 2000. La charge totale atteindrait ainsi en 2000-2002 le niveau de celle de 1997.

- Indret : conception, réalisation, maintenance d'appareils propulsifs et chaufferies nucléaires : 8,7 % de la charge totale et 7,1 % de l'effectif total de la DCN. La charge totale, dont l'essentiel est constitué par les études et constructions neuves pour la Marine Nationale (de 90 % en 1991 à 58 % en 2000), diminue de moitié entre 1996 et 2000. La part des « divers », dont l'exportation, maintient la charge à un niveau quasi-constant entre 1991 et 1996, en raison de la réalisation des appareils propulsifs des six frégates du programme « Bravo ». Une reprise de l'activité « études et constructions neuves » est prévue à partir de 2000, en raison de la réalisation des appareils propulsifs et des chaufferies nucléaires des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins de la nouvelle génération ( SNLE NG) et du développement du sous-marin nucléaire d'attaque futur (SNAF), inscrits à la loi de programmation 1997-2002. La charge totale correspondrait alors en 2002 aux deux tiers de celle de 1996.

- Ruelle : maîtrise d'oeuvre de systèmes complexes, mécanismes de systèmes, cybernétique navale, munitions : 4,4 % de la charge totale et 6,3 % de l'effectif total de la DCN. En 2002, la charge totale ne devrait être que le tiers du niveau de 1990. La part des divers dont l'exportation ne cesse de croître, de 27 % de la charge totale en 1990, pour égaler la charge études et constructions neuves Marine Nationale en 1997 (43 % de la charge totale) et atteindre 68 % de la charge totale en 2000. L'importance relative des exportations s'explique par l'exécution du programme « Sawari II » complété par la commande notifiée à la mi-1997 d'une troisième frégate équipée d'un système d'armes renforcé.

- Papeete : maintenance opérationnelle de la flotte du Pacifique, entretien des installations à terre de la Marine Nationale en Polynésie et en Nouvelle Calédonie : 1,5 % de la charge totale et 1,6 % de l'effectif total de la DCN.

La société de droit privé DCN International commercialise à l'export les produits et services de la DCN, met en oeuvre les alliances et coopérations industrielles et commerciales demandées par la DCN.

L'étude du plan de charge des dix années passées et de celui résultant de la loi de programmation 1997-2002, conduit aux constatations suivantes :

La charge totale de la DCN n'a décru que très légèrement entre les années 1990 et 1996 et atteint environ 24 millions d'heures en 1996. Entre 1996 et 1999, la charge totale devrait en revanche décroître de manière importante, jusqu'à 15 millions d'heures pour 1999 (soit 62 % de la charge de 1996 dans les années 1999 et 2000). En raison d'une décroissance plus rapide, les études et constructions neuves ne représenteraient plus en 1999 et 2000 que le tiers de la charge totale, alors qu'elles y participaient pour 60 % environ dans les années 1987 à 1992. L'entretien pour la Marine nationale ne décroît que très peu sur les dix dernières années et sur celle de loi de programmation militaire (1997-2002). Il atteindrait 48 % de la charge totale en 1999, alors qu'il en représentait auparavant le tiers.

2. Des perspectives sombres pour 1998 dans la construction navale française

La situation des chantiers français civils est critique à court terme. Le plan de charge en constructions neuves de la DCN est en fort recul. Le graphique suivant représente l'évolution programmée en 1997, pour 1998, du carnet de commandes de construction navale civile (en millions de t.b.c), et des plans de charge de la DCN (en millions d'heures).

3. Une situation aggravée par l'éventuelle signature de l'accord de l'O.C.D.E

3.1 L'accord de l'OCDE sur les conditions normales de concurrence dans l'industrie de la construction et de la réparation navale marchande

L'» Accord sur les conditions normales de concurrence dans l'industrie de la construction et de la réparation navale marchande », conclu en 1994, vise en théorie à harmoniser, au moyen de dispositions contraignantes, la concurrence dans l'industrie de la construction navale des pays de l'OCDE. La mise en oeuvre de l'accord abolirait les subventions directes (autorisées en Europe à hauteur de 9 %), encadrerait la bonification des prêts (T.I.C.R) et les pratiques de prix inéquitables (loi anti-dumping). L'accord de l'OCDE comporte trois éléments fondamentaux :

1. la suppression des subventions, ainsi que des réglementations et pratiques officielles en faveur de l'industrie de la construction navale, excepté :

- les aides à la recherche et développement : recherche fondamentale, recherche industrielle de base (dans la limite de 50 % des coûts éligibles), recherche appliquée (35 %), développement (25 %) ;

- les crédits à l'exportation de navires : un taux d'intérêt commercial de référence remplacera le taux d'intérêt fixé jusqu'alors à 8 pour cent, et le délai de remboursement sera porté de 8,5 à 12 ans, pour tenir compte des modalités réelles de financement des navires ;

- les crédits intérieurs remplissant des conditions analogues ;

- les aides à la restructuration ne sont généralement pas autorisées, sauf pour la Corée du Sud, la Belgique, l'Espagne et le Portugal, en vertu de la clause de maintien des droits acquis (avec un délai de paiement fixé impérativement au 31 décembre 1998, révisable après un délai de 3 ans) ;

- les aides destinées aux travailleurs perdant leur emploi ;

2. un Code des pratiques préjudiciables en matière de prix, qui applique pour la première fois les règles antidumping à la construction navale. Compte tenu de la non-homogénéité des navires, il reste difficilement applicable. Les constructeurs, en jouant sur les caractéristiques techniques de tel navire par rapport à un autre, pourront toujours nier la comparaison sur les coûts de revient engagés ;

3. 3. un mécanisme contraignant de règlement des différends devant un Groupe spécial international (sauf pour les crédits à l'exportation), en cas de violation des règles concernant les subventions et/ou du Code des pratiques préjudiciables en matière de prix, ce mécanisme étant assorti de mesures correctrices et de sanctions.

L'accord ne remet pas en cause le Jones Act américain, qui institue la réservation du trafic de cabotage aux États-Unis au profit des armateurs américains. Le libéralisme qui inspire cet accord, on le voit, est asymétrique.

Cet accord ne couvre qu'environ 80 pour cent du marché mondial de la construction navale. Le Brésil, la Chine, la Pologne, la Russie et l'Ukraine constituent les exceptions les plus notables de son champ d'application.

3.2 Étude d'impact de l'accord de l'OCDE

Si les niveaux d'aides sont comparables, les structures d'aides sont profondément différentes d'un pays à l'autre. C'est principalement selon la structure de celles-ci que l'éventuelle signature de l'OCDE aura un impact plus ou moins important sur un pays.

L'accord de l'OCDE, s'il est signé, implique la suppression des aides directes relatives aux coûts de production et à la perte liée au contrat (autorisées actuellement par la septième directive européenne à hauteur de 9 % du coût des navires). Il prévoit également d'encadrer l'aide sous forme de prêts bonifiés, par l'utilisation d'un Taux d'Intérêt Commercial de Référence ( ( * )27) (TICR).

Évaluer l'impact de l'accord de l'OCDE nécessite de déterminer les effets du lissage des aides aux prêts bonifiés, par l'utilisation du TICR. En pratique cette mesure implique le calcul dans chaque pays d'une fourchette de taux sur la base des taux de références (PIBOR et taux interbancaires) et de déterminer les différences entre ces taux, et les taux offerts par les administrations des finances. Ce problème technique n'est pas abordé dans le rapport Thiesen.

La partie 3.2.1 va évaluer l'impact de l'accord avec les éléments fournis dans le rapport Thiesen. Dans une deuxième partie 3.2.2, la méthode est adaptée aux cas japonais et coréens, ces pays représentant près des deux tiers du marché. Elle se fonde sur l'évolution des masses budgétaires et ne donne, dès lors, qu'une estimation indicative.

3.2.1 Impact de l'accord sur les niveaux d'aide : les États-Unis seront avantagés

Le rapport Thiesen (1995) s'est attaché à estimer les conséquences qu'aurait la signature de cet accord sur le niveau des aides à la construction navale dans les principaux pays européens et les États-Unis.

Niveau des aides avant et après la mise en place de l'accord de l'OCDE

(exprimé en pourcentage du coût de construction des navires

suivant les législations des pays en 1994)

Allemagne

Danemark

Espagne

France

Royaume -Uni

États-Unis

Avant l'accord (1)

14,5 %

28,7 %

29,7 %

13,4 %

15,9 %

21,6

Niveau d'aide après la mise en oeuvre de accord de l' O.C.D.E (2)

7,2 %

9,2 %

9,9 %

5,8 %

4,5 %

8,9

Variation

(3) - (2) - (1)

- 7,30 %

- 19,50 %

- 19,80 %

- 7,60 %

- 11,40 %

- 12,7

Source : Rapport Thiesen Securities, calculs CGP

Les pays ayant principalement recours à des mécanismes d'aides financières continueront à subventionner leur secteur relativement plus que les autres. Ceux qui financent principalement leur construction navale par des aides directes verront leur niveau d'aide baisser fortement. Aussi, la France va rester l'un des pays dont la construction navale est la moins subventionnée :

5,8 %, contre 9,9 % pour l'Espagne, 9,2 % pour le Danemark, 8,9 % pour les États-Unis et 7,2 % pour l'Allemagne, même si ce n'est pas le pays qui connaît la plus forte baisse du niveau de subvention.

Les modalités de bonification des prêts deviennent le facteur essentiel du financement public. Ils expliquent les différences de niveau de subvention ( ( * )28).

Pour analyser précisément l'impact que cet accord aura sur la compétitivité relative des chantiers français, il faut estimer le comportement des entreprises.

Suite à cet accord, si les entreprises souhaitent maintenir leur bénéfice, elles seront obligées d'augmenter leurs prix. Plus les prix augmentent, plus les parts de marché sont menacées. Le tableau suivant donne les hausses de prix pour les pays considérés.

Évolution des prix en cas de respect de l'accord

Allemagne

Danemark

Espagne

France

Royaume -Uni

Etats-Unis

Avant l'accord (1)

14,5 %

28,7 %

29,7 %

13,4 %

15,9 %

21,6

Niveau d'aide après la mise en oeuvre de l'accord de l' O.C.D.E (2)

7,2 %

9,2 %

9,9 %

5,8 %

4,5 %

8,9

Hausse du prix

(3)- 1-(2)-1

1- (2)

+ 8,5 %

+ 27,3 %

+ 28,2 %

+ 8,8 %

+ 13,6 %

+ 16,2 %

Source : Rapport Thiesen Securities, calculs CGP

Les pays dont le niveau d'aides sera le plus réduit, connaîtront la hausse des prix la plus importante. Les prix des chantiers français augmenteront donc moins que les prix de ses concurrents.

Les aides directes apparaissent nettement dans les lois de finances. Elles sont donc facilement contrôlables. Par contre, les aides au financement sont incluses dans les budgets globaux qui ne détaillent pas leurs interventions au niveau sectoriel. Nous examinons alors un scénario extrême dans lequel la bonification des prêts à la construction navale ne disparaît pas, alors que les aides directes sont supprimées (Respect Partiel ). Dans ce cas les deux tableaux précédents sont profondément modifiés.

Évolution des prix en cas de respect partiel de l'accord

(maintien des bonifications des prêts) :

les États-Unis seraient très avantages

Dans ce cas, excepté pour les États-Unis, la variation des aides et la hausse des prix sont à peu près les mêmes pour les pays européens. La France ne voit donc pas sa position concurrentielle nettement dégradée par rapport à ses partenaires - européens. Par contre, les États-Unis sont très significativement avantagés.

Les États-Unis mettent en place un dispositif législatif leur permettant d'obliger les autres pays à appliquer de manière restrictive l'accord, tout en gardant leur système de crédit export. Le scénario ne manque donc pas d'un certain réalisme.

3.2.2 Impact de l'accord de l'OCDIZ sur les masses budgétaires versées au secteur de la construction navale

Il est plus difficile d'estimer l'impact de l'accord sur le Japon et la Corée. Là encore, nous allons recourir à une méthode qui ne donne qu'une estimation. On détermine l'impact de l'accord de l'OCDE sur les masses budgétaires. Les aides directes sont supprimées, par contre les politiques d'abandon de créances et de recherche et de développement restent inchangées. Il suffit dès lors d'estimer les aides financières. Lorsque 1'on calcule la moyenne de l'impact de l'accord de l'OCDE sur les aides financières des six pays considérés, on observe que 45 % des aides financières sont éliminées. Ce taux est appliqué aux aides financière coréennes et japonaises.

Effet de la mise en place de l'accord pour la Corée du Sud et le Japon

sur les masses budgétaires

Base 100 avant l'accord de l'OCDE

Aides directes

Aides au Financement*

Abandons de créances

R/D

Total

Avant l'accord

Corée du Sud

0,0

60,3

39,7

0,0

100

Japon

5,7

27,4

0,0

66,9

100.

Respect intégral

Corée du Sud

0,0

33,3

39,7

0,0

73,1

Japon

0,0

15,1

0,0

66,9

82

Respect partiel

Corée du Sud

0,0

60,3

39,7

0,0

100

Japon

0,0

27,4

0,0

66,9

94,3

* l'aide financière est estimée à 50 % de l'encours des contrats bonifiés. Les résultats finaux sont peu sensibles à ce ratio.

Source : Shipbuilders Council of America, calculs CGP

En appliquant la règle précédente, la Corée du Sud et le Japon voient leurs aides au financement passer respectivement à 33,1 et 15,1, au lieu de 60,3 et 27,4 (en base 100 avant l'accord). En cas de non-respect intégral l'accord, ces aides au financement ne changent pas. On compare les niveaux d'aides au niveau initial pour les six pays selon les deux scénarios.

Impact de l'accord de l'OCDE sur le niveau d'aide - Base 100 avant l'accord

Respect intégral

de l'accord

Corée du Sud

73,1

Japon

82,0

Allemagne

49,7

Danemark

32,1

Espagne

33,3

France

43,3

Royaume-Uni

28,3

États-Unis

41,2

Respect partiel**

de l'accord

Corée du Sud

100

Japon

94,3

Allemagne

49,7

Danemark

71,8

Espagne

75,1

France

43,3

Royaume-Uni

43,4

États-Unis

100,0

* Pour les six pays autres que le Japon et la Corée, cela correspond à 1 - (2)/(l) du tableau « Évolution des prix en cas de respect de l'accord ».

** Pour ces six pays, cela correspond à 1 - (2)/(l) du tableau « Évolution des prix en cas de respect partiel de l'accord ».

Source: Shipbuilders Council of America, Rapport Thiesen, calculs CGP

Si le respect est intégral, la situation de la France n'est pas compromise par rapport à ses partenaires européens ou américains. En revanche, la Corée et le Japon sont très fortement avantagés, alors qu'à eux deux ils contrôlent 70 % du marché de la construction navale.

Si le respect de l'accord n'est que partiel, la France se retrouve très désavantagée, et même les pays le plus désavantagé de la liste des pays. Les pays les plus avantagés, outre les deux pays asiatiques, sont les États-Unis, le Danemark et l'Espagne.

3.3 Une autre faiblesse de l'accord de l'OCDE est qu'il ne s'applique pas à des pays particulièrement dynamiques

Des pays non couverts par l'accord de l'OCDE émergent parmi les constructeurs navals les plus dynamiques. Leur rôle pourrait s'accroître encore à l'avenir. Ces pays développent leurs capacités et améliorent leurs, produits. Huit pays construisent 90 pour cent du tonnage mondial hors OCDE : Chine, Taiwan, Brésil, Croatie, Singapour, Roumanie, Russie, Ukraine. La Chine, Taiwan et la Malaisie, mais aussi la Croatie ont attribué à la construction navale un rôle stratégique dans leur industrialisation.

En 1996, les pays de l'OCDE ont construit 88 pour cent de la production mondiale. Leur part a même légèrement progressé tout au long de 1a décennie, passant de 85 à 88 %.

Navires achevés (milliers de tonnes brutes)

1991

1992

1993

1994

1995

1996

Pays de l'OCDE

14 308

15 930

17 765

16 651

19 935

21 318

Reste du monde

2 508

2 948

2 728

2 912

2 532

2 870

Total monde

16 816

18 878

20 493

19 563

22 467

24 188

Part de l'OCDE

85,10 %

84,30 %

86,70 %

85,10 %

88,80 %

88,10 %

Source : Lloyd's Register "World Fleet Statistics 1995", "World Shipbuilding Statistics, Mars, Juin, Septembre, Décembre 1996.

Mais certains pays non-membres jouent un rôle important dans ce secteurs. De tous les pays, entre 1991 et 1996, la Chine a connu la croissance la plus dynamique dans ce secteur, d'environ 24 % en rythme annuel. Avec 0,9 million de tonnes brutes, elle détient déjà 3,7 pour cent de la production mondiale de navires. Sa part a doublé en cinq ans et pourrait s'accroître encore durant les années à venir.

Lorsque l'on analyse les carnets de commandes, c'est à dire que l'on évalue les constructions actuelles et futures, on observe que la part de l'OCDE est plus faible que sa part dans la construction, à hauteur de 81 %.

Carnets de commandes (Milliers de tonnes brutes)

l'art dans le carnet de commande mondial en 1995

l'art dans le carnet de commande mondial en 1996

Progression entre 1995 et 1996

Chine

4,1

6,0

34,0

Taiwan

2,4

2,1

- 18,4

Brésil

0,8

0,5

- 43,2

Croatie

1,1

1,4

12,3

Singapour

0,6

0,5

- 22,6

Roumanie

2,5

2

- 25,4

Russie

1,4

1,1

- 22,7

Ukraine

2

1,5

- 30,3

Total

15

15,1

- 6,3

Hors OCDE

18

18,7

- 3,3

Pays de l'OCDE

82

81,3

- 7,4

Monde

100

100

- 6,6

Source : Lloyd's Register "World Shipbuilding Statistics", Décembre 1995 and 1996.

En une année, la part de marché de l'OCDE a perdu un point. La Chine est le pays qui connaît l'évolution la plus favorable. Avec 2,7 millions de tonnes brutes de commandes en carnet, les chantiers navals chinois se situent troisième rang mondial pour le volume des commandes, derrière le Japon et la Corée, devant tous les pays européens.

Le problème est d'autant plus aigu qu'un certain nombre de chantiers de ces pays concluent des accords de coopération avec des chantiers des pays de l'OCDE. À terme, ils leur offrent la possibilité d'abaisser leurs coûts de production en sous-traitant différentes activités. En cas de ratification de l'Accord de l'OCDE, les pays signataires se trouveront donc face à une concurrence renforcée.

3.3.1 Une ratification aléatoire

Les négociations relatives à l'accord de l'OCDE ont été entamées à l'automne 1989 en réponse à une plainte déposée par l'industrie américaine de la construction navale, au titre de la Section 301. Les États-Unis se proposaient d'éliminer les aides directes à la construction navale. La commission européenne a proposé, de son côté, d'étendre l'accord aux pratiques déloyales en matière de prix ou pratiques de dumping. Pour garantir son efficacité, il a été prévu dès l'ouverture des négociations que cet accord serait juridiquement contraignant et comporterait un dispositif de règlement des différents, des "mesures correctrices" en cas de violation et des "sanctions" pour faire appliquer ces mesures.

En juillet 1994, la commission européenne et les Gouvernements de la République de Corée, des États-Unis, de la Finlande, du Japon, de la Norvège et de la Suède ont adopté l'Acte final de l'«Accord sur les conditions normales de concurrence dans l'industrie de la construction et de la réparation navales marchandes», l'ouvrant ainsi à la signature. L'Accord a été signé par tous les gouvernements concernés.

La commission a participé à ces négociations en s'exprimant au nom des États membres de l'Union européenne. L'Assemblée Nationale française a émis un vote en décembre 1994 demandant au gouvernement d'exercer son veto contre une ratification par l'Union européenne. Le Gouvernement n'a pas suivi ce vote. Après avoir manifesté son opposition à cet accord, la France s'est abstenue lors du Conseil des Affaires Générales de décembre 1994, en raison de l'acceptation, par la commission, d'un plan de mise à niveau des chantiers français. Ce plan permettra d'apporter 2,6 milliards de francs d'aide (aide à la recherche et au développement, à l'investissement, à la formation et aux mesures sociales) au cours des trois premières années d'application de l'accord, période à l'issue de laquelle l'accord sera renégocié.

L'Accord ne peut entrer en vigueur qu'une fois ratifié par tous les participants. Aujourd'hui, seuls les États-Unis ne l'ont pas ratifié, alors qu'ils en sont à son origine. L'accord n'est donc pas entré, comme prévu, en vigueur le 1er janvier 1996.

Lorsque le 104ème Congrès américain a discuté de cette législation, la Chambre des Représentants a adopté plusieurs amendements visant à conférer aux constructeurs navals des États-Unis des avantages unilatéraux incompatibles avec l'Accord ( ( * )29) . Le Congres des États-Unis n'a donc pas adopté la législation d'application qui aurait autorisé le gouvernement de ce pays à le ratifier.

Toutefois, l'exécutif américain reste favorable à l'Accord. Il reste déterminé à faire adopter la législation qui permettrait aux États-Unis de le ratifier.

L'acte final de l'Accord prévoit le gel des mesures nouvelles en attendant la ratification. Cet acte n'a pas été ratifié par le Conseil européen de décembre 1994. L'Union européenne a prorogé, mais jusqu'à la fin de 1997 seulement, la validité de la 7ème Directive du Conseil qui réglemente les aides publiques accordées à la construction navale, ainsi que le plafonnement des aides à la production liées à des contrats. En conséquence, pratiquement tous les États membres de l'UE ont continué à accorder les aides autorisées par cette Directive.

Si traité n'est pas ratifié, il est probable que les principaux concurrents de la France poursuivront leurs politiques de subvention. En particulier, il faut envisager la possibilité du maintien dans sa forme actuelle du programme américain de garantie de prêts du titre XI, véritable outil permettant aux États-Unis de revenir sur ce marché longtemps délaissé.

L'accord de l'OCDE ne concernera pas un ensemble de constructeurs de plus en plus vaste, dont la Chine, en passe de devenir le troisième producteur mondial. Il risque en outre de mettre la France en position de faiblesse, alors que les chantiers français ont un carnet de commande insuffisant, surtout si l'accord n'est pas complètement respecté. Cet accord privilégie les systèmes opaques. Les pays ayant un système de soutien public concentré sur les aides au financement comme les États-Unis ou des politiques d'aides à la R & D très ambitieuses comme le Japon, seront très avantagés. Les pays possédant un fort marché intérieur (cas des États-Unis pour le cabotage, cas de la Corée, du Japon et du Danemark du fait de l'intégration de leurs secteurs armement et transport), peuvent fausser l'accord et inciter à des comportements non coopératifs. Par ailleurs, la loi antidumping compte tenu de la non-homogénéité des navires, est difficilement applicable.

Finalement, en cas de ratification de l'accord de l'OCDE, le secteur disparaîtra en France probablement à très court terme. La situation serait encore plus grave si les pays ne respectaient pas l'esprit de l'accord. Les pays ayant des systèmes de soutien public concentrés sur les aides au financement comme aux États-Unis, ou des politiques d'aides à la recherche et développement comme au Japon, seront probablement très avantagés. Les pays possédant un fort marché intérieur (comme les États-Unis pour le cabotage), peuvent fausser l'accord et inciter à des comportements non coopératifs.

CHAPITRE 5 - LES STRATÉGIES ENVISAGEABLES( ( * )30)

Le présent chapitre a pour objet de présenter les grandes orientations stratégiques qui pourraient permettre au secteur de la construction navale française de se maintenir et de se développer.

Deux remarques préalables doivent être formulées :

- d'abord, la concurrence internationale sera, dans les années à venir, de plus en plus vive. Que cela résulte de la mise en oeuvre de l'accord de l'OCDE ou de l'émergence de candidats particulièrement puissants et compétitifs -la Chine-, dont la vivacité relative sera renforcée par le fait qu'ils ne sont pas concernés par cet accord ;

- ensuite, les prévisions à deux ans sur les carnets de commande du secteur en France sont très sombres, on l'a vu.

1. La Recherche et Développement (R&D)

1.1 La R&D, nouvel enjeu du marché

La stratégie de niche adoptée par la France requiert un travail incessant d'innovation. La recherche de segments de plus en plus technologiques pour la grande construction navale (des pétroliers pendant les années soixante et soixante-dix, aux méthaniers, chimiquiers et paquebots aujourd'hui) et pour la petite construction navale (navires rapides civils ou militaires) nécessite une remise en cause permanente. La concurrence de pays similaires, sur la grande construction (Japon, Italie, Finlande, Espagne...), et pour la petite construction (Pays-Bas par exemple), conduit à estimer que faire les mêmes efforts de R&D que les autres pays ne signifie pas pour autant être plus compétitif. Par contre, il est certain que faire moins, ne peut, à terme, que signifier la fin de la construction navale française.

Pour l' offshore, les difficultés opérationnelles issues de zones d'extraction de plus en plus difficilement accessibles, impliquent une recherche innovante, pour un pays voulant rester compétitif.

Enfin, la pression des armateurs pour des navires toujours plus rapides, confère également au marché des navires rapides, un statut de plus en plus stratégique. Or, ce marché prometteur reste encore aujourd'hui un des segments les plus technologiques.

Pour le marché de la construction navale, le souci écologique conduit déjà, et conduira de plus en plus, à privilégier des navires de plus en plus respectueux de l'environnement.

Tous ces facteurs conduisent à penser que la distinction qui s'est opérée depuis le début des années quatre-vingts entre marché à haute et faible technologie ne fera que s'accentuer. Au sein des deux marchés, les écarts de prix des navires feront la différence. La R&D doit donc tenir ce double rôle :

- permettre à la France de rester compétitive aussi bien en termes de coûts
que de technologie dans la conception des navires.

En augmentant nos efforts de R&D, à la fois en montant, mais aussi en qualité, la France peut enfin espérer voir collaborer les entreprises entre elles. Si des collaborations existent (entre Leroux et Lotz et les Chantiers de l'Atlantique par exemple sur les NGV), elles doivent s'étendre aux fournisseurs, mais aussi permettre, la fin du gaspillage des moyens civils et militaires, notamment pour les bassins d'essai des carènes.

En axant sa politique sur la recherche, la France accélérerait la prise de conscience européenne, permettant d'en finir avec l'idée erronée selon laquelle la construction navale est un marché de faible technologie.

2. Le développement de la filière pétrochimique

2.1 L'avantage technologique de la France

Sur ce marché, la compétition existe entre technique norvégienne (type « phère » ou Moss-Rosenberg) et technique française (type membrane). Aujourd'hui, sur les quatre-vingt-dix méthaniers en vogue, 50 % sont issus de la conception norvégienne et 43 % issus de la technique française. Pour les commandes au premier janvier 1996, 23 % font appel à la technique membrane (française), et 77 % à la technique norvégienne.

La technique norvégienne reste donc aujourd'hui la plus utilisée. Les trois japonais (Mitsubishi, Mitsui et Kawasaki) la privilégient toujours. Des signes avant-coureurs montrent que la technique française s'impose toutefois de plus en plus :

- les constructeurs mondiaux s'engagent dans cette voie. 29 chantiers sont sous licence de la technique membrane dans le monde en 1997, dont 5 en République de Corée, 8 au Japon, 9 en Europe, 3 aux États-Unis. Elle permet des économies en coût d'installation des infrastructures (3 millions de $ d'investissement pour une cale permettant de construire des membranes contre 50 millions de $ pour la technique sphère) et en coût de revient (d'environ 10 %) pour la construction ;

- les armateurs reconnaissent une supériorité d'exploitation en mer, de manoeuvrabilité, de vitesse, de résistance et de sécurité pour ce procédé. Ils commandent aujourd'hui des navires membranes et démontrent, ainsi, qu'il n'y a pas de difficultés opérationnelles entre les deux systèmes (Yunkong Line a programmé 2 navires type membrane alors qu'il venait de commander il y a 2 ans, 1 navire type sphère).

Les perspectives de commandes sont de 9 à 11 méthaniers pour 1997-1998, dont 60-80 % avec la technique française. Pour 1999-2001, les estimations tournent aux alentours de 10 à 13 navires en commande.

2.2 La nouvelle filière française du gaz ?

La France maîtrise les deux techniques de fabrication les plus performantes (basées sur la technologie membrane). Le rapprochement de ces deux techniques au sein d'une structure commune va permettre de proposer une nouvelle solution encore plus performante. Aussi, une nouvelle carte peut être jouée ; proposer le méthanier de la nouvelle génération. Le marché potentiel est important, de l'ordre de 10 milliards de dollars. La France a déjà une part de marché de 3,5 %. Elle pourrait donc l'accroître très significativement.

La compétence de GTT - GazTransport & Technigaz issue, en 1994, du rapprochement de Gaz Transport et SN Technigaz, est une des clés du succès de la technique de construction française. Ce groupe présente une structure performante dans la conception et la manutention du système de cargaison. Deux qualités ressortent de cette fusion : la mise en commun de compétences techniques, et la création d'un puissant pôle Financier et commercial comprenant Gaz de France (40 %), Total (30 %) et Bouygues Offshore (30 %). En complément, 1TRCN développe un programme de recherche permettant d'optimiser les formes de cuves de méthaniers, de plus grandes tailles et plus résistantes aux mouvements de liquide. Ainsi, on pourra construire des méthaniers moins coûteux avec un petit nombre de cuves.

La France peut de nouveau espérer supplanter les fournisseurs japonais dans la conception du système de cargaison de quatre navires membranes par la Korea Gas Corporation (KGC).

Si on peut donc parler de filière technologique, la filière maritime du transport de gaz n'existe cependant plus. Un débouché s'offre aujourd'hui aux Chantiers de l'Atlantique : la commande par Gaz de France de 2 méthaniers GNL d'ici trois ans. La maîtrise du système de fabrication et les études menées par ce chantier dans les nouvelles techniques de production (CSI) permet de maintenir l'espoir.

La maîtrise intégrale de la filière gaz n'est pas perdue pour la France.

L'émergence de la technique française de fabrication en est un exemple.

Dans un marché où la commande d'un nouveau type de navire est la matérialisation d'une nouvelle compétence, la relation entre armateurs (Gaz de France) et constructeurs (Chantiers de l'Atlantique) serait, dans le cas de filière du gaz, un signe puissant de l'efficacité de la politique publique maritime et de ses effets d'entraînement.

2.3 La filière de l'offshore : l'importance du marché des FPSO

La filière de l'offshore connaît une demande soutenue. Elle utilise de plus en plus de structures flottantes devant être construites dans les chantiers navals.

Ainsi, la construction de cinquante navires de gros tonnage de type "Floating Production Storage Offloading » est envisagée dans les dix années à venir. Certains projets sont prévus en béton armé précontraint, un domaine dans lequel la France excelle (Technigaz, Doris et Bouygues offshore...). Ce domaine constitue donc une piste prometteuse pour la France. Les chantiers civils et militaires peuvent être concernés. Les militaires sont en particulier, habitués à passer des contrôles qualité très sévères. Pour cela, les mentalités devront changer, puisque les modalités de passation de contrats dans l'offshore correspondent plus à celles du secteur de Bâtiments et Travaux Publics, qu'à celles de la construction navale.

2.3.1 Navires d'exploitation de champs de type « Floating Production Storage Offloading » (FPSO).

Le marche de FPSO est de loin le plus important, environ cinquante FPSO sont prévus dans les dix ans à venir. En particulier, ELF Angola doit lancer un appel d'offres pour un IPSO qui sera installé par 1400 m d'eau pour l'exploitation du champ de Girassol.

Ces navires sont connectés aux puits et comprennent les installations de traitement du pétrole ou de traitement et liquéfaction du gaz. des capacités de traitement du pétrole ou du gaz liquéfié, des équipements de chargement de navires pétroliers ou méthaniers.

À ce jour, seuls des FPSO de production de pétrole ont été réalisés. En Europe, deux chantiers sont particulièrement actifs dans ce domaine :

- Harland and Wolff, en Irlande, qui construit actuellement un navire FPSO destiné au champ pétrolier de « Scheilhallion » en Mer du Nord pour BP ;

- Astano, en Espagne, qui a construit, par exemple, l'unité de production flottante du champ « Captain Field » de Texaco en Mer du Nord et effectue de nombreuses conversions.

En ce qui concerne le gaz naturel liquéfié, aucun FPSO n'existe actuellement. Cependant, des projets importants sont en cours d'étude. Par exemple le LNG FPSO de IHI au Japon (longueur : 300 m, capacité de stockage : 150.000 m3) et le projet français actuellement développé par Technigaz et Bouygues Off-shore (longueur : 250 m, capacité de stockage : 200.000 m3) basé sur une coque en béton.

2.3.2 Terminal GNL off-shore.

Des terminaux GNL basés sur l'utilisation de pontons flottants échoués au voisinage de la côte (Gravity Base Structure : GBS) par des profondeurs d'eau relativement faibles (15 à 30 m) sont en cours d'étude.

- projet BHP / PHILIPS pour les champs de Undar / Baver en Mer de Timor ;

- projet développé conjointemenl par Doris Engineering, Sofregaz et Technigaz.

Ces projets, comme le FPSO Tcchnigaz / Bouygues Off-shore, sont prévus en béton armé précontraint. Des solutions « acier » peuvent également être envisagées. Les chantiers navals pourraient participer à de telles réalisations en mettant à la disposition d'entrepreneurs de génie civil leurs infrastructures et / ou en réalisant une partie des équipements de stockage et de production.

2.4 Les navires à grande vitesse.

Alors que les navires rapides étaient avant les années 1990 des petits navires assurant des liaisons très courtes, le marché des navires à grande vitesse (NGV) a vraiment pris un essor depuis 1992, en Asie et en Europe, pour des bâteaux de plus de 80 mètres d'une valeur de 200 à 300 MF. Certaines études envisagent un marché mondial d'une quinzaine d'unités par an. Le marché des NGV concerne actuellement les transports de passagers et de voitures (ferries rapides), mais, surtout, est très prometteur pour les transports de marchandises et notamment pour le cabotage en Méditerranée, en Manche et en Mer du Nord. Les chantiers français (Leroux et Lotz, ACH, CMN, Iris Catamarans) sont activement présents sur ce marché.

La mise au point des NGV de grande taille (plus de 80 mètres), capables d'atteindre des vitesses de 40 noeuds (75 km/heure environ), nécessite la résolution de nombreuses difficultés concernant la conception, la tenue de la structure, la mise en oeuvre de matériaux (passage de l'acier à l'alliage d'aluminium). La compétition est ouverte dans le monde entier pour trouver les meilleures solutions techniques.

La SNCM a lancé un appel d'offre pour la construction d'un NGV monocoque de 135 mètres de long, pouvant transporter 1000 passagers et 250 voitures entre la Corse et le Continent et opérer par des creux de 6 mètres. En mars 1993, cinq chantiers européens (Chantiers de l'Atlantique, Aslilleros Espanoles, Bremer Vulkan et Howaldswerke-Deutsche Werft, et Fincantieri), regroupes au sein du GIE « Euroyards », ont constitué un groupe de travail spécialise dans les navires rapides en vue d'un projet de roulier rapide (28 noeuds sur une distance de 200 nautiques) transportant des camions. Projet américain à plus long terme de liaison par porte-conteneurs rapides entre Philadelphie et l'Europe (Zeebruge ou Cherbourg).

3. La pertinence d'un rapprochement entre construction navale civile et militaire

Les chantiers civils et militaires se trouvent dans une situation critique. La construction militaire est touchée par la réduction des budgets militaires, tandis que les chantiers civils souffrent de la concurrence internationale et de la faiblesse du marché intérieur. Un rapprochement entre constructions navales civile et militaire apparaît dans ce contexte pertinent. Il convient de relever que l'incompatibilité apparente entre les deux secteurs repose sur les statuts respectifs des effectifs. Mais ni les différences de métiers et de clients ni la préservation du caractère confidentiel de la technologie des systèmes d'armes intégrés dans un navire militaire n'empêchent un rapprochement entre secteurs civil et militaire.

3.1 Des rapprochements déjà réalisés

La production de navires militaires de surface par les chantiers civils pourrait leur assurer un volet de sécurité conjoncturel.

La fusion entre construction navale civile et militaire ne peut certes être totale. Mais la dichotomie qui existe en France peut être atténuée. La France est le seul pays dans le monde à garder cette distinction. Sans aller jusqu'à la fusion, la collaboration est souhaitable. De plus, plusieurs exemples en France et à l'étranger abondent dans ce sens. Pour la France, il s'agit :

- des Constructions Mécaniques de Normandie (10 patrouilleurs P 400 dans les années 80, soit 25 % de la vente de patrouilleurs sur le marché mondial) ou de Leroux et Lotz, qui sont des chantiers privés français performants sur des créneaux de bâtiments légers militaires ;

- de l'expérience, de 1984 à 1994, de construction de 6 frégates de surveillance (type Floréal) aux Chantiers de l'Atlantique. Les caractéristiques de ces frégates, faiblement armées et ne dépassant pas 20 noeuds les définissaient cependant plus comme répondant à des normes civiles que militaires ;

- des accords bilatéraux noués entre la DCN et les chantiers privés. En juin 1992, un accord entre la DCN et les Chantiers de l'Atlantique a fixé les principes d'une répartition des responsabilités entre les contractants pour la promotion, la vente et la construction de navires militaires :

- les accords transnationaux se développent également. La création du G.I.E Eurocorvette entre les chantiers de l'Atlantique et Bremer-Vulkan pour le développement de navires de surveillance en est un exemple. La coopération entre la D.C.N et les chantiers espagnols BAZAN, pour le sous-marin Scorpène, ou belges et hollandais pour la construction de chasseurs de mines tripartites en est un autre.

3.2 Des désaccords récurrents

Deux sources de désaccords existent principalement : ceux liés à la répartition des commandes nationales et ceux liés au marché à l'exportation. Des événements passés conduisent à créer une méfiance des partenaires les uns vis-à-vis des autres.

L'accord de coopération sur les chasseurs de mines pour le Pakistan prévoyait, par exemple, un partage de la production à l'exportation entre constructeurs privés (Constructions Mécaniques de Normandie et Leroux et Lotz) et constructeur public (DCN). Alors que les C.M.N ont accepté de rétrocéder leur part à Leroux et Lotz en échange de l'attribution par la DCN de 400.000 heures de travail sur 4 ans, seulement 10 % ont été à ce jour effectivement réalisés. Ce différend sur les chasseurs de mines entre la DCN et C.M.N. s'est traduit par la suite par un différend entre Leroux et Lotz et C.M.N. concernant des rétrocessions de commandes dans le cadre du marché des patrouilleurs pour le Koweït. De façon plus large, il apparaît que les contraintes de gestion budgétaire auxquelles la DCN est soumise pénalisent parfois les partenaires de petite taille, dont les impératifs de gestion s'inscrivent dans le court terme.

Les procédures d'appel d'offres sont facteur de méfiance, autant avec l'extérieur que sur les commandes passées par la Marine nationale. Lors des négociations avec le Koweït, la DC'N International a été retenue comme agent représentatif de la garantie de l'État, et a donc été perçue comme juge et partie par certains.

Des dysfonctionnements apparaissent également dans la réglementation de protection du secret défense et dans le contrôle de l'industrie d'armement. Il est en effet impossible pour de nombreux contrats de faire appel à des ingénieurs étrangers, de travailler avec une filiale de droit étranger ou de s'allier à une entreprise étrangère. La réglementation sur la protection du secret de défense prend ses sources dans un décret de 1981 et dans les textes d'application conçus par le Secrétariat Général de la Défense Nationale (SGDN). Au-delà des protocoles de collaboration d'État à État, les travaux au sein d'équipes multinationales sont presque impossibles.

Les textes sur le contrôle de l'industrie d'armement sont également un frein au rapprochement d'entreprises. La loi du 18 avril 1939 et son décret d'application 95.589 du 6 mai 1995 visent à garder sous contrôle national les entreprises fabriquant et commercialisant le matériel d'armement. Les sociétés d'armement doivent dès lors être dirigées par des administrateurs et des associés français. Il en va de même pour la majorité du capital de la société. Si l'existence de DCN International a permis de simplifier les procédures, les petits chantiers privés spécialisés dans le militaire se trouvent encore aujourd'hui fortement contraints.

3.3 Des complémentarités objectives

La construction navale civile et militaire française est caractérisée par une diversité de compétence plutôt que par une concurrence d'objectifs.

La relative proximité géographique entre les grands chantiers de construction civile et militaire est un facteur de complémentarité. Sur les 24.323 employés que compte la D.C.N en 1995, près de 15.000 personnes travaillent en Bretagne ou Pays-de-la-Loire. Cet aspect est important puisque :

- le rapprochement entre constructeurs civils et militaires implique une mobilité de la main d'oeuvre ;

- la mise en commun des équipements et les économies de gamme, d'échelle en dépendent ;

- la faisabilité d'une complémentarité associant la construction de la coque propulsée des bâtiments de surface par la construction civile et de l'intégration des armements par les chantiers militaires induit une mobilité des hommes et des moyens de production.

Une politique industrielle transparente peut amener les constructeurs civils et militaires à se voir plus complémentaires que concurrents. Des gaspillages pourront être ainsi évités. Alors qu'à la suite de la crise de la construction navale civile, les Chantiers de l'Atlantique possédaient des capacités de production largement excédentaires, le Rapport Bondile-Villain de l'Inspection Générale des Finances et du Contrôle Général des Armées révèle que la DCN a réalisé dans les années 1980, des investissements lourds à Brest ou Lorient.

Du district point de vue de l'activité de construction navale, la mise en commun des compétences reconnues dans les domaines des appareils propulsifs, du montage, de l'expertise... et plus généralement des unités de recherche et développement doit également pousser les deux parties à se rapprocher. La R&D est indispensable pour des secteurs se tournant résolument vres l'export. Ce rapprochement pourrait aussi comprendre le regroupement des fournisseurs en amont de la filière.

Enfin, la recherche de marchés à l'exportation passe par un fort réseau de prospection, qui devrait être mis en commun. Tous les acteurs doivent y être mobilisés pour l'aider : Postes d'Expansion Economique, Ministère des Affaires Étrangères, Ministère de l'Industrie...

Le respect des délais et des budgets est aussi une contrainte à laquelle les constructeurs prives sont plus habitués que la DCN. Tous ces éléments contribuent à « l'image de marque a priori », alors que la construction militaire s'appuie sur « la qualité a posteriori du produit », issue de l'utilisation du bâtiment de guerre.

Conclusion

La construction nasale française, à l'instar de ce qui se pratique dans le monde, est substantiellement aidée, un peu moins que pour nos concurrents toutefois. En cela, l'intervention de l'État est très importante. Actuellement, les masses budgétaires engagées sur ce secteur sont indispensables à sa survie dans les prochaines années.

Dans le monde, le secteur de la construction navale, a déjà connu des restructurations très importantes. Les effectifs mondiaux ont baissé de près de 70 % dans les pays concernés de l'OCDE, passant de 550.000 personnes en 1976 à 170.000 en 1994. La construction navale privée française s'est restructurée et spécialisée avec l'aide de l'État. Depuis 1976, les effectifs sont passés de 32.500 à 5.800 personnes, soit une baisse de l'ordre de 80 %.

Cette restructuration n'aurait pas été possible sans l'aide de l'État.

L'ensemble des dépenses engagées, depuis 1983, est d'environ 2,7 MdF (en francs 1997).

La création puis la fermeture de la NORMED a sans doute représenté une dépense supérieure à ce qui était nécessaire. La fermeture de ce chantier et de quelques autres plus petits a permis de remettre en ligne le dispositif français de construction. Les restructurations, en privilégiant les chantiers de l'Atlantique au détriment de la NORMED, ont assuré le développement d'une industrie navale spécialisée dans des navires de haute technologie.

Un des éléments de vulnérabilité de la construction navale française est la faible synergie entre construction et marine marchande, et entre constructeurs et fournisseurs. Le développement d'un projet national du méthanier du futur, (dont le client pourrait être Gaz de France) et celui des navires à très grande vitesse permettraient d'utiliser le savoir-faire des chantiers français pour un marché intérieur potentiel. Ces commandes domestiques acquises rendraient plus aisées les exportations de ces produits.

La construction navale française a la particularité de séparer nettement les entreprises construisant les navires civils des arsenaux (DCN) fabriquant des navires militaires. Face à la réduction des commandes de la marine nationale, la DCN réduit ses effectifs de 1.000 personnes par an. La réparation, procurant actuellement plus du tiers de la charge, constituera avec les exportations un socle appréciable d'activité. La DCN espère que ses exportations atteindront à terme 35 % de la charge totale, ce qui semble accessible puisqu'elle a de nombreuses références, une réputation très solide et que les États-Unis produisent des bâtiments trop lourds pour leur marché extérieur.

Dans le cadre de l'OCDE, un accord concernant la construction navale marchande est en cours de ratification. Il vise à interdire les subventions directes et à harmoniser, au moyen de dispositions contraignantes, la concurrence dans l'industrie de la construction navale des pays de l'OCDE et de la Corée. Le dispositif français, qui repose sur des aides directes, est au coeur de la cible de l'accord de l'OCDE. Le risque de voir disparaître ce secteur, si l'accord est appliqué, devient très important. La situation serait encore plus grave si des pays ne respectaient pas l'esprit de l'accord. Les pays ayant des systèmes de soutien public concentrés sur les aides au financement, comme les États-Unis, ou mettant en oeuvre des politiques d'aides à la R&D très ambitieuses, comme le Japon, seront avantagés. Les pays possédant Un fort marché intérieur (cas des États-Unis pour le cabotage), peuvent aussi fausser l'accord de l'OCDE par des pratiques non coopératives.

Si l'accord de l'OCDE était ratifié, il faudrait redéployer tout notre dispositif public, sous peine de disparition du secteur.

Les relations entre chantiers civils et militaires pourraient être revues. Le rapprochement de ces deux univers est certes difficile. Les statuts sont très différents, tout comme les métiers. Les chantiers civils sont particulièrement performants pour la construction de coques propulsées. La DCN consacre 80 % de son temps de construction à la conception et à l'intégration du système d'armes. Un premier pas pourrait être envisagé avec la mise aux enchères des coques. D'ailleurs, cette démarche s'intégrerait dans la réforme des méthodes d'acquisition de la DGA.

La sauvegarde de l'activité nécessite en particulier une innovation constante.

La recherche et le développement dans ce secteur sont trop dispersés et mal coordonnés. Les efforts civils et militaires sont notamment complètement séparés. Néanmoins, la recherche a permis d'acquérir des compétences dans des activités d'avenir (mouvements de liquides dans les cuves intégrées de méthaniers, matériaux composites, navires à grande vitesse).

Les orientations suivantes pourraient être retenues :

- renforcement de la recherche et développement autour de centres fédérateurs, en particulier en coordonnant les efforts civil et militaire ;

- développement des logiques de filière, notamment sur le gaz ;

- développement de nouveaux secteurs : bateaux rapides, offshore ;

- amélioration de la compétitivité du secteur, notamment en ce qui concerne :

ï le coût total du travail ;

ï la gestion de la production, des stocks et de l'approvisionnement ;

ï l'organisation du secteur, notamment les rapports entre les donneurs d'ordre et sous-traitants ;

ï la standardisation des équipements (création d'un catalogue normatif).

- renforcement des coopérations entre constructions civiles et militaires, en particulier examiner :

g. Fourniture de biens et de services a des prix inférieurs à ceux qui correspondent à une rémunération suffisante ;

h. Mesures et pratiques fiscales bénéficiant à l'industrie de la construction et de la réparation navales ;

i. Aide accordée aux fournisseurs de biens et de services à l'industrie de la construction et de la réparation navales, si cette aide confère spécifiquement des avantages à cette industrie ;

j. Réglementations et pratiques officielles, y compris obligation de faire construire ou de réparer dans des chantiers nationaux ou réglementations ayant des effets analogues [voir cependant plus loin, la Section V.

"Traitement du Jones Act"] ;

k. Autres aides [voir cependant ci-après la Section II : "Mesures d'aide autorisées"].

II. Mesures d'aide autorisées

1. Crédits à l'exportation de navires

Les facilités de crédit à l'exportation compatibles avec les dispositions de l'Arrangement sur les crédits à l'exportation de navires (version révisée) sont autorisées (à savoir intérêt égal au TICR, remboursement en 12 ans, versement initial de 20 pour cent).

Les crédits d'aide pour navires commercialement viables ne sont pas autorisés.

2. Prêts et garanties de prêts accordés à des acquéreurs nationaux de navires neuf

Sont autorisés les prêts et garanties de prêts accordés dans les mêmes conditions que celles qui peuvent être accordées en vertu de l'Arrangement sur les crédits à l'exportation de navires. L'octroi de ces prêts peut être limité à l'achat de navires dans des chantiers nationaux.

3. Recherche et développement

Cette aide est autorisée dans les proportions suivantes :

a. Recherche fondamentale : 100 pour cent des coûts donnant droit à une aide ;

b. Recherche industrielle de base : 50 pour cent des coûts donnant droit à une aide ;

c. Recherche appliquée : 35 pour cent des coûts donnant droit à une aide ;

d. Développement : 25 pour cent des coûts donnant droit à une aide.

Dans des conditions bien précises, le montant maximal autorisé de l'aide destinée aux activités de recherche-développement se rapportant à la sécurité et à l'environnement peut être supérieur de 25 points, voire davantage, aux pourcentages mentionnés aux alinéas b, c et d ci-dessus.

Le montant maximal autorisé de l'aide destinée aux activités de recherche-développement exercées par de petites et moyennes entreprises est de points supérieur aux pourcentages mentionnés aux alinéas b, c, et d ci-dessus.

Des informations sur les résultats des activités de recherche-développement doivent être publiées rapidement, au moins une fois par an.

La définition des activités de recherche-développement (recherche fondamentale, recherche industrielle de base, recherche appliquée et développement), de même que la marge des coûts ouvrant droit à une aide font l'objet de dispositions détaillées.

4. Aides aux travailleurs

Il s'agit des aides destinées à couvrir le coût des mesures bénéficiant exclusivement aux travailleurs qui perdent leurs droits à la retraite, qui sont licenciés ou qui perdent leur emploi à titre définitif dans l'entreprise de construction navale concernée, lorsque ces aides sont liées à l'arrêt ou à une réduction d'activité de chantiers navals, à la faillite ou à une diversification de leurs activités hors construction navale ;

5. Aides à la restructuration

Les aides à la restructuration peuvent continuer d'être accordées, mais elles devront prendre fin comme annoncé à la conclusion de l'Accord ; il s'agit : (a) du programme actuel de la Corée concernant Daewoo et KSEC, et (b) des programmes intéressant la Belgique, l'Espagne et le Portugal.

III. Mesures de réparation ou mesures correctrices

Le Gouvernement responsable procède au recouvrement auprès du constructeur qui a bénéficié d'une mesure d'aide interdite en vertu de l'Accord, d'un droit égal à l'avantage obtenu du fait de cette mesure, majoré des intérêts, ou s'il n'est pas possible juridiquement de recouvrer ce droit, il prend toute autre mesure appropriée pour éliminer ou neutraliser les avantages obtenus.

Les violations et les montants seront déterminés par un Groupe spécial international et indépendant dont les décisions sont définitives et ont force obligatoire

IV- Sanctions

Faute de mettre en oeuvre la décision du Groupe spécial, c'est-à-dire faute pour le constructeur en cause de s'acquitter du droit imposé (ou d'appliquer les autres mesures arrêtées) ou faute pour les pouvoirs publics de supprimer une mesure d'aide incompatible, les dispositions suivantes peuvent être prises ;

a. sur décision du Groupe des Parties, le constructeur naval qui a bénéficié d'un avantage indu, peut se voir refuser le droit de faire valoir qu'il a été lésé par le prix des navires vendus par les autres constructeurs ;

b. la ou les parties lésées peuvent suspendre des concessions équivalentes prévues par le GATT, en privilégiant celles qui sont liées au(x) produit(s) associé(s) à la violation.

V. Traitement du "Jones Act"

Nonobstant l'interdiction générale de réglementations et pratiques publiques privilégiant l'industrie nationale de la construction et de la réparation navales, les États-Unis se réservent le droit de maintenir les obligations de construction nationales édictées dans un certain nombre de lois ("Jones Act") (une liste détaillée de ces textes figure dans l'accord], sous réserve :

a. que les États-Unis estiment que les livraisons moyennes annuelles de navires construits en application des dispositions de ces lois ne dépasseront pas 200 000 tb ;

b. que dans un délai de trois ans suivant l'entrée en vigueur de l'Accord, s'il détermine que les livraisons prévues ou effectives au cours d'une année quelconque après l'entrée en vigueur de l'Accord dépassent 200 000 tjb et que ces livraisons compromettront sensiblement l'équilibre des droits et des obligations découlant de l'Accord, le Groupe des Parties puisse autoriser une ou plusieurs parties lésées à prendre des mesures de réaction (par exemple, instaurer un droit ou une restriction sur les offres ou les contrats) à l'égard des chantiers qui, l'année durant laquelle le seuil est dépassé, ont bénéficié de la construction de ces navires, c ; que plus de trois ans après l'entrée en vigueur, s'appliquent les mêmes dispositions que celles qui sont énoncées à l'alinéa b. ci-dessus, mais que la limite des 200 000 tb par an n'existe plus.

Les États-Unis coopéreront à un examen annuel auquel procédera le Group des Parties, assureront une totale transparence en ce qui concerne la construction des navires visés et fourniront des renseignements sur les nouvelles commandes et les contrats approuvés. Les États-Unis fourniront ces renseignements au moins tous les ans et plus fréquemment si on les leur demande ou si cela est approprié. Le Groupe des Parties suivra avec attention les renseignements fournis.

Si les États-Unis estiment que le niveau, le type ou la durée des mesures prises par une Partie ou des Parties en vertu des points 1 b. et le ci-dessus entraînent une plus forte diminution des opportunités de vente pour ses chantiers que celle causée par les navires visés par le "Jones Act", ils peuvent invoquer la procédure de règlement des différends par un Groupe spécial prévue à l'Accord.

Dans le cadre du premier examen triennal, le Groupe des Parties étudiera si les conditions ayant conduit à formuler les conditions particulières relatives au "Jones Act" existent encore et si les mesures prévues aux points 1.b. et 1.c. ci-dessus sont suffisantes pour maintenir l'équilibre des droits et des obligations découlant de l'Accord. En se fondant sur cet examen, le Groupe des Parties peut prendre les décisions voulues.

B. DROITS APPLICABLES POUR PRIX PRÉJUDICIABLE

I. Objet des droits applicables pour prix préjudiciable

Les pratiques préjudiciables en matière de prix, qui permettent de vendre des navires d'une Partie à un ressortissant d'une autre Partie à un prix inférieur à leur valeur normale, sont condamnables si elles causent ou menacent de causer un préjudice important à une branche de production établie sur le territoire d'une Partie ou si elles retardent sensiblement la création d'une branche de production nationale. En vue de neutraliser ou d'empêcher des pratiques préjudiciables en matière de prix, un droit pour prix préjudiciable pourra frapper le navire en cause.

II. Enquêtes sur des pratiques préjudiciables en matière de prix

1. Ouverture de l'enquête

En règle générale, une enquête sur des pratiques préjudiciables en matière de prix sera ouverte sur demande présentée par écrit par la branche de production nationale ou en son nom, demande qui sera déposée dans un délai déterminé et pas plus de six mois après la livraison du navire en cause.

Cette demande devra démontrer des éléments essentiels, par exemple, l'existence de 1'"acquéreur" ressortissant de la Partie plaignante, du préjudice, du lien de causalité entre la vente à un prix prétendument préjudiciable et le préjudice allégué, une simple affirmation, non étayée par des éléments de preuve pertinents, ne pourra pas être jugée suffisante. La demande contiendra les renseignements qui peuvent raisonnablement être connus sur ; la description complète du navire vendu à un prix prétendument préjudiciable, les prix auxquels ces navires sont vendus sur le marché intérieur du pays d'origine ou d'exportation, l'effet de la vente à un prix prétendument préjudiciable sur les prix du navire similaire sur le marché intérieur et l'incidence de cette vente sur la branche de production nationale, etc.

Les autorités examineront l'exactitude et l'adéquation des éléments de preuve fournis dans la demande en vue de déterminer si ces éléments de prévue sont suffisants pour justifier l'ouverture d'une enquête.

2. Détermination de l'existence de pratiques préjudiciables en matière de prix

Un navire doit être considéré comme faisant l'objet d'une pratique préjudiciable en matière de prix si son prix à l'exportation est inférieur au prix comparable pratiqué au cours d'opérations commerciales normales pour un navire similaire 3 vendu à un acheteur du pays exportateur.

Lorsqu'aucune vente de navires similaires n'a eu lieu au cours d'opérations commerciales normales sur le marché intérieur du pays exportateur, la marge de prix préjudiciable sera déterminée a. par comparaison avec un prix comparable d'un navire similaire, lorsque celui-ci est exporté vers un pays tiers, b. si ces ventes à un pays tiers n'existent pas, par comparaison avec le coût de production dans le pays d'origine, majoré d'un montant raisonnable pour les frais d'administration et de commercialisation et les frais généraux ainsi que les bénéfices.

Les ventes de navires similaires à des prix inférieurs aux coûts de production unitaires majorés des frais d'administration et de commercialisation et des frais généraux ne pourront être considérés comme n'ayant pas lieu au cours d'opérations commerciales normales en raison de leur prix et ne pourront être écartées de la détermination de la valeur normale que si les autorités déterminent que de telles ventes sont effectuées à des prix qui ne permettent pas de couvrir tous les coûts dans un délai raisonnable [cinq ans].

3. Détermination de l'existence d'un préjudice

La détermination de l'existence d'un préjudice se fondera sur des éléments de preuve positifs et comportera un examen objectif (a) de l'effet exercé par la vente à des prix inférieurs à la normale sur les prix des navires similaires pratiqués sur le marché intérieur, et (b) de l'incidence résultant de ces ventes sur les constructeurs nationaux de navires similaires. Pour ce qui concerne l'effet exercé sur les prix, les autorités chargées de l'enquête examineront s'il y a eu de ce fait sous-cotation importante du prix ou si cette vente a eu autrement pour effet de déprimer les prix de façon importante ou d'empêcher de manière importante des hausses de prix qui, sans cela, se seraient produites.

L'examen de l'incidence des ventes à des prix inférieurs à la normale sur la branche de production nationale comportera une évaluation de tous les éléments économiques pertinents qui influent sur la situation de cette branche, y compris les suivants : diminution effective ou potentielle des ventes, des bénéfices, de la production, de la part de marché, de la productivité, du rendement des investissements, ou de l'utilisation des capacités, éléments qui influent sur les prix intérieurs, importance de la marge de prix préjudiciable, effets négatifs, effectifs ou potentiels, sur la marge d'autofinancement ("cash-flow"), les stocks, l'emploi, les salaires, la croissance, la possibilité de se procurer des capitaux ou l'investissement.

Cette liste n'est pas exhaustive, et un seul, voire plusieurs de ces éléments ne constitueront pas nécessairement une base de jugement déterminante.

Il devra être démontré que la vente à un prix inférieur à la normale cause, ou a causé, un préjudice au sens où l'entend le Code des pratiques préjudiciables en matière de prix dans la construction navale.

La détermination concluant à une menace de préjudice important se fondera sur des faits, et non pas seulement sur des allégations, des conjectures ou de lointaines possibilités.

4. Définition de l'expression "branche de production nationale"

L'expression "branche de production nationale" s'entend de l'ensemble des constructeurs nationaux de navires similaires ou de ceux d'entre eux dont les capacités de production cumulées constituent une proportion majeure de la capacité totale de production nationale de ces navires.

III. Réparation (Instauration de droits pour prix préjudiciables)

(À déterminer par l'autorité chargée de l'enquête)

Le montant du droit instauré pour prix préjudiciable ne dépassera pas la marge de prix préjudiciable. Il est souhaitable qu'il soit inférieur à la marge si ce droit moins élevé suffit à faire disparaître le préjudice subi par la branche de production nationale.

Si l'instauration d'un doit pour prix préjudiciable se justifie, le constructeur doit verser ce droit dans les 180 jours à la Partie procédant à l'enquête. Le constructeur disposera d'un délai raisonnablement prorogé pour s'acquitter du paiement dès lors que le paiement dans les 180 jours le rendrait insolvable. Le constructeur peut aussi annuler la vente qui donne lieu à l'instauration du droit ou se conformer à une autre mesure équivalente acceptée par l'autorité chargée de l'enquête.

IV. Sanctions (Contre-mesures)

Au cas où le constructeur naval ne paie pas le droit instauré pour pratique de prix préjudiciable, n'annule pas la vente du navire, ou ne se conforme pas à une autre mesure équivalente valide, le pays de l'autorité procédant à l'enquête peut refuser le droit de chargement et de déchargement aux navires construits par le constructeur naval en cause. Cette contre-mesure peut, dans un premier temps, être imposée sous réserve d'une notification publique 30 jours auparavant, pour une durée maximale de quatre ans à compter de la livraison des navires commandés pendant une période maximale de quatre ans, déterminée à partir de la fin de la période de notification publique.

Un Groupe spécial peut examiner la contre-mesure et prolonger ou abréger les délais.

Le Secrétariat de l'OCDE dressera, mettra périodiquement à jour et diffusera la liste des navires faisant l'objet de contre-mesures ou de mesures correctrices.

ANNEXE 2 : Liste des textes européens concernant la construction navale

DIRECTIVE DU CONSEIL du 21 décembre 1990 concernant les aides à la construction navale (90/684/CEE)

RÈGLEMENT (CE) N° 3094/95 DU CONSEIL du 22 décembre 1995 relatif aux aides à la construction navale.

Autorisation du 18 décembre 1995 des aides d'État dans le cadre des dispositions des articles 92 et 93 du traité CE

Sous couvert d'une ratification de l'accord de l'O.C.D.E., deux règlements remplaceraient l'actuelle septième directive. II s'agit :

RÈGLEMENT (CE) N° 3094/95 DU CONSEIL du 22 décembre 1995 relatif aux aides à la construction navale.

RÈGLEMENT (CE) N° 385/96 DU CONSEIL du 29 janvier 1996 relatif à la défense contre les pratiques préjudiciables en matière de prix dans la construction navale.

ANNEXE 3 : liste des lois et décrets français concernant la construction navale

Loi n° 51-675 du 24 mai 1951 relative à la construction navale.

Loi n° 51-675 du 24 mai 1961 relative à la construction navale,

Loi de finances rectificative pour 1971 (n° 71-1205 du 24 décembre 1971) ;

Loi de finances rectificative pour 1972 (n° 72-1147 du 23 décembre 1972) ;

Décret n° 51-1370 du 25 novembre 1951 portant règlement d'administration publique pour l'application de la loi du 24 mai 1951 relative à la construction navale.

Décret n° 55-551 du 20 mai 1955 relatif à la construction navale et portant fixation d'un programme d'activité ;

Décret n° 55-647 du 20 mai 1955 étendant les dispositions de la loi n° 51-675 du 24 mai 1951 relative à la construction navale, aux travaux de construction, de transformation ou de réparation des bateaux ou engins flottants destinés à être exploités sur les voies navigables autres que celles du réseau intérieur français.

Décret n° 59-1505 du 28 décembre 1959 organisant le régime du nantissement des décisions d'attribution d'allocations aux constructions navales admises au bénéfice de la loi du 24 mai 1951 ;

Décret n° 60-641 du 4 juillet 1960 complétant les dispositions de la loi n° 51-675 du 24 mai 1951 relative à la construction navale ;

Décret n° 60-690 du 4 juillet 1960 modifiant la loi n° 51-675 du 24 mai relative à la construction navale ;

Décret n° 55-1191 du 9 septembre 1965 soumettant diverses entreprises au contrôle économique et financier de l'État.

Arrête du 18 juillet 1956 concernant les obligations comptables auxquels sont soumis les chantiers de constructions navales bénéficiant des dispositions de la loi du 24 mai 1951 relative à la construction navale.

ANNEXE 4 : ÉVOLUTION DES CHANTIERS

DE CONSTRUCTION NAVALE FRANÇAIS

1976-1995

Les effectifs des chantiers de construction navale français sont passés de 32 500 à 5 880 personnes entre 1976 à 1995 Deux étapes caractérisent cette évolution :

1ère étapes : 1976-1985

Il existait 7 sites de grande construction navale en 1976 :

. Chantiers de l'Atlantique à Saint-Nazaire,

. Chantiers Dubigeon à Nantes,

. Chantiers de France-Dunkerque,

. Construction Navale de la Ciotat,

. Construction Navale et Industrielle de la Méditerranée à la Seyne-Sur-Mer,

. Ateliers et Chantiers du Havre,

. Ateliers et Chantiers de la Rochelle-Pallice,

Ces deux derniers étant regroupés au sein d'un même holding.

S'y ajoutaient 9 sites de petite construction navale : ateliers et chantiers de la Manche à Dieppe et Saint-Malo, Constructions Mécaniques de Normandie à Chantiers et Ateliers Français de l'Ouest à Grand Quevilly près de Rouen,

Chantiers et Ateliers de La Perrière à Lorient, Société Française de Construction Navale à Villeneuve-la-Garenne en banlieue parisienne, Ateliers et Chantiers du Sud Ouest à Bordeaux, Chantiers Auroux Arcachon.

La période 1976-1985 est caractérisée par des réductions d'effectifs sur chaque site . Globalement les effectifs ont diminué de 32.500 à 13.700 personnes.

Les entreprises concernées se sont adaptées aux possibilités du marché et aux montants d'aides acceptables par les Pouvoirs Publics.

Des regroupements se sont opérés en 1982, à la demande des Pouvoirs Publics, au sein des chantiers de grande construction navale : le chantier Dubigeon (Nantes) repris par Alsthom Atlantique était intégré à sa Division Construction Navale aux côtés des chantiers de l'atlantique, les sites de Dunkerque, La Ciotat et La Seyne sur Mer ont été regroupés pour constituer la société des chantiers du Nord et de la Méditerranée (NORMED).

2ème étape 1986-1995

Elle est caractérisée par la fermeture définitive et irréversible de 5 sites de grande construction navale :

ï Mise en liquidation judiciaire de NORMED et fermeture de ses 3 sites (Dunkerque, La Ciotat et la Seyne) entre 1986-1989,

ï Cessation d'activité de Dubigeon (Nantes) et transfert de ses capacités aux Chantiers de l'Atlantique (Saint-Nazaire) en 1987,

ï Mise en liquidation judiciaire du site de La Rochelle-Pallice en 1987.

ï Trois sites de petite construction navale devaient également cesser leur activité : celui de Bordeaux en 1986, celui de Grand Quevilly en 1987, ces deux sites par mise en liquidation judiciaire, celui de la Villeneuve-La-' Garenne en 1991.

ï Pour les sites subsistant, les effectifs ont été en constante diminution, il faut distinguer deux catégories :

ï Les deux sites de grande construction navale (Chantiers de l'Atlantique - Ateliers et Chantiers du Havre) : à l'exception du licenciement d'environ 120 personnes à Saint-Nazaire (avec plan d'adaptation à un nouvel emploi) les réductions d'effectifs ont eu Heu par mise en oeuvre de plans sociaux sur la base du volontariat touchant les classes d'âge les plus élevées et non compensation des départs naturels. Toutefois depuis 1993, tant au Havre qu'à Saint-Nazaire, les départs par plans sociaux (environ 300 personnes concernées jusqu'à ce jour) sont compensés par des embauches de personnel plus jeunes à raison d'une embauche pour deux départs.

ï Les quatre sites de petite construction navale (Cherbourg, Dieppe, Saint-Malo et Lorient) : ces quatre sites ont fait l'objet de dépôt de bilan suivi soit de reprise directe (cas de Cherbourg en 1987 repris par le groupe ROSARIO, puis en 1992 par le groupe SOFIA - simple changement d'actionnaire), soit d'une liquidation judiciaire suivi de reprise par le groupe Leroux & Lotz en 1988 pour Dieppe et Saint-Malo et Lorient.

Ces diverses reprises ont eu lieu après de fortes réductions d'effectifs.

Durant cette période, les entreprises concernées ont supporté seules :

. une part importante des coûts des plans sociaux,

. l'intégralité de leurs investissements d'amélioration de productivité, . la quasi totalité des coûts de formation (adaptation aux nouvelles technologies et/ou techniques de production), le développement de la polyvalence.

De plus, elles n'ont bénéficié d'aucun allégement fiscal et de charges sociales.

Globalement les effectifs sont passés de 13 700 à 5 800 personnes au cours de cette deuxième étape.

ANNEXE 5 : Estimation de l'évolution de l'emploi, de la production
et de la productivité et de leurs liens

L'OCDE donne les niveaux d'emploi et de production depuis 1976 ( ( * )31) La production est donnée en tonneaux de jauge brute compensée

Emploi

1976

1991

1994

Allemagne

71500

33900

22600

Belgique

7328

2418

1652

Danemark

13400

8600

7500

Espagne

44265

16825

14155

France

32500

6110

5910

Italie

22360

9620

8273

Pays-Bas

20850

4000

4200

Royaume-Uni

47212

7744

4675

Finlande

18006

7161

7284

Norvège

18500

5300

4000

Suède

23600

475

540

Turquie

5280

4096

3065

Japon

175000

56000

53000

Corée

40522

31017

30909

Source : OCDE

Production (en milliers de tonneaux de jauge brute compensée)

1976

1991

1994

Allemagne

2100

1100

1000

Belgique

141

21

49

Danemark

560

345

122

Espagne

841

415

204

France

769

164

109

Italie

336

410

395

Pays-Bas

507

206

108

Royaume-Uni

824

142

133

Finlande

110

221

126

Norvège

213

385

262

Suède

932

5

1

Turquie

29

?

15

Japon

7857

4200

5187

Corée

450

1937

2412

Source OCDE

On peut alors définir un niveau de productivité et déterminer son évolution de 1976 à 1994.

Production par employé

t.j.c/emploi

1976

1991

1994

Allemagne

29,4

32,4

44,2

Belgique

19,2

9,5

29,7

Danemark

41,8

40,1

42,9

Espagne

19,0

24,7

14,4

France

23,7

26,8

18,4

Italie

15,0

42,6

47,7

Pays-Bas

24,3

51,5

73,3

Royaume-Uni

17,5

18,3

28,4

Finlande

17,2

31,1

17,3

Norvège

11,5

72,6

65,5

Suède

39,5

10,5

1,9

Turquie

5,5

n s

4,9

Japon

44,9

75,0

97,9

Corée

11,1

62,4

78,0

Source OCDE, calculs CGP

On peut alors comparer les évolutions de l'emploi, de la production et de la productivité sur les périodes 1976- 1991 et 1976- 1994 On utilise les deux périodes, car pour l'année 1994, la production française est particulièrement basse, du fait de la grande variabilité de la production Par contre, la production de l'année 1991, est proche de la moyenne de la sous-période avoisinante

Évolution des grandeurs caractéristiques du secteur de la construction navale entre 1976 et 1991

Évolution de l'emploi

Évolution de la production

Évolution de la productivité

Allemagne

- 68,4

- 47,6

10,5

Belgique

- 77,5

- 83,7

- 50,6

Danemark

- 44,0

- 38,4

- 4,0

Espagne

- 68,0

- 50,7

29,8

France

- 81,8

- 78,7

13,4

Italie

- 63,0

22,0

183,6

Pays-Bas

- 79,9

- 59,4

111,8

Royaume-Uni

- 90,1

- 82,8

5,1

Finlande

- 59,5

- 28,1

80,9

Norvège

- 78,4

80,8

530,9

Suède

- 97,7

- 99,5

- 73,3

Turquie

- 42,0

n s

n s

Japon

- 69,7

- 46,5

67,0

Corée

- 23,7

330,4

462,4

Source : OCDE, calculs CGP

Évolution, de grandeurs caractéristiques de la construction navale entre 1976 et 1994

Évolution de l'emploi

Évolution de la production

Évolution de la productivité

Allemagne

- 52,6

- 52,4

50,7

Belgique

- 67,0

- 65,2

54,2

Danemark

- 35,8

- 42,5

2,7

Espagne

- 62,0

- 75,7

- 24,1

France

- 81,2

- 85,8

- 22,1

Italie

- 57,0

17,6

217,7

Pays-Bas

- 80,8

- 39,3

201,6

Royaume-Uni

- 83,6

- 83,9

63,0

Finlande

- 60,2

- 59,4

0,5

Norvège

- 71,4

23,0

468,9

Suède

- 98,0

- 99,9

- 95,3

Turquie

- 22,4

- 48,3

- 10,9

Japon

- 68,0

- 34,0

118,0

Corée

- 23,5

436,0

602,7

Source OCDE, calculs CGP

On peut alors comparer les évolutions de la productivité et de la production. Le graphique ci-dessous montre qu'elles sont fortement corrélées.

Construction navale

Évolutions de la production et de la productivité de 1976 à 1991

Source OCDE, Calcul CGP.

On peut calculer explicitement les coefficients de corrélations. On les établit sur les deux périodes, 1976- 1991 et 1976- 1994. Les logarithmes des variations donnent les rythmes de croissance des données.

Estimation de la relation entre production et productivité Variable dépendante : Logarithme de la variation de production.

Moindres carrés ordinaires

Estimation sur 12 pays

Période

Constante

Log (Productivité)

R

Test de Fisher

1976- 1991

- 0,50

(0,08)

1,14

(0,20)

0,77

12,56

1976- 1994

- 0,56

0,09)

1,12

(0,21)

0,71

24,69

R 2 est le coefficient de détermination. Il compare la production estimée par la régression aux valeurs réelles. Il varie entre 0 et 1. Un coefficient de détermination égal à 1 indique une corrélation parfaite de l'échantillon. À l'inverse, un coefficient de détermination nul indique que l'équation de régression ne peut servir à prédire la production. Les chiffres entre parenthèses donnent les écarts-type Source OCDE Calculs CGP

Pour les deux périodes, le R 2 est relativement élevé. Il y a donc bien une corrélation significative entre la productivité et l'évolution de la production. La meilleure équation est donnée sur la période 1976- 1991. On a :

Logarithme de Variation de la production sur la période 1976- 1991 = -0,50 + 1,14 x Logarithme de Variation de la productivité sur la période 1976- 1991

On peut alors passer en variation annuelle, et on a :

Croissance annuelle de la production = - 3,3 % + 1,14 x Croissance annuelle de la productivité

ANNEXE 6 : Initiative du Ministère des Travaux publics du Canada concernant la construction navale

Pour finir, on rappelle une action très intéressante du Ministère des Travaux publics du Canada. Il a proposé, en 1997, des changements à la politique des approvisionnements pour la construction navale.

Un comité composé de représentants du gouvernement fédéral et de l'Association de la Construction Navale du Canada (ACNC) a passé en revue la politique d'achat en ce qui concerne l'évaluation des soumissions. Une proposition recommande d'éliminer les seuils régionaux et d'ajouter des coûts éventuels dans l'évaluation des soumissions pour les projets de radoub, de réparation et de modernisation de navires.

La proposition en question aurait pour effet d'éliminer tous les seuils régionaux établis pour les travaux de plus de 25 000 $ de radoub, de réparation et de modernisation de navires. Les changements proposés permettraient d'harmoniser la politique des approvisionnements pour la construction navale avec l'objectif d'éliminer les obstacles au commerce entre les provinces. La proposition prévoit également d'inclure des coûts éventuels, comme le coût du transport du navire de son port d'attache à l'installation de l'entrepreneur, dans le prix de l'évaluation au moment du lancement d'un appel d'offres pour l'exécution de tels travaux.

Selon la proposition, les besoins en travaux de radoub, de réparation et de modernisation de navires du gouvernement continueraient de faire l'objet d'un appel d'offres dans l'Est du Canada ou dans l'Ouest du Canada, selon où se trouve le port d'attache du navire. L'Ouest du Canada comprendrait tous les chantiers navals qui se trouvent à l'ouest de l'Ontario et dans le Yukon et les Territoires du Nord- Ouest. L'Est du Canada comprendrait les chantiers qui se trouvent en Ontario et à l'est de l'Ontario

Bibliographie

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Assemblée Nationale -commission des Finance, de l'Économie Générale et du Plan, (1996), Loi de Programmation Militaire pour les années 1997 à 2002, Arthur Paecht -Député, mai

Commissariat Général du Plan, (1993). L'avenir des industries liées à la défense, Groupe de stratégie industrielle -Marcel Bénichou. La Documentation Française, Novembre

Ministère de la Défense -Groupe de travail relatif à l'Avenir de la DCN, (1996), Diagnostic, Sous la Direction de M. Henri Conze, Février

Sénat -commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces Armées, (1996), Programmation militaire pour les années 1997 à 2002, Xavier de Villepin -Sénateur, juin.

Glossaire

français

Anglais

Définition

A

Aliamax

Aframax

Navire citerne (pétrolier) d'une taille se situant aux alentours de 70 000 tPL

C

Capesize

Capesize

Navire vraquier ( marchandises sèches ) d'une taille comprise entre 120 000 et 160 000 tPL.

Catégories de navires

Ship types

Les principales grandes catégories de navires sont navires citernes, vraquiers secs, cargos de ligne, navires à passager.

Chimiquier

Chemical tanker

Navire construit et aménagé pour le transport de marchandises dangereuses ( IMDG Cpde - OMI ), dans des citernes spécialisées.

CNUCED

UNCTAD

( United Nation

Conférence on Trade and Development

Conference de Nations Unies sur le Commerce et de Développement

Container ship

(Full)

Porte

conteneurs

(Intégral)

Navire entièrement aménagé avec des guides fixes ou mobiles pour le transport de conteneurs en cale ou en pontée.

D

Démolition navale

Ship breaking

Un fois juges inaptes à la navigation ou rejetés par le marché (obsolètes) les navires sont vendus au poids et au prix de la ferraille à des chantiers de démolition ( Chune, Inde, Pakistan)

E

EVP

(Équivalent Vingt Pieds)

TEU ( Twenty Equivalent Unt )

Unité de mesure ramenant une flotte ou un trafic de conteneurs diversifiée à la longueur d'un conteneur de 20 pieds (voir EQP )

F

EQP

(Équivalent Quarante Pieds)

FEU ( Fourty Equivalent Unit )

Unité de mesure ramenant une flotte ou un trafic de conteneurs diversifiée à la longueur d'un conteneur de 40 pieds ( voir EVP )

Flotte de commerce

Merchant fleet

Inclus des navires de mer, motorisés, dédiés au transport de marchandises et/ou des passagers à l'exclusion des navires militaires, autres activités civiles ou ne relevant pas du transport.

FMI

IMF - International

Monetary Fund

Fond Monétaire International

Fret

Freight

Prix du transport de marchandises ( ou de la location de navire pour l'affrètement à temps ou coque nue) à ne pas confondre avec la marchandise elle même.

G

Gazier

Liquid gas tanker

Navire construit et aménagé pour le transport de Gazette de Lausanne liquéfié dans des citernes intégrées ou indépendantes, sous pression ou régrigérées.

GNL

LNG

Gaz Naturel Liquéfié

GPL

LPG

Gaz de Pétrole Liquéfié

H

Handysize

Handysize

Navire vraquier de 10000 à 45000 tPL, le plus souvent réparti en deux catégories : Handysize (10000-25000 tPl.) et Handymax (25000-45000 tPL)

I

Immatriculation Registration (Pays d') (country of)

Indique le pays ou le port sur les registres duquel le navire est enregistré (pavillon).

J

Jb (ex. Tjb)

gt (gross tonnage)

Jauge brute : unité de mesure issue de 1a Convention Internationale de 1969 sur 1a mesure des espaces intérieurs des navires, dont la définition est variable selon le type de navire.

Jbc (ex. Tjbc)

cgt

(compensated gross tonnage)

Jauge brute compensée : multiplication de la jauge (Jb) d'un navire par un coefficient déterminé en fonction du type et de la taille d'un navire, souvent utilisé comme un indicateur du volume nécessaire de travail d'un chantier pour construire un navire.

Jn (ex. Tjn)

nt (net tonnage)

Jauge nette : unité de mesure issue de la Convention Internationale de 1969 sur 1a mesure des espaces intérieurs commerciaux (réservés au transport) des navires, dont la définition est variable selon le type de navire, (voir Jb)

M

Mille marin

International knots

1 mille = 1,8520 kilomètre

Minéralier

Ore carrier (Bulk carrier)

Vraquier sec, navire simple pont renforcé pour le transport de minerais.

ml (mètre linéaire)

lm (lane meters)

mètres linéaire unité de mesure de la capacité des garages d'un navire roulier (Ro-Ro)

N

Navire à passagers

Passenger ship

Navire aménagé pour transporter au moins 12 passagers payants avec ou sans cabines ;

O

OCDE

OECD x

Organisation internationale pour la Coopération et le Développement

OMI

IMP

Organisation Maritime Internationale.

P

Panamax

Panamax

Navire dont les dimensions lui permettent au maximum de franchir le Canal de Panama, soit : environ 4400 EVP pour un porte-conteneurs, 70000 tPL pour un vraquier

Pavillon

Flag

Drapeau du pays d'immatriculation du navire.

Pétrolier Pétrolier

Oil tanker

Navire simple pont construit et aménagé pour le transport de marchandises liquides en citernes intégrées à la coque, comprenant le pétrole et les produits pétroliers à l'exclusion des matières dangereuses (Code OMI).

Pied

Foot

1 pied = 0,3048m. Un conteneur de 20 pieds de long (EVP) mesure 6,096 m.

Propriétaire

( Pays du )

Domicile (Country of)

Indique le pays où la majeure partie des intérêts qui contrôlent le navire sont situés, en termes de société mère.

R

Reefer

Navire réfrigère

Cargo sec spécialement conçu avec 80 % ou plus de capacité de transport sous température dirigée/

Registre

Register

Port ou pays d'immatriculation du navire.

Registres ouverts

Open registries

Pays autorisant l'immatriculation de navires propriété de non résidents.

Registres ouverts

(principaux)

Open registries (major)

Liberia, Panama, Chypre, Bahamas, Bermudes, Malte Saint-Vincent, Marshall Islands, Vanuatu, Antigua & Barbuda.

Roulier -Transbordeur

RoRo cargo -

RoRo

passenger

Navire aménagé pour le transport de véhicules roulants (roll on - roll off " manutention horizontale) avec ou sans aménagements particuliers pour les passagers.

S

Specialised carrier

( Special ship).

Navire Spécialisé

Cargo sec spécialement conçu pour le transport de marchandises particulières.

T

tdl (tonnes de déplacement lège)

Idt (Light

Displacement Tons)

Poids à vide du navire : unité de mesure servant à l'évaluation du prix d'un navire vendu pour la démolition.

tPL (tonnes de port en lourd)

dwt

(deadweight

tons)

Unité de mesure exprimée en tonnes du chargement maximum d'un navire (i.e. poids de la marchandise, passagers, soutes, approvisionnements et équipage) chargé à la limite de sa ligne de franc bord été.

V

VLCC/ULCC

VLCC/ULCC

Very/Ultra Large Crude Carrier : Navire destiné au transport de pétrole brut de 200 000 à 300 000 tPL ( Very ) et de + de 300 000. tPL ( Ultra )

Volume

Volume/Valeur

Capacity - in

Volume terms

Le terme «volume» peut être compris de deux manières distinctes. D'une part, en tant qu'unité de mesure physique (m3, Jb,.. ) et d'autre part en tant que valeur de laquelle on retranche un pourcentage de variation des prix sur une période déterminée.

Vraquier mixte

Ore/Bulk/Oil

carrier ( OBO )

Vraquier mixte aménagé pour le transport alterné de marchandises sèches ou liquides en vrac dans les mêmes cales mais non simultanément.

Vraquier sec

Dry bulk

Vraquier sec. Navire simple pont, machines disposées à l'arrière, cales à panneaux supérieurs, capable de transporter une grande variété de marchandises sèches sans arrimage.

* (1) La jauge brute compensée (t.b.c.) est obtenue en multipliant la jauge brute par un coefficient de compensation. Ces coefficients sont tels que des navires de jauge brute différente (de type et de dimension) ayant la même jauge brute compensée, nécessitent approximativement le même nombre d'heures de travail pour les construire. Ils sont établis par l'Association des Constructeurs de Navires d'Europe Occidentale (AWES) et l'Association des Constructeurs de Navires du Japon (SAJ). L'AWES a pour membre les représentants de la construction et de la réparation navale de douze pays de l'Europe de l'Ouest, auxquels s'est jointe récemment la Pologne. Cet organisme participe notamment aux discussions sur le niveau des aides légalement autorisé à l'OCDE. Il est également observateur et conseiller à l'Organisation Maritime Internationale.

* (2) Les tonnes de port en lourd (t.p.l) sont égales au poids de la cargaison, du combustible et des provisions de bord (y compris l'eau et les personnes) que le navire, supposé à son tirant d'eau maximum, est en mesure de transporter

* (3) Réciproquement, un cours de change surévalué conduit à favoriser la construction navale d'un pays

* (4) Le choix d'une année de base limite la portée de l'analyse. Elle peut correspondre, pour un pays, à une année où le cours de change, le taux d'inflation, ou la structure des échanges d'un pays étaient particuliers :

* (5) Le chapitre portant sur l'évaluation des aides revient plus en détail sur la structure de la dépense publique selon les pays. Le Japon a la particularité d'aider majoritairement ses chantiers par des aides à la recherche et au développement. À l'opposé, les pays européens aident leurs chantiers presque uniquement par les aides directes aux constructeurs ou par l'octroi de prêts bonifiés.

* (6) Soit (49 + 197 + 190) 791 pour l'Italie et (6 + 48) / 210 pour la France.

* (7) Revue Warship Forecast (février 1997).

* (8) Deux NGV, les Corsaires 1 100 « Asco » et « Aliso » sont en service, et la Société Nationale Corse-Méditerranée a lancé un appel d'offres pour la construction d'un NGV monocoque de 135 mètres de long pouvant transporter 1 000 passagers et pouvant naviguer par 6 mètres de creux.

* (9) Voir le rapport Outre-mer, pour une évaluation plus complète tic la Loi Pons.

* (10) La Chambre Syndicale de Constructeurs de Navires réunit les six principaux chantiers navals privés français. Cet organisme exerce au niveau français et européen une action de sensibilisation des médias et du monde politique à partir d'une documentation relativement riche.

* (11) L'OCDE ne produit pas de statistiques donnant la valeur ajoutée de ces secteurs.

* (12) Le Shipbuilders Council of America est un organisme proche des constructeurs américains. Il participe à l'élaboration des lois dans ce domaine. Il défend notamment le système de prêts bonifiés américains « Titre XI ». Par ailleurs, au nom des constructeurs il a porté plainte auprès de l'Administration contre les pays aidant leur construction navale (sous le couvert de la section 301 de la loi du commerce 1974) pour pratiques déloyales.

* (13) Il convient de souligner que les chiffres figurant dans ce tableau (aide rapportée à la valeur contractuelle des navires) ne correspondent pas aux intensités d aide exprimées en part de l'aide dans la valeur ajoutée du secteur.

* (14) Les emprunts de première hypothèque sont généralement insuffisants pour assurer à l'armateur les moyens de financement nécessaires à l'achat d'un navire (d'environ 20 %). Au Danemark, en Allemagne les institutions étatiques pourvoient dès lors des fonds permettant de combler ce besoin de financement. Le Danemark assure cette aide complémentaire grâce au Danske Skipskredit Fund d'État (80 % des 20 % complémentaires) et aux banques commerciales. En Allemagne il vient des Länder (100 % des 20 % complémentaires).

* (15) L'échéancier est un facteur important dans l'avantage comparatif des conditions d'emprunt entre un système public et un système bancaire commercial. Un État peut plus facilement supporter l'échelonnement d'une dette sur une durée de 12 années, ce qui permet de procéder à une péréquation entre la durée d'exploitation moyenne et son financement.

* (16) Cf. annexe I.

* (17) À la fin de chaque période retenue pour I établissement de l'impôt sur les sociétés, il est procédé à une estimation forfaitaire des bénéfices nets réalisés par chaque chantier naval sur l'ensemble des opérations bénéficiant des allocations forfaitaires. Lorsque ces bénéfices dépassent 3 % du montant du chiffre d'affaires provenant desdites opérations, ils font l'objet d'un prélèvement calculé d'après le barème ci-après :

- 50 % de la fraction du bénéfice comprise entre 3 % et 6 % du montant du chiffre d'affaires ;

- 75 % de la fraction du bénéfice excédant 6 % du montant de ce même chiffre d'affaires .

* (18) Une nouvelle directive est en préparation.

* (19) Les navires concernés sont les bâtiments de mer à coque métallique suivants :

-navires de commerce pour le transport de passagers ou de marchandises, d'au moins 100 tonnes brutes,

- bateaux de pêche d'au moins 100 tonnes brutes,

- dragues ou autres navires pour travaux en mer, d'au moins 100 tonnes brutes, à l'exclusion des plates-formes de forage,

remorqueurs d'une puissance d'au moins 365 kilowatts.

* (20) Le niveau est de 9 % depuis 1992, il était de 28 % en 1987, 26 % sur la période 88-89, 20 % en 1990 et 13% en 1991.

* (21) La commission doit veiller, en révisant le plafond, à ce qu'il ne se produise pas de concentrations d'activité dans la construction navale sur certains segments de marché, dont l'ampleur serait contraire aux intérêts de l'Union européenne.

* (22) Les aides aux investissements spécifiques ou non, ne peuvent être octroyées pour la création de nouveaux chantiers, à moins qu'elles ne soient liées à un plan de restructuration qui n'entraîne aucun accroissement de la capacité de construction navale de ce chantier ou, en cas d'accroissement, qu'elles soient liées directement à une réduction irréversible correspondante de la capacité d'autres chantiers du même État-membre au cours de la même période. De telles aides ne peuvent être octroyées aux chantiers de réparation navale, à moins qu'elles ne soient liées à un plan de restructuration qui aboutit à une réduction de la capacité globale de réparation navale de l'État-membre concerné. Dans ce contexte, la commission peut prendre en considération des réductions de capacité effectuées pendant les années qui précèdent immédiatement.

* (23) Cet accord prévoit, en autres choses, la limitation des aides publiques directes à un plafond de 9 %. La description de l'accord est détaillée dans le chapitre 4 - titre 3.

* (24) Toutefois, la COFACE peut, à titre exceptionnel, sous réserve de l'accord de la commission des garanties et du crédit au commerce extérieur, de régler l'indemnité dès la réception du sinistre.

* (25) Pour les années 1993 et 1994 cela correspond au secteur 351B (Nomenclature NES).

Pour les années 1991 et 1992, les secteurs considérés sont les constructions de navires de marine marchande et la fabrique et pose d'équipements de bord Cela correspond aux secteurs 3202 et 320-4. Le secteur construction navale (E11 en nomenclature NES) contient, en plus du secteur construction de navires civils, la réparation navale (351C). La construction de bateaux de plaisance (351E) et la construction de bâtiments ce guerre (35IA).

* (26) Le secteur construction navale (E11 en nomenclature NES), contient, en plus du secteur construction de navires civils (351B), la réparation navale (351C), la construction de bateaux de plaisance (351E) et la construction de bâtiments de guerre (351A).

* (27) En pratique, celle mesure implique le calcul dans chaque pays d'une fourchette de taux sur la base de taux de références (PIBOR et taux interbancaires) et permet de déterminer si les taux consentis ne s'assimilent pas à des subventions indirectes par effet « monétaire ».

* (28) Des éléments sont donnés dans le rapport Thiesen. Ce rapport avait d'ailleurs comme objet de proposer au gouvernement britannique des modifications de son système de bonification des prêts, afin de mettre les chantiers navals de ce pays au niveau de ses concurrents.

* (29) D'ailleurs, l'amendement Bateman, qui a fait échouer la ratification, a été largement accepté par le Congrès : 278 voix contre 149. Il consistait à demander le prolongement des crédits export (connu sous l'appellation de Titre XI) dans une version très avantageuse aux constructeurs américains. Dans une moindre mesure, des dispositions concernant le Jones Act et la flotte paramilitaire américaine étaient incompatibles avec le principe de ratification.

* (30) Les éléments de prospective qui suivent n'abordent pas deux conditions essentielles de la compétitivité

- La baisse des charges sociales patronales, qui diminue le coût total du travail et permet donc de maintenir l'emploi directement, ou via l'amélioration de la compétitivité-prix de l'entreprise ;

- une politique de change pragmatique, c'est-à-dire évitant la surévaluation trop systématique de notre devise vis-à-vis du dollar.

* (31) Voir « Structural Adjustement in the shipbulding industry : an averview ». document interne de l'OCDE

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